« Ce matin, à deux heures, l'ennemi est venu nous attaquer ; il a été, comme de raison, bientôt repoussé. Les brigands sont dans Quiberon ; il paraît, d'après les rapports, que les Chouans réunis à eux forment un total de quinze à dix-huit mille hommes : dans ce nombre, il peut y avoir cinq à six mille émigrés. [...] Aujourd'hui l'ennemi était si pressé de se retirer, qu'il lui a encore été pris un caisson chargé de munitions, aux armes du roi Georges, et quelques chevaux. Le général en chef met la plus grande activité et la plus grande bravoure. C'est lui-même qui va reconnaître son terrain, sous le feu de l'ennemi, et en avant de tous les tirailleurs.
Les chaloupes canonnières de l'ennemi n'ont pas cessé, ce matin, de tirer à terre pendant l'affaire ; mais jusqu'à présent, je n'ai pas appris que cette canonnade nous ait été funeste.
Il y a quatre jours que les émigrés sont à Quiberon. Nous n'avons pas connaissance de ce qui s'y passe, mais nous voyons une grande agitation dans la flotte anglaise. Tous les bâtiments sont presque toujours à la voile où prêts à s'y mettre. On dit que les émigrés ont fait rembarquer, il y a deux jours, leurs femmes et leurs enfants. Beaucoup de personnes pensent qu'ils ne tarderont pas d'en faire autant, malgré les exhortations et la présence de l'évêque de Dol, du curé de Saint-Malo, et de plusieurs autres calotins.
Nos canons, et surtout nos obusiers, ont ce matin fait merveille, et déconcertent furieusement nos chevaliers français et leurs écuyers[3]. »
— Brue, lettre aux représentants Topsent et Guermeur, le 7 juillet 1795 à Plouharnel.