Abbaye de la Grâce-Dieu (Doubs)Abbaye de la Grâce-Dieu
Vue générale de l'abbaye
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L'abbaye de la Grâce-Dieu, placée sous la titulature de Notre-Dame, est une ancienne abbaye cistercienne, située dans la région de Franche-Comté, sur le territoire de la commune de Chaux-lès-Passavant, dans le département du Doubs. Elle occupe un vallon boisé, en bordure de la rivière l'Audeux. L'église, les bâtiments qui entourent le cloître et se prolongent jusqu'à l'Audeux, les façades et toiture de l'aile nord des bâtiments conventuels qui bordent l'Audeux, celles des dépendances ouest, de l'hôtellerie, du moulin nord-est, la cheminée et le décor de la salle du rez-de-chaussée de l'aumônerie, sont inscrits au titre des monuments historiques depuis le [2]. Son jardin d'agrément est un site protégé[4]. ![]() HistoireFiliale de l'abbaye de la Charité, elle-même fille de Notre-Dame de Bellevaux, elle verra ses premières pierres posées en 1139. La fondation du monastèreAu XIIe siècle saint Robert, abbé de Molesme, obtient de l'archevêque de Lyon l'autorisation de fonder un nouvel ordre concrétisé par l'édification de l'abbaye de Cîteaux en 1098. Quinze ans plus tard Bernard, seigneur de Fontaine, accompagné de ses frères et de compagnons, demande à être reçu à Cîteaux. Il y reste deux ans avant d'être envoyé poser les premières pierres de l'abbaye de Clairvaux et prendre à cette occasion le nom de Bernard de Clairvaux. C'est l'époque du grand essor de Cîteaux qui voit des filiales s'élever aussi en Franche-Comté (Bellevaux, Cherlieu, Rosières, Acey, Theuley, La Charité, Bithaine, Lieu-Croissant, Claire-Fontaine, Balerne, Billon, Mont-Sainte-Marie). La région, jusqu'alors désertique, se peuple rapidement ; si bien que Bernard de Clairvaux est reçu par l'archevêque de Besançon Humbert en 1135 qui, dans l'élan, fait élever l'abbaye de la Grâce-Dieu quatre ans plus tard[5]. L'abbaye est située dans un vallon boisé, anciennement nommé « la vallée des Hiboux », en bordure d'une rivière au sein d'une région au relief escarpé, vide de présence humaine et dont le silence n'est perturbé que par le grondement de la cascade de l'Audeux. Quelques centaines de mètres après ce lieu, le vallon s'élargit et forme un bassin propice à l'établissement de la communauté. Tout d'abord rebaptisée « Rupes florida » (Rocher fleuri) ou « Vallis florida » (Vallée fleurie) dans des diplômes de Frédéric Barberousse, elle prend le nom de « Locus Gratiœ Dei, Misericordœ Dei » (Lieu de la Grâce-Dieu, de la miséricorde de Dieu) puis au XIIIe siècle de la « vallée de la bienheureuse Vierge-Marie » en hommage à la statue miraculeuse de la Vierge qu'elle possède jusqu'au XVIIIe siècle. L'érection du monastère ne peut se faire sans le concours de puissants seigneurs. Les Montfaucon et les Rougemont pourvoient à ses besoins, en association avec le comte de Bourgogne Renaud III qui possède les terres de Passavant toutes proches. Frédéric Barberousse, devenu gendre de Renaud III lorsqu'il épouse son unique fille Béatrice, ne manque pas de rappeler l'attachement de son beau-père à cette abbaye lors de la confirmation des biens de celle-ci en 1156 :
Le monastère de la Grâce-Dieu est fondé le . Ses dotations primitives sont « le creux de l'abbaye », « Ausoens » (Aïssey), « Fallondans » (peut-être Glamondans) et « Quineunt » (peut-être le lieu-dit La grange du Mont). « Le creux de l'abbaye », qui est le vallon où se dresse le monastère, ne peut avoir été donné que par Richard II de Montfaucon, cité dans la charte de 1147, propriétaire du château de Montfaucon. Cette puissante famille de Montfaucon, du comté de Bourgogne, détient presque toutes les terres situées au comté de Warasch depuis Besançon jusqu'au val de Morteau, la « vallée des Hiboux » y étant entièrement enclavée ; la preuve en est apportée aussi par le blason des Montfaucon qui est « de gueules à deux bars d'or adossés », motif repris dans celui de la Grâce-Dieu, ainsi que par le privilège d'être les seuls à pouvoir être inhumés dans le chœur de l'église[5]. Charte de 1147
Au nom de la sainte et indivisible Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, Humbert, par la grâce de Dieu, archevêque du siège de Besançon, à Wuarnier, abbé de la Miséricorde de Dieu, et aux frères du même lieu, persévérez irréfragablement dans la volonté de vous sanctifier! La mémoire des hommes est sujette à oublier ; c'est pourquoi les lois ordonnent de rédiger par écrit les conventions et les preuves des faits, afin que les témoins venant à manquer, ce qui a été réglé autrefois soit démontré par l'acceptation qu'on en a faite. Il est convenable que les biens donnés par amour de la sainteté et par zèle pour la religion aux lieux consacrés à Dieu, soient placés sous la protection tutélaire et privilégiée de l'évêque. Aussi nous assignons et confirmons par l'apposition de notre sceau, à vous et à l'Église à laquelle par les desseins de Dieu vous présidez, ainsi qu'aux frères qui s'y sont consacrés à son service, à savoir, le lieu de la Miséricorde de Dieu, ceux de Quineunt, d'Ausoëns, tout ce qui vous a été et vous sera donné, afin que vous les possédiez à perpétuité tranquillement et à l'abri de trouble et d'inquiétude. Nous faisons connaître à tous les frères présents et futurs que les seigneurs Thiébaud de Rougemont et Richard de Montfaucon, du consentement et de l'approbation de leurs épouses, enfants et amis, out donné à ladite église leur alleu anciennement appelé Falundeas, sans s'y réserver aucun usage, pour qu'elle en jouisse pleinement et librement. Les témoins sont les abbés Thiébaud, du Lieu-Croissant ; Albéric, de Bithaine ; Pierre, de la Charité ; Étienne I, de Luxeuil ; Firmin, de Belchamp ; Hyrode, de Bellelay ; les prieurs Vicard, de Saint-Paul ; Hugues, de Marast ; les seigneurs Thierry, comte de Montbéliard ; Henri, de Faucogney ; Simon, de la Roche ; Pierre, de Belmont ; Étienne, de Rougemont ; Vivien, de Montfaucon ; Henri, de Montjustin ; Bernard ; Vuillerme, de Cubry, et un grand nombre d'autres personnages. Quiconque, ecclésiastique ou séculier, aura la témérité de contrevenir sciemment à notre présente constitution, si, après avoir été averti trois fois, il ne satisfait pas d'une manière convenable, qu'il soit privé de sa dignité d'honneur et de juridiction, qu'il sache qu'il est coupable et responsable au jugement de Dieu du crime qu'il a commis, qu'on l'éloigne de la réception du corps et du sang de Notre Seigneur Jésus-Christ, et qu'il subisse une vengeance sévère au jour du jugement suprême! Que la bénédiction de Notre Seigneur Jésus-Christ arrive, au contraire, à tous ceux qui laisseront la même Église en paix ; qu'ils reçoivent maintenant le fruit de leur bonne action, et du juste Juge la récompense de la paix éternelle! Donné à Besançon, le cinq des nones de mai, par les mains du chancelier Pierre et d'Étienne le chantre, l'an de l'incarnation mil cent quarante-sept[5]. La première communauté![]() Au printemps 1139, cinq religieux partent de l'abbaye de la Charité située à Neuvelle-lès-la-Charité sous la conduite de Pierre Gauthier. Arrivés sur les lieux, ils construisent un abri et un oratoire avant d'être rejoints par d'autres. Gauthier est le premier abbé de la Grâce-Dieu, portant à ce titre le nom de « père » donné à un abbé d'un monastère qui en a fondé un autre. À ce titre est attaché le droit de visite et celui d'assister à l'élection d'un nouvel abbé ; l'abbé de Morimont, en qualité de supérieur de l'abbaye de Bellevaux elle-même « mère » de celle de La Charité, se gardant le droit de bénir l'abbé élu et de le déposer. Les premiers temps sont difficiles pour la petite communauté : la région est sauvage, dépeuplée, les terres doivent être défrichées et des bâtiments construits. Ils trouvent de l'aide en premier lieu dans la coutume de Renaud III qui veut que les monastères de l'ordre cistercien soient exemptés de redevances lors de la vente, l'achat et le transport de denrées. Les autres seigneurs de la région l'imitent, favorisant ainsi l'installation des premiers moines. Parallèlement, le chapitre métropolitain de Saint-Jean de Besançon prend la communauté sous sa protection et contracte avec elle un traité d'association en 1141[5]. ![]() Les deux siècles suivants sont l'époque la plus florissante du monastère, comme le prouve le titre d'« abbé par la grâce de Dieu » pris par l'abbé Jean Ier en 1248. Le nombre de religieux augmente en même temps que les donations des seigneurs des alentours (vingt hectares de terres sur le territoire de Chaux-lès-Passavant vers 1188, tout le territoire d'Aïssey en 1194, les dîmes de Saint-Juan de la part des religieuses de l'abbaye Sainte-Odile). Alors que les premiers religieux alliaient prière, jeûnes, veilles, chant et travail, la communauté en s'étoffant doit avoir recours à des frères convers (membres des ordres religieux catholiques chargés principalement des travaux manuels) pour permettre aux moines de s'adonner aux obligations religieuses. Ces frères commencent par défricher les terres voisines du monastère et ils y implantent les fermes du Mont (au lieu-dit "la grange du Mont") et de Rentessert, font paître leur troupeaux à « la planche du berger » et au « champ de la bergerie », construisent de nouveaux bâtiments dans la partie nord du monastère. Ces lieux sont précisés dans la charte de 1196 d'Henri VI, fils de Frédéric Barberousse : « Le lieu de la Grâce-Dieu et les cours ou fermes lui appartenant, à savoir, celles de Rentessert, de Chaux, du Mont et d'Aïssey, de Morchamps (aujourd'hui Rougemont), avec leurs dépendances, la terre et les prés de Bussières, celle de Rebbovillers… ». À partir du XIVe siècle, avec l'abandon de l'agriculture, les frères convers sont remplacés par des domestiques salariés[5]. Comme toutes les abbayes, celle de la Grâce-Dieu se doit d'avoir de puissants et proches protecteurs. Le choix se porte sur les seigneurs de Montfaucon, qui signent un traité de gardienneté en 1249 avec l'abbé Humbert. Mais cette protection n'est pas gratuite et en contrepartie le seigneur réclame l'exclusivité du titre de gardien ainsi que des revenus tirés des exploitations agricoles. Pour assurer la protection des religieux, les Montfaucon élèvent une forteresse à Châtelard. Située à cinq cents mètres de l'abbaye au lieu-dit « les terres du Châtelard » non loin de l'Audeux, celle-ci se dresse au-dessus de la vallée de la Grâce-Dieu sur un domaine de 300 hectares et se compose d'une tour ronde assez vaste, d'une enceinte renfermant une grange, des jardins et des vergers. Une dizaine de familles de serfs occupent le lieu et forment le premier village[5]. traité de gardienneté de 1249
— Cartulaire de Montfaucon, folio 17. Les troublesLors des guerres du XIVe siècle opposant le duc de Bourgogne Eudes IV aux hauts barons franc-comtois menés par Jean II de Chalon-Arlay, l'abbaye souffre d'exactions, elle est dévastée et ses archives perdues. Vient la peste noire des années 1346 et 1349 ; et les Grandes compagnies de mercenaires ravagent la Franche-Comté. La noblesse franc-comtoise aide l'abbaye à se relever et les religieux peuvent réintégrer les lieux en 1383. En mars 1476, les Français et les Suisses, qui d'un commun accord entrent en Franche-Comté, s'en prennent aux populations et tuent des religieux à la Grâce-Dieu, mettant les derniers en fuite. Cette succession de désastres signe le déclin de l'abbaye malgré le retour des religieux[5]. Au XVe siècle les villages sont désolés, vidés de leurs habitants, les terres en friches et les troupeaux disparus. La Grâce-Dieu, si elle veut survivre, doit renouer avec ses premières activités agricoles mais la région manque de bras. Pour attirer les ouvriers à son service, le monastère leur abandonne des terres moyennant une redevance concrétisée par l'acensement. Mais l'équilibre reste fragile, d'autant plus qu'elle doit soutenir de nombreux procès avec les communes voisines, des tentatives d'usurpation de la part des nobles alentour, et la Réforme protestante qui entraîne des tentatives des habitants du lieu pour se soustraire aux droits seigneuriaux de l'abbé au XVIe siècle. Il s'ensuit une période financièrement difficile ; l'abbaye se voit dans l'obligation d'hypothéquer tous ses biens à l'abbaye de Bellevaux. Elle subsiste courageusement jusqu'au XVIIIe siècle où ses vastes forêts commencent à prendre de la valeur grâce à l'établissement de fabriques métallurgiques[5]. La transition![]() Fin juillet 1789 les portes de la Grâce-Dieu sont forcées par la population voisine. L'année suivante, les religieux quittent l'établissement qui devient bien national. En octobre 1790 le mobilier est vendu aux enchères et le mois suivant tout ce qui reste (linge, bibliothèque et archives) est livré aux pilleurs. Le le domaine d'Aïssey est vendu à Cosme-Damien Delacour pour 30 000 livres, la grange du Mont à Claude-Ignace-Louis Clerc pour 25 977 livres et le domaine de Rentessert à Claude-Antoine Vilat pour 19 400 livres. Le le monastère est adjugé 51 600 livres à un maître de forges qui y installe une forge. En 1844 les trappistes rachètent l'abbaye et les forêts qui en dépendent. L'année suivante, le haut-fourneau est démoli et les fondations des nouveaux bâtiments sont tracées. En 1846, les moulins sont réparés, puis la scierie et le réfectoire en 1847[5]. Un nouveau moulin est bâti en 1853 sur quatre niveaux. Le grain est stocké au troisième étage, la bluterie [2] établie au second, les meules au premier et le "beffroi"[6] au rez-de-chaussée[7]. Lucien Mesny[8], en devient propriétaire, en 1928, et l'exploitera jusqu'en 1958, année où il sera désaffecté avant d'être rasé ultérieurement. En 1929, sous l'impulsion de l'archevêque de Besançon, des moniales cisterciennes de la filiation de l'abbaye de Port-Royal des Champs réinvestissent les lieux jusqu'en 2008. Départ des religieusesL'effectif de la communauté diminuant, les moniales cisterciennes quittent l'abbaye en 2008 pour l'abbaye Notre-Dame d'Igny. Les travailleuses missionnaires de l'Immaculée prennent leur suite à l'abbaye. 2008 L'arrivee des Travailleuses Missionnaires de l'Immaculee, de la Societe de vie Apostolique Donum Dei[9] Actuellement, l'abbaye est le centre de formation missionnaire (le Studium[Quoi ?] ) des Travailleuses Missionnaires de l'Immaculée[10] de la Sociéte de vie apostolique Donum Dei qui assurent également les offices religieux quotidiens (laudes, messe, vêpres). La communauté accueille aussi des pèlerins, visiteurs, des sessions pour préparations à la Confirmations etc ... et les personnes désirant un cadre silencieux, calme et priant pour quelques jours de retraites. La responsable actuelle est Soeur Renée Prieur. ArchitectureL'église, qui date du XIIe siècle, comporte quelques structures romanes de l'édifice d'origine. Le chœur néo-gothique a été reconstruit au XIXe siècle[2]. Les bâtiments conventuels datent du XVIIIe siècle. Galerie
Liste des abbés et abbesses![]()
Sources
Notes et références
Voir aussiBibliographie
Articles connexes
Liens externes
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