Né probablement du mariage le 17 juillet 1742 de Pierre Robert Ingouf et de Jeanne Françoise Lantenois (Amiens, 1717 - ?), François Robert Ingouf est le frère cadet du graveur Pierre-Charles Ingouf (dit l'aîné, 1746-1812) et est comme lui élève de Jean-Jacques Flipart. Si les relations avec ce dernier sont appelées à durer dans l'amitié intime, François Robert Ingouf est également cité parmi les élèves de Jean-Georges Wille. On relève, dans le Journal de ce dernier en date du 2 août 1766 (notre artiste est alors âgé de 18 ans), que, à la suite du mécontentement exprimé par Jean-Baptiste Greuze quant à l'interprétation de ses œuvres par Jean-Michel Moreau, c'est le jeune Ingouf que Wille charge de leur achèvement[1].
Portrait d'Aulus Cornelius Celsus, en médaillon avec serpente et culs-de-lampe pour De re medica libri octo, ex fide manuscriptorium codicum et vetustissimorum librorum,, summâ diligentiâ studiosummoque recensuit J. Valart d'Aulus Cornelius Celsus, Pierre-François Didot le Jeune, Paris, 1772.
Gravures d'après Eustache Le Sueur pour Synopsis universae praxeos medicae de Joseph Lieutaud, Pierre-François Didot le Jeune, Paris, 1772.
Augustin de La Balme, Essai sur l'équitation ou principes raisonnés sur l'art de monter et de dresser les chevaux, frontispice montrant, gravé par François Robert Ingouf d'après Jean-Michel Moreau, l'auteur en posture à cheval, à Amsterdam et se trouve à Paris chez Jombert fils aîné, Ruault, 1773[4].
Jean-Baptiste-Michel Bucquet, Introduction à l'étude des corps naturels tirés du règne végétal, Veuve Hérimont, Paris, 1773.
La mort de Claude Anet - « Chères et précieuses larmes ! Elles furent entendues et coulèrent de tout mon cœur », gravure d'après Jacques Barbier (vers 1753 - ?) pour le livre V (Les Confessions), collection complète des œuvres de Jean-Jacques Rousseau, Genève, 1782.
Mais elle m'arrêta et m'imposa le silence en mettant un de ses doigts sur la bouche, gravure pour Lettres d'une Péruvienne de Françoise de Graffigny, Imprimerie de Migneret, rue Jacob, Paris, 1797.
Barthélemy Faujas de Saint-Fond, Histoire naturelle de la Montagne de Saint-Pierre de Maestricht - tome 2 : planches, chez Deterville, libraire, 1799.
Vierge à l'enfant avec Saint Jean-Baptiste, d'après Raphaël Sanzio, et L'adoration des bergers, d'après José de Ribera, gravures pour Le Musée français de Robillard-Peronville et Pierre Laurent, quatre volumes, Pierre Didot l'Aîné, 1803-1809.
« C'est par la délicatesse du burin, par la grâce et la variété des tailles, et surtout par la pureté des teintes que se distinguent les estampes de M. Ingouf. L'Adoration des bergers offre de plus un mérite très rare dans les gravures modernes, cette vivacité d'effet qui naît de la vigueur des ombres et de l'éclat des lumières ménagées avec art et mises en harmonie... L'esprit et le brillant de la pointe ont été respectés par le burin, dont le fini refroidit, détruit même presque toujours cette partie si précieuse du travail du graveur, et qu'on peut considérer comme la pierre de touche de son talent. François Robert Ingouf, né à Paris, y est mort le 17 juin dernier. Il avait 64 ans. » - Journal de Paris politique, commercial et littéraire, n°244, lundi 31 août 1812
« En général, les estampes d'Ingouf sont d'un bon ton de couleur et annoncent beaucoup d'entente du clair-obscur. La variété qu'il a su répandre dans ses travaux rend avec un naturel parfait chaque objet, et supplée, autant que possible, l'absence du coloris. Il a su, avec la seule combinaison du noir et du blanc, unique ressource de la gravure pour rendre la nature avec fidélité, donner une juste idée de l'harmonie et de la couleur des tableaux qu'il a traduits, talent d'autant plus rare qu'il arrive souvent que le graveur qui croit le saisir tombe dans la manière et l'exagération. » - Antoine-Vincent Arnault[40]
« Ses ouvrages se font remarquer en général par un bel effet et une variété de teintes tonnantes. » - Philippe Le Bas[41]
« Il avait un burin très fin, comme en témoignent les estampes gravées pour le Monument du costume... Ingouf le Jeune semble du reste avoir été fort apprécié de son temps. Sur l'épreuve d'une figure gravée par lui pour le Théâtre de Crébillon, Marillier a écrit : "Je suis très content de la planche de M. Ingouf. Je lui en ferai mon compliment lorsque je serai à Paris... J'en suis si content que je désirerais fort que M. Ingouf voulût se charger d'un autre dessin de la même suite dont le sujet est bien intéressant. Il m'obligerait sensiblement. » - Baron Roger Portalis et Henri Béraldi[42]
XXIe siècle
« La distorsion dans la représentation de l'Amérique est très révélatrice des idées qui animent la France de la fin du XVIIIe et du début du XIXe siècle, souligne Peggy Davis[43], professeur au département d'histoire de l'art de l'UQAM (Université du Québec à Montréal). "L'Amérique est porteuse des valeurs de liberté et d'exotisme. Elle répond à une aspiration profonde et à un idéal. On regarde du côté du Nouveau Monde en souhaitant y trouver un modèle pour l'Ancien. On y cherche la pureté des mœurs pour contrer la dégénérescence de la société française... Après la Révolution française, par exemple, on remarque une forte tendance à s'émouvoir devant les rites funèbres des Amérindiens et à citer en exemple la noblesse et la sensibilité de ce peuple simple et vertueux". Les Canadiens au tombeau de leur enfant devint dans les années 1790 un symbole universel d'amour parental et de respect envers les morts. Cette scène touchante montre un couple d'Indiens du Canada éplorés. À côté de son époux mélancolique appuyé au tombeau, la mère pleure en arrosant de son lait l'herbe qui recouvre la tombe de son enfant mort. Notons que la pratique de l'allaitement funèbre, décrite par les ethnographes de l'époque, s'explique par une croyance répandue dans les tribus amérindiennes selon laquelle les morts ont les mêmes besoins que les vivants ; le nourrisson étant incapable de subvenir à ses propres besoins, sa mère doit l'allaiter, explique l'historienne. Dans le contexte où la mère européenne confie son enfant à une nourrice mercenaire, les mœurs des Sauvages, qui ont donné lieu à une abondante iconographie, sont porteuses de leçon morale. » - Michèle Leroux[44]
« Un Canadien et sa femme pleurant sur le tombeau de leur enfant, reproduit en gravure par François Robert Ingouf, porte sur la pratique de l'allaitement funèbre décrite par l'abbé Raynal dans l'histoire philosophique et politique des établissements et du commerce des Européens dans les deux Indes (1770) et le missionnaire jésuite Joseph François Lafitau dans les Mœurs des Sauvages américains, comparées aux mœurs des premiers temps, publiées en 1724. La mère continue de nourrir son enfant mort en versant son lait sur le feu ou la tombe de ce dernier. À travers cette œuvre se manifeste la connaissance d'une coutume funéraire amérindienne faisant office de plaidoyer en faveur de l'allaitement maternel et de ses bienfaits. Elle sert de modèle, en conformité avec les conceptions de l'époque sur l'éducation des enfants, développées dans les essais de Madame d'Epinay et répandues après la publication de l'Emile ou De l'éducation (1762) de Jean-Jacques Rousseau. L'œuvre gravée par Ingouf condense un savoir pré-anthropologique et rend hommage à la dévotion des parents amérindiens envers leur enfant. » - Agathe Cabau[45]
Musées et collections publiques
France
Musée d'Aquitaine, Bordeaux, Un Canadien et sa femme pleurant sur la tombe de leur enfant, d'après Jean-Jacques Le Barbier.
Musée du Louvre, Paris, La création d'Eve, lavis de sépia[25], Le négociant ambulant, d'après Sigmund Freudenberger[48], La paix du ménage, d'après Jean-Baptiste Greuze[19].
Musée de Vendôme, Portrait de Jean-François Sarrasin, d'après Robert Nanteuil[25].
Bibliothèque municipale de Versailles, La mort de Claude Anet, d'après Jacques Barbier (pour la collection complète des œuvres de Jean-Jacques Rousseau), 1782.
Château de Versailles, Nicolas Boileau-Despreaux, d'après Hyacinthe Rigaud[38] ; Pierre Corneille, d'après Charles Le Brun[27] ; Gérard Dou jouant du violon à sa croisée d'après Gérard Dou[17] ; Mathieu de Montreuil, d'après François Robert Ingouf lui-même[24] ; Philippe Néricault Destouches, d'après Pierre-François Berruer ; François Petit, d'après Pierre de Lorme[30] ; Jean Racine, d'après Jean-Baptiste Santerre[49] ; J.N. Regnault, d'après Madeleine Loir[29] ; Pierre-Guillaume Simon, d'après Claude Pougin de Saint-Aubin, 1786[32].
Musée du Prado, Madrid, Saint Barthélemy, d'après José de Ribera.
Université Complutense de Madrid, Synopsis universae praxeos medicae de Joseph Lieutaud, gravures de Pierre Robert Ingouf d'après Eustache Le Sueur, 1772.
British Museum, Londres, Atrée et Thyeste, d'après Clément-Pierre Marillier (pour les œuvres complètes de Crébillon), 1785 ; vingt-huit autres gravures[51].
San Francisco De Young Museum, Portrait de Paul Charles Lorry, d'après Noël Hallé[22] ; Portrait de Claude Emmanuel Luillier, dit Chapelle, d'après Charles Le Brun[28].
↑ Antoine Vincent Arnault, Biographie nouvelle des contemporains, ou dictionnaire historique et raisonné de tous les hommes qui, depuis la Révolution française, ont acquis de la célébrité, La librairie historique et des arts et métiers d'Émile Babeuf, 1823, tome neuvième, pages 320-321.
↑ Philippe Le Bas, France. Dictionnaire encyclopédique, tome 9, Firmin Didot Frères, Paris, 1843.
↑ Baron Roger Portalis et Henri Béraldi, Les graveurs du XVIIIe siècle Damascène Morgand et Charles Fatout, 1881.
↑ Peggy Davis, Perception et invention du Nouveau Monde - l'américanisme étudié à travers les estampes françaises (1750-1850), Université Laval, Québec, 2003.
↑ Michèle Leroux, « Représentation du Nouveau Monde en France des Lumières - Une Amérique mythique et fictive », revue L'UQAM, Université qu Québec à Montréal, 24 janvier 2005.
↑ Agathe Cabau, Du mythe de l'homme de chair : réflexions sur un corpus - Géographies artistiques : les identités culturelles, Séminaire doctoral commun d'histoire de l'art et d'archéologie, Universités Paris 1 et Paris 4, 2010-2011, quatrième séance, 17 février 2011.
Pierre-François Basan, Dictionnaire des graveurs anciens et modernes, depuis l'origine de la gravure - Nouvelle édition augmentée d'un volume supplémentaire et d'une table alphabétique des maîtres, Jos Ermens, Bruxelles, 1791.
Michael Huber et Carl Christian Heinrich Rost, Manuel des curieux et des amateurs de l'art contenant une notice abrégée des principaux graveurs et un catalogue raisonné de leurs meilleurs ouvrages, depuis le commencement de la gravure, jusqu'à nos jours, tome 8, chez Orell, Fusli et Compagnie, 1804.
Antoine-Vincent Arnault, Biographie nouvelle des contemporains, ou dictionnaire historique et raisonné de tous les hommes qui, depuis la Révolution française, ont acquis de la célébrité par leurs actions, leurs écrits, leurs erreurs ou leurs crimes, soit en France, soit dans les pays étrangers, tome neuvième, La librairie historique et des arts et métiers d'Émile Babeuf, Paris, 1823.
Charles Gabet, Dictionnaire des artistes de l'Ecole française au XIXe siècle, chez Madame Vergne, libraire à Paris, 1834.
Margaret Denton Smith, « Le Barbier's Un Canadien et sa femme pleurant sur le tombeau de leur enfant : an emblem of respect for the dead in the aftermath of the French Revolution », Notes in the History of Art, vol. 9, n°3, The University of Chicago Press, printemps 1990.
Amy Freund, Portraiture and politics in revolutionary France, The Pennsylvania University Press, 1993.
Emmanuel Bénézit, Dictionnaire des peintres, sculpteurs, dessinateurs et graveurs, Gründ, 1999.
Peggy Davis, Perception et invention du Nouveau Monde - L'américanisme étudié à travers les estampes françaises (1750-1850), thèse de doctorat en histoire de l'art, Université Laval, Québec, 2003.
Pierre Sanchez, Dictionnaire des artistes exposant dans les salons des XVII et XVIIIe siècles, L'Echelle de Jacob, Dijon, 2004.
Neil Jeffares, Dictionary of pastellists before 1800, Unicorn Press, 2006 (lire en ligne).