En théorie des nombres — une branche des mathématiques — la fonction nombre de diviseurs est une fonction arithmétique qui indique le nombre de diviseurs d'un entier naturel non nul
n
{\displaystyle n}
, en incluant parmi les diviseurs de
n
{\displaystyle n}
les nombres 1 et
n
{\displaystyle n}
. Elle est généralement notée
d
{\displaystyle {\text{d}}}
ou
τ
{\displaystyle \tau }
(de l'allemand Teiler : diviseur), ou encore
σ
0
{\displaystyle \sigma _{0}}
, comme cas particulier de fonction somme des puissances k -ièmes des diviseurs .
Définition
Pour tout nombre naturel
n
{\displaystyle n}
on définit :
d
(
n
)
=
card
(
{
d
∈
N
;
1
⩽
d
⩽
n
et
d
|
n
}
)
=
∑
d
|
n
1
{\displaystyle {\text{d}}(n)=\operatorname {card} \left(\{d\in \mathbb {N} {\text{ ; }}1\leqslant d\leqslant n\ {\text{et}}\ d|n\}\right)=\sum _{d|n}1}
où
d
|
n
{\displaystyle d|n}
indique la divisibilité de
n
{\displaystyle n}
par
d
{\displaystyle d}
.
Les premières valeurs sont les suivantes[ 1] :
n
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
Diviseurs de n
1
1, 2
1, 3
1, 2, 4
1, 5
1, 2, 3, 6
1, 7
1, 2, 4, 8
1, 3, 9
1, 2, 5, 10
1, 11
1, 2, 3, 4, 6, 12
d(n )
1
2
2
3
2
4
2
4
3
4
2
6
Propriétés
On a l'identité suivante :
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
=
∑
d
=
1
n
⌊
n
d
⌋
{\displaystyle \sum _{k=1}^{n}{\text{d}}(k)=\sum _{d=1}^{n}\left\lfloor {\frac {n}{d}}\right\rfloor }
où
⌊
.
⌋
{\displaystyle \left\lfloor \,.\right\rfloor }
désigne la fonction partie entière [ 2] , [ 3] , [ 4] :
Démonstration
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
=
∑
k
=
1
n
∑
d
|
k
1
=
∑
d
=
1
n
∑
1
⩽
k
⩽
n
d
|
k
1
=
∑
d
=
1
n
⌊
n
d
⌋
.
{\displaystyle \sum _{k=1}^{n}{\text{d}}(k)=\sum _{k=1}^{n}\sum _{d|k}1=\sum _{d=1}^{n}\sum _{\begin{matrix}1\leqslant k\leqslant n\\d|k\end{matrix}}1=\sum _{d=1}^{n}\left\lfloor {\frac {n}{d}}\right\rfloor .}
Si la décomposition en produit de facteurs premiers de
n
{\displaystyle n}
est
n
=
p
1
α
1
p
2
α
2
…
p
r
α
r
{\displaystyle n=p_{1}^{\alpha _{1}}p_{2}^{\alpha _{2}}\dots p_{r}^{\alpha _{r}}}
,
alors[ 5] :
d
(
n
)
=
(
α
1
+
1
)
(
α
2
+
1
)
…
(
α
r
+
1
)
{\displaystyle {\text{d}}(n)=(\alpha _{1}+1)(\alpha _{2}+1)\dots (\alpha _{r}+1)}
.
La fonction nombre de diviseurs est donc multiplicative , c.-à-d. que si
m
{\displaystyle m}
et
n
{\displaystyle n}
sont premiers entre eux , alors :
d
(
m
n
)
=
d
(
m
)
d
(
n
)
{\displaystyle {\text{d}}(mn)={\text{d}}(m){\text{d}}(n)}
.
Un nombre n est premier si et seulement si d(n )=2 .
Un nombre n est un carré parfait si et seulement si d(n ) est impair.
d
(
n
)
{\displaystyle {\text{d}}(n)}
est le double du nombre de diviseurs de n entre 1 et √n , auquel il faut retrancher 1 si
n
{\displaystyle n}
est un carré parfait , donc un majorant de d(n ) est 2√n .
La fonction génératrice de (d(n )) s'exprime comme série de Lambert :
∑
n
=
1
∞
d
(
n
)
s
n
=
∑
n
=
1
∞
s
n
1
−
s
n
{\displaystyle \sum _{n=1}^{\infty }{\text{d}}(n)s^{n}=\sum _{n=1}^{\infty }{\frac {s^{n}}{1-s^{n}}}}
(pour
Re
(
s
)
>
1
{\displaystyle \operatorname {Re} (s)>1}
)
La série de Dirichlet de (d(n )) est le carré de la fonction zêta de Riemann [ 6] :
∑
n
=
1
∞
d
(
n
)
n
s
=
ζ
2
(
s
)
{\displaystyle \sum _{n=1}^{\infty }{\frac {{\text{d}}(n)}{n^{s}}}=\zeta ^{2}(s)}
(pour
Re
(
s
)
>
1
{\displaystyle \operatorname {Re} (s)>1}
)
Comportement asymptotique
Représentation en bâtons de d(n ) ; en rouge, de
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
n
{\displaystyle {\frac {\sum _{k=1}^{n}d(k)}{n}}}
; en bleu, de Hn -1 et Hn ; et en vert, de ln n +2γ -1 .
La fonction d est très irrégulière : elle prend la valeur 2 pour
n
{\displaystyle n}
premier, et prend aussi des valeurs arbitrairement grandes (par exemple N + 1 pour n = 2N ) . Mais en moyenne de Cesàro :
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
n
∼
ln
n
{\displaystyle {\frac {\sum _{k=1}^{n}{\text{d}}(k)}{n}}\sim \ln n}
.
Ceci vient de la formule
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
=
∑
k
=
1
n
⌊
n
k
⌋
{\displaystyle \sum _{k=1}^{n}{\text{d}}(k)=\sum _{k=1}^{n}\left\lfloor {\frac {n}{k}}\right\rfloor }
, dont on déduit :
H
n
−
1
⩽
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
n
⩽
H
n
{\displaystyle H_{n}-1\leqslant {\frac {\sum _{k=1}^{n}{\text{d}}(k)}{n}}\leqslant H_{n}}
où (Hn ) est la série harmonique , puis l'encadrement :
ln
n
−
1
⩽
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
n
⩽
ln
n
+
1
{\displaystyle \ln n-1\leqslant {\frac {\sum _{k=1}^{n}{\text{d}}(k)}{n}}\leqslant \ln n+1}
.
Représentation en rouge de d(n ) ; en bleu, de l'ordre moyen ln n + 2γ ; et en vert, de 2, correspondant aux nombres premiers.
Un développement plus précis est donné par[ 2] , [ 7] , [ 8] , [ 4]
∑
k
=
1
n
d
(
k
)
n
=
ln
n
+
2
γ
−
1
+
O
(
1
/
n
)
{\displaystyle {\frac {\sum _{k=1}^{n}{\text{d}}(k)}{n}}=\ln n+2\gamma -1+O(1/{\sqrt {n}})}
(où O est un symbole de Landau et γ la constante d'Euler-Mascheroni .)
Il a été démontré par Johann Peter Gustav Lejeune Dirichlet en 1849[ 9] .
On en déduit qu'un ordre moyen pour d(n ) est ln n + 2γ .
Problème des diviseurs de Dirichlet
La recherche des valeurs de
β
⩽
1
2
{\displaystyle \beta \leqslant {\tfrac {1}{2}}}
telles que
∑
1
⩽
n
⩽
x
d
(
n
)
=
x
ln
x
+
(
2
γ
−
1
)
x
+
O
(
x
β
)
{\displaystyle \sum _{1\leqslant n\leqslant x}d(n)=x\ln x+(2\gamma -1)x+O(x^{\beta })}
constitue le « problème des diviseurs de Dirichlet (en) »[ 3] .
Des avancées ont été effectuées par Gueorgui Voronoï (1903, O (√x ) remplacé par O (3 √x log(x ) )[ 10] , Johannes van der Corput (1922, β = 33 / 100 )[ 11] , ainsi que Martin Huxley (de) (2003, β = 131 / 416 )[ 12] . À l'opposé, Godfrey Harold Hardy et Edmund Landau ont démontré[ 13] que β est nécessairement supérieur ou égal à 1/4. Les valeurs possibles pour β font toujours l'objet de recherches.
Application à la différence du nombre de diviseurs pairs et du nombre de diviseurs impairs
Posons
u
(
n
)
=
∑
d
|
n
(
−
1
)
d
=
dp
(
n
)
−
di
(
n
)
{\textstyle {\text{u}}(n)=\sum _{d|n}(-1)^{d}={\text{dp}}(n)-{\text{di}}(n)}
où
dp
(
n
)
{\displaystyle {\text{dp}}(n)}
est le nombre de diviseurs pairs de
n
{\displaystyle n}
et
di
(
n
)
{\displaystyle {\text{di}}(n)}
celui des diviseurs impairs ; la suite
(
−
u
(
n
)
)
{\displaystyle (-{\text{u}}(n))}
est répertoriée comme suite A048272 de l'OEIS .
On a alors l'identité :
∑
k
=
1
n
u
(
k
)
=
∑
d
=
1
n
(
−
1
)
d
⌊
n
d
⌋
{\displaystyle \sum _{k=1}^{n}{\text{u}}(k)=\sum _{d=1}^{n}(-1)^{d}\left\lfloor {\frac {n}{d}}\right\rfloor }
qui, combinée avec la valeur de la série harmonique alternée
∑
d
=
1
∞
(
−
1
)
d
d
=
−
ln
2
{\displaystyle \sum _{d=1}^{\infty }{\frac {(-1)^{d}}{d}}=-\ln 2}
,
donne la convergence au sens de Cesàro de
(
u
(
n
)
)
{\displaystyle ({\text{u}}(n))}
vers
−
ln
2
{\displaystyle -\ln 2}
.
La formule de Dirichlet permet d'obtenir plus précisément :
∑
k
=
1
n
u
(
k
)
n
=
−
ln
2
+
O
(
1
/
n
)
{\displaystyle {\frac {\sum _{k=1}^{n}{\text{u}}(k)}{n}}=-\ln 2+O(1/{\sqrt {n}})}
.
Plus petit entier ayant un nombre prescrit de diviseurs
Notons
n
min
(
m
)
{\displaystyle n_{\min }(m)}
le plus petit
n
{\displaystyle n}
tel que
d
(
n
)
=
m
{\displaystyle {\text{d}}(n)=m}
; la suite
(
n
min
(
m
)
)
m
{\displaystyle (n_{\min }(m))_{m}}
est répertoriée comme suite A005179 de l'OEIS .
Le tableau suivant en donne les 36 premiers termes.
Nota 1 : Pour p,q premiers tels que
p
⩽
q
{\displaystyle p\leqslant q}
,
n
min
(
p
)
=
2
p
−
1
{\displaystyle n_{\min }(p)=2^{p-1}}
et
n
min
(
p
q
)
=
2
q
−
1
3
p
−
1
{\displaystyle n_{\min }(pq)=2^{q-1}3^{p-1}}
.
Nota 2 : si
n
min
(
m
)
{\displaystyle n_{\min }(m)}
n'a pas de successeur plus petit que lui, alors il est hautement composé .
Généralisation
La fonction
σ
k
{\displaystyle \sigma _{k}}
associe à tout naturel non nul la somme des puissances
k
{\displaystyle k}
-ièmes de ses diviseurs :
σ
k
(
n
)
=
∑
d
∣
n
d
k
{\displaystyle \sigma _{k}(n)=\sum _{d\mid n}d^{k}}
La fonction nombre de diviseurs est donc le cas particulier de cette fonction obtenu pour
k
=
0
{\displaystyle k=0}
:
σ
0
(
n
)
=
∑
d
∣
n
d
0
=
∑
d
∣
n
1
=
d
(
n
)
{\displaystyle \sigma _{0}(n)=\sum _{d\mid n}d^{0}=\sum _{d\mid n}1={\text{d}}(n)}
.
Notes et références
↑ Pour plus de valeurs, voir la suite A000005 de l'OEIS .
↑ a et b Pierre Eymard et Jean-Pierre Lafon, Autour du nombre Pi , Hermann, p. 25-29
↑ a et b Olivier Bordellès, « Le problème des diviseurs de Dirichlet », Quadrature , no 71, 2009 , p. 21-30 (lire en ligne ) .
↑ a et b Gérald Tenenbaum, Introduction à la théorie analytique et probabiliste des nombres , Dunod, chap. 1.3 (« Sur les ordres moyens, en illustration du principe de l'hyperbole de Dirichlet »)
↑ (en) G. H. Hardy et E. M. Wright , An Introduction to the Theory of Numbers (1re éd. 1938) [détail des éditions ] , 4e éd., 1975, p. 239, Th. 273.
↑ Hardy Wright , p. 250, Th. 289.
↑ Hardy Wright , p. 264, Th. 320.
↑ G.H. Hardy et E.M. Wright (trad. François Sauvageot), Introduction à la théorie des nombres , Vuibert Springer, mai 2007 , chap. XVIII, section 18.2, théorème 320, p. 339
↑ (de) P. G. L. Dirichlet, « Über die Bestimmung der mittleren Werthe in der Zahlentheorie », Abhandl. König. Preuss. Akad. Wiss. , 1849 , p. 69-83 ou (de) P. G. L. Dirichlet, Werke , t. II, 49-66 p. .
↑ G. Voronoï, « Sur un problème du calcul des fonctions asymptotiques », J. reine angew. Math. , vol. 126, 1903 , p. 241-282 (lire en ligne ) .
↑ (de) J. G. van der Corput, « Verschärfung der Abschätzung beim Teilerproblem », Mathematische Annalen , vol. 87, 1922 , p. 39-65 . « —, Corrections », vol. 89, 1923, p. 160.
↑ (en) M. N. Huxley, « Exponential Sums and Lattice Points III », Proc. London Math. Soc. , vol. 87, no 3, 2003 , p. 591-609 .
↑ (en) G. H. Hardy, « On Dirichlet’s divisor problem », Proc. Lond. Math. Soc. (2) , vol. 15, 1915 , p. 1-25 . Cf. Hardy Wright , p. 272.
↑ Les deux premières colonnes sont extraites de la suite A005179 de l'OEIS . Pour
p
,
q
{\displaystyle p,q}
premiers tels que
p
≤
q
{\displaystyle p\leq q}
,
n
min
(
p
)
=
2
p
−
1
{\displaystyle n_{\min }(p)=2^{p-1}}
et
n
min
(
p
q
)
=
2
q
−
1
3
p
−
1
{\displaystyle n_{\min }(pq)=2^{q-1}3^{p-1}}
.
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