La Renaissance bulgare (Българско възраждане - Bãlgarsko vãzrajdane), dans une perspective universitaire Renaissance culturelle bulgare et dans une perspective nationaliste et protochronisteRenaissance nationale bulgare[1], est une période de l'histoire de la Bulgarie qui commence au milieu du XVIIIe siècle et se termine en 1878. Elle est marquée par la naissance de la conscience et du sentiment national bulgare moderne parmi les populations de langue bulgare de l'Empire ottoman, sachant qu'elle ne toucha pas l'ensemble de ces populations, puisque les plus occidentales développèrent une identité nationaleslavo-macédonienne, tandis que celles qui avaient embrassé la foi musulmane restèrent à l'écart du mouvement.
la troisième période va de ces années à la Guerre de Crimée (1853-1856) et se caractérise par la séparation linguistique des révolutionnaires, et par une orientation moins religieuse et plus nationale des identités et des aspirations : les comitadjis bulgares aspirent à recréer un grand état bulgare sur le modèle de ceux décrits par Païssii de Hilendar, les combattants de l'ORIM développent l'idée d'une autonomie macédonienne dans le cadre ottoman, tandis que les Grecs de leur côté, ayant obtenu l'indépendance de leur pays, aspirent seulement à l'agrandir. Toutefois, cette séparation ne les empêche pas encore de rester solidaires face à la domination turque. Durant cette période, Guéorgui Rakovski et d'autres révolutionnaires bulgares inspirés par l'esprit des Lumières, les idéaux de la « Société des Amis », la compassion pour la souffrance du peuple et l'indignation face à l'oppression ottomane, créent une société secrète à Svichtov, afin de collecter de l'argent pour acquérir des armes et d’espionner les troupes ottomanes, au profit du commandement militaire russe. C'est cette société secrète qui propose comme drapeau de la future Bulgarie les couleurs blanc, vert et rouge horizontales, inspirées du drapeau russe. Ces activités sont découvertes : Rakovski et ses camarades sont arrêtés et emmenés à Constantinople, mais réussissent à s’évader. Les membres de la Société secrète continuent de collecter des fonds, contribuant à hauteur de 20% à un centre culturel bulgare et à 80% à l’armement[4] ;
la quatrième période va de la Guerre de Crimée à la proclamation de l'autonomie de la Bulgarie en 1878 : durant cette période, les divers mouvements deviennent clairement rivaux et s'affrontent parfois entre eux ; le côté religieux a complètement disparu et le côté national est devenu exclusif, en partie en raison du croisement dans les Balkans, des tendances panslaves soutenues par la Russie, pangermaniques soutenues par l'Autriche et l'Allemagne, panhelléniques soutenues par la France et panturques soutenues par l'Angleterre et l'Allemagne, chacune de ces grandes puissances instrumentalisant le nationalisme de l'un ou l'autre des peuples balkaniques[5].
L'achèvement
La Renaissance nationale bulgare se concrétise en 1878, à l'issue de la guerre russo-turque de 1877-1878, par la signature du traité de San Stefano qui prévoit la création du royaume de Bulgarie moderne. Le traité prévoit un État bulgare englobant presque tous les locuteurs de la langue bulgare des Balkans. Mais seule la Russie soutient ce projet : les autres puissances cherchent à ménager l'Empire ottoman et, au Congrès de Berlin, créent deux états bulgares, séparés et vassaux à des degrés divers de la « Sublime Porte » : au nord du Grand Balkan une Principauté de Bulgarie qui s'auto-gouverne, mais doit verser tribut à Constantinople, et au sud du Grand Balkan la province ottomane partiellement autonome de Roumélie orientale. Les efforts politiques des Bulgares pour les réunir aboutissent en 1885, mais c'est seulement en 1908 que la communauté internationale, Turquie incluse, reconnaît l'indépendance du royaume de Bulgarie.
↑La vision nationaliste et protochroniste de l'histoire suppose que les nations modernes, quelles qu'elles fussent, existaient déjà dans le passé lointain (moyen-âge, antiquité, voire préhistoire) et que les États de ces périodes étaient mono-ethniques ou à grande majorité nationale, comme le sont les États modernes ; les nations modernes ne sont, selon ce point de vue, que des restaurations des nations anciennes : cf. Dimitri Kitsikis, La Montée du national-bolchevisme dans les Balkans, ed. Avatar, Paris 2008.
↑Article (bg) Кръвният данък бил по-страшен от смърт (« L'impôt du sang était pire que la mort ») du 20 mars 2009 sur Chudesa.net [1]
↑Georges Castellan, Histoire des Balkans, Fayard, 1991, p. 183-185
↑R. J. Crampton, (en) A Concise History of Bulgaria, Cambridge University Press 1997, p. 77. (ISBN0-521-56719-X).
↑Jacques Frémeaux, La Question d'Orient, Fayard 2014 p. 150-152