Durant l'Occupation, à Poitiers, il aide des familles juives à échapper à la déportation[2],[3],[4],[5]. Gaulliste de la première heure[6],[7], il se déplace à Paris dès décembre 1940 afin de mettre en garde le cardinal Suhard contre les risques que représentait l'inféodation à Vichy[6],[8],[9]. Avec d'autres catholiques de Poitiers (comme Réné Savatier, Louis Cartan, Hélène Durand), ils s'émeuvent du sort réservé aux juifs et tziganes[10]. Ils forment un comité et réclament à l'évêque de Poitiers, Mgr Mesguen, une condamnation publique, qui ne viendra jamais[4].
En , il est élu à la chaire d’histoire moderne de la faculté des lettres de l'Université de Lyon, où il enseignera jusqu’à sa retraite en 1971, refusant, à plusieurs reprises, un poste à la Sorbonne. Il est doyen de la Faculté de 1956 à 1959, puis doyen honoraire.
Pour autant son activité professionnelle ne se limite pas aux murs de sa Faculté :
D' à , il donne une série de cours inauguraux à l'Université Laval de Québec, dont il aide à organiser l'Institut d'Histoire et de Géographie ; il y revient en mission à 3 reprises en 1950, 1957 et 1960, à la demande du Recteur Parent[14].
Contemporain de l'« École des Annales », il garde comme historien une ligne très personnelle, exigeante, qui lui fait critiquer toutes les facilités que se donnent aussi bien les « essayistes en mal d'Histoire » que tel théoricien qui décrit « des modes de vie et non des vivants »[16].
De à , à la demande de son ami Hubert Beuve-Méry, fondateur du journal Le Monde, il tient régulièrement dans ce journal une chronique de critique historique (plus de 230 articles publiés), aussi appréciée des amateurs d'Histoire que redoutée des auteurs d'ouvrages.
En 1956, il fonde la revue Les Cahiers d’histoire, et en 1962 le Centre régional interuniversitaire d'histoire religieuse[17], qui organisa de 1953 à 1980 plusieurs colloques internationaux. En 1974, à la suite de la scission de l'Université de Lyon, le centre est rattaché à l’Université Lumière Lyon 2, associant des chercheurs de six Universités de la région Rhône-Alpes. Ce centre de recherches jouera un rôle important dans la lutte contre le négationnisme, dans les années 1978-1980, lors de la première affaire Faurisson[18]. Il porte depuis 1984 le nom de Centre André Latreille[19].
Durant toute sa carrière, il ajoute à ses activités d'enseignement et de publication une intense activité de conférencier, en France et à l'étranger. La rigueur et la clarté de ses exposés en font un orateur très demandé. Son talent d'orateur et ses qualités de pédagogue ont séduit des générations d'étudiants et d'amateurs d'Histoire[20].
Profondément catholique, membre actif dès sa jeunesse de la Chronique Sociale, et à ce titre très engagé dans la société, il fut une des figures du Centre catholique des intellectuels français (CCIF)[21], du Cercle Tocqueville[22], de la Paroisse Universitaire[9] (association des chrétiens de l'Enseignement public).
Convaincu que « la laïcité de la société n'est que l'expression juridique de la liberté de l'acte de foi »[23],[24],[25],[26] , il défendit toute sa vie la participation des chrétiens à l'enseignement public, et ses analyses faisaient référence dans les débats relatifs à l'école libre (Loi Barangé, Loi Debré), ce qui lui valut des ennemis dans les deux camps.
En mars 1957, il fait partie des 357 personnalités chrétiennes qui signent une lettre ouverte au président de la République pour dénoncer les méthodes de « pacification » employées par la police et l'armée en Algérie[27],[28].
Il a épousé le Suzanne Ruplinger[34], dont il eut dix enfants entre 1925 et 1944 (dont Geneviève, psychologue, et François, mathématicien[35],[36]). Il disparut peu avant de pouvoir fêter leurs noces de diamant.
Publications
Ouvrages
André Latreille, Napoléon et le Saint-Siège, 1801-1808 : L'Ambassade du Cardinal Fesch à Rome (thèse de doctorat ès lettres), Paris, Félix Alcan, , 626 p. (présentation en ligne) — Prix d'Académie de l'Académie Française en 1935
André Latreille, Le Catéchisme impérial de 1806 : Etudes et documents pour servir à l'histoire des rapports de Napoléon et du clergé concordataire (thèse complémentaire), Paris, Les Belles Lettres, (présentation en ligne, lire en ligne).
André Latreille, Comment l'Allemagne a déchaîné la guerre, Lyon, Chronique sociale de France, coll. « la Veilleuse », .
André Latreille, Comment s'est formée la France, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Bibliothèque du Peuple », , 64 p..
André Latreille, L'Explication des textes historiques : méthode d'explication et choix de textes, Paris, Hachette, , 274 p..
L'Église catholique et la Révolution française :
André Latreille, L'Église catholique et la Révolution française, t. I : Le pontificat de Pie VI et la crise française (1775-1799), Paris, Hachette, (réimpr. 1970,2019) (ISBN978-2-204-13581-8, SUDOC240833325) — Grand prix Gobert d'Histoire de l'Académie Française en 1947
André Latreille, L'Église catholique et la Révolution française, t. II : L'ère napoléonienne et la crise européenne 1800-1815, Paris, Hachette, (réimpr. 1970, 2019) (ISBN978-2-204-13581-8, SUDOC240833325) — Grand prix Gobert d'Histoire de l'Académie Française en 1947
André Latreille, E. Delaruelle et Jean-Rémy Palanque, Histoire du catholicisme en France, vol. I : Des origines à la chrétienté médiévale, Paris, Spes, (réimpr. 1964)
André Latreille, E. Delaruelle et Jean-Rémy Palanque, Histoire du catholicisme en France, vol. II : Sous les rois très chrétiens, Paris, Spes, (réimpr. 1964).
André Latreille, E. Delaruelle, Jean-Rémy Palanque et René Rémond, Histoire du catholicisme en France, vol. III : La période contemporaine, Paris, Spes, (réimpr. 1964)
André Latreille, La Seconde Guerre mondiale : 1939-1945 : essai d'analyse, Paris, Hachette, , 364 p. (lire en ligne)
André Latreille, L'Ère napoléonienne, Paris, Armand Colin, coll. « Collection U. Série Histoire contemporaine », , 383 p. (SUDOC000046000)
André Latreille, André-Marie Ampère : l'homme, la pensée, l'influence, Poleymieux-au-Mont-d'Or, Société des amis d'André-Marie Ampère, coll. « extrait des Cahiers d'histoire », , 21 p.
Plusieurs de ces ouvrages ont été traduits, en espagnol, en portugais ou encore en japonais.
Ouvrages collectifs
Édouard Perroy, Roger Doucet et André Latreille, Histoire de la France pour tous les Français, Hachette, .
Arthur Kleinclausz (dir.), Déniau, Roger Doucet, Dubois, Dutacq, Camille Germain de Montauzan, Pouzet et André Latreille (3 volumes), Histoire de Lyon, Masson, 1939-1952 (réimpr. Laffitte, Marseille, 1978).
Centre de sciences politiques de l'institut d'études juridiques de Nice, la Laïcité, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « bibliothèque des centres d'études supérieures spécialisées », , 586 p. (lire en ligne), « l'Église catholique et la laïcité ».
André Latreille et Joseph E. Cunneen, The catholic church and the secular state : the church and the secularization of modern societies, University of North Carolina Press, (lire en ligne).
Catholicisme et Liberté : correspondance inédite de Charles de Montalembert 1852-1870, Cerf, Paris, 1970, avec J.Gadille
André Latreille (dir.) et Richard Gascon, Histoire de Lyon et du Lyonnais, Toulouse, Privat, coll. « Univers de la France et des pays francophones », (réimpr. 1988), 511 p. (ISBN2-7089-4751-6).
Articles d'encyclopédies :
L'encyclopédie française Larousse
The New Catholic Encyclopedia, the Catholic University of America, Washington.
Léon Foillard (préf. André Latreille, ill. Luc Barbier), Le vin de nos vignes : Souvenirs et pages d'autrefois, Villefranche-en-Beaujolais, Éditions du Cuvier, , 131 p.
Contributions récurrentes
Collaboration régulière à diverses revues, notamment Esprit[37], la Vie intellectuelle, Les Cahiers d'histoire.
Nombreux articles d'actualité dans Le Monde (1945-1972) et La Croix (1969-1984)[38].
interventions à l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon[39]
Maryannick Lavigne-Louis et Dominique Saint-Pierre (dir.), « André Latreille », dans Dictionnaire historique des Académiciens de Lyon : 1700-2016, Lyon, éd. ASBLA de Lyon, (ISBN978-2-9559-4330-4, présentation en ligne), p. 764-766..
André Fugier, « Latreille (André), Le catéchisme impérial de 1806. Etudes et documents pour servir à l'histoire des rapports de Napoléon et du clergé concordataire, 1935 », Revue d’Histoire Moderne & Contemporaine, vol. 13, no 31, , p. 83–85 (lire en ligne, consulté le )
↑Isabelle SOULARD, Les FEMMES du POITOU sous L’OCCUPATION (lire en ligne), p. 106
« A vélo, elle parcourt la ville de Poitiers, aidée par le professeur Latreille. Tous deux téléphonent à tous les Juifs réfugiés un peu partout, il y en avait vers Colombiers notamment, et leur disent : "Partez sinon vous risquez votre vie". »
↑Isabelle Soulard, Les femmes de l'Ouest sous l'Occupation, Geste Editions, , 283 p. (ISBN978-2-84561-063-7), p. 185.
« Habitant le même immeuble que le professeur André Latreille qui enseigne l'histoire à la faculté des lettres, elle lui confie ses préoccupations. Il décide de former un comité avec d'autres enseignants catholiques... »
↑Hellen Kaufmann, Thierry Marchal et Bernard Lhoumeau, « Hélène-Durand », sur www.ajpn.org (consulté le ) : « Dès les premières mesures anti-juives et notamment le port de l'étoile, elle décide avec le professeur d'histoire, André Latreille, de former un comité composé d'enseignants catholiques. »
↑ a et bJ.-M. MAYEUR, « UN LIVRE D'ANDRÉ LATREILLE L'Église de France à la libération », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
↑Christian Amalvi, Dictionnaire biographique des historiens français et francophones: de Grégoire de Tours à Georges Duby, la Boutique de l'histoire, (ISBN978-2-910828-32-5)
↑ a et bÀ ce sujet, voir son ouvrage De Gaulle, la Libération et l’Église catholique, Paris, les Éd. du Cerf / CNRS éd., , 219 p. (ISBN978-2-271-07245-0)
↑cité par J.M.Mayeur dans sa notice pour l'Encyclopedia Universalis
↑« Un entretien avec le cardinal Decourtray " On ne peut pas être chrétien et antisémite " nous déclare l'archevêque de Lyon », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
↑« Fidélité à l'héritage », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
↑Louis Massignon et ses contemporains, Karthala, coll. « Collection "Hommes et sociétés" », (ISBN978-2-86537-736-7)
↑Renée Bédarida, « La gauche chrétienne et la guerre d'Algérie », Bulletins de l'Institut d'Histoire du Temps Présent, vol. 9, no 1, , p. 89–104 (DOI10.3406/ihtp.1988.2049, lire en ligne, consulté le )
↑Académie des sciences, belles-lettres et arts, L'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon : 1700-2000 trois siècles d'histoire lyonnaise, Lyon, Éd. lyonnaises d'art et d'histoire, (ISBN2-84147-097-0, BNF37114557, lire en ligne), p372.
↑Mémoires de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon, Lyon, C. Palud (Lyon), (lire en ligne), p. 7
↑ a et bReligion et Politique ; Les deux guerres mondiales ; Histoire de Lyon et du Sud-Est : Mélanges offerts à M. le Doyen André Latreille (préf. Marcel Pacaut, Jacques Gadille, Jean-Marie Mayeur, Hubert Beuve-Méry), Lyon, Audin, coll. « Collection du Centre d'Histoire du Catholicisme », (BNF35315703), p. 6.
↑Bernard Giroux, « Les dirigeants nationaux de la JEC et de la JECF (1929-1975) », dans La Jeunesse étudiante chrétienne 1929-2009, LARHRA, coll. « Chrétiens et Sociétés. Documents et Mémoires », , 99–248 p. (ISBN979-10-365-4327-2, lire en ligne)
↑listes de ses interventions dans : Christiane de Clavières et Edmond Reboul (préf. Jean Pouilloux), Index des mémoires de l'Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon : répertoire des auteurs et des thèmes, Académie des sciences, belles-lettres et arts de Lyon, (ISBN2-86971-175-1, BNF36189457, lire en ligne), page 56.