La bataille de Beaulieu-sous-la-Roche se déroule le lors de la guerre de Vendée. Elle s'achève par la victoire des Vendéens qui tendent une embuscade contre une convoi républicain.
Selon les rapports républicains, le convoi est défendu par une escorte de 300 à 400 soldats[1].
Déroulement
Le 27 juin 1795, près de Beaulieu-sous-la-Roche, les Vendéens tendent une embuscade à un convoi républicain parti des Sables-d'Olonne et en route pour Palluau[4],[1]. Les républicains se retrouvent encerclés : les éclaireurs et la tête de la colonne sont attaqués par les hommes de Guérin, tandis que la queue de la colonne est assaillie par les troupes de Louis Marin Charette[4].
Après leur succès, les Vendéens pillent les ambulances, mais ils sont surpris par l'arrivée du représentant Gaudin, parti de Palluau, avec une petite escorte[4],[6]. Ils pensent à tort que la garnison de Palluau fait une sortie pour venir en aide au convoi, et battent en retraite[4],[6]. Certains prisonniers républicains sont tués alors qu'ils tentent de profiter du désordre pour s'enfuir[6]. L'escorte du représentant arrive alors sur les lieux du combat, puis poursuit sa route vers les Sables-d'Olonne sans être inquiétée[4],[6].
Dans ses mémoires[A 2], l'officier vendéen Lucas de La Championnière écrit que près de 300 républicains sont faits prisonniers lors du combat et que tous les autres défenseurs du convoi sont tués[3],[6]. François Eriau, un combattant vendéen de 18 ans originaire de Touvois, capturé en juillet 1795, ramène pour sa part, lors de son interrogatoire par le district de Challans, le nombre des prisonniers à un peu plus de 100[3].
« Les Vendéens viennent de faire une nouvelle attaque, dans laquelle ils ont enlevé, entre Beaulieu et la Mothe-Achard, un convoi escorté par trois à quatre cents hommes. Le représentant Gaudin a fait replier les troupes de Palluau sur la Mothe-Achard Cette position n'en couvrira que mieux Saint-Gilles et les Sables.
J'attends les secours qui m'ont été promis ; ils seraient bien nécessaires, pour donner au général Hoche les moyens de repousser l'ennemi devant lequel il se trouve en présence. Le général Lemoine vient de partir d'ici, lui menant toutes les forces qu'il a pu rassembler. Je n'aurai plus d'autre moyen que de me tenir sur la défensive. J'ai pris les mesures nécessaires pour couvrir la côte[1]. »
« Peu de temps après cette affaire, le représentant Gaudin l'échappa belle ; nous guettions sur la route des Sables un convoi qui retournait à Palluau. La division du Poiré, commandée par M. Charette, frère du Général, avait pris l'escorte en queue, nous attendions son passage à Beaulieu ; ennuyé de ne pas voir l'ennemi pressé davantage, Guérin, commandant du Pays de Retz, ordonna à sa cavalerie de foncer dessus bride abattue.
L'ordre fut parfaitement exécuté par le brave Colin ; les Républicains dispersés de droite et de gauche furent tous pris ou tués ; mais tandis que nos soldats pillaient les ambulances, le représentant parut sur le grand chemin avec une escorte. Comme nous étions près de Palluau on crut que la garnison entière de ce poste était sortie pour nous combattre ; nos compagnies étant toutes confondues, il ne fut pas possible d'y mettre de l'ordre et nous laissâmes passer la représentation nationale, ce qui fut un grand chagrin pour nous quand nous sûmes quelle proie venait de nous échapper. Cet événement fut cause de la mort de plusieurs prisonniers qui, voulant profiter du désordre pour se sauver, furent massacrés par ceux qui étaient chargés de les conduire.
Nous en emmenâmes cependant près de trois cents à Belleville ; ils furent réunis à ceux des Essarts. J'ai vu à cette affaire un exemple de sang-froid bien remarquable : un des officiers de l'escorte cherchait à se sauver ; une forte haie le séparait de nos premiers cavaliers ; Colin lui cria de se rendre : « Attends un moment, lui dit-il, voilà ma réponse » ; il tira de sa ceinture un pistolet qu'il se mit dans la bouche, le pistolet rata ; Colin lui cria que son dessein n'était pas de le tuer ; le Républicain, sans lui répondre, prit un second pistolet et se fit sauter la cervelle.
A notre retour à Belleville, nous reçûmes de grands éloges de la part du Général ; il n'avait assisté à aucun des derniers combats, sa présence était utile ailleurs.
M. Charette s'était décidé à recommencer la guerre sans prendre conseil des Généraux commandant les autres armées et sans demander l'avis de ceux qui partageaient l'autorité dans la sienne. M. de Couëtus, général en second, faisait publier la paix à Saint-Philbert le jour même ou que nous recommençions les hostilités ; il fallut à M. Charette aller enlever M. de Couëtus, dont l'influence dans son pays pouvait déranger ses projets. M. de Couëtus, malgré son goût pour le repos, se rendit aux avis du Général et consentit à revenir à Belleville[6]. »
« On devait s'attendre que les chefs vendéens, démasqués, ne tarderont pas à reprendre les armes, ou plutôt à les employer contre la République, car ils ne les ont jamais laissées et n'ont cessé de voler, de piller et d'assassiner les voyageurs et nos ordonnances.
J'étais instruit que des rassemblements se formaient, et Charette luimême me l'avait marqué; mais, pour me donner le change sur ses projets , il m'avait assuré que ce n'était que pour former la garde territoriale . Je n'ai point été la dupe de cette ruse ; je lui ai répondu que je lui défendais de faire aucun rassemblement, que c'était violer votre arrêté du 9 prairial, et que toute infraction à cet arrêté serait regardée comme un délit et réprimée. Je ne me suis pas borné là . J'ai écrit au général Legros de se tenir sur ses gardes au château de l'Oie. J'ai écrit la même chose à mon collègue Dornier, à Cholet et j'ai proposé à l'un et à l'autre de prévenir Charette et de marcher sur lui avant qu'il fut en force. Il y a eu quelques lenteurs dans les courriers qui ont porté nos lettres , et de l'indécision sur le parti à prendre . Pendant ce temps , les rebelles nous ont prévenus : un camp a été forcé aux Essarts, et le général Legros me marque que 117 hommes ont manqué à l'appel. Le 9, un convoi, parlant des Sables pour se rendre à Palluau, escorté par 300 à 400 hommes, a été attaqué et enlevé , et nous n'avons recueilli que 12 hommes de l'escorte. Le général Legros m'a écrit aussi qu'il m'a envoyé une dépêche par 27 chasseurs. Elle ne m'est point parvenue, et il paraît que ces chasseurs ont encore été égorgés par l'ennemi.
Ces événements nous ont forcés d'abandonner la position de Palluau, où nous manquions absolument de vivres, et à nous rapprocher des Sables, pour venir au devant de nos convois, qui ne pouvaient plus passer. Nous nous sommes encore déterminés à cette mesure dans l'espoir de ramasser les malheureux soldats qui auraient pu échapper aux brigands et se cacher dans les bois. Nous comptions encore tomber sur l'ennemi et le battre, s'il était resté sur le champ de bataille. Mais, à l'exception de 4 soldats de l'escorte, que nous avons rencontrés sur le chemin, nous n'avons trouvé que les cadavres des malheureux qu'ils avaient égorgés. La route en était couverte dans l'espace d'un quart de lieue. Ceci a tellement monté les têtes que la colonne de l'adjudant-général Cortez, à laquelle j'étais attaché, a commis beaucoup d'excès, cette nuit, pendant que j'étais aux Sables à prendre quelque repos des mesures pour les subsistances de l'armée. Le général m'a écrit ce matin avec le ton du désespoir ; il lui a été impossible de contenir les troupes. Plusieurs commandants de bataillon sont venus me dire la même chose. Tous demandaient à abdiquer le commandement et à servir comme simples soldats. Je les ai encouragés à montrer dans les circonstances le même courage dont ils avaient fait preuve en présence de l'ennemi.
J'ai fait une adresse aux troupes, dont je vous envoie copie et qui est actuellement sous presse , et je vais me rendre au camp, avec quelques généraux qui sont ici, pour aider le général Cortez, qui est plein de zèle et qui ne manque pas de talents militaires. J'espère que mes exhortations et quelques exemples ramèneront la discipline et le bon ordre. Cependant, citoyens collègues, je vous dirai ce que j'ai déjà dit au Comité de salut public, avant de partir pour ma mission, c'est que les troupes qui ont fait la guerre de la Vendée, lorsqu'on a incendié et massacré, ne sont pas bonnes à la faire aujourd'hui. Enfin on en tirera le meilleur parti possible.
[...]
Je suis mécontent du général en chef. Ses dispositions pour le placement des troupes étaient évidemment mauvaises. Elles ne pouvaient avoir aucune communication entre elles, du moins entre la colonne commandée par l'adjudant-général Cortez, qui était à Palluau, et celle commandée par le général Legros, qui est au château de l'Oie. Cependant le premier devait prendre les ordres du dernier. J'ai vu juste jusqu'à ce moment-ci sur les affaires de la Vendée. Je vous assure que le général Canclaux n'est pas l'homme qui convient à l'armée de L'Ouest. Dornier pense à peu près comme moi[7]. »
« La malveillance aura sans doute grossi les succès éphémères que Charette doit à sa déloyale conduite, ils se réduisent à la dispersion de deux convois et à la surprise du poste des Essarts. Notre perte totale est de trois cents et quelques .hommes , dont plus de deux cents sont prisonniers : ces légers désavantages ne se renouvelleront pas[2]. »
Alphonse Aulard, Recueuil des actes du Comité de salut public : avec la correspondance officielle des représentants en mission et le registre du conseil exécutif provisoire, t. XXIV, Imprimerie nationale, , 922 p. (lire en ligne).
Lionel Dumarcet, François Athanase Charette de La Contrie : Une histoire véritable, Les 3 Orangers, , 536 p. (ISBN978-2912883001).
Jean Julien Michel Savary, Guerres des Vendéens et des Chouans contre la République, t. V, Paris, Baudoin Frères, Libraires-éditeurs, , 419 p. (lire en ligne).