Elle fait partie de la famille plus large des séries de Riemann, qui sont utilisées comme séries de référence : la nature d'une série est souvent déterminée en la comparant à une série de Riemann et en utilisant les théorèmes de comparaison.
Définition
Le terme général (un) de la série harmonique est défini par
.
On appelle n-ième nombre harmonique (noté classiquement Hn) la n-ième somme partielle de la série harmonique, qui est donc égale à
.
Divergence de la série harmonique
Calcul des premiers termes
En calculant les premières sommes partielles de la série harmonique, il apparaît que la suite de nombres obtenus est croissante, mais à croissance lente : on pourrait croire qu'il s'agit d'une série convergente.
Valeur de n
1
2
3
4
5
6
7
8
9
10
11
12
13
14
15
16
17
18
19
20
Valeur approchée de Hn
1
1,5
1,8
2,1
2,3
2,5
2,6
2,7
2,8
2,9
3,0
3,1
3,2
3,25
3,32
3,38
3,44
3,49
3,55
3,60
En fait, la série harmonique diverge, ses sommes partielles tendent vers +∞.
Valeur de n
10
102
103
104
105
106
107
108
109
Valeur approchée de Hn
2,9
5,2
7,5
9,8
12,1
14,4
16,7
19,0
21,3
Dans le tableau ci-dessus, à chaque fois qu'on multiplie la valeur de n par 10, il semble qu'on rajoute une constante à Hn, de l'ordre de 2,3 ≃ ln(10). Ce comportement apparent est de type logarithmique en n. C'est bien ce qu'on obtient en faisant une étude asymptotique plus poussée.
Démonstrations de divergence
La première démonstration de la divergence de la série harmonique est due à Nicole Oresme, parue dans Questiones super geometriam Euclidis (1360)[1],[2]. Elle consiste à remarquer que :
et ainsi de suite, les H d'indice une puissance de 2 augmentant indéfiniment.
On peut aussi[3] montrer que la suite (Hn) tend vers +∞ en remarquant que pour tout n, H2n – Hn ≥ 1/2, donc que cette suite n'est pas une suite de Cauchy.
On peut également comparer la série harmonique à la série télescopique bien choisie, définie par :
.
Alors est le terme général d'une série divergente, à termes positifs, donc par comparaison, la série harmonique diverge elle aussi.
On peut aussi montrer le résultat à l'aide de la méthode de comparaison série-intégrale (c'est un peu ce qui est caché, d'ailleurs, dans le choix « judicieux » de la série télescopique ci-dessus).
On utilise l'encadrement suivant, lié à la décroissance de la fonction inverse :
En sommant de 1 à N l'inégalité de gauche et, pour celle de droite, en sommant de 2 à N et en ajoutant 1, on arrive à :
Puis, en calculant les deux membres et en constatant qu'ils sont tous deux équivalents à ln N, on obtient :
Second terme du développement asymptotique
La suite (Hn – ln n) admet une limite finie qui est traditionnellement notée avec la lettre grecque γ et appelée constante d'Euler-Mascheroni. On a donc la formule d'Euler[3] :
La méthode est détaillée dans l'article comparaison série-intégrale et généralisée à d'autres séries (obtenant la formule d'Euler-Maclaurin). On peut également obtenir ces termes en utilisant le théorème de sommation des relations de comparaisons. Les premiers termes du développement sont
Alors que les termes de la série harmonique sont tous positifs, on se propose ici de faire alterner les signes de la série. Le terme général (un) de la série harmonique alternée est défini par
Cette série n’est cependant que semi-convergente, et l’on peut, d’après le théorème de réarrangement de Riemann, la rendre divergente, ou la faire converger vers n’importe quel réel, en changeant l’ordre de ses termes.
La série harmonique apparaît dans de nombreux problèmes de mathématiques récréatives, où sa lente divergence amène à des résultats contre-intuitifs, voire paradoxaux.
Dans le problème d'empilage de blocs, un calcul soigné montre qu'il est théoriquement possible d'empiler une arche formée de dominos identiques pour obtenir un surplomb aussi large qu'on veut, le surplomb obtenu à partir de dominos de longueur 2 étant le -ème nombre harmonique [6],[7]
De même, dans le problème de la fourmi sur un élastique, alors que la fourmi avance à un centimètre par minute, et que l'élastique mesurant au départ un mètre, est étiré d'un mètre par seconde, la fourmi atteindra néanmoins finalement l'autre extrémité : la fraction de ruban qu'elle parcourt en n secondes est , et la série étant divergente, ce nombre finira nécessairement par dépasser 1 (cependant, le temps de traversée est démesurément long, de l'ordre de e6000 secondes, soit plus de 102000 années).
La série harmonique apparaît également dans le problème de la traversée du désert, où une jeep doit traverser un désert en ayant la possibilité de faire des dépôts de carburant sur son trajet ; la distance pouvant être parcourue est aussi grande qu'on veut, mais le nombre de dépôts (et la quantité de carburant consommée) croît exponentiellement avec la distance.
(en) Paul Erdős et Ivan Niven, « Some properties of partial sums of the harmonic series », Bull. Amer. Math. Soc., vol. 52, , p. 248-251 (lire en ligne)