En mathématiques, les coefficients binomiaux, ou coefficients du binôme, définis pour tout entier naturel n et tout entier naturel k inférieur ou égal à n, sont des entiers donnant le nombre de parties (ou sous-ensembles, non ordonnés) à k éléments d'un ensemble à n éléments. On les note[1] — qui se lit « k parmi n » — ou , la lettre C étant l'initiale du mot « combinaison ».
Les coefficients binomiaux sont donnés par :
,
ou, de manière équivalente, mais plus compacte, à l'aide de la fonction factorielle :
Lecture et expressions dans divers langages informatiques
Le coefficient binomial se lit « k parmi n » en français, mais « n choose k » en anglais. Cette inversion de l'ordre de n et k se retrouve dans les langages informatiques ; par exemple, se note :
binom(n,k) ou comb(n,k) dans les modules math ou scipy de Python[2] ;
n \choose k en LaTeX (ou \binom{n}{k} avec amsmath).
Établissement de la formule
Le coefficient binomial est le nombre de parties à k éléments dans un ensemble à n éléments. Par exemple, dans un ensemble à 4 éléments {a,b,c,d}, il y a parties à deux éléments, à savoir : {a,b}, {a,c}, {a,d}, {b,c}, {b,d}, {c,d}. Dans un jeu de cartes à 52 cartes, il y a mains possibles de 5 cartes (l'ordre des cartes dans une main ne compte pas).
On dit aussi que est le nombre de k-combinaisons dans un ensemble à n éléments. Il se détermine en calculant de deux façons différentes le nombre de façon de choisir éléments de cet ensemble dans un ordre donné, autrement dit de k-arrangements dans cet ensemble. Premièrement on a :
.
En effet, on choisit le premier élément parmi les éléments de l'ensemble, le deuxième élément parmi éléments (puisque l'on ne peut pas reprendre le premier élément), le troisième parmi , etc. Deuxièment, on a
.
En effet, on choisit une partie de k éléments, que l'on peut permuter de façons différentes pour obtenir un ordre donné. La confrontation des deux calculs donne l'expression algébrique de , pour k variant de 0 à n[5] :
en particulier, (dans un ensemble à n éléments, il y a exactement une partie à 0 élément : l'ensemble vide) et de même, .
Si k est strictement négatif ou strictement supérieur à n, le coefficient binomial est nul.
Définition récursive des coefficients binomiaux
La formule de Pascal lie les coefficients binomiaux : pour tout couple (n,k) d'entiers naturels[6],
On la démontre par un raisonnement combinatoire[7], mais on peut aussi utiliser la forme factorielle[8].
Elle est à la base de la construction du triangle de Pascal qui permet un calcul rapide des coefficients pour de petites valeurs de n :
0 :
1
1 :
1
1
2 :
1
2
1
3 :
1
3
3
1
4 :
1
4
6
4
1
5 :
1
5
10
10
5
1
6 :
1
6
15
20
15
6
1
7 :
1
7
21
35
35
21
7
1
8 :
1
8
28
56
70
56
28
8
1
Les coefficients pour 0 ≤ k ≤ n figurent à la ligne d'indice n. Le triangle est construit en plaçant des 1 aux extrémités de chaque ligne et en complétant la ligne en reportant la somme des deux nombres adjacents de la ligne supérieure. k se lit de gauche à droite sur la ligne d'indice n en partant de 0 jusqu'à n.
Ces nombres sont les coefficients qui apparaissent en développant la puissance n-ième de x + y :
Par exemple, on a :
En regardant la cinquième ligne du triangle de Pascal, on obtient les valeurs des coefficients binomiaux. Ainsi :
.
Dérivée d'ordre n d'un produit de fonctions
Si n est un entier supérieur ou égal à 1, et f et g deux fonctions n fois dérivables en un point x, alors leur produit fg est aussi n fois dérivable au point x, et la dérivée d'ordre n est donnée par la formule de Leibniz :
Les coefficients binomiaux sont importants en combinatoire, parce qu'ils fournissent des formules utilisées dans des problèmes fréquents de dénombrement :
Le nombre de parties à k éléments dans un ensemble à n éléments est égal à . C'est également le nombre de listes de longueur n, constituées de 1 et de 0, et ayant k fois l'élément 1 et n–k l'élément 0. Ces parties ou ces listes sont appelées des k-combinaisons sans répétition.
Le nombre de suites de nentiers naturels dont la somme vaut k est égale à (nombre de n-compositions faibles de k). C'est aussi le nombre de façons de choisir k éléments d'un ensemble à n éléments si les répétitions sont permises (nombre de k-combinaisons avec répétition de n objets).
Le nombre de suites de nentiersstrictement positifs dont la somme vaut k est égale à (nombre de n-compositions de k).
D'un point de vue plus intuitif, ce nombre permet de savoir combien de tirages de k éléments parmi n différents on peut réaliser. Exemple : les quatre as d'un jeu de cartes sont face contre table, on veut savoir combien de possibilités de jeu il existe si l'on prend simultanément deux cartes au hasard. Si l'on suit la formule il y en a six.
Pour s'en persuader, voici la liste des mains :
as de cœur et as de carreau
as de cœur et as de trèfle
as de cœur et as de pique
as de carreau et as de trèfle
as de carreau et as de pique
as de trèfle et as de pique
Il n'existe pas d'autres possibilités vu que l'ordre n'importe pas (« carreau - pique » est équivalent à « pique - carreau »).
Propriétés arithmétiques des coefficients binomiaux
Divisibilité
Un entier n ≥ 2 est premier si et seulement si tous les pour k = 1, … , n – 1 sont divisibles par n.
Si p est un nombre premier et pr est la plus grande puissance de p qui divise , alors r est égal au nombre d'entiers naturels j tels que la partie fractionnaire de k⁄pj soit plus grande que la partie fractionnaire de n⁄pj. C'est le nombre de retenues dans l'addition de k et n – k, lorsque ces deux nombres sont écrits en basep[9],[10].
La règle permet de déterminer les qui sont pairs. Il suffit pour cela de prendre p = 2 et r ≥ 1. La soustraction de n par k nécessite donc au moins une retenue en binaire. Cela signifie que, dans le développement binaire de n, il se trouve au moins un 0 situé au même rang qu'un 1 dans le développement binaire de k.
À l'inverse, est impair si, à chaque fois que k possède un 1 dans son développement binaire, il en est de même de n au même rang. On dit que kimpliquen. Par exemple, si n est de la forme 2m – 1, tous ses chiffres binaires valent 1, et tous les seront impairs. Si n = 2m, alors n possède un seul 1 dans son développement binaire, et seuls et sont impairs, tous les autres sont pairs.
Une conséquence du théorème de Wilson est que n ≥ 2 est premier si et seulement si tous les sont congrus à modulo n (pour ) [11]. Par exemple, les nombres de la 6e ligne du triangle de Pascal ( 1, 6 ,15, 20, 15, 6, 1) deviennent, après correction par , (0,7,14,21,14,7,0), tous multiples de 7.
Coefficients binomiaux égaux à des puissances
On a , mais pour , Erdős a démontré en 1951 que le coefficient binomial n'est ni un carré, ni aucune puissance d'ordre supérieure [12].
Généralisations
Élargissement du domaine de définition
Jusqu'à présent le coefficient binomial était défini pour k et n entiers naturels avec k ≤ n. Il existe plusieurs manières d'étendre le domaine de définition (ces différentes extensions de la définition étant compatibles les unes avec les autres).
Tout d'abord, l'interprétation combinatoire des coefficients binomiaux amène à poser pour n < k. En effet, il n'existe pas de sous-ensembles à k éléments d'un ensemble à n éléments si n < k.
Pour tout entier naturel n et tout entier naturel k compris entre 0 et n, le coefficient binomial satisfait la formule . Le terme de droite dans cette égalité a toujours un sens lorsque n est un entier relatif et même un nombre réel ou complexe et lorsque k est un entier naturel quelconque. Si l'on utilise le symbole de Pochhammer pour les factorielles descendantes, alors pour tout nombre réel ou complexe z et entier naturel k on peut définir le coefficient binomial par la formule :
Il existe une autre manière de définir pour k entier naturel et n entier relatif par la formule :
qui ramène au cas initial lorsque n est négatif.
Il est possible de poser lorsque k est un entier négatif. L'avantage de cette convention est qu'elle conserve la plupart des formules établies jusqu'ici vraies.
La définition de peut se généraliser, à l'aide de la fonction gammaΓ. Pour tout entier naturel n, n! = Γ(n+1), ainsi, pour tout entier naturel n et pour tout entier naturel k ≤ n on a :
.
Comme la fonction Γ est définie pour tout complexe qui n'est pas un entier négatif ou nul, on peut généraliser le coefficient binomial à tous complexes w et z qui ne sont pas des entiers négatifs ou nuls et tels que z - w ne soit pas un entier négatif ou nul, par la formule :
.
Cette formule peut d'ailleurs s'écrire plus simplement à l'aide de la fonction bêtaB :
.
Enfin, il est possible d'unifier toutes les définitions précédentes avec la fonction gamma, en résolvant le problème de pôles de cette fonction par un passage à la limite :
.
Dans cette dernière formule, l'ordre des limites est important[13]. Cette définition donne une valeur infinie au coefficient binomial dans le cas où z est un entier négatif non nul et w n'est pas un entier strictement négatif.
Cet analogue de l'identité de Vandermonde (8) peut se démontrer de la même façon, à partir de la formule du binôme négatif[17]. Un cas particulier est (pour tous entiers r ≥ n ≥ 0)[18] :
.
Encadrement et approximations
L'encadrement suivant fait intervenir le nombre de Neper et est valable pour toute valeur de k et n[19] :
L'écart entre les deux bornes croit exponentiellement, c'est pourquoi il peut être préférable d'utiliser un équivalent asymptotique lorsque l'on connait le comportement de k par rapport à celui de n. Grâce à la formule de Stirling, lorsque n et k tendent vers l'infini on a :
↑Y compris pour car . Cf. par exemple F. Benoist, B. Rivet, S. Maffre, L. Dorat et B. Touzillier, Mathématiques ECS 1re année, Dunod, (lire en ligne), p. 9.
↑ ab et c(en) Shagnik Das, « A brief note on estimates of binomial coefficients », Voir la formule 5. Et la formule 7, moins précise que la borne fournie dans wiki mais qui a le même comportement. (consulté le ), p. 5
↑ a et b(en) Neven Elozovic (théorème 7.10 page 1024, prendre p=1, r=alpha et s=1-alpha), « Asymptotic expansions of gamma and related functions, binomial coefficients, inequalities and means » [« développement asymptotique de la fonction gamma et de fonctions associées, de coefficients binomiaux, d'inégalités et de moyennes »], Journal of Mathematical Inequalities, vol. 9, no 4, , p. 1001-1054 (lire en ligne).