Évariste-Vital LuminaisÉvariste-Vital Luminais Évariste Vital Luminais, photoglyptie pour l'album du Salon de 1885.
Évariste-Vital Luminais (né Charles Evariste Vital) à Nantes le et mort à Paris le , est un peintre et graveur français. BiographieFamilleFils de Clara et René Luminais, Évariste-Vital Luminais naît au sein d'une famille de parlementaires et d’hommes de loi. Son arrière-grand-père, Michel Luminais, est procureur à Bouin. Son grand-père Michel Pierre Luminais, est avocat et député de la Vendée de 1799 à 1803[1]. Son père, René Marie Luminais, est député de la Loire-Inférieure de 1831 à 1834 et d'Indre-et-Loire de 1848 à 1849[2]. En premières noces, il épouse Anne Foiret qui lui donne une fille, Esther. Devenu veuf en 1874, Luminais se remarie en 1876 avec une de ses élèves, Hélène de Sahuguet d'Amarzit d'Espagnac, veuve de guerre née le à Paris, morte le (son premier mari était l'artiste peintre Charles Auguste Durand de Neuville, né le à Paris et mort le à la bataille de Sedan). FormationSa famille l’envoie à Paris auprès du peintre et sculpteur Auguste-Hyacinthe Debay (1804-1865). Dès 1839, il entre à l'École des beaux-arts de Paris où il suit les cours de Léon Cogniet (1794-1865), peintre d'histoire et portraitiste[3]. Enfin, il fréquente l’atelier de Constant Troyon (1810-1865), peintre de paysage et d’animaux et son véritable maître. Carrière artistiqueSa carrière officielle débute au Salon de 1843, où deux de ses toiles sont admises. Il sera médaillé aux Salons de 1852, 1855, 1857, 1861, et 1889. En 1869, il est nommé chevalier de la Légion d'honneur ; en 1894, il est élevé au grade d'officier. Il partage son temps entre son atelier parisien du 17, boulevard Lannes et sa maison de Douadic[4] dans l'Indre, au lieu-dit « La Petite Mer Rouge ». Il meurt à Paris le , il est inhumé dans le petit cimetière de Douadic. Son œuvrePeintre de Salon, classé trop rapidement parmi les peintres académiques[5], Luminais pratique aussi bien la peinture de genre que la peinture d'histoire. Après une série de lithographies de jeunesse (1838), on lui doit aussi des eaux-fortes pour les albums de la maison Cadart (1878-1879), inspirées de l'histoire de la Gaule[6]. Les Énervés de JumiègesUne des œuvres les plus réputées de ce peintre est Les Énervés de Jumièges[7] de 1880, dont l'artiste fit deux tableaux (conservés au musée des Beaux-Arts de Rouen et à Sydney, à la galerie d'art de Nouvelle-Galles du Sud) après avoir réalisé plusieurs études. L'œuvre s'inspire d'un récit apocryphe qui raconte le supplice infligé au VIIe siècle par le roi mérovingien Clovis II à deux de ses fils révoltés. Ce tableau, porteur d’un symbolisme étrange, a tour à tour fasciné et dérangé les spectateurs. Selon la légende, les fils rebelles furent punis (à la suggestion de leur mère) qui conseilla de leur faire couper les tendons des jambes puis de les remettre à la grâce de Dieu, les laissant dériver sur un radeau au fil de la Seine. Ils auraient été secourus par les moines de l'abbaye bénédictine de Jumièges et se seraient réconciliés plus tard avec leurs parents. Cette peinture est considérée comme le chef-d'œuvre d'Évariste Luminais et a fait sensation au Salon de 1880.
Le peintre en a d'abord réalisé une esquisse intitulée Première pensée pour les Énervés de Jumièges, représentant le moment du supplice et comportant quatre personnages, puis une Étude pour les Énervés de Jumièges n'ayant plus que trois personnes et présentant les suppliciés dérivant sur la Seine. Cette nouvelle version, précédant le sauvetage des fils de Clovis II par des moines bénédictins, souligne l'horreur de leur situation. Lors du salon de 1880, Luminais présente une nouvelle version où les personnages sont réduits aux deux suppliciés ; elle fut vendue à l'Australie sous le titre Les Fils de Clovis II et est conservée à Sydney à la galerie d'art de Nouvelle-Galles du Sud, après avoir été présentée dans différents lieux d'exposition dont la galerie française de Wallis and Sons à Londres en 1881, l'Exposition internationale de Munich en 1883, et enfin la galerie nationale d'Australie du Sud et la National Gallery of Victoria en 1896. Une dernière version grandeur nature fut acquise par l'État français pour le musée des Beaux-Arts de Rouen[8]. Le peintre des GaulesÉvariste Luminais a largement participé à la diffusion de cette iconographie nouvelle véhiculée par les manuels scolaires et l'idéologie de la Troisième République. C'est à cette époque que naît la représentation du Gaulois au casque ailé et aux longues tresses blondes célébrée par l'imagerie populaire. Ainsi la scène du tableau Gaulois revenant de la chasse comporte-t-elle quelques anachronismes, notamment dans l'habillement : braie et haut-le-corps serrés. Il s'agit ici d'un retour de chasse et non d'une scène guerrière, le casque représente bien plus un accessoire nécessaire à la caractérisation du Gaulois qu'un attribut guerrier. La longue chevelure rousse participe à l'idée que l'on se faisait des Gaulois au XIXe siècle[9].
La même liberté apparaît dans la toile En vue de Rome, où la représentation des casques et du bouclier de gauche est très fantaisiste[10]. L'aventure des Celtes en Italie a frappé très tôt de manière durable l'imagination des artistes[11]. Le « Peintre des Gaules » représente également des scènes de bataille opposant les différents peuples qui s'y sont affrontés. Les Romains, rodés aux techniques d'attaque par leurs campagnes précédentes, allaient au combat équipés de cuirasses à éléments métalliques. Téméraires, les Celtes les affrontaient torse nu, n'ayant pour toute protection qu'un casque et un bouclier[12].
Une autre de ses toiles dépeint la Déroute des Germains après la bataille de Tolbiac au moment où les Alamans s'enfuient devant les hordes franques. Théophile Gautier en fit ce compte-rendu dans le Salon de 1848 : « La multitude vaincue se présente en raccourci au spectateur, et la fuite continue hors de la toile : les chevaux effarés galopent sur des fondrières, où ils se précipitent ; les grands bœufs qui traînent les chars de bagage, fous d’épouvante, se jettent de côté, résistant à tous les efforts de leurs conducteurs, et forment, dans ce torrent humain, avec l’obstacle des chariots, des espèces d’îles, autour desquelles la foule écume et fait des remous, et que surmontent les bras tordus des femmes au désespoir. À l’horizon, tant que le regard peut s’enfoncer, l’on aperçoit des vagues de fuyards, où se dresse, çà et là, comme un flot blanchissant, un cheval qui se cabre, atteint par la francisque ou la flèche d’un vainqueur[13]. » La lecture de Chateaubriand lui a inspiré une autre de ses œuvres : Combat de cavaliers francs[14].
Luminais a également peint plusieurs toiles représentant les Francs Mérovingiens. Ignorant les données de l'archéologie funéraire, les peintres du XIXe siècle proposèrent des costumes germaniques orientaux pour les reines mérovingiennes[15]. Luminais inventa ainsi le portrait d'une Princesse mérovingienne. De même, la déposition de Childéric III, avec l'accord du pape Zacharie, par Pépin le Bref et sa réclusion dans le monastère de saint Bertin à Saint-Omer lui donna l'idée d'une toile. Luminais aurait utilisé comme modèle le grand-père d'un dénommé Roger-René Dagobert[16]. Il rencontra Théodore Hersart de La Villemarqué, qui avait publié un recueil de chants populaires de Bretagne, le Barzaz Breiz. Un de ces chants raconte la légende de la ville d'Ys, qui inspira à Luminais une toile conservée au musée des Beaux-Arts de Quimper. Elle représente la scène où le roi Gradlon fuit à cheval la ville d'Ys submergée par les flots. Il est rejoint par saint Guénolé qui le somme de jeter Dahut, son unique fille qui l'accompagne, à la mer. Plusieurs esquisses de cette œuvre sont conservées aux musées des Beaux-Arts de Quimper, de Rennes et de Nantes. Il pressent, mais sans vraiment les précéder, les peintres naturalistes, notamment dans une œuvre comme La Veuve (1865), proche par le mouvement des figures, la lumière et le drame suggéré, du peintre belge Eugène Laermans (1864-1940).[réf. nécessaire] Luminais ne fut pas seulement un peintre de Salon comblé d'honneurs et de commandes, mais également un artiste capable d'audaces de touches, des bonheurs de matières qui transcendent l'académisme de sa manière. Estampes dans les collections publiques
Luminais et le BerryPendant près de 40 ans, Évariste-Vital Luminais séjournera au « pays des mille étangs », la Brenne, dans l'Indre, où il avait établi son atelier d'été au village de Douadic, à l'instigation de deux amis qu'il fréquentait dans les milieux littéraires et artistiques, Jules de Vorys et Louis Fombelle. Son goût de la nature et sa passion de la chasse vont s'illustrer dans ses toiles « berrichonnes » aux titres évocateurs :
La fille de sa seconde femme Hélène, Marthe, épousera Geoffroy Hérault de la Véronne, grand-père des propriétaires actuels du château du Bouchet[réf. nécessaire]. Peinture monumentaleAux côtés de quatre autres peintres, Luminais a participé à la réalisation de la toile marouflée de plus de 1 500 m2 ornant la coupole de la Bourse de commerce de Paris, commencée en 1886 et inaugurée en 1889, représentant l'histoire du commerce entre les continents[18]. Il y a représenté l'Amérique dans l'esprit de l'époque avec une scène groupant des Indiens, des esclaves, des ouvriers, des cow-boys, et où fait irruption une locomotive à vapeur, symbole de modernité[19]. Une esquisse pour ce décor est conservé à La Rochelle au musée du Nouveau Monde. Cette étude représente un ouvrier noir portant une poutre, construisant le chemin de fer de l'Amérique et évoquant cette nouvelle voie de circulation vers le Far West[20]. Liste d'œuvres d'Évariste-Vital Luminais
Par ailleurs, Alexis Mauflastre (1839-1905) a peint une copie du tableau Retour de chasse ou Les Braconniers bretons[21]. Élèves
Notes et références
AnnexesBibliographie
Filmographie
Liens externes
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