Traité de GallipoliLe traité de Gallipoli est un accord conclu au début de l'année 1403 entre Suleyman Bey, dirigeant des régions européennes de l'Empire ottoman et les principales puissances chrétiennes des Balkans : l'Empire byzantin, la république de Venise, la république de Gênes, l'ordre de Saint-Jean de Jérusalem et le duché de Naxos. Il fait suite à la bataille d'Ankara qui plonge l'Empire ottoman dans la guerre civile, partagé entre plusieurs prétendants au trône. Suleyman tente alors de renforcer ses positions face à ses frères et adversaires. Le traité fait d'importantes concessions aux royaumes chrétiens, en particulier aux Byzantins, qui récupèrent plusieurs territoires perdus et deviennent même les suzerains nominaux des Ottomans. Si Mehmed Ier, vainqueur de Suleyman, accepte les conditions du traité, celui-ci est rejeté après sa mort en 1421. ContexteLe , le sultan Bayezid Ier est lourdement vaincu et capturé par Tamerlan après la bataille d'Ankara. Pour l'Empire ottoman, le choc est significatif. La partie asiatique de l'empire ottoman est divisée par Tamerlan, qui rend leur indépendance à de nombreux beylicats incorporés par les Ottomans. Il ne s'intéresse pas aux régions européennes sous contrôle ottoman mais la défaite met un coup d'arrêt à la progression turque, à l'image de l'interruption du siège de Constantinople. Les puissances chrétiennes tentent de profiter de la situation pour affermir leurs positions mais sont trop faibles pour réellement combattre les Turcs. Suleyman Bey, le fils aîné de Bayezid, échappe à la défaite avant de rejoindre Gallipoli le . Ses autres frères, alors en Anatolie, traitent avec Tamerlan, espérant pouvoir conserver le plus de territoires possibles. Suleyman en profite pour s'emparer des territoires européens de l'Empire, la Roumélie. Toutefois, sa légitimité demeure fragile et il cherche à s'assurer du soutien des autorités chrétiennes de la région, au travers d'une trêve. Il espère ensuite pouvoir combattre ses frères en Asie. Le , la république de Venise entame des pourparlers, espérant prendre Gallipoli. Les Vénitiens entrent aussi en contact avec Manuel II Paléologue, alors en voyage en Europe pour chercher de l'aide. Ils l'incitent à rentrer à Constantinople car son neveu et régent, Jean VII Paléologue, est vu comme trop favorable à la république de Gênes. Les négociations commencent assez vite après la bataille d'Ankara. Suleyman envoie des ambassadeurs à Venise et auprès de Manuel, leur offrant d'importantes concessions. Toutefois, Manuel ne peut revenir à Constantinople qu'au début de l'été 1403 et un accord est trouvé dans l'intervalle, après trois mois et demi de négociations. Les Vénitiens tentent de profiter de la situation pour déstabiliser leur rival florentin, Antonio Ier Acciaiuoli, qui vient de prendre Athènes. Ils vont ainsi jusqu'à envoyer leur meilleur diplomate, le seigneur d'Andros, Pietro Zeno, aux côtés de Marco Grimani. De leurs côtés, les Génois envoient Jean de Chateaumorand comme représentant de leurs possessions en Orient. Dispositions du traitéIl est fort probable que le traité soit signé en janvier ou au début de car des copistes de Pera sont payés le pour avoir écrit son contenu. Seule une copie en a survécu sous la forme d'une médiocre traduction vénitienne de l'original rédigé en turc. Pietro Zeno a aussi laissé un compte-rendu des négociations avec les Ottomans. Le sultan Suleyman conclut la paix avec le grand empereur des Grec (Jean VII Paléologue), son « père », ainsi que les Hospitaliers de Rhodes, Venise, Gênes, l'île de Chios et le duché de Naxos, ainsi qu'avec toutes les terres et îles génoises ou vénitiennes en mer Égée et en mer Noire.
ConséquencesLe traité signé par Suleyman est mal accepté par les Ottomans mais, ratifié à nouveau au retour de Manuel II, il donne à Suleyman des moyens dans la guerre civile qui s'annonce entre les prétendants ottomans. Finalement, ses frères sont aussi contraints d'accepter les concessions pour éviter toute guerre avec les puissances chrétiennes. Ainsi, en 1411, Suleyman est renversé mais Mehmed Ier garantit son application. En revanche, l'opposition de certains chefs frontaliers ottomans, notamment Evrenos Beg, explique que Gallipoli reste aux mains des Ottomans. Pour ces derniers, il s'agit d'éviter de connaître à nouveau la perte de cette position stratégique, à l'image de sa prise éphémère par la croisade savoyarde de 1366 qui a temporairement coupé les relations entre les deux parties de l'Empire. L'historien Nevra Necipoğlu souligne la référence à l'empereur byzantin comme le père de Suleyman. Il s'agit là d'un spectaculaire renversement de situation puisque avant la bataille d'Ankara, les Byzantins sont réduits à l'état de vassaux de Bayezid et au bord de la destruction. Manuel parvient ainsi à rétablir pour quelques décennies la situation byzantine, lui et ses successeurs profitant des luttes intestines des Ottomans pour garantir leur existence, jusqu'à la chute de Constantinople en 1453. Quand Mehmed Ier triomphe de tous ses frères en 1413, il accepte son statut de vassal de l'empereur byzantin, malgré l'évidente disproportion des forces en sa faveur. L'ascension de Mourad II sur le trône change la donne. Elle se fait conjointement avec l'arrivée au pouvoir de Jean VIII Paléologue, fils de Manuel II. Les deux dirigeants s'opposent rapidement et Mourad met le siège devant Constantinople en 1422. Dans le même temps, il impose un blocus à Thessalonique. Dès 1423, les Byzantins doivent céder la ville aux Vénitiens. Finalement, en , un traité byzantino-ottoman rétablit la paix mais les Byzantins ont alors perdu tout ce qu'ils avaient obtenu en 1403, redevenant les vassaux des Ottomans. Bibliographie
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