Plogoff
Plogoff [plogɔf] est une commune du département du Finistère, à l'extrémité du Cap Sizun (canton de Pont-Croix) dans la région française Bretagne, en France. Plogoff est limitrophe de Primelin et de Cléden-Cap-Sizun. Ses habitants sont les Plogoffistes. GéographieReprésentations cartographiquesDescriptionPlogoff se situe à l'extrémité sud-ouest du Cap Sizun. Son finage, étiré en longueur dans le sens est-ouest, est délimité au sud par l'Océan Atlantique, le littoral, formé principalement de falaises, allant de l'Anse du Loc'h à l'est (partagée avec la commune voisine de Primelin) à la baie des Trépassés à l'ouest en passant par la Pointe du Mouton, la Pointe de Plogoff, la Pointe de Feunteun Aod et la célèbre Pointe du Raz. La limite nord de la commune, dont la voisine est Cléden-Cap-Sizun, suit le tracé d'une dépression drainée par un petit fleuve côtier qui alimente l'étang de Laoual (sous les eaux duquel la croyance populaire place parfois la légendaire ville d'Ys) et se jette dans la Baie des Trépassés par sa partie occidentale, et d'un autre petit fleuve côtier qui se jette dans l'Anse du Loc'h pour sa partie orientale. Le sous-sol est presque entièrement granitique, même si de petits dépôts houillers dans la Baie des Trépassés et à Kergogne ont été signalés[1], leur exploitation fut vainement tentée dans les premières décennies du XIXe siècle. Des murets en pierres sèches remplacent les haies, absentes en raison du vent et des embruns, pour délimiter les parcelles tout le long du littoral. La RD 784 dessert la commune sur toute la longueur jusqu'à la pointe du Raz depuis Audierne.
Les ports de PlogoffLa commune dispose de quatre petits ports, difficiles d'accès, même par voie terrestre, uniquement accessibles aux petites, voire très petites, unités : Pors-Loubous, Feunten-Aod, Bestrée et Poul Mostrec. Les ports de Pors Loubous et Feunten-Aod
À Feunteun Aod, les marins faisaient escale avant de contourner la pointe du Raz afin de s'approvisionner en eau potable. Pietro Vesconte, cartographe génois, mentionne dans son "Atlas" publié en 1313 le nom de "Fontanao" ("Feunteun Aod"). Les ports de Bestrée et Poul MostrecBestrée est un petit refuge naturel, un simple abri précaire, relativement protégé par une langue de granit barrant la houle d’ouest du Raz de Sein et de la Chaussée de Sein qui sont des zones très poissonneuses en raison du brassage de l’eau, ainsi que de la Pointe du Raz. L’accès terrestre au port est également difficile en raison du fort dénivelé des falaises l’avoisinant. Ce fut un repaire de contrebandiers en raison de son isolement. C’est en 1885 que l’escalier, la plate-forme et la digue reliant le rocher protégeant le port à la terre ferme sont réalisés. Malgré l’épaisseur de la maçonnerie, cette digue a été détruite à plusieurs reprises lors de tempêtes. La cale et le treuil ont été aménagés quelques années plus tard. Situé à proximité du Raz de Sein, le port de Bestrée a longtemps été le port d’embarquement des bateaux ravitaillant le phare de la Vieille et assurant la relève des gardiens. Jusque dans les années 1930, ce sont de petits canots de pêcheurs de Bestrée qui se chargeaient de cette mission très dangereuse : tenter d’approcher le rocher de Gorlébella sur lequel le phare a été construit en 1887 (lors des grandes tempêtes d’hiver, il arrivait que la relève ne puisse pas se faire pendant plusieurs semaines). Par la suite, ce sont des vedettes motorisées des phares et balises qui accomplirent cette liaison maritime. Le phare a été automatisé en 1995. Entre 1949 et 1971, le port de Bestrée a été le port d’attache d’une petite navette faisant la liaison entre le continent et l’Île de Sein, du moins pendant la saison touristique. Un dramatique accident, la noyade de trois personnes lors d’un embarquement, mit un terme à cette activité[2].
Poul Mostrec est un tout petit port situé sur la côte nord de la Pointe du Raz, qui a servi de port de remplacement à Bestrée lorsque les vents de suroît rendaient trop dangereux le débarquement à Bestrée ; ce port est de nos jours peu utilisé. La répartition de l'habitatLes falaises escarpées qui bordent la quasi-totalité du littoral et la rudesse du climat expliquent l'absence quasi-totale d'habitat en bordure de mer, si l'on excepte Keringard (en position d'abri par rapport aux vents dominants, côté nord-ouest de l'Anse du Loc'h, faisant face au sud-est). Le bourg de Plogoff, ainsi que les principaux hameaux traditionnels (Landrer, Pennéac'h, Le Dreff, Kerguidy, Kerhuret, Pendreff, Kerherneau, Lescoff, etc., sont tous sur le plateau (haut de 50 à 76 mètres selon les endroits), éloignés de plusieurs centaines de mètres, voire plus d'un kilomètre pour certains, du littoral. Un habitat résidentiel récent s'est toutefois développé au Loc'h, en bordure de l'Anse du Loc'h.
L'"Enfer de Plogoff" est une galerie creusée par la mer sous le cap de la Pointe du Raz ; le lieu est réputé être le lieu où sont ramenés les noyés dont on entend les gémissements. Le lieu est ainsi décrit dans une revue touristique en 1891 : « L'"Enfer de Plogoff", gouffre en forme d'entonnoir, où la mer s'engage et gronde avec de sourdes détonations jusqu'à la paroi abrupte où l'on voit, en se penchant, le jour et la mer de l'autre côté d'une fissure qui perce comme un tunnel la masse du cap »[3]. Ce gouffre, d'un accès dangereux, a connu des drames, par exemple la mort d'un touriste belge qui s'y fracassa le crâne en 1925[4]. Cadre géologiquePlogoff est située sur un plateau d'altitude de 60 à 70 m, à l'une des extrémités occidentales du Massif armoricain. Le territoire correspond au prolongement occidental du domaine centre armoricain (synclinorium médio-armoricain) et du domaine sud armoricain (domaine hercynien)[5]. . Le domaine hercynien est marqué par la phase orogénique bretonne du cycle varisque, au début du Carbonifère inférieur, ou Tournaisien, il y a environ 360 Ma. La collision continentale au cours de l'orogenèse varisque proprement dite se traduit dans le Massif armoricain par un métamorphisme général de basse-moyenne pression, formant les gneiss et micaschistes au nord du cap Sizun, par des phases de cisaillement (en) et par la mise en place de nombreux leucogranites intrusifs (granites de teinte claire à deux micas, biotite et muscovite) au niveau de Plogoff[6] S'inscrivant dans le cadre géologique du cap Sizun, la commune est située au niveau du prolongement occidental du cisaillement sud-armoricain (CSA) qui constitue un « Y » horizontal dont la base du raz de Sein à Quimper se divise en deux grands accidents linéamentaires (branche nord s'étendant vers l'est en direction d’Angers, branche sud en direction de Nantes). C'est le CSA qui guide la mise en place de la ceinture des leucogranites en feuillets ou en lobes qui la jalonne, depuis la pointe jusqu'à Nantes. Sur le plan pétrographique, ce massif est ainsi constitué par un leucogranite à deux micas (biotite et muscovite) de grain très fin (millimétrique) dont le faciès varie selon la distance au cisaillement. Cette roche plutonique présente une déformation très hétérogène qui se traduit notamment par un débit en lames de quelques décimètres d'épaisseur, très redressées et orientées est-ouest (orientation plus ou moins mylonitique), parallèlement au CSA[7]. Les falaises de Plogoff permettent d'observer, à environ 2 km à l'est de Feunteun-Aod, sur le GR 34, un filon quasi vertical étroit (50 cm environ) d'une roche magmatique sombre de couleur verte proche du granite, la sizunite (selon le terme de Jean Cogné en 1961[8]), recoupant le feuilletage du leucogranite. La sizunite présente un intérêt scientifique, un intérêt pédagogique et une rareté régionale, qui justifient le classement en site d'intérêt géologique. L'orientation du filon « est NO-SE identique à celle de la faille Kerforne[9]. Il s’agit d’un lamprophyre, roche hypo-volcanique à plagioclase et biotite... Il [le filon] contient de nombreuses enclaves[10], plus ou moins arrondies[11] ». ClimatEn 2010, le climat de la commune est de type climat océanique franc, selon une étude du CNRS s'appuyant sur une série de données couvrant la période 1971-2000[12]. En 2020, Météo-France publie une typologie des climats de la France métropolitaine dans laquelle la commune est exposée à un climat océanique et est dans la région climatique Bretagne orientale et méridionale, Pays nantais, Vendée, caractérisée par une faible pluviométrie en été et une bonne insolation[13]. Parallèlement l'observatoire de l'environnement en Bretagne publie en 2020 un zonage climatique de la région Bretagne, s'appuyant sur des données de Météo-France de 2009. La commune est, selon ce zonage, dans la zone « Littoral », exposée à un climat venté, avec des étés frais mais doux en hiver et des pluies moyennes[14]. Pour la période 1971-2000, la température annuelle moyenne est de 11,7 °C, avec une amplitude thermique annuelle de 10 °C. Le cumul annuel moyen de précipitations est de 899 mm, avec 15,6 jours de précipitations en janvier et 7,1 jours en juillet[12]. Pour la période 1991-2020, la température moyenne annuelle observée sur la station météorologique la plus proche, située sur la commune de Lanvéoc à 32 km à vol d'oiseau[15], est de 12,2 °C et le cumul annuel moyen de précipitations est de 1 030,1 mm[16],[17]. Pour l'avenir, les paramètres climatiques de la commune estimés pour 2050 selon différents scénarios d’émission de gaz à effet de serre sont consultables sur un site dédié publié par Météo-France en novembre 2022[18]. UrbanismeTypologieAu , Plogoff est catégorisée commune rurale à habitat dispersé, selon la nouvelle grille communale de densité à 7 niveaux définie par l'Insee en 2022[19]. Elle est située hors unité urbaine[20] et hors attraction des villes[21],[22]. La commune, bordée par l'océan Atlantique, est également une commune littorale au sens de la loi du , dite loi littoral[23]. Des dispositions spécifiques d’urbanisme s’y appliquent dès lors afin de préserver les espaces naturels, les sites, les paysages et l’équilibre écologique du littoral, comme par exemple le principe d'inconstructibilité, en dehors des espaces urbanisés, sur la bande littorale des 100 mètres, ou plus si le plan local d’urbanisme le prévoit[24]. Occupation des solsLe tableau ci-dessous présente l' occupation des sols de la commune en 2018, telle qu'elle ressort de la base de données européenne d’occupation biophysique des sols Corine Land Cover (CLC).
ToponymieLe nom de la localité est attesté sous les formes Ploegomff vers 1330, Ploegoff en 1368, 1379 et 1394[26]. Plogoff est un éponyme composé du breton plou (« paroisse ») et du nom d'un saint inconnu. Le -ff est un ancien digraphe notant la nasalisation de la voyelle précédente ; cette convention orthographique est désuète en breton moderne, où on utilise ñ, mais a été conservé en français. Ainsi le nom de la commune se dit Plougoñ [ploˈgõ̞ː][27] en breton, et par hypercorrection [plo.gɔf] en français. HistoireOriginesPlogoff est une ancienne paroisse qui englobait les paroisses médiévales de Plogoff, Cléden-Cap-Sizun, Goulien, Primelin et sa trève Saint-Tugen (aujourd'hui en Primelin), Esquibien et sa trève Audierne, Beuzec et sa trève Pont-Croix[28]. Par la suite Plogoff appartint au doyenné de Pont-Croix et à l'évêché de Cornouaille. Le bourg est situé à une certaine distance de la côte, sur un plateau : c'est là une caractéristique commune à de nombreuses communes littorales bretonnes (par exemple à Ploaré, Esquibien, Plouhinec, Poullan, Combrit, Beuzec-Conq, Nizon, etc.), les premiers émigrants bretons fixèrent le centre de leurs plous à l'intérieur des terres, probablement par crainte des pirates saxons[29]. Plogoff aurait été fondé par saint Collédoc (connu aussi sous le nom de Saint Ké ou saint Quay), évêque d'origine cornique devenu ermite, devenu le saint patron de Plogoff sous le nom de "saint Collodan". La chapelle Saint-Michel de Plogoff était antérieurement consacrée à saint Cléden, autre nom de saint Collodan[30]. Joseph Loth a étudié l'origine des noms propres (de personnes, de lieux-dits, etc.) de Plogoff[31]. Préhistoire et AntiquitéUne stèle tronconique datant de l'âge du fer, d'une hauteur de 1,20 mètre, plane à son sommet et arrondie à sa base, portant des gravures à peine discernables a été découverte à Laoual en Plogoff, à l'emplacement supposé de l'ancienne chapelle Saint-Guénolé, si l'on en croit un notice datant de 1889 écrite par Hyacinthe Le Carguet[Note 1] : « Sous le village de Laoual en Plogoff, la tradition place l'ancienne chapelle Saint-Guénolé (…), des substructions, deux fontaines et un lec'h indiquent l'emplacement de cette chapelle »[32]. Cette stèle a été décrite en détail en 1989 par Michel Le Goffic[33]. En 1890, Paul du Châtellier évoque les nombreux monuments préhistoriques situés sur le plateau à proximité de la chapelle Notre-Dame-du-Bon-Voyage, malheureusement ravagés « par les carriers qui ont trouvé dans ces grands mégalithes qui se dressaient de tous côtés de beaux matériaux d'une exploitation facile », évoquant l'ancien tumulus disparu qui se trouvait à Ar-Voguer-Men (la "muraille de pierre") où il trouva néanmoins plusieurs chambres contenant encore du mobilier funéraire (vases, poteries, haches, lame en silex, etc.) ; il signale aussi l'existence plus à l'ouest, à 150 m à l'est de la chapelle Notre-Dame-du-Bon-Voyage, d'un autre vaste monument mégalithique connu dans le pays sous le nom d'Ar-Carn (le « cimetière »), littéralement mis à sac par les carriers ; il évoque aussi l'ancien tumulus disparu de Pennaech, « qui recouvrait une allée couverte de 15 m de long, sur 1,60 m de large » et dont il ne restait déjà à cette époque que de rares vestiges. Il ajoute : « En s'avançant jusqu'à la Pointe du Raz, on trouve encore le grand tumulus fouillé de Bec-an-Ty-Dévet et le dolmen du Dreff, le tumulus ravagé avec dolmen intérieur sur lequel est construit le corps de garde de Lescoff, le menhir de Lescoff ; enfin le camp retranché de la Pointe du Raz »[34]. La pointe du Raz a été occupée au Néolithique et à l'âge du bronze, et a conservé les vestiges d'un éperon barré datant de l'âge du fer[35]. Sur la pointe de Diameur on a retrouvé les restes d'un retranchement de l'âge du fer[35]. Le chanoine Moreau, dans Histoire de la Ligue en Basse-Bretagne, écrit en 1586, parle « d'une ville appelée Roc'h-Guen (…) défendue du côté de la terre par une triple enceinte de murailles, et du côté de la mer par un précipice le long duquel on avait pratiqué un escalier étroit qui descendait jusqu'au rivage ». Il évoque aussi « une autre place très forte [qui] se trouvait près de Cléden et Plogoff : une grande muraille carrée, faite de cailloux noyés dans le ciment, qui devait être une dépendance de l'ancienne (et peut-être fabuleuse) ville d'Is, et près de laquelle on trouvait des auges de pierre ou cercueils qui, d'après la description, devaient appartenir au IVe siècle ». La Pierre de la mariée est une stèle gauloise qui est située dans l'ancien jardin de la maison du prêtre de Lescoff. La tradition voulait que, le jour de son mariage, la mariée vienne s'y frotter le ventre[36]. Une voie romaine venant de Vorgium aboutissait à la Pointe du Raz en passant par Plogoff[37]. Moyen ÂgePors ar Sent ("Port des saints") , ( Porzensur les cartes modernes), se situe dans la partie ouest de l'anse du Loc'h ; c'est là qu'auraient débarqué selon la légende les deux fils de Conomor : saint They et saint Trémeur[38]. Le seigneur de Lezoualc'h, en Goulien, disposait d'un « droit de sennage consistant en le septième des merlus, daurades et autres poissons pêchés sur les côtes de Cléden, Plogoff, Goulien et aux environs de l'Île de Sein ». Il jouissait également « au port et rade du Loc'h [en Plogoff et Primelin], de la faculté de prendre une fois l'an, un merlu sur tout "compagnon de bateau" qui déchargeait au dit port Loc'h»[39]. Au XIVe siècle la peste noire, véhiculée probablement par un navire, fit des ravages à Plogoff ; les traditions et une gwerz en ont gardé le souvenir ; elle est connue localement sous le nom de "maladie de Lescoff" car elle se propagea à partir de ce hameau.
Hyacinthe Le Carguet a aussi retranscrit dans son article le texte de la gwerz en langue bretonne et sa traduction en français. Selon cette gwerz, c'est le recours au plantain qui aurait permis d'arrêter l'épidémie[41]. Époque moderne« Peu éclairés au point de vue religieux, les habitants [de Plogoff] travaillaient le dimanche comme les autres jours. Ils étaient, au surplus, victimes des superstitions les plus grossières. Des danses nocturnes avaient lieu dans les chapelles de la côte[42]. Le célèbre prédicateur Julien Maunoir qui prêcha des Missions à Plogoff en 1643, 1648, 1655 et 1659[43], parvint à les convertir. lors de la Mission de 1659, il convertit aussi Nicolas de Tremaria[44], seigneur de Kerazan (en Cléden-Cap-Sizun), lequel menait jusque-là une vie tumultueuse[45]. Un texte breton du XVIIe siècle, traduit par Joseph Loth, évoque la construction de la chapelle Notre-Dame-du-Bon-Voyage : la chapelle fut construite par Jean de Tréana[46], seigneur de Kerazan ; sur le point de mourir, il fit alors le vœu de construire une chapelle s'il survivait sur la montagne de Kernen en Plogoff, située sur la lande dépendant de son domaine de Kerstrat[47] ; il ne savait pas quel nom lui donner, mais inspiré par Dieu, lui donna le nom de Notre-Dame-de-Bon-Voyage ou de Bon-Port. « Les marchands qui risquent leurs biens sur la mer viennent y recommander leurs barques et vaisseaux (…) ; tous ceux qui invoquent Notre-Dame de Bon Voyage (…) obtiennent touts leur demande (…) ; Notre-Dame de Bon Voyage les protège contre les pirates et touts les dangers de la mer »[48]. En 1741, une épidémie de dysenterie sévit : « Dans chacune des paroisses de Goulien, Plogoff, Esquibien, Plouinec, Plozévet, Mahelon, Poulan, Beuzet-Cap-Sizun, Pouldergat, Douarnenez, on compte le chiffre énorme de dix à douze morts par jour (…) En 1768, ce sont les paroisses de Plumelin, Cléden, Goulien, Esquibien et Plogoff qui sont envahies »[49]. Le la Marguerite-Anne, d'Amsterdam, un bateau de 145 tonneaux, fit naufrage dans l'anse du Petit Loch en Plogoff. Le le Saint-Denis, de Nantes s'échoua également au Petit Loch ; les archives de l'Amirauté de Quimper indiquent : "pillage en règle"[50]. En 1759, une ordonnance de Louis XV ordonne à la paroisse de Plougoff [Plogoff] de fournir 4 hommes et de payer 26 livres pour « la dépense annuelle de la garde-côte de Bretagne »[51]. Dans son Dictionnaire historique et géographique de la province de Bretagne publié en 1778, Jean-Baptiste Ogée indique que Plogoff compte alors « 900 communiants » et que son territoire est « fertile en toutes sortes de grains »[52]. Révolution françaiseLa paroisse de Plogoff, qui comprenait alors 195 feux, élit deux délégués, André Le Carval et Clète Yven, pour la représenter à l'assemblée du tiers état de la sénéchaussée de Quimper au printemps 1789[53]. Le décret du réduit à quatorze les paroisses du district de Pont-Croix ; parmi elles « Cléden, qui aura pour succursales les paroisses de Goulien et Plogoff »[54]. Guillaume Goardon, ancien élève du séminaire de Quimper, ouvrit une école à Plogoff en vertu de la loi du 5 nivôse an II () qui rendait l'école primaire obligatoire et gratuite[55]. Les paroissiens de Plogoff soutinrent pendant la Terreur les prêtres non assermentés et en cachant plusieurs originaires de la paroisse comme Henri Mével, vicaire à Plonéour-Lanvern, et Clet Kerloc'h, vicaire de Trégunc et refusant les prêtres assermentés. « Dans ce canton [celui de Cléden], l'esprit d'incivisme et de révolte se manifeste de jour en jour de la part des paroissiens de Plogoff et d'une partie de ceux de Cléden » écrit un membre du directoire du district de Pont-Croix ; des prêtres réfractaires se cachèrent dans une grotte près de la Pointe du Raz ; on leur y descendait à manger par un trou connu des paroissiens. « Ces deux paroisses [Plogoff et Cléden] manifestent la résistance la plus ouverte à l'exécution des décrets de la Convention nationale [concernant les réquisitions] » écrit le même responsable du district de Pont-Croix le [56]. La levée en masse provoqua de nombreuses désertions à Plogoff ; le , 300 soldats, accompagnés d'un canon, arrivèrent à Plogoff et capturèrent 21 déserteurs. Le , 50 soldats sont à nouveau à Plogoff pour y faire la chasse aux déserteurs (50 déserteurs environ à Plogoff) et procéder à des réquisitions[57]. Le XIXe sièclePlogoff au début du XIXe siècleSi l'on en croit un récit de Hyacinte Le Carguet, une vieille femme de Plogoff aurait été brûlée vive dans sa masure à une date inconnue située dans la première moitié du XIXe siècle car elle terrifiait la population locale qui croyait qu'elle lançait des sortilèges, des drouk-avvis (en breton), c'est-à-dire le "mauvais œil"[58]. Une circulaire du Préfet du Finistère en date du indique que « le navire La Fanny ayant fait naufrage en vue de la commune de Plogoff, des habitants de Primelin et de Cléden-Cap pillèrent les naufragés, se portèrent sur eux à des voies de fait et s'emparèrent violemment des objets échoués »[59]. Plogoff en 1845A. Marteville et P.Varin, continuateurs de Jean-Baptiste Ogée, font en 1845 cette description de Plogoff : « La commune de Plogoff n'est pour ainsi dire qu'un grand monticule, s'étendant du sud-est au nord-ouest sur une longueur de 6 kilomètres et sur une largeur de 3 ». Les auteurs indiquent que pour une superficie de 1 167 hectares, la commune possède alors 617 ha de terres labourables, 44 de prés et pâtures, 12 ha de vergers et jardins, 441 ha de landes et incultes ; Plogoff disposait alors de 8 moulins à vent (Carn, Kerlédec, Kerguidy, Lestrivin, Run, à vent). Ils ajoutent : « On exploite en plusieurs endroits le granite pour constructions. Plogoff manque absolument de bois ; aussi y brûle-t-on beaucoup de mottes et de la fiente de vache desséchée au soleil. (…) La population se livre en grande partie à la pêche à la sardine pendant l'été ; l'agriculture prospère grâce aux engrais de mer. On a établi depuis quelque temps une fabrique de soude de warech. Le passage entre Plogoff (…) et l'Île de Sein s'opère par de petits bateaux pêcheurs qui s'abritent dans les anses de Saint-Yves [Bestrée] et de Portbihan [Porsz Loubous]. (…) On parle le breton »[60]. L'élevage des moutonsAbandonné dans le cours de la première moitié du XXe siècle, l'élevage des moutons était traditionnellement important à Plogoff ; en témoigne par exemple cet extrait de la Chanson de Jeanne Normand (traduit du breton par Joseph Loth) : La plus belle des jeunes filles de Plogoff Symboliquement d'ailleurs, lors du combat contre l'implantation d'une centrale nucléaire à Plogoff aux alentours de 1980, le comité de défense créa une bergerie sur le site envisagé pour ralentir le processus d'achat des terres par EDF. La région de Plogoff décrite par Maxime Du CampVers 1845, Gustave Flaubert visite, en compagnie de Maxime Du Camp, la région de Plogoff, que ce dernier décrit ainsi dans Par les champs et par les grèves :
Les travaux du XIXe siècleEn 1880, le Conseil général du Finistère accorde une subvention de 18 000 francs pour la construction d'une école de garçons et de filles, « la commune de Plogoff étant l'une des plus pauvres du département ». La commune ne possédait encore à cette date aucun établissement scolaire, elle n'a eu jusqu'à ce jour « pour la tenue de ses écoles que des locaux loués, peu convenables et même insuffisants »[63]. Par contre, la même année, le Conseil général refuse de financer des travaux d'aménagement de la crique de Feunteun-Not : « Le service des Ponts et Chaussées ne croît pas le projet réalisable. La dépense serait exorbitante, eu égard au peu d'importance du port. Des travaux économiques seraient emportés (…) comme ils l'ont été à Port Loubous»[64]. Bestrée en 1891Une revue touristique décrit ainsi le petit port de Bestrée en 1891 : « Nous descendons, par un petit sentier de montagne, jusqu'au petit port de Bestrée, où deux ou trois barques de pêcheurs se balancent à l'abri d'une cale tout encombrée de paniers à homards. Trois pêcheurs (deux hommes, un enfant) y font silencieusement leurs préparatifs de départ. Devant nous, une autre barque aborde, ramenant du phare un des trois gardiens, qui a fini son tour de garde. Il a dû perdre, en son dur métier, l'habitude de la parole, car c'est à peine s'il échange un bonjour avec les gens du rivage… »[65]. Plogoff à la fin du XIXe siècleEn 1869, deux Jésuites, les pères Coniat et Kervennic prêchèrent une Mission à Plogoff[28]. En 1863, lorsque le peintre Georges Clairin et son ami Louis Leloir visitent la région : « Plogoff en ce temps-là n'avait pas d'auberge et nos deux voyageurs durent demander asile au maire du pays qui, sans trop de façons, consentit à les nourrir et à les loger. Le premier magistrat du pays s'appelait le père Yvenou ; c'était un vieux loup de mer ayant peu l'usage du monde, mais possédant un cœur d'or et toute une cargaison de morue salée. Il traita de son mieux ses hôtes (…) »[66]. En 1897, Plogoff n'avait « ni boulanger, boucher, épicier » si l'on croit le récit de voyage effectué par Charles Géniaux à l'époque, qui décrit aussi les deux auberges du bourg à cette date[67]. Anatole Le Braz décrit ainsi Plogoff en 1896 :
Une épidémie de diphtérie sévit à Plogoff du au . Selon un rapport du docteur Hébert adressé au Préfet du Finistère, les causes en sont « les mauvaises conditions de milieu et d'habitat, la mauvaise hygiène publique et privée, la malpropreté du paysan Bas-Breton (on trouve, dans certaines habitations, des poules nichées dans des trous de mur contre lesquels sont appuyés les lits des habitants) ». Parmi les douze cas traités, la maladie ne fit qu'un mort, mais « sept enfants atteints de diphtérie (…) sont morts sans avoir reçu le sérum. (…) Les Bretons trouvent le sérum trop cher »[69]. Le XXe siècleLe le vicomte Alain Le Gualès de Mézaubran[Note 2] demanda « la concession de mines de houille, schistes bitumineux, anthracite, lignite ou pétrole » qui pourraient se trouver sur les communes de Cléden-Cap-Sizun, Plogoff, Primelin, Esquibien, Audierne, Plouhinec, Pont-Croix et Goulien[70]. Descriptions de Plogoff au début du XXe siècleEn réponse à une enquête épiscopale organisée en 1902 par Mgr Dubillard, évêque de Quimper et de Léon en raison de la politique alors menée par le gouvernement d'Émile Combes contre l'utilisation du breton par les membres du clergé, le recteur de Plogoff, l'abbé Déniel, écrit : « Je certifie que les deux tiers de mes paroissiens ne comprennent pas un mot de français. parmi l'autre tiers, je puis compter à peine une cinquantaine de personnes qui puissent suivre tant bien que mal une instruction [religieuse] faite en français, si simple soit-elle »[71]. Bien d'autres parlent seulement « un jargon que je me garde bien de décorer du nom de français, ne voulant pas faire injure à la langue nationale » écrit le même recteur de Plogoff en 1903[72]. En 1903, les Bell, un couple d'Anglais en villégiature dans l'hôtel tenu par madame Lapous, rapportent : « Tandis que nous bavardions, des groupes d'enfants affamés s'étaient rapprochés. Ils ne demandaient pas l'aumône, mais regardaient avec regret et tristesse les quelques restes que les convives avaient laissé sur les tables ». L'hôtelière d'expliquer : « Ils n'ont souvent que des pommes de terre à manger, et parfois, en cas de mauvaise récolte, ils n'en ont même pas »[73]. Gustave Geffroy décrit ainsi Plogoff en 1904 :
En 1906, le comte Mortimer-Mégret, qui fait le voyage jusqu'à la Pointe du Raz, écrit :
La récolte du goémonAlexandre Nicolaï décrit ainsi le brûlage du goémon en 1893 dans la région de Plogoff :
Yvon Normant décrit ainsi, dans son livre Clet, langoustier de Plogoff, la récolte du goémon :
Le même auteur poursuit plus loin, décrivant l'activité goémonière à Pors Loubous :
Le journal Ouest-Éclair indique en qu'au cours d'une seule semaine, « 1 500 m3 de goémons épaves ont été récoltés sur les côtes du gardiennage de Plogoff. La tempête qui sévit depuis dix jours sur nos côtes a ramené des amendements marins à terre en grande quantité »[78]. La pêcheLe nombre des inscrits maritimes est en 1903 de 911 à Plogoff pour une population totale qui est alors de 2 254 habitants[79]. La pêche était pratiquée traditionnellement à partir de Pors Loubous : « Pors Loubous n’est pas un vrai port, mais plutôt un abri pour les barques (…). En dehors de la digue ouest, un fond de sable situé en face de Stang ar Guer sert de lieu de mouillage pour les grands langoustiers. (…) Deux grosses chaînes traversières assurent un bon amarrage pour les canots qui, maintenus bord à bord, se déplacent solidairement au gré du ressac ». De nombreux langoustiers restaient mouiller en dehors du port, à une centaine de mètres de la digue, en particulier ceux qui prenaient l’aiguade à la fontaine de Pors Loubous Vraz. Les bateaux de pêche entraient dans le port d’Audierne à mi-marée montante, afin de choisir, en l’absence de criée, le mareyeur proposant le meilleur prix ; si, par téléphone, un mareyeur d’un autre port proposait un prix plus avantageux pour les langoustes et les homards (les tourteaux étaient alors délaissés et rejetés en mer), le bateau repartait aussitôt. À marée basse, les bateaux et leur pêche sont prisonniers du port en raison de son assèchement complet. Le gain de la marée était partagé par l’équipage : sur un langoustier, les trois marins à bord avaient droit à une part, le propriétaire du bateau à une part (à deux parts si le bateau était ponté), le mousse à une demi-part (de nos jours, le patron propriétaire d’un bateau reçoit la moitié de la valeur de la marée). Les langoustiers, désarmés à partir du mois d’octobre, passaient l’hiver à Audierne, à l’abri dans la ria du Goyen. Le séchage des congres, pêchés à la palangre, était ainsi effectué : « Une ancienne barrique est utilisée pour saler les morceaux bien tranchés de chaque côté de la colonne vertébrale. Après quelques jours de saumure, les morceaux sont enfilés sur une corde, puis suspendus à la façade de la maison où ils sécheront au soleil. Cette opération peut prendre plusieurs jours en évitant les jours de pluie. Les morceaux jaunissent et deviennent alors comme de la pierre. Bien secs, ils sont placés dans de la paille d’avoine et se conserveront tout l’hiver »[77]. Le journal Ouest-Éclair indique par exemple que le « les gros langoustiers de la région de Plogoff, de Cléden et de Primelin sont actuellement presque tous désarmés et ne réarmeront que dans les premiers jours du printemps. D'une manière générale, la pêche a été très rémunératrice cette année, particulièrement en crustacés et sardines, le temps pendant toute la belle saison ayant été très favorable »[80]. Au cours du mois de , les pêcheurs de Plogoff ramenèrent 1 000 kilos de langoustes, 650 kilos de homards, 30 kilos de mulets et 600 kilos de poissons divers[81]. Les petites usines de petits pois permettaient aux jeunes filles de trouver un travail saisonnier. Le naufrage du steamer Ottercaps et les autres naufragesLe Jeanne-et-Geneviève fit naufrage sur la côte de Plogoff en [82]. Le , le steamer anglais Ottercaps, de Sunderland, fit naufrage, poussé par une tempête violente, sur les rochers de Feuntenot près de Plogoff. « Les pêcheurs de Plogoff ont trouvé sept cadavres flottant sur la mer, on suppose que l'équipage et les passagers étaient 30 personnes »[83]. Douze cadavres furent inhumés à Plogoff le [84]. Clet Vichon, originaire de Plogoff, fut l'une des victimes de l'explosion d'un canon survenue le à bord de la Couronne, accident qui fit 9 morts et 10 blessés[85]. Le Journal des débats politiques et littéraires du écrit : « La gendarmerie maritime de Brest, saisie d'une plainte du représentant du Lloyd's, assureur du vapeur anglais Arden, coulé dans le Raz de Sein, s'est livrée à une enquête pour retrouver les pillard du bâtiment naufragé. Une dizaine de procès-verbaux ont été dressés contre des habitants de Plogoff ; de nombreux procès-verbaux ont été également établis contre des pêcheurs de Lesconil qui s'approprièrent des épaves sans les déclarer à l'inscription maritime et les vendirent à des habitants de l'Île-Tudy. Tous seront poursuivis devant le tribunal correctionnel de Quimper »[86]. Le , une lame de fond précipita sur des rochers un canot de pêche en train de manœuvrer à Pors Loubous ; l'accident fit un noyé, Martin Jaffry, âgé de 19 ans[87]. Dans la nuit du 18 au , la goélette La Surprise, de Paimpol, fit naufrage à 400 m environ des roches de Plogoff, probablement à cause du non-fonctionnement du Phare de la Vieille cette nuit-là ; les 10 hommes à bord furent noyés[88] ; « le lendemain matin les pêcheurs de Pors Loubous ont aperçu d'innombrables épaves jonchant la grève sur une longueur de 500 m. Deux cadavres ont été pour l'instant retrouvés (…) »[89]. Le président de la station de sauvetage du Loch (en Primelin) se plaignit de ne pas avoir pu porter secours aux marins de la goélette faute d'avoir été prévenu car sa station de sauvetage, pourtant à proximité du lieu du naufrage, ne disposait pas encore alors du téléphone[90]. En , le cargo danois Aclene fit naufrage aux environs du Loch, entre la Pointe du Raz et Plogoff ; « la baie est jonchée de madriers et de planches »[91]. Le journal Le Matin écrit, décrivant les conséquences de la forte tempête qui sévit plusieurs jours, isolant aussi les gardiens du phare de la Vieille : « Sur une longueur de 10 km, de Plogoff à Primelin, la côte est couverte d'épaves dont la valeur est estimée à plus d'un million. L'inscription maritime de Douarnenez a donné des ordres pour les récupérer »[92]. Jacques Bonis, patron du canot Reine-des-Flots et ses deux matelots, reçurent un prix de 500 francs, et le patron la médaille d'Argent du sauvetage maritime, pour avoir sauvé par mauvais temps le deux hommes dont le canot avait chaviré dans les brisants de l'anse du Loc'h[93]. L'utilisation des bouses de vacheFaute de bois, les bouses de vache étaient traditionnellement utilisées comme combustible jusque vers 1950 : « Durant l'hiver, on mettait de côté des bouses de vache. (…) Un jour de printemps, on y ajoutait de l'eau et on y faisait danser les chevaux. Celui qui n'avait pas de chevaux dansait lui-même sur ce fumier jusqu'à ce qu'il devienne une espèce de pâte ». Voisins et amis étaient invités pour la circonstance, le foulage du fumier donnant lieu à de véritables fêtes. On ajoutait du crottin de cheval et la finition du travail se faisait à la main, le lendemain. « On prenait un morceau de pâte de fumier, on la roulait dans de la balle d'avoine et on en faisait une boulette ». Les boulettes étaient ensuite mises à sécher sur les murs et les pierres[94]. Les querelles liées à la laïcitéLa laïcisation de l'école tenue par les Filles de Jésus (elles soignaient également les malades à domicile[95]) provoqua la démission d'un conseiller municipal de Plogoff, Marzin, le [96]. La Première Guerre mondialeLe monument aux morts de Plogoff porte les noms de 81 personnes mortes pour la France pendant la Première Guerre mondiale. Parmi elles, 3 au moins (Clet Carval, Yves Carval, Joseph Hémidy) sont morts sur le front belge lors de la Course à la mer ; 18 au moins sont des marins disparus en mer ; quatre au moins sont morts dans les Balkans, alors qu'ils étaient membres de l'Armée française d'Orient : un (Jean Floch) en Serbie, deux (Clet Criou, Jean Kerloch) en Grèce et un (Jacques Kerloch[97]) en Turquie ; 1 (Jean Corre[98]) est décédé au Maroc, 1 au moins (Jean Moullec) est mort en captivité en Allemagne ; la plupart des autres sont décédés sur le sol français[99]. L'entre-deux-guerresEn 1923 est décidée la translation du cimetière, jusque-là situé autour de l'église, à son emplacement actuel[100]. Le , « par suite de la tempête qui sévit, une partie de la falaise de Plogoff s'est éboulée causant des dégâts très importants et ensevelissant plusieurs bateaux de pêche »[101]. La Seconde Guerre mondialeLes Allemands commencèrent dès 1940 à installer une puissante station radar (un Freya rotatif qui avait une portée de 200 km et un Mammut, puissant radar équipé d'une antenne de 11 mètres de haut, destinés à repérer les bombardiers qui pilonnaient Brest et Lorient, et un imposant blockhaus) sur le site de Men Tan, le point culminant de la commune (74 mètres d'altitude). En 1942 plus de 300 soldats allemands occupaient le site[102]. Enfoui sous la végétation et des gravats (le site a servi de dépotoir dans l'après -guerre), ces vestiges ont été restaurés depuis 2023 par des bénévoles et est désormais visitable[103]. Le monument aux morts de Plogoff porte les noms de 40 personnes mortes pour la France pendant la Seconde Guerre mondiale ; parmi elles, 12 au moins (Jean Ansquer, Yves Bloch, Jean Carval, Pierre Follic, Mathieu Kerisit, Jean Marzin, Clet Mével, Guillaume Pennamen, Clet Tréanton, Gabriel Umont, Alain Yven, Pierre Yvenou) sont disparues en mer, auxquels il faut ajouter un marin (Jean Bour[104]) mort à Toulon, deux marins (Clet Bloch[105], Jean Marchand[106]) morts lors de l'attaque anglaise contre Mers el-Kébir le et deux marins (Clet Coatmeur[107], Jean Cozic[108]) morts en Angleterre[99]. André Coquet[109], résistant originaire de Plogoff est mort en déportation. Guillaume Pennamen[110], engagé dans les Forces navales françaises libres, a disparu lors du naufrage du Surcouf le dans le golfe du Mexique et reçu la Médaille de la Résistance. Yves Donnart[111], prisonnier de guerre, est décédé aussi en Allemagne. Germain Kersaudy[112] et Paul Marzin sont décédés en Tunisie. Martin Yven[113] est décédé en Indochine. Les résistants Jan Doornik (le ), Maurice Barlier (le ) et Honoré d'Estienne d'Orves (le ), envoyés en mission en France depuis l'Angleterre, débarquèrent successivement (à bord du chalutier Louis-Jules, rebaptisé pour les besoins de la guerre Marie-Louise, dirigé par François Follic) à Pors-Loubous ; les trois hommes furent hébergés par la famille Normant du village de Pennéac'h[114]. Le , pris dans la tempête, le chalutier Jouet des Flots, qui, parti de l'Île-Tudy, transportait 32 aviateurs et résistants, dont Pierre Brossolette, Yves Le Hénaff, Émile Bollaert et Edmond Jouhaud, s'échouait à Feunteun Aod ; les passagers réussissaient à débarquer et à s'enfuir, mais les Allemands arrêtèrent Pierre Brossolette et trois de ses camarades à Plouhinec (Finistère)[115]. Un groupe de résistance, dirigé par François Maubras, membre du réseau « Défense de la France » fut actif à Plogoff en 1944. L'après-Seconde Guerre mondialeLes guerres d'Indochine et d'AlgérieTrois soldats originaires de Plogoff (Jean Coatmeur[116], Étienne Fily et Yves Pochic[117]) sont morts pendant la guerre d'Indochine, un (Georges Ragot) pendant la guerre d'Algérie et un (Clet Riou) au Maroc[99]. La lutte contre le projet d'implantation d'une centrale nucléaireÀ la fin des années 1970, l’État français a voulu implanter une centrale nucléaire sur le territoire de la commune, au niveau du site de la pointe de Feunteun Aod[118], EDF prévoyant une emprise de 176 hectares (77 sur le domaine maritime et 90 sur le territoire de la commune)[119]. Le projet fut rejeté massivement par les Plogoffistes[120] et d'autres partisans anti-nucléaires venus de toute la Bretagne voire de la France entière. Le site avait été retenu à l'automne 1978 par le Conseil régional et le Conseil général du Finistère, ce qui aboutit à la structuration d'un mouvement antinucléaire, notamment à travers le GFA et le CRIN[121] de Plogoff. Le conflit, souvent violent, connut son apogée en 1980. Le , les dossiers pour l'enquête d'utilité publique, réceptionnés le jour même à la mairie de Plogoff, furent brûlés ; l'enquête commença quand même le lendemain, des camionnettes faisant office de mairies annexes. De nombreuses manifestations violentes eurent alors lieu, les plus importantes étant celles du , le jour de la clôture de l'enquête d'utilité publique, qui rassembla 50 000 personnes et celle du avec de 100 à 150 000 manifestants, qui se prolongea par un gigantesque fest-noz la nuit suivante. L'opposition à la construction, répertoriée sous le vocable « les événements de Plogoff », a suscité en 1980 des manifestations importantes contre la politique nucléaire française des années 1970, après celles de Fessenheim et surtout celle de Creys-Malville en 1977. Lors de son accession au pouvoir en 1981, François Mitterrand prit une mesure emblématique en faveur des écologistes, en renonçant à la centrale de Plogoff[122]. Ce combat anti-nucléaire remporté de haute lutte par les opposants au projet de centrale a été à l'origine de plusieurs livres, de deux films (Plogoff, des pierres contre des fusils et Le dossier Plogoff), une bande dessinée Plogoff, de nombreux articles de presse et de dizaines d'affiches. Les Plogoffistes ont conservé, depuis ce combat contre le projet d’implantation d’une centrale nucléaire sur les landes de Feunteun Aod, qui dura cinq ans, de 1976 à 1981, une solide réputation comme le raconte Yvon Normant : « Vous êtes originaire de Plogoff ! Ah ! Ahaaaa ! Vous appartenez à une population têtue et solide comme le granit de leur Pointe du Raz. Qui ne connaît pas Plogoff ! La France entière connaît Plogoff depuis les grandes manifs contre le projet d’implantation d’une centrale nucléaire à l’extrême pointe du Cap Sizun ! »[77] La réhabilitation de la Pointe du RazSur le promontoire de la Pointe du Raz un centre commercial construit dans les années 1970 fut remis en cause et détruit car il dénaturait le site. En contrepartie, un nouvel espace d'accueil fut créé en retrait et sa gestion confiée à un syndicat mixte. Il semble plus en rapport avec les aspirations de mise en valeur de ce patrimoine et permet de mieux accueillir les visiteurs. Les ressources financières générées par le parking payant permettent la valorisation et l'entretien du site, désormais classé "Grand site de France". Politique et administrationListe des mairesDémographieL'évolution du nombre d'habitants est connue à travers les recensements de la population effectués dans la commune depuis 1793. Pour les communes de moins de 10 000 habitants, une enquête de recensement portant sur toute la population est réalisée tous les cinq ans, les populations de référence des années intermédiaires étant quant à elles estimées par interpolation ou extrapolation[130]. Pour la commune, le premier recensement exhaustif entrant dans le cadre du nouveau dispositif a été réalisé en 2007[131]. En 2022, la commune comptait 1 166 habitants[Note 3], en évolution de −5,2 % par rapport à 2016 (Finistère : +2,16 %, France hors Mayotte : +2,11 %). Commentaire : La population de Plogoff, après une baisse spectaculaire pendant le Premier Empire, liée probablement au Blocus continental a augmenté ensuite régulièrement pendant tout le reste du XIXe siècle et les premières décennies du XXe siècle, passant de 1 093 habitants en 1806 à un record de 2 970 habitants en 1936, soit une augmentation de 1 877 habitants ( + 172 % en 130 ans), principalement en raison de l'essor de la pêche à cette époque. Par contre, depuis la Seconde Guerre mondiale, la population décline régulièrement ( - 1 706 habitants entre 1936 et 2012, soit - 57 % en 76 ans) en raison du déclin de la pêche et de l'agriculture, ainsi que de l'isolement liée à l'excentration de la commune à l'extrémité du Cap Sizun, ce qui a provoqué un important exode rural ; la commune est désormais moins peuplée en 2012 qu'elle ne l'était en 1793, date du premier recensement. Le déclin démographique a été particulièrement accentué pendant la dernière décennie du XXe siècle, Plogoff perdant alors 339 habitants en 9 ans, soit une moyenne de - 38 habitants/an. Ce déclin est à la fois dû à un solde naturel négatif qui va croissant ( - 1,2 % l'an entre 1990 et 2006, - 1,6 % l'an entre 2006 et 2011) et à une émigration nette voisine de 1 % l'an en moyenne entre 1968 et 1999, qui s'est toutefois notablement ralentie ces dernières années ( -0,3 % l'an entre 1999 et 2006), devenant même nulle entre 2006 et 2011. Entre 2006 et 2011, le taux de natalité a été de 3,7 pour mille, le taux de mortalité de 19,6 pour mille, soit un taux d'accroissement naturel très négatif de - 15,9 pour mille. La population plogovite est vieillie : en 2011, les 65 ans et + étaient 562 (43 % de la population totale), alors que les 0 à 19 ans étaient seulement 144, formant 11 % d la population totale. En raison de sa situation littorale, Plogoff possède un parc important de résidences secondaires : au nombre de 345 en 2011, elles formaient alors 30,8 % du parc immobilier total constitué essentiellement de maisons individuelles ; la proportion notable des logements vacants (au nombre de 83, soit 7,4 % du parc immobilier total en 2011) est aussi un signe révélateur du déclin démographique[134]. Économie
Équipements et services
Culture locale et patrimoineL'itinéraire touristique "Route du vent solaire"[136] va de la Pointe du Raz à Saint-Pierre (Penmarc'h) en longeant la Baie d'Audierne. Lieux et monuments civils
Églises et chapelles
Selon un témoignage datant de 1856 « les Îliens [de Sein] ont une dévotion spéciale (...) pour N.-D. du Bon-Voyage (...) où de temps immémorial ils se rendent processionnellement le jour du pardon. Tout le monde se rend au port [de Sein], on entonne l' Ave Maris Stella en breton et les bateaux partent. C'est un cierge que les marins offrent ordinairement à la Vierge, ils le portent à la procession et Lee tiennent allumé pendant le Magnificat. Ils sont habillés tout en blanc »[138].
Croix et calvairesPlogoff possède 14 croix et calvaires : celui de Kerveur, ancien, est non daté ; celui de l'église date de 1656, celui de Kerherneau de 1673, celui de Kerguidic de 1718, ceux de Lescoff de 1738 et 1739, celui de Landrer de 1773, celui de Kervergar de 1774, celui de Trogor de 1776, ceux de Kergroas et Kerguidy datent du début du XIXe siècle, celui du cimetière de 1869, celui de Toramur de 1903[139]. Le calvaire de Pennéac'h est daté de 1877. Anatole Le Braz a décrit ainsi son origine : « Sur une stèle fruste, de granit du pays, taillée peut-être dans un ancien menhir, fut entée il y quelque trente-cinq ans, une croix en pierre bleue de Kersantite, ouvragée artistement (…). Des marins de Laoual étant une nuit à pêcher le congre au large de la Baie des Trépassés, sentirent soudain au bout de leur grosses lignes un poids inaccoutumé. (…) Grande fut leur surprise quand, au lieu du poisson phénoménal qu'ils s'attendaient à voir paraître, sortit des eaux une croix de pierre, fleurie de coquillages, enchevêtrée d'algues et de goémons. (…) Il y eut, dès l'aube, un attroupement considérable dans l'enclos sacré de Saint-Colloden, où la croix avait été déposée. (…) La croix-épave, comme on la nommait, fut transportée au bourg, sur une civière ornée d'un drap blanc, au milieu d'un immense concours de peuple chantant en chœur l'hymne latin O crux ave, spes unica !. Il fut entendu, d'un commun accord, qu'on l'érigerait sur le fut découronné du calvaire de Penn-an-Néac'h [Pennéac'h], parce que de là-haut elle dominerait tout le Cap »[68]. Personnalités liées à la commune
Plogoff dans les légendes et la littérature
Films
Tableaux représentant Plogoff et sa région
Voir aussiBibliographie
Articles connexes
Liens externes
Notes et référencesNotes
Références
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