Les élections législatives dans le Bouches-du-Rhône sont marquées par une défaite cinglante pour le camp présidentiel, qui perd ses six députés sortants. Le Rassemblement national double presque son nombre d'élus, tandis que Nouveau Front populaire améliore légèrement sa performance et gagne un siège à Marseille et à Aix-en-Provence.
Est élu au premier tour le candidat qui réunit la majorité absolue des suffrages exprimés et un nombre de voix au moins égal au quart des électeurs inscrits dans la circonscription, soit 25 %. Si aucun des candidats ne satisfait ces conditions, un second tour est organisé entre les candidats ayant réuni un nombre de voix au moins égal à un huitième des inscrits, soit 12,5 %. Les deux candidats arrivés en tête du 1er tour se maintiennent néanmoins par défaut si un seul ou aucun d'entre eux n'a atteint ce seuil. Au second tour, le candidat arrivé en tête est déclaré élu[4],[5].
Le seuil de qualification basé sur un pourcentage du total des inscrits et non des suffrages exprimés rend plus difficile l'accès au second tour lorsque l'abstention est élevée. Le système permet en revanche l'accès au second tour de plus de deux candidats si plusieurs d'entre eux franchissent le seuil de 12,5 % des inscrits. Les candidats en lice au second tour peuvent ainsi être trois, un cas de figure appelé « triangulaire ». Les second tours où s'affrontent quatre candidats, appelés « quadrangulaire » sont également possibles, mais beaucoup plus rares[3],[6].
Partis et nuances
Les résultats des élections sont publiés en France par le ministère de l'Intérieur, qui classe les partis en leur attribuant des nuances politiques. Ces dernières sont décidées par les préfets, qui les attribuent indifféremment de l'étiquette politique déclarée par les candidats, qui peut être celle d'un parti ou une candidature sans étiquette[7].
Tous les autres partis se voient attribuer l'une ou l'autre des nuances suivantes : EXG (extrême gauche), DVG (divers gauche), ECO (écologiste), REG (régionaliste), DVC (divers centre), DVD (divers droite), DSV (droite souverainiste) et EXD (extrême droite). Des partis comme Debout la France ou Lutte ouvrière ne disposent ainsi pas de nuances propres, et leurs résultats nationaux ne sont pas publiés séparément par le ministère, car mélangés avec d'autres partis (respectivement dans les nuances DSV et EXG)[10].
Fief historique de la droite, détenue dix ans durant par Valérie Boyer, la première circonscription des Bouches-du-Rhône correspond à l'est de la ville de Marseille (10e, 11e et 12e arrondissement). Sabrina Agresti-Roubache est élue en 2022 avec 50,8 % des voix face à Monique Griseti (Rassemblement national). Cette dernière est cette fois élue nettement au second tour face à la gauche, malgré le retrait du camp présidentiel, arrivé en troisième position[18].
Fief historique de la droite, représentée par la députée sortante RenaissanceClaire Pitollat depuis 2017, la deuxième circonscription des Bouches-du-Rhône correspond au sud-ouest de la ville de Marseille (7e et 8e arrondissement). Elle est remportée par la gauche pour la première fois depuis les législatives de 1973, du fait de la consigne de vote de la députée sortante de « faire barrage » au Rassemblement national et, selon le nouveau député socialisteLaurent Lhardit, du fait d'un changement de sociologie du 7e arrondissement : « de nouveaux arrivants, plutôt jeunes, votant plus à gauche et sensibles à l’écologie »[21].
Au sein de la troisième circonscription, qui correspond à la partie nord-ouest de Marseille (12e, 13e et 14e arrondissement), la députée sortante du Rassemblement nationalGisèle Lelouis a été élue avec presque 55 % des voix en 2022, en battant la candidate de la majorité présidentielle, qui l'avait elle-même emporté de peu face au candidat de l'extrême-droite Stéphane Ravier en 2017. La députée sortante est réélue de justesse au second tour face au candidat de gauche Amine Kessaci[23].
Dans cette circonscription centrale de Marseille acquise à la gauche depuis des décennies, on y trouve des « quartiers hétérogènes majoritairement pauvres et métissés »[29]. Longtemps un bastion communiste, Jean-Luc Mélenchon y avait été parachuté avec succès en 2017 dans ce qui avait été calculé comme une des meilleures circonscriptions de France pour La France insoumise. Manuel Bompard lui succède sans difficulté en 2022 avec 74 % des voix au second tour, et réussit cette fois à se faire élire dès le premier tour avec 67 % des voix, une performance inédite dans cette circonscription.
Au sein de cette circonscription du centre de Marseille, le député sortant insoumisHendrik Davi, également membre d'Ensemble puis de la Gauche écosocialiste, n'est pas reconduit par la France insoumise, qui présente Allan Popelard contre lui[34]. Le dissident arrive très légèrement en tête face à son rival, qui se désiste en sa faveur, et bat nettement le Rassemblement national au second tour, avec près de 66 % des voix.
La septième circonscription comprend la partie nord-ouest de Marseille, notamment les cités Castellane ou Kalliste-Granière-Solidarité, et représente un bastion historique pour la gauche, à l'exception du scrutin de 1993 remporté par le Rassemblement pour la république. Le Front national y a également souvent obtenu des scores solides, dépassant régulièrement les 40 % de voix au second tour depuis 1986. Le député insoumis sortant, Sébastien Delogu, est réélu dès le premier tour, une situation inédite dans cette circonscription.
Au sein de la huitième circonscription, centrée autour de la ville de Salon-de-Provence, le député sortant du camp présidentiel Jean-Marc Zulesi, en poste depuis 2017, est battu par le Rassemblement national. Avec plus de 62 % des voix, le candidat d'extrême-droite réalise ses meilleurs scores à Rognac, tandis que le député sortant reste en tête à Salon-de-Provence avec 53,6 % des suffrages exprimés[45],[46].
La neuvième circonscription, située immédiatement à l'est de Marseille, est centrée autour des villes de d'Aubagne et de La Ciotat. Ancien bastion communiste, elle est détenue par la droite depuis 2002 et conquise par la députée sortante Joëlle Mélin du Rassemblement national en 2022. Elle est réélue deux années plus tard avec un score équivalent.
La dixième circonscription, essentiellement composée de petites villes dont les plus importantes sont Allauch et Gardanne, est remportée en 2022 par le candidat du Rassemblement nationalJosé Gonzalez avec presque 60 % des voix. Il est nettement réélu au second tour, bien qu'avec un score inférieur. Il remporte 61 % des voix à Allauch[51], 52 % à Gardanne[52], tandis que la candidate du camp présidentiel est en tête à Bouc-Bel-Air avec 56 % des voix[53].
Dans cette circonscription acquise depuis toujours à la droite, le député du Mouvement démocrate, Mohamed Laqhila est élu en 2017 pour la majorité présidentielle. La circonscription comprend les villes de Septèmes-les-Vallons, Les Pennes-Mirabeau, Cabriès et Éguilles, mais plus de la moitié de sa population correspond à la majeure partie de la ville d'Aix-en-Provence, à l'exception de son centre-ville et des quartiers Pinchinats et Puyricard. À l’issue du premier tour, le député sortant arrive en troisième position et demande à son rival de gauche de se désister, s'affirmant en meilleure position pour battre l'extrême droite. Marc Pena, qui avec 800 voix d'avance argue de sa deuxième position, refuse et le député s'incline finalement[58]. Au second tour, il l'emporte de justesse, plaçant la circonscription à gauche pour la première fois depuis le redécoupage de 1988. Il obtient 58 % des voix à Aix-en-Provence[59], est également légèrement en tête à Éguilles[60], mais est largement distancé par l'extrême-droite dans les trois autres communes, surtout aux Pennes-Mirabeau où le Rassemblement national obtient 68 % des voix[61].
La douzième circonscription, centrée autour des villes de Vitrolles et Marignane, est une place forte du Front national, où Bruno Mégret avait manqué de peu d'être élu député en 1993. En 2022 Franck Allisio est élu au second tour avec 51,4 % des voix, et réussit cette fois l'exploit d'être élu dès le premier tour avec 54 % des suffrages exprimés. Il réalise ses meilleurs scores à Saint-Victoret avec 66,7 % des voix[63].
La treizième circonscription est centrée autour des villes de Martigues, Port-de-Bouc, Fos-sur-Mer et la plus grande partie d'Istres. Fortement ouvrière et historiquement communiste depuis 1993, la circonscription bascule progressivement vers l'extrême-droite (22 % en 2012, 24 % en 2017 et 31 % en 2022). Lors des législatives de 2022, le député sortant Pierre Dharréville est réélu d'une courte tête, et perd cette fois ci avec une marge équivalente. Si le résultat est très serré à Martigues, Emmanuel Fouquart remporte 54 % des voix à Istres[66] et 63 % à Fos-sur-Mer[67].
La quatorzième circonscription correspond à la partie d'Aix-en-Provence non incluse au sein de la onzième circonscription, soit son centre-ville et les quartiers Pinchinats et Puyricard, en plus de zones rurales du nord-est du département. À l'exception du scrutin de 2012 où la gauche l'avait emporté, la circonscription a toujours été à droite depuis 1988, avant la victoire d'Anne-Laurence Petel en 2017 en soutien à Emmanuel Macron. À l'issue du premier tour, le proche d'Eric Ciotti soutenu par le Rassemblement nationalGérault Verny devance légèrement le candidat de l'union de la gauche. Arrivée en troisième position, Petel refuse de se désister, renvoyant dos à dos les « extrêmes ». Elle perd néanmoins plus de mille voix lors du second tour, et Gérault Verny est élu avec près de 800 voix d'avance sur son rival de gauche[71]. Il est toutefois largement distancé à Aix-en-Provence, avec 29,3 % des voix contre 42 % pour le candidat du Parti socialiste[59].
Deuxième plus vaste circonscription des Bouches-du-Rhône, essentiellement rurale et centrée autour Châteaurenard, elle est dominée la droite depuis sa création en 1988, avant d'être remportée en 2022 par le candidat du Rassemblement nationalRomain Baubry, avec 54 % des voix. Deux ans plus tard, il améliore considérablement son score, manquant de peu de l'emporter dès le premier tour.
Plus vaste du département, la seizième circonscription comprend notamment les villes d'Arles et Miramas. En 2017, Monica Michel, la candidate soutenue par le président nouvellement élu Emmanuel Macron l'emporte de peu face au candidat du Front national. Cinq ans plus tard, Emmanuel Taché de la Pagerie remporte la circonscription avec 55 % des suffrages. En 2024, il est réélu avec un score similaire tandis que le candidat du Parti communiste arrive légèrement en tête à Arles[74].
↑Candidate rattachée financièrement aux Écologistes, qui n'a pas mené campagne[28]. C'est une candidature présentée hors de l'accord du Nouveau Front populaire, sans doute pour des raisons de parité.