Les langues coréaniques (en coréen : 한국어, hangug-eo), plus rarement appelées langues puyŏ-han[3],[4], constituent une famille de langues. Elle regroupe plusieurs langues ayant été parlées dans la péninsule de Corée. Les seules langues encore vivantes de cette famille sont le coréen, le jeju et le yukjin[5],[6], parfois considérés comme des dialectes du coréen ; pour cette raison le coréen est parfois considéré comme un isolat[7]. L’appartenance des langues coréaniques à la famille controversée des langues altaïques n’est pas acceptée par la majorité des linguistes[8],[9]. Il s'agit des langues parlées par la civilisation coréenne[10].
Classification interne
Classification traditionnelle
Les langues coréaniques sont traditionnellement classées comme ceci[11],[12],[13] :
La classification interne comme externe des langues coréaniques est très controversée, certaines sont débattues voire controversées, et aucune ne fait l'unanimité. Ces propositions sont présentées de la plus ancienne à la plus récente, à part la proposition de Glottolog et d'Ethnologue, qui est placée après celle d'Andreas Hölzl, en raison des similitudes partagées.
Il est à noter que selon les auteurs, les noms des langues peuvent varier. Notamment, le nom "vieux coréen" est réservé par certains pour désigner la langue du royaume de Silla[14], tandis que d'autres l'utilisent pour désigner les langues ou dialectes parlé(e)s dans les Trois Royaumes de Corée[15],[16]. Les noms peuvent aussi varier selon la romanisation du coréen qui est utilisée. Ainsi, certains chercheurs utilisent la romanisation McCune-Reischauer (Ki-Moon Lee, Alexander Vovin, John Whitman,...), alors que d'autres utilisent la romanisation révisée (Senyokbalgul, Sean Kim,...).
Classification selon Lee et Ramsey (2011)
En se basant sur des textes chinois (en particulier les Chroniques des Trois Royaumes), Ki-Moon Lee sépare les anciennes langues parlées sur la péninsule de Corée en langues puyŏ (au Nord) et hán (au Sud), en tant que branches des langues coréaniques[17]. Cette séparation ne fait pas l'unanimité.
Ainsi, il classe les langues coréaniques comme ceci :
En se basant principalement sur la classification selon Iksop Lee et Robert Ramsey (2000) et Ki-Moon Lee et Robert Ramsey (2011), Senyokbalgul propose une classification, mais celle-ci est critiquée[24]. Les "?" signalent l'incertitude.
Andreas Hölzl utilise le terme "coréanique" pour désigner uniquement les descendants du moyen coréen[25]. Ce terme contraste avec les "langues para-coréaniques", qui désignent les langues apparentées au coréen antérieures au moyen coréen[26].
Sungdai Cho et John Whitman (2019) définissent les coréaniques comme ceci[29] :
Langues coréaniques
Silla
Moyen coréen
Paekche
Koguryŏ (peut-être inclus)
Puyŏ (peut-être inclus)
Classification selon Robbeets (2020)
Martine Robbeets (2020) réserve le terme de "langues coréaniques" pour désigner les descendants du silla. Le terme de "langues macro-coréaniques" correspond à peu près aux langues han et désigne les langues qui, selon elle, sont directement apparentées au coréen (dont elle considère que certains idiomes généralement considérés comme ses dialectes, sont des langues). Elle classe les langues puyŏ au sein d'une famille appelée "japanique" (qui comprend aussi les langues japoniques) semblable à l'hypothèse japono-koguryeoïque de Christopher Beckwith. Robbeets classe les langues japaniques et macro-coréaniques dans le groupe japono-coréanique de la famille transeurasienne (ou langues macro-altaïques)[30],[31],[32]. Ces deux hypothèses sont très controversées, et les linguistes qui soutiennent l'hypothèse transeurasienne sont très minoritaires[33],[34],[35].
Ainsi, elle classe les langues macro-coréaniques comme tel :
Langues macro-coréaniques
Mahan
Mahan paekche
Pyŏnhan
Kaya
Chinhan
Silla
Langues coréaniques
Moyen coréen
Langues coréennes
Langues coréennes septentrionales
Hamgyŏng
P'yŏngan
Langues coréennes centrales
Coréen
Ch'ungch'ŏng
Langues coréennes méridionales
Kyŏngsang
Chŏlla
Cheju
Classifications selon Kim (2020, 2022)
Sean Kim (2020) classe les langues coréaniques comme ceci[36] :
Plus tard, en 2022, il crée une nouvelle classification basée sur celle de Vovin, de Whitman, et Lee et Ramsey[37] :
Langues coréaniques
Langues puyŏ
Puyŏ
Langues macro-koguryŏ
Langues koguryŏ
Koguryŏ
Parhae
Paekche
Okchŏ
Yemaek
Langues han
Silla
Moyen coréen ancien
Moyen coréen tardif
Coréen moderne ancien
Coréen moderne
Cheju
Mahan
Origines et affinités
Histoire
Il est possible que le proto-coréanique hypothétique duquel dériveraient les langues et dialectes coréens modernes se soit développé par créolisation dans une société mixte mêlant les apports des habitants primitifs de la Corée et d'immigrants venus d'Asie centrale.
Par la suite, le "proto-coréanique" se serait séparé en langues han et langues buyeo[17]. Les langues han, parlées au sud de la péninsule, rassembleraient les langues des confédérations de Jinhan (puis, Silla), Byeonhan (puis, Gaya) et Mahan[38] et peut-être la langue d'Usan, non-attestée. Il est possible que ces langues aient cohabité avec les langues japoniques péninsulaires hypothétiques[39]. Au nord de la Corée, les langues buyeo (ou Puyŏ, ou Fuyu) rassembleraient les langues des anciens royaumes coréens de Buyeo, d'Okjeo, de Goguryeo, de Ye, et peut-être de Baejke[40]. Cependant, certains linguistes affirment que les langues buyeo constituent la branche continentales des langues japoniques, mais cette hypothèse est controversée (Voir Hypothèse Buyeo)[41].
Le royaume de Silla, ayant unifié politiquement la péninsule de Corée à la fin de la période des Trois Royaumes de Corée en 676[42], aurait imposé sa langue dans les territoires conquis. Le silla aurait donc évolué en moyen coréen, ancêtre des langues coréennes modernes[43],[44]. En revanche, certains linguistes affirment que le moyen coréen descend du goguryeo[45]. La controverse se poursuit toujours aujourd'hui.
De nombreux travaux ont proposé de rattacher les langues coréaniques ainsi que les langues japoniques aux langues altaïques, qui comprennent classiquement les langues turques, les langues mongoliques et les langues toungouses. Toutefois cette hypothèse est de plus en plus controversée[9]. La validité même du groupe altaïque comme unité génétique (c'est-à-dire comme groupe de langues ayant une origine généalogique commune) est également contestée : il pourrait s'agir d'une aire linguistique de diffusion d'innovations communes[47].
Une autre théorie suggère, tant par l'archéologie que par la génétique (mais contredite par Taylor & Francis en 2008), une parenté avec la langue de Goguryeo[58]. Cette hypothèse dite des langues buyeo, puyŏ ou fuyü[a] ou japono-koguryeoïques rassemble l'ancien japonais, les langues ryūkyū et la langue de Goguryeo, distinguée de celle du royaume de Silla qui a le plus influencé le développement du coréen moderne[59]. Une majorité de linguistes considère cependant que tous les dialectes coréens historiques appartiennent à une famille unique, ce que contredit l'hypothèse Buyeo[60].
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Les études plus récentes faites par Martine Robbeets de l'université de Tokyo consolident la démonstration de la filiation des langues japoniques et coréaniques avec les langues transeurasiennes.
Certains réfutaient auparavant la filiation, d'une part par manque de fiabilité des relations dans le vocabulaire de base — mais celles-ci furent consolidées en 2004[61] — et d'autre part à cause de la plus grande simplicité du japonais — fait qui a reçu une explication en 2008[62].
Comparaison lexicale chinois-coréanique
Ci-dessous, une comparaison entre des nombres chinois et coréaniques[63],[64].
Le tableau ci-dessous présente quelques comparaisons lexicales entre langues altaïques (turques, mongoles et toungouses), coréen et japonais, qui peuvent indiquer une parenté entre ces langues[65]. Les correspondances ne sont pas toujours précises sémantiquement, et se situent parfois au niveau du champ lexical plus que du sens exact. Pour chaque signification, la première ligne donne la forme reconstruite dans la protolangue correspondante, à côté de la forme altaïque commune hypothétique ; la deuxième ligne donne ensuite un exemple tangible dans une langue attestée : le turc de Turquie pour les langues turques, le mongol khalkha pour les langues mongoliques, le mandchou ou l'evenki pour les langues toungouses, et les formes modernes pour le coréen et le japonais.
Comme une grande part de ce tableau repose sur des interprétations (à savoir la reconstruction des protoformes et l'étendue des champs lexicaux), il n'est pas possible, malgré l'abondance des données, d'y voir une preuve directe de parenté génétique de toutes ces langues au sein d'un groupe macro-altaïque. Beaucoup de parallèles peuvent remonter à des contacts anciens et des emprunts lexicaux. Ces données — qu'il serait possible de multiplier — montrent cependant que ni une parenté génétique des trois branches de l'altaïque au sens strict, ni l'appartenance du coréen et peut-être aussi du japonais à ce groupe ne peuvent être exclues sans examen.
↑Versions du même nom coréen, la première selon la romanisation révisée du coréen, la deuxième dans le système McCune-Reischauer plus ancien, la troisième étant une transcription chinoise. C'est une référence à l'ancien peuple Puyŏ.
↑Campbell, Lyle; Mixco, Mauricio (2007). "Korean, A language isolate". A Glossary of Historical Linguistics. University of Utah Press. pp. 7, 90–91. most specialists... no longer believe that the... Altaic groups... are related […] Korean is often said to belong with the Altaic hypothesis, often also with Japanese, though this is not widely supported".
↑(en) Stefan Georg, Peter A. Michalove, Alexis Manaster Ramer et Paul J. Sidwell, Telling general linguists about Altaic, Journal of Linguistics, (DOI10.1017/S0022226798007312.)
↑(en) Lyle Campbell, Glossary of Historical Linguistics, Edinburgh University Press, (ISBN978-0-7486-3019-6), page 7
↑Encyclopedia of World History, Vol II, P371 Silla Dynasty, Edited by Marsha E. Ackermann, Michael J. Schroeder, Janice J. Terry, Jiu-Hwa Lo Upshur, Mark F. Whitters, (ISBN978-0-8160-6386-4)
↑Starostin, Sergei, Altaiskaya problema i proishozhdeniye yaponskogo yazika The Altaic Problem and the Origins of the Japanese Language, 1991, Moscow: Nauka.
↑Mallory, J.P.; Adams, D.Q. (2006). The Oxford Introduction to Proto-Indo-European & the Proto-Indo-European World (Oxford Linguistics). Oxford University Press. p. 84. (ISBN0199296685). Retrieved 2019-07-23.
↑Stratification in the peopling of China: how far does the linguistic evidence match genetics and archaeology? In; Sanchez-Mazas, Blench, Ross, Lin & Pejros eds. Human migrations in continental East Asia and Taiwan: genetic, linguistic and archaeological evidence. 2008. Taylor & Francis
↑Présentation modifiée d'après (en) Sergueï Starostine, 28 mai 2006, une base de données adaptée de (en) Sergueï Starostine, Anna Dybo et Oleg Moudrak, vol. 8, Leyde, Brill, coll. « Handbook of Oriental studies, section 8, Central Asia », 2003, 2 096 p., trois volumes (ISBN90-04-13153-1).
Voir aussi
Bibliographie
(en) Alexander Vovin, From Koguryo to Tamna: Slowly riding to the South with speakers of Proto-Korean, Korean Linguistics, (lire en ligne)
(en) Alexander Vovin, Koguryŏ and Paekche: different languages or dialects of Old Korean?, Journal of Inner and East Asian Studies, (lire en ligne)
(en) Alexander Vovin, Korean as a Paleosiberian Language, France, EHESS/CRLAD, (lire en ligne)
(en) Alexander Vovin, Northeastern and Central Asia: 'Altaic' linguistic history, (ISBN978-1-118-97059-1)
(en) Andreas Hölzl, A typology of questions in Northeast Asia and beyond, Studies in Diversity Linguistics, (lire en ligne)
(en) Ho-Min Sohn, « Middle Korean », dans Lucien Brown et Jaehoon Yeon, The Handbook of Korean Linguistics, John Wiley & Sons, (ISBN978-1-119-01687-8), p. 439–459.
(en) Ho-Min Sohn, The Korean Language, Cambridge, Cambridge University Press, (ISBN978-0-521-36123-1)
(en) Iksop Lee et S. Robert Ramsey, The Korean Language, SUNY Press, (ISBN978-0-7914-4831-1)
(en) Jaehoon Yeon, Korean dialects: a general survey, Routledge, (ISBN978-0-415-46287-7)
(en) James Marshall Unger, The role of contact in the origins of the Japanese and Korean languages, Honolulu, University of Hawaii Press, (ISBN978-0-8248-3279-7)
(en) J. R. P. King, An introduction to Soviet Korean, Language Research, (hdl10371/85771), p. 233–274
(en) John Whitman, « Northeast Asian Linguistic Ecology and the Advent of Rice Agriculture in Korea and Japan », Rice, vol. 4, nos 3–4, , p.149–158 (DOI10.1007/s12284-011-9080-0)
(en) Ki-Moon Lee et S. Robert Ramsey, A History of the Korean Language, coll. « Cambridge University Press », (ISBN978-1-139-49448-9, lire en ligne).
(en) Konstantinos Melas, CIVILIZATIONS OF THE WORLD: The Major Cultural Spheres, Kindle, (lire en ligne)
(en) Lucien Brown, Varieties of contemporary Korean, Wiley, The Handbook of Korean Linguistics, (ISBN978-1-118-35491-9)
(en) Martine Robbeets, Archaeolinguistic evidence for the farming/language dispersal of Koreanic, Oxford University Press, (lire en ligne)
(en) Roy Andrew Miller, Japanese and the Other Altaic Languages, Chicago, IL: University of Chicago Press, (ISBN0-226-52719-0)
(en) Roy Andrew Miller, Languages and History: Japanese, Korean and Altaic, Oslo, Norvège, Institute for Comparative Research in Human Culture, (ISBN974-8299-69-4)