Dans un espace topologique (non nécessairement séparé), les propriétés suivantes sont équivalentes. Un espace qui les vérifie est dit dénombrablement compact[2].
Tout recouvrement dénombrable de l'espace par des ouverts possède un sous-recouvrement fini ;
Tout ensemble dénombrable de fermés d'intersection vide possède un sous-ensemble fini d'intersection vide ;
Toute suite décroissante de fermés non-vides a une intersection non-vide ;
(1) ⟺ (2) est immédiat car les fermés sont, par définition, les complémentaires des ouverts.
(2) ⇒ (3) : Soit une suite décroissante de fermés non-vides . Supposons . Par (2), il existe tel que . Mais puisque est décroissante, , donc , absurde par hypothèse.
(3) ⇒ (2) : Soit une famille dénombrable de fermés d'intersection vide. La suite définie par est une suite décroissante de fermés dont l'intersection est vide, donc par contraposition du (3), l'un des est vide.
(3) ⇒ (4) : Par définition, une valeur d'adhérence de est un élément de , qui est l'intersection d'une suite décroissante de fermés non-vides.
(4) ⇒ (3) : Soit une suite décroissante de fermés non-vides. Choisissons dans chaque un élément . Par le (4), la suite admet une valeur d'adhérence . Alors est un élément de . En effet, soit et supposons . La suite étant décroissante, on a pour tout . Mais l'ensemble est un ouvert qui contient , c'est-à-dire un voisinage de . Par définition d'une valeur d'adhérence, il contient une infinité des , d'où une contradiction.
(4) ⇒ (5) : Toute valeur d'adhérence d'une suite injective est point d'accumulation de son image.
(5) ⇒ (4) : Par contraposée car si une suite n'a pas de valeur d'adhérence alors l'ensemble de ses valeurs est infini (puisque chaque valeur n'est prise qu'un nombre fini de fois) et n'a pas de point d'accumulation.
Lien avec d'autres notions de compacité
Un espace est dit :
quasi-compact si tout recouvrement de l'espace par des ouverts possède un sous-recouvrement fini (compact s'il est quasi-compact et séparé) ;
de Lindelöf si tout recouvrement de X par des ouverts possède un sous-recouvrement dénombrable.
On a donc trivialement, avec la définition (1) ci-dessus :
Un espace est quasi-compact si et seulement s'il est à la fois de Lindelöf et dénombrablement compact.
Quant à la définition (4) ci-dessus, elle ressemble beaucoup à la caractérisation suivante de la quasi-compacité, à une grosse différence près : on remplace les suites par des suites généralisées[5] : un espace est quasi-compact si et seulement si toute suite généralisée a au moins une valeur d'adhérence.
De la préservation par sous-espaces fermés, on déduit une condition suffisante (et évidemment nécessaire si l'espace est séparé)[7],[8] de convergence d'une suite :
Dans un espace dénombrablement compact, si l'ensemble (non vide) des valeurs d'adhérences d'une suite est réduit à un singleton {y}, alors cette suite converge vers y.
Démonstration
Notons Fn l'adhérence de l'ensemble des termes d'indices supérieurs à n de cette suite. Par hypothèse, l'intersection de ces fermés est réduite à {y} donc pour tout ouvert O contenant y, les fermés Fn\O forment une suite décroissante d'intersection vide. L'un d'eux est donc vide, c'est-à-dire que O contient un Fn et a fortiori, tous les termes de la suite d'indices supérieurs à n.
De la préservation par images continues, on déduit une propriété des compacts (qui généralise le théorème des bornes), souvent citée mais ne leur est pas spécifique : tout espace dénombrablement compact X est pseudo-compact(en), c'est-à-dire que toute fonction continue de X dans ℝ est bornée. La réciproque est vraie pour un espace normal. Un espace est compact si et seulement s'il est pseudo-compact et si c'est un espace de Hewitt-Nachbin(en) (ou, ce qui est équivalent : un fermé d'une puissance – éventuellement infinie – de ℝ). Les espaces dénombrablement compacts vérifient même une propriété strictement plus forte que cette pseudo-compacité[6] :
Contrairement à la quasi-compacité (cf. Théorème de Tykhonov), la compacité dénombrable n'est pas préservée par produits, même finis[9] (la propriété d'être de Lindelöf non plus). Également, une partie dénombrablement compacte ou de Lindelöf d'un espace séparé n'est pas toujours fermée, alors qu'une partie compacte l'est[6].
Lien avec la compacité séquentielle
Un espace X est dit séquentiellement compact si toute suite dans X possède une sous-suiteconvergente.
Il est donc clair, avec la deuxième des trois définitions équivalentes ci-dessus, que
Il ne reste donc plus qu'à montrer que si X est dénombrablement (« et » séquentiellement) compact, alors il est de Lindelöf (donc quasi-compact), ce qui résulte de l'enchaînement suivant : tout métrique séquentiellement compact est précompact de façon évidente, donc séparable, donc de Lindelöf.
Espaces angéliques
Une partie A d'un espace topologique X est dite relativement dénombrablement compacte si toute suite dans A possède une valeur d'adhérence dans X. (Dans un espace normal, l'adhérence d'une telle partie est dénombrablement compacte, mais dans un espace de Tychonoff pas toujours, comme le montre l'exemple du sous-espace [0, ω1[×[0, ω] de la planche de Tychonoff [0, ω1]×[0, ω].)
Un espace séparé est dit angélique[15]si, pour toute partie A relativement dénombrablement compacte, l'adhérence de A est compacte et réduite à la fermeture séquentielle de A.
dans tout espace angélique, les parties dénombrablement compactes, séquentiellement compactes et compactes sont les mêmes, et de même pour les trois notions relatives ;
tout sous-espace d'un angélique est angélique ;
sur un espace angélique, toute topologie régulière plus fine est encore angélique ;
l'espace des fonctions continues d'un espace compact dans un espace métrisable, muni de la topologie de la convergence simple, est angélique.
En particulier, les compacts d'Eberlein(en)[17], c'est-à-dire les parties faiblement compactes d'un espace de Banach, sont angéliques. Plus généralement, tout compact de Corson[18] est angélique.
La notion de g-espace permet par ailleurs de formuler deux caractérisations des espaces angéliques[15] :
Un espace séparé est un g-espace si toutes ses parties relativement dénombrablement compactes sont relativement compactes.
Un espace séparé est angélique si et seulement si c'est un g-espace dont tous les compacts sont de Fréchet-Urysohn.
Les espaces angéliques sont exactement les g-espaces « héréditaires » (c'est-à-dire dont tout sous-espace est encore un g-espace).
Contre-exemples dans le cas général
En général, on a seulement « quasi-compact ⇒ dénombrablement compact » et « séquentiellement compact ⇒ dénombrablement compact ».
Les deux espaces séparés suivants fournissent des contre-exemples aux quatre autres implications entre ces trois notions :
inversement, le produit d'une infinité non dénombrable de copies du segment [0, 1] est compact mais non séquentiellement compact.
Espace faiblement dénombrablement compact
Il existe une variante de la troisième des définitions de la compacité dénombrable, plus faible en général mais équivalente dès que X est T1 : X est faiblement dénombrablement compact (ou « compact par points limites », ou « Fréchet-compact »[19]) si toute partie infinie Y de X admet un point limite, c'est-à-dire un point x de X dont tout voisinage rencontre Y\{x}.
↑(en) Angelo Bella et Peter Nyikos, « Sequential Compactness vs. Countable Compactness », Colloquium Mathematicum, vol. 120, no 2, , p. 165-189 (lire en ligne)
↑Gaal 1964, p. 129, dit alors que l'espace possède la « propriété de Bolzano-Weierstrass ».
↑Gustave Choquet, Cours d'analyse, tome II : Topologie, p. 34-35 et Hervé Queffélec, Topologie, Dunod, , 3e éd., p. 70, démontré seulement dans le cas des espaces compacts et pour une suite, mais avec évocation de la généralisation naturelle pour un filtre, sous cette hypothèse plus forte de quasi-compacité.
↑(en) Anthony Goreham, « Sequential Convergence in Topological Spaces », Topology Atlas Preprint, no 547, (lire en ligne), Prop. 3.2 p. 12, revendique (p. 3) de n'utiliser aucune hypothèse de séparation mais sa preuve semble incomplète sans cette hypothèse. Il dit s'inspirer du théorème 3.10.31 de Engelking 1989 mais selon Bella et Nyikos 2010, p. 2, les « espaces dénombrablement compacts » d'Engelking sont par définition séparés. La version anglophone de l'article « Compacité séquentielle » ne mentionne pas non plus cette hypothèse, donnant comme références le même théorème de Engelking 1989 ainsi que l'exposé de synthèse (en) P. Simon, « Fréchet and Sequential Spaces », dans K. P. Hart, J.-I. Nagata et J. E. Vaughan, Encyclopedia of General Topology, Elsevier, (ISBN978-0-08053086-4, lire en ligne). Ce dernier omet effectivement toute hypothèse de séparation.
↑ ab et c(en) Montserrat Bruguera, Elena Martín-Peinador et Vaja Tarieladze, « Eberlein-Šmulian Theorem for topological Abelian groups », J. London Math. Soc., vol. 70, , p. 341-355 (lire en ligne).
↑ a et b(en) D. H. Fremlin, Measure Theory, vol. 4, Torres Fremlin, , 945 p. (ISBN978-0-9538129-4-3, lire en ligne), chap. 46 (« Pointwise compact sets of measurable functions »), p. 21-22.