Article 53 de la Constitution de la Cinquième République françaiseArticle 53 de la Constitution du
L'article 53 de la Constitution de la Ve République française est un article constitutionnel dont l'objet principal est d'énumérer les catégories de traités ou autres accords internationaux dont la ratification ou l'approbation doit être autorisée par une loi adoptée par le Parlement ou, dans le cadre l'article 11, par référendum. Texte
— Article 53 de la Constitution du 4 octobre 1958[1] ContenuL'article 53 de la Constitution du est le deuxième article du titre VI (« Des traités et accords internationaux ») de celle-ci. Il est en vigueur depuis le , date de publication de la Constitution du au Journal officiel de la République française[2]. Il succède à l'article 27 de la Constitution du , en vigueur sous la IVe République. L'article 53 présente trois différences par rapport à l'article 27[3]. En premier lieu, les traités « relatifs au droit des Français à l'étranger » ne figurent plus au nombre de ceux dont la ratification doit être autorisée par une loi[3]. En deuxième lieu, sont mentionnés les traités qui modifient des dispositions de nature législative et non plus ceux qui modifient des lois internes françaises[3]. En troisième lieu, dans tous les domaines, à l'exception des traités de paix et des traités de commerce, il n'est plus question que de traités à ratifier mais de traités ou d'accords à approuver[3]. Alors que cet article de la Constitution prévoit la ratification des « traités de commerce », la ratification par la France du traité de Lisbonne transfère la signature de traités de commerce à la compétence exclusive de l'Union Européenne, et le Parlement français n'a plus à être consulté de façon obligatoire lors de la signature de tels traités par l'UE, sauf si ces traités comportent d'autres dispositions que commerciales et sont qualifiés de « mixtes ». Le Parlement peut donc bloquer un traité de commerce européen en ne le ratifiant pas[4]. Le traité étant d’application obligatoire en droit international (pacta sunt servanda) il ne peut plus faire l'objet d'un contrôle de constitutionnalité du Conseil constitutionnel une fois ratifié[5]. Le troisième alinéa constitutionnalise la nécessité de l'obtention du consentement de la population dans la cession ou l'échange d'une part du territoire français. Cet alinéa est quasiment identique à l'article 27 de la constitution de 1946 et à la constitution de 1875. Il ne concerne que la cession à un état étranger et non la sécession[6]. Cet alinéa fut discuté par plusieurs historiens pour la guerre d'Algérie et fut vu comme une volonté du général de Gaulle pour ouvrir la voie à l'autodétermination[7],[8], en transgressant le principe de l'intégrité territoriale[9]. Cette disposition n'a trouvé application que dans le cadre de l'indépendance de territoires coloniaux ou d'anciens territoires coloniaux, comme les Comores[10]. ÉlaborationAu cours de l'élaboration de la Constitution du , la première rédaction du futur article 53 apparaît le dans les documents préparatoires à une réunion du groupe de travail chargé de rédiger la nouvelle Constitution[11]. Elle a été établie par François Luchaire, avec l'accord du ministère des Affaires étrangères, dont André Gros[11]. Le texte est le suivant : « Les traités de paix, les travaux ou accords relatifs à l'organisation internationale, ceux qui engagent les finances de l'État, ceux qui sont relatifs à l'état des personnes, ceux qui modifient une loi, ceux qui comportent cession, échange ou adjonction de territoire, sont ratifiés ou approuvés en vertu d'une loi. »[12]. Le texte soumis au Comité consultatif constitutionnel le est presque identique[12]. La liste des traités dont la ratification est soumise à autorisation législative n'est pas modifiée[12]. Le Comité consultatif constitutionnel, pendant la première quinzaine d', n'accorde que peu d'importance au texte[12]. Il propose de rajouter les traités de commerce à l'énumération prévue[12]. Par la suite, la commission spéciale du Conseil d'État s'interroge sur l'ajout des accords de Communauté à l'énumération[12]. La question est renvoyée au titre de Constitution sur la Communauté. L'expression « qui modifient une loi » est remplacée par « qui modifient des dispositions de nature législative »[12]. Lors de l'examen du texte devant l'assemblée générale du Conseil d'État, la discussion ne porte que sur la suppression de l'énumération des traités « relatifs au droit de propriété des Français à l'étranger »[13]. Ils ne sont pas rajoutés[13]. DoctrineComme à l'article 52, traité s'entend d'un accord international en forme solennelle[14],[15]. La signature d'un traité ou accord relevant du champ d'application de l'article 53 doit être faite « sous réserve de ratification ou d'approbation »[15]. La Constitution n'a pas prévu le cas de l'adhésion de la France à un traité ou accord préexistant[16],[17] à la négociation duquel elle n'a pas participé[18] ou dont elle n'est pas signataire[16]. Mais l'adhésion suit le régime de la ratification[16],[17]. Dès lors, lorsque le traité ou l'accord préexistant relève d'une des catégories énumérées à l'article 53, l'adhésion doit être autorisée par une loi[16]. L'exécutif n'est pas tenu de solliciter l'autorisation du Parlement : la Constitution ne lui impartit aucun délai à cet effet[19]. Lorsqu'il la sollicite, la Constitution n'impartit au Parlement aucun délai pour se prononcer[19]. Une fois l'autorisation accordée, l'exécutif reste libre de différer la ratification, l'approbation ou l'adhésion du traité ou de l'accord voire de décider de ne pas le ratifier, l'approuver ou y adhérer[20]. JurisprudencePaixLe Conseil constitutionnel n'a pas eu à se prononcer à propos de « traités de paix »[21]. Organisation internationaleDepuis la décision no 70-39 DC du , le Conseil constitutionnel considère que les « traités ou accords relatifs à l'organisation internationale » s'entendent de ceux dont l'objet est la participation de la France « à la création ou au développement d'une organisation internationale permanente, dotée de la personnalité juridique et investie de pouvoirs de décision par l'effet de transferts de compétence consentis par les États membres »[22]. Le Conseil constitutionnel a confirmé son interprétation dans plusieurs décisions dont sa décision no 92-308 DC du [23]. Modification de dispositions de nature législativesLes « traités ou accords (...) qui modifient des dispositions de nature législative » forment « la plus importante des catégories » d'engagements internationaux dont la ratification ou l'approbation doit être autorisée par une loi[24]. Dans sa décision no 70-39 DC du , le Conseil constitutionnel a considéré que, pour relever du premier alinéa de l'article 53, il n'est pas nécessaire que l'engagement international modifie une loi existante : il suffit que, « sur certains points, (il) porte sur des matières de nature législative telles qu'elles sont définies à l'article 34 de la Constitution »[23],[22],[25]. Depuis le début des années 1980, le Conseil d'État interprète l'expression « qui modifient des dispositions de nature législative » comme visant tout traité ou accord portant sur des matières relevant, en droit interne, du domaine de la loi[24]. Principe de libre détermination des peuples d'outre-mer et de libre manifestation de leur volontéDepuis la décision no 75-59 DC du , le Conseil constitutionnel déduit du troisième et dernier alinéa de l'article 53 un principe dit « de libre détermination des peuples d'outre-mer et de libre manifestation de leurs volonté » et ayant valeur constitutionnelle[26]. Il a confirmé l'existence et la valeur constitutionnelle de ce principe dans sa décision no 87-226 DC du [27]. Loi d'autorisationLa loi prévue à l'article 53 est une loi ordinaire[28]. Le Conseil constitutionnel l'a confirmé dans ses décisions nos 93-318 DC[29],[30] et 93-319 DC[29],[31] du . L'objet de la loi est d'autoriser la ratification du traité ou l'approbation de l'accord concerné. Le Conseil constitutionnel l'a confirmé dans sa décision no 2003-470 DC du en « considérant que le seul pouvoir reconnu au Parlement en matière de traités et d'accords internationaux par la Constitution est celui d'en autoriser ou d'en refuser la ratification ou l'approbation dans les cas mentionnés à l'article 53 »[32]. Contrôle de la régularité des actes de ratificationLa jurisprudence du Conseil d'État Ass. Villa, du 16 novembre 1956 avait indiqué que qu'il refusait de contrôler l'intervention d'une autorisation parlementaire. Cela permettait à l'époque une entorse à la lettre de la Constitution, car l'exécutif pouvait ratifier un traité sans passer par le Parlement[33]. Un revirement de jurisprudence a eu lieu avec l'arrêt CE SARL Parc d'activités de Blotzheim du 18 décembre 1998, où le CE a indiqué qu'il contrôle la régularité des actes de ratification[34]. AutresLa DC 78-99 du 29 décembre 1978 précise qu'un engagement ou une annonce politique ne saurait être considérée comme un traité créateur de droit. Ainsi, la résolution du 5 décembre 1978 où le Conseil européen a prévu qu'un système monétaire européen serait instauré à compter de l'année suivante, ne peut faire l'objet d'une ratification[35]. Notes et références
Voir aussi: document utilisé comme source pour la rédaction de cet article. Bibliographie
Jurisprudence
Articles connexesLiens externes
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