La deuxième bataille de Challans a lieu le lors de la guerre de Vendée. Elle s'achève par la victoire des républicains qui repoussent une attaque des Vendéens.
Prélude
Après sa victoire inespérée à la bataille des Clouzeaux, le 20 mars, Charette commence à reconstituer ses forces[3]. Selon Lucas de La Championnière, il envoie alors des cavaliers « dans toutes les paroisses avec ordre de menacer de mort quiconque ne rejoindrait pas et de tuer de suite celui qui paraitrait le plus mutin pour servir d'exemple aux autres »[3],[4]. Le général en chef de l'Armée de l'Ouest, Louis Marie Turreau, ne semble pas s'inquièter de la survie du chef vendéen[3]. Le 5 avril, il écrit au ministre de la guerre Jean-Baptiste Bouchotte : « Charette a éprouvé tant d'échec que je ne luy connais plus d'armée, je ne sais où est son parti, mais au moment où il reparaitra si toutefois il reparait, je ne perdray pas de temps pour lui donner la chasse. Il n'existe maintenant dans la Vendée que deux corps de rebelles qui méritent quelqu'attention, celuy commandé par Stofflet et l'autre par Marigny »[3].
De son côté, le général républicain Jacques Dutruy mène, pendant le mois de mars, plusieurs expéditions dans le marais, depuis la ville de Challans[5]. Turreau envisage cependant d'évacuer Challans et de faire incendier la ville[3],[5]. Il adresse un courrier en ce sens à l'adjudant-général Boussard le 24 mars, cependant ce dernier s'oppose à cette idée dans la réponse qu'il lui adresse trois jours plus tard[3],[5],[Note 1].
Forces en présence
Dans son rapport[Note 2], adressé au Comité de salut public le jour même de la bataille, Melrand, agent national du district, porte la garnison de Challans à 500 hommes mais précise que seulement 300 ont combattu, les autres ayant été disséminés dans les marais[1],[5]. Charruau, receveur des domaines de Machecoul, évoque, dans une lettre datée du 8 mai, une garnison de 900 républicains, renforcée par 300 hommes à la fin du combat[2]. Cette garnison est sous les ordres du général de brigade Dutruy et de l'adjudant-général Boussard[3].
Le nombre des Vendéens est évalué à 4 000 par Melrand[1] et à 3 000 par Charruau[2]. L'auteur royaliste René Bittard des Portes estime quant à lui l'armée de Charette à 1 500 hommes lors de l'attaque[2].
Les Vendéens ont d'abord l'avantage mais prennent la fuite inexplicablement[8]. Selon Lucas de La Championnière, les patriotes semblent d'abord décidés à faire retraite sur les Sables-d'Olonne[3],[7]. Les habitants font leurs paquets et l'artillerie est attelée[7]. Cependant un caisson escorté par quelques gendarmes fait son apparition, au nord, sur la route de Nantes, dans le dos de l'armée vendéenne[3],[7]. Ce petit renfort suffit à provoquer la panique des paysans, qui se croient pris entre deux feux[3],[7].
Dutruy poursuit les fuyards sur une lieue avec sa faible cavalerie[1],[3],[7]. Il regagne Challans dans la soirée[1].
D'après Dutruy et Charruau, la bataille a duré environ huit heures[3],[2]. Charruau précise que « si les brigands avoient pris Challans, ils se seroient emparés d'un convoy de 80 000 cartouches »[2].
Dans son rapport à Turreau, le général Dutruy annonce que les pertes républicaines sont de 29 morts et d'une trentaine de blessés, tandis qu'il estime les pertes vendéennes à 200 morts[1]. Ce bilan est transmis par Turreau au ministre de la guerre[Note 5]. Charruau donne un état des pertes similaire dans sa lettre du 8 mai : 60 morts ou blessés pour les républicains et 200 Vendéens tués[2].
« Feu le général Haxo m'avait donné l'ordre d'excepter provisoirement de l'incendie Challans, la Garnache, Sallertaine et Soullans, comme postes militaires. Depuis deux mois que je suis à Challans, j'ai tiré autour de moi tout le grain possible pour faire du pain, que l'on manutentionne et dont je nourris plusieurs colonnes. Le district, patriote, nous a bien secondés, car il fallait beaucoup de charrettes, qu'il nous a procurées... N'ayant pas encore épuisé les ressources de Challans, y ayant établi des fours, des boulangeries, un train de charrois assez considérable pour avoir au moins 40 charrettes occupées par jour, depuis près d'un mois, et pouvant même en rassembler plus de 200 dans les cas urgents, ayant du foin en abondance autour de nous, toutes ces circonstances me font te demander que tu veuilles bien me désigner nominativement si tu entends, par ton ordre, que Challans sera brûlé[5],[6]... »
« Vous saurez que Charette est venu à la tête de quatre mille brigands au moins, attaquer Challans. Nous n'avons dû notre salut qu'à la bravoure de cinq cents hommes qui forment notre garnison, dont trois cents à peine ont combattu. Toutes les forces avaient été disséminées autour du Marais, pour le cerner. Challans dégarni était facile à prendre, Charette en a été instruit, il l'a attaqué, tout ceci est naturel ; mais que nos généraux aient dégarni ce poste important de Challans où se trouvaient des munitions de guerre en assez grande quantité, cela ne s'explique pas si naturellement.
Lorsqu'il y a environ deux mois on entreprit la conquête de l'île de Noirmoutier, les généraux commirent la même faute en dégarnissant Machecoul. Charette en profita pour s'en emparer, il y trouva des munitions de guerre et de bouche.
Enfin, si nous n'avons pas été égorgés à notre poste, avec nos femmes et nos enfans, ainsi que tous les bons citoyens que Challans possède encore, nous n'en sommes pas redevables à la prudence de nos généraux.
Homme libre, j'ai cru pouvoir faire ces réflexions. Je ne crains pas la mort, mais je ne voudrais pas la recevoir de la main des brigands, qui s'étudieraient à me la rendre cruelle, ainsi qu'il est arrivé à ceux de mes collègues qui sont tombés en leur pouvoir[1],[5]. »
« M. Charette marcha sur Challans ; la garnison était peu nombreuse ; les habitants saisis de crainte faisaient leur paquets pour se sauver aux Sables ; l'artillerie était attelée pour prendre la même route : dans ce moment une faible escorte arriva de Nantes conduisant un caisson. Nos soldats croyant être pris entre deux feux ne virent plus que la victoire était certaine ; on prit la fuite et la cavalerie de Challans nous poursuivit avec intrépidité l'espace d'une lieue[7]. »
« Mes frères d'armes viennent de battre les brigands d'un côté où certainement je ne les attendais pas. Quoique victorieux, ma position est un peu critique. Je ne puis continuer mon expédition, si mes derrières sont exposés de la sorte.
Charette, Savin et Baudry étaient à la tête de cette horde; je les ai poursuivis autant que faire se peut, n'ayant, au total, que dix-huit cavaliers. Notre perte est de vingt-neuf hommes et une trentaine de blessés; celle des brigands est d'à peu près deux cents. Quant à leurs blessés, je n'en sais rien. Je ne suis rentré de la poursuite qu'à la nuit.
Je suis persuadé que tu me feras passer une colonne suffisante pour tenir sur Touvois l'ennemi en respect, pendant mon opération.
N'ayant personne, j'ai gardé Dufour près de moi, jusqu'à ce que tu m'aies envoyé les forces que je te demande et qui, commandées par lui qui connaît cette partie, m'aideront à bien faire. J'attends impatiemment ta réponse[1]. »
« Depuis la dernière lettre que je t'ai écrite, je n'ai cessé de poursuivre les brigands et de leur enlever autant de moyens de subsistances que les mauvais chemins et la pénurie de voitures le permettent.
» Lorsque j'ai poursuivi Charette dans le Bocage, il n'a voulu ni m'attaquer ni m'attendre. Pressé aux Landes de Bouay, il a partagé son armée en deux colonnes qui ont fui rapidement, chacune de leur côté. L'une d'elles s'est renfermée entre Maine et Sèvre et s'y est fait battre, comme je te l'ai marqué (i). J'ai continué à le poursuivre et j'ai anéanti ce rassemblement, en faisant fouiller de suite les forêts de Monbert et de Touffou, où l'on en a tué plus de cinq cents en deux jours. Nous n'avons eu qu'un homme tué et deux blessés.
» Cependant Charette restait caché, ayant sacrifié la moitié de son armée pour conserver l'autre. Une colonne se mettait en marche pour le chercher dans le Bocage, lorsque tout à coup il attaque Challans. Dutruy avait dégarni ce poste et celui de Machecoul pour une expédition dans le Marais où de nouveaux rassemblemens s'organisaient. L'armée de Charette a combattu pendant sept heures avec un acharnement qui ne lui est pas ordinaire ; enfin elle a été rompue et mise dans une déroute complète. Charette a eu deux cents morts, on ne sait pas le nombre de ses blessés. Nous avons eu vingt-neuf hommes tués et trente et quelques blessés. Charette, en se retirant, a dû trouver une colonne républicaine derrière lui. Je n'ai point encore de nouvelles de cette rencontre[9]. »