L'historien Christopher Tyerman signale que, dès sa publication, l'Histoire des croisades de Grousset essuya des critiques. On reprocha à cet ouvrage d'une part de ne pas analyser le système politique de ce que Grousset considérait comme un État français du Levant et d'autre part d'exagérer ou de dépeindre sous un faux jour la sympathie culturelle entre communautés d'Outremer. Les historiens américains Frederic Duncalf et John Life La Monte furent particulièrement sévères[2].
En 1981, l'historien Hans Eberhard Mayer(en) estimait que l'Histoire des croisades de Grousset fut, parmi les ouvrages généraux sur ce sujet, « celui où le chauvinisme dans l'étude des croisades leva sa tête hideuse pour une dernière fois »[3].
Plus récemment, des successeurs de Grousset ont noté que sa vision des choses était marquée par ses idées sur le rôle colonial de la France. En 2001, Joël Gourdon écrivait :
« René Grousset a produit une œuvre entièrement dédiée à la France colonisatrice. Il voit dans l'aventure coloniale l'admirable synthèse des valeurs les plus sacrées pour lui : le christianisme, la patrie et l'État, même républicain. Il projette au Moyen Âge cet idéal et voit dans les croisades la première expression de cette “mission civilisatrice” qui est celle de la France éternelle[4]. »
En 2007, le médiéviste Pierre Aubé s'exprimait ainsi sur Grousset :
« Cet historien, qui a su s'appuyer sur le meilleur des plus grands orientalistes de son temps, dont l'érudition est d'une rare solidité quand il s'agit d'établir des faits, est très orienté quand il s'agit de les interpréter. Son angle de vision est très marqué par l'utopie colonialiste qui avait cours dans les années 1920-1930 où il a construit son opus magnum[5]. »
Pour Vadime Elisseeff, qui lui a succédé à la direction du musée Cernuschi,
« [René Grousset est] le dernier des grands classiques, ceux pour qui le “sens de l'histoire” tenait plus à la psychologie des êtres qu'aux conditions matérielles de l'existence dont les sciences n'avaient pas encore souligné l'impact physique et moral sur la vie des individus. Ses ouvrages valent par l'intelligence des vues et des faits présentés en style clair et facile à lire[6]. »
Publications
Histoire de l’Asie, 3 tomes, 1921-1922
Histoire de la philosophie orientale. Inde, Chine, Japon, 1923
« Les Nouveaux aspects du problème indien », La Revue universelle. Tome XIV, , Jacques Bainville, directeur.
« Le Celtisme et nos origines historiques », La Revue universelle. Tome XIV, , Jacques Bainville, directeur.
Le Réveil de l’Asie. L’impérialisme britannique et la révolte des peuples, Paris, Plon, 1924
↑Christopher Tyerman, The Debate on the Crusades, 1099-2010, Oxford University Press, 2011, p. 156-157, passage consultable sur Google livres.
↑(en) Hans Eberhard Mayer, « America and the Crusades », Proceedings of the American Philosophical Society, vol. 125, n° 1 (1981), p. 38-45, ce passage p. 41. Cité par l'historien William Purkis dans une notice sur Grousset, en ligne.
↑Joël Gourdon, Le Cygne et l’éléphant : Renaud de Châtillon, prince d’Antioche, seigneur d’Outre-Jourdain, Paris, Le Manuscrit, , 267 p. (ISBN978-2-74811-155-2, lire en ligne), p. 238.
Roland Andréani, « Deux historiens aubaisiens : René Grousset et Émile-G. Léonard », Liame no 9, janvier-, p. 65-74.
Roland Andréani, « René Grousset » dans Christian Amalvi (dir.), Dictionnaire biographique des historiens français et francophones. De Grégoire de Tours à Georges Duby, Paris, La Boutique de l'histoire, 2004, p. 138-139.
« La vie et l'œuvre de René Grousset », France-Asie no 88-89, septembre-.
René Grousset : un « Européen », historien de l'Asie, Gérard Dédéyan, Isabelle Augé et Bernard Schouler, éditions Geuthner, 2015.