Les intempéries rendent le ravitaillement de Paris impossible pendant trois mois. En France, presque tous les noyers, oliviers, pommiers et vignes périssent ainsi que les vieux châtaigniers[2] qui servaient à faire les poutres et les grains dans le sol. Le prix du setier de blé atteint 64 livres tournois à Paris, inégalé depuis la fin du XVIe siècle. On sème partout des céréales de printemps en avril. Les cours du vin augmentent et les vins du Bas Languedoc et de Provence, exemptés de droits, s’exportent pour la première fois à Paris. Comme le note, en 1709, Louis Morin, de l’Académie royale des sciences, il fait encore +11 degrés le jour de Noël et le 5 janvier, veille du coup de froid qui saisit la France et qu’on appellera le « grand hiver ». Pour janvier la moyenne s’établit à -3,4 degrés (-12,3 degrés à Berlin). Ce terrible hiver s’inscrit dans la période que les climatologues nomment le petit âge glaciaire qui s’étend de 1303 à 1860. Un flux d’air froid recouvre toute l’Europe occidentale faisant de janvier 1709 le mois le plus froid des cinq cents dernières années. La vague de froid débute le jour des rois, le dimanche 6 janvier. Les températures, constamment inférieures à -10 degrés jusqu’au 24 janvier descendent jusqu’à -20,5 degrés à Paris le 20[3]. Six autres vagues de froid s’enchaînent jusqu’à la mi-mars : le sol gèle en profondeur et détruit massivement la végétation. Ainsi, le prix du setier de froment est multiplié par six entre juin 1708 et juin 1709. Au niveau de la population, entre 1709 et 1710, on dénombre 600 000 morts supplémentaires à travers toute la France et environ 200 000 naissances de moins que de coutume.
20 janvier : après être légèrement remontée le 15 janvier, la température à Paris tombe à -20.4°, puis de -20.6°[5]. Selon la Palatine, 24 000 personnes seraient mortes de froid à Paris durant le mois de janvier[7].
15 mars : début de la fonte des neiges, qui provoque une importante inondation de la Seine, qui rend encore impossible le ravitaillement de Paris[8]. L'historien Marcel Lachiver estime à 100 000 la surmortalité de janvier à et à 630 000 le nombre total des victimes en 1709-1710[9]. Les prix du blé sont multipliés par six dans le nord de janvier à mai, par deux dans le sud. De nombreuses « émeutes de la faim » éclatent en mars et avril[10]. Point culminant de l’impopularité de Louis XIV.
5 avril : bloqué par les rigueurs de l’hiver, Paris est approvisionné pour la première fois depuis trois mois[11].
29 avril : le corsaire Français Jacques Cassard combat 24 heures durant devant Tabarka avec deux bateaux face à cinq navires britanniques afin de permettre le passage d'un convoi de 25 bateaux de blé en provenance de Tunisie à destination de Marseille, sauvant ainsi la Provence de la famine[12].
Avril : crise financière. Les billets du financier Samuel Bernard et de son associé Nicolas sont refusés à Lyon et à Marseille. La faillite provisoire de Samuel Bernard, due à la conjoncture et à l’effort de guerre, entraîne la banqueroute de la place financière de Lyon[13].
17 mai : émeute à Caen contre un commissaire de police nommé Hébert, que la rumeur accuse d’accaparer les blés, de connivence avec l’intendant Foucault de Magny. Magny, malmené par la foule, réprime vigoureusement la sédition, mais est révoqué moins de trois mois après[17].
28 mai : propositions de paix signées par le grand pensionnaire Heinsius, Marlborough et le prince Eugène. Restitution ou démilitarisation de Lille, Strasbourg, Dunkerque et Naples. Louis XIV devra éventuellement contribuer à chasser son petit-fils du trône d’Espagne (article 4) ; en contrepartie, un armistice lui sera accordé (article 37). Le 7 juin, Louis XIV refuse l’ultimatum et le lendemain envoie des circulaires à tous les gouverneurs de province pour leur exposer les raisons de sa conduite[14].
12 juin : appel de Louis XIV au peuple qui est lu dans toutes les églises du royaume[7]. L’appel est entendu et l’effort de guerre est maintenu malgré l’urgence de la disette.
3 juillet : émeute contre l’intendant de Rouen Lamoignon de Courson, préparée par les ouvriers drapiers de Darnétal et Rouen contre les licenciements. La milice bourgeoise est réquisitionnée, et le 11 juillet arrivent trois compagnies de dragons. Le conflit se règle sans heurt et les ouvriers obtiennent gain de cause. L’intendant De Courson est relevé de ses fonctions[20].
victoire du comte du Bourg à Rumersheim sur les Impériaux de Mercy, qui bat en retraite[25]. La prise de la cassette de Mercy prouve qu’il y a eu une conspiration en Franche-Comté[26]. Le colonel Braconnier, un aventurier, est chargé par les Impériaux de provoquer une émeute début septembre en Franche-Comté et de s’emparer d’Auxonne, sur la Saône, avec cent cinquante hommes pour permettre au général Mercy d’avancer avec ses troupes. Braconnier divulgue ses plans à l’ambassade de France pour de l’argent, et l’invasion échoue[27].
29 octobre : excommunié depuis 1707, le monastère de Port-Royal des Champs, foyer du mouvement janséniste, est fermé et les religieuses sont dispersées[30]. L’abbaye sera rasée et les cadavres de son cimetière exhumés en 1711.
24 novembre : le conseil du roi de France accepte les préliminaires de La Haye à l’exception des articles 4 et 37, ce dernier ne garantissant à la France qu’un armistice et non pas la paix[14].
↑Louis Nicolas Bescherelle, Histoire des marins illustres de la France, de l'Angleterre et de la Hollande, Limoges, Ardant, (présentation en ligne)
↑Philippe Sagnac, « Le crédit de l'État et les banquiers à la fin du XVIIe et au commencement du XVIIIe siècle », Revue d'histoire moderne et contemporaine, vol. 10, no 4, , p. 268 (présentation en ligne)
↑ ab et cMaximilian Samson Friedrich Schöll, Cours d'histoire des États européens depuis le bouleversement de l'Empire romain d'Occident jusqu'en 1789, vol. 29, Gide, fils, (présentation en ligne)
↑Jean Le Clerc, Histoire des Provinces-Unies des Pays-Bas, vol. 3, Amsterdam, Chez Z. Châtelain, (présentation en ligne)
↑Joseph Fr. Michaud, Jean-Joseph-François Poujoulat, Nouvelle collection des mémoires pour servir à l'histoire de France depuis le XIIIe siècle jusqu'à la fin du XVIIIe, Guyot, (présentation en ligne)
↑Gaétan de Raxis de Flassan, Histoire générale et raisonnée de la diplomatie française depuis la fondation de la monarchie jusqu'à la fin du règne de Louis XVI, Lenormant, (présentation en ligne)
↑Pierre Rebetez-Paroz, Les relations de l'évêché de Bâle avec la France au XVIIIe siècle, Imprimerie Saint-Augustin, (présentation en ligne)
↑Frédéric Schoell et Franz Xaver Zach, Cours d'histoire des États européens, vol. 30, de l'imprimerie royale et chez Duncker et Humblot, (présentation en ligne)
↑Théodore Juste, Histoire de Belgique, vol. 2, Bruylandt-Christophe & cie, (présentation en ligne)
↑La France sous Louis XV (1715 - 1774) : Introduction : Règne de Louis XIV. : La régence, vol. 1, Didier et Cie, (présentation en ligne)