Le regroupement familial est un motif d'immigration reconnu dans de nombreux pays, selon lequel la présence d'un ou de plusieurs membres de la famille dans un certain pays permet au reste de la famille divisée ou à certains membres de la famille seulement d'immigrer légalement dans ce pays. En France, le regroupement familial est la possibilité donnée à un ressortissant étranger en situation régulière (titulaire d'un titre de séjour), sous certaines conditions de ressources, d'être rejoint par des membres de sa famille (conjoint, enfants mineurs…). Ce droit a été confirmé par le Conseil d’État en 1978.
Contexte
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Dans les années 1880, l'expression « regroupement familial » a pu désigner la volonté des familles de se réunir[1]. En 1917, l'expression peut être utilisée pour désigner la cohabitation avec les parents, qui est alors vue comme pouvant réduire l'émancipation des femmes[2]. En 1926, la notion de regroupement familial désigne simplement la capacité de conjoints à se retrouver ensemble et à pouvoir veiller sur leurs enfants[3].
En 1938, le Cercle amical italien se fixe comme objectif le regroupement de tous les italiens résidant en France[4]. En , une organisation, nommée « le Regroupement familial », est fondée à Paris par l'« Union féminine civique et sociale »[5] et par la fédération des associations des familles nombreuses[6],[7].
Le regroupement familial est considéré en 1940 comme une raison sérieuse pour autoriser un réfugié de changer de domicile[8],[9],[10]. En 1941, le fichier central de Lyon a permis de répondre à 300 000 demandes[11]. En 1943, il est question d'étendre le regroupement familial aux neveux[12].
En 1961, la notion de regroupement familial est vue comme un critère de choix géographique pour les immigrés[13]. En 1970, la notion de regroupement familial permet d'introduire en France ou de régulariser des mineurs[14].
L'expression « regroupement familial » a également été utilisée dans d'autres contextes, comme pour décrire l'assemblage d'héritages en vue d'éviter la dispersion des terres[15], ou ce qui s'est passé en Australie[pas clair][16].
Dates clés
Décret du 29 avril 1976 : autorisation sous conditions
Après avoir mis fin à l’immigration pour motif économique en , le gouvernement Chirac autorise le regroupement familial sous plusieurs conditions (durée de résidence, ressources, logement, ordre public, santé). Cette décision est actée par un décret du signé notamment par le Premier ministre, Jacques Chirac, et par le ministre du Travail, Michel Durafour[17],[18]. Le cas des familles algériennes reste régi par les accords franco-algériens de 1964 et par les circulaires du et du qui s'efforcent de limiter le regroupement familial algérien, le gouvernement de l’Algérie indépendante craignant qu'une stabilisation des migrants en France ait pour conséquence la diminution des envois d'argent vers leur pays d'origine[19].
Décret du 10 novembre 1977 : suspension
Un an plus tard, en pleine augmentation du chômage, le gouvernement Barre suspend pour trois ans l'application du décret du : le regroupement familial est ainsi stoppé, sauf pour « les membres de la famille qui ne demandent pas l'accès au marché de l'emploi »[20]. Mais ce décret est annulé par le Conseil d’État (voir infra), qui consacre le droit au regroupement familial, le .
Décision du 8 décembre 1978
Saisi par le Groupe d'information et de soutien des immigrés (GISTI), le Conseil d'État consacre, dans une décision du , un nouveau principe général du droit : le « droit de mener une vie familiale normale »[21]. Il annule le décret du par lequel le gouvernement subordonnait l'entrée des conjoints et enfants de travailleurs immigrés à la promesse que ceux-ci ne tenteraient pas d'y chercher un emploi. Cet arrêt du Conseil d'État sanctuarise le regroupement familial[22] en marquant un revirement de jurisprudence important.
Pour l'universitaire Jean-Louis Harouel, « cet arrêt du Conseil d'État a été l'acte fondateur de la transformation de l'immigration de travail en immigration de colonisation, selon la formule du sociologue Abdelmalek Sayad ». De plus, ce même arrêt eut pour conséquence, toujours selon l'historien du droit, de faire basculer la société française « dans un système de gouvernement des juges » ; le président de la République de l’époque, Valéry Giscard d’Estaing, s'opposait en particulier à cette vision du regroupement familial[23],[24].
Évolution
Depuis cette décision, de nombreuses réformes ont durci l'application de ce dispositif[22]. La loi Sarkozy 2003 impose un délai minimal de présence en France avant de pouvoir en bénéficier, et une autorisation préalable au regroupement familial avant d’entrer sur le territoire, et rend ainsi quasi impossible la régularisation sur place des familles[22]. L’État a aussi renforcé les exigences pour les immigrés souhaitant être rejoints par leur famille au niveau du logement (qui doit, depuis 1993, être considéré comme normal pour une famille comparable) et des ressources financières (depuis 2016, au moins 1 à 1,2 smic selon la taille de la famille)[22]. La loi de 2007 ajoutait un contrôle de l’intégration des familles a été qui a été supprimé en 2016[22].
Le , en pleine pandémie de Covid-19, le Conseil d'État, saisi en référé, suspend le gel de la délivrance de visas de regroupement familial aux conjoints et enfants d'étrangers non-européens résidant en France, jugeant qu’il s’agit d’« une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale normale et à l'intérêt supérieur de l'enfant ». Cette mesure avait été prise par le gouvernement en raison de la crise sanitaire en cours[26].
Statistiques
Il concerne environ 12 000 personnes par an (en 2016)[27].
Lors du dépôt de l'ensemble des pièces auprès de l'OFII un récépissé est remis. Il vaut pour date de début de l'instruction. Dans les 2 mois qui suivent, le maire peut venir constater la conformité du logement. Dans l'absence de réponse, celle-ci est réputée favorable au terme de 2 mois.
En cas de refus de la part de la préfecture
Au terme des 6 mois d'instruction, l'absence d'accord par la préfecture vaut un refus. Les demandeurs disposent d'un délai maximal de 2 mois pour faire appel : recours gracieux ou recours hiérarchique. Si le recours est explicitement négatif, ou en cas d'absence de réponse au bout de 2 nouveaux mois (refus implicite), les demandeurs disposent encore de 2 nouveaux mois pour déposer un recours devant le tribunal administratif de leur juridiction, par la procédure du référé.
Les refus ne sont pas toujours fondés ou volontaires. Parfois, l'administration préfectorale n'a pas le temps ou les moyens de traiter tous les dossiers, et un recours devant une juridiction peut être le moyen d'obtenir gain de cause.
Après l'obtention
Une fois l'accord donné pour le regroupement familial, les requérants disposent de 6 mois pour faire venir leur famille, sans quoi cet accord peut leur être retiré.
Les procédures peuvent varier d'un département à l'autre. Cependant, toutes tournent à peu près autour des mêmes dispositions. Ces procédures sont souvent internes et ne correspondent pas à des textes de lois ou décrets. L'ensemble de ces délais additionnés peut parfois dépasser les 6 mois, et de fait remettre en question l'autorisation qui venait d'être délivrée. En cas de délais excessifs, les demandeurs doivent utiliser la procédure du référé devant le tribunal administratif, à condition de toujours justifier du caractère « urgent ».
Dans les deux semaines qui suivent l'accord du regroupement familial, la préfecture informe les destinataires par lettre recommandée avec accusé de réception. Quand la préfecture reçoit la confirmation que les intéressés ont reçu l'avis, elle délègue la suite des démarches à l'OFII.
L'OFII doit prendre contact avec les intéressés, souvent plusieurs semaines après la réception de l'avis. Les intéressés reçoivent un bon à payer de 265 euros par demande (quel que soit le nombre de personnes à faire venir). En parallèle et indépendamment du paiement des frais, le demandeur en France doit faire parvenir à sa famille le formulaire CERFA du visa long séjour, ainsi que la copie de l'acceptation du regroupement familial, et envoyer le tout à la famille à l'étranger, afin que ceux-ci puissent demander un visa. Certains consulats émettent la possibilité d'une convocation, mais celle-ci est théorique et ne répond à aucun article de loi, mais seulement à l'organisation interne du consulat.
Les services médicaux du consulat peuvent faire passer aux demandeurs de visas une visite afin de vérifier que ces candidats à l'entrée en France ne sont pas porteurs de l'une des 3 maladies mentionnées au titre V du règlement sanitaire international, à savoir la fièvre jaune, la peste ou le choléra[29]. Cette visite qui est obligatoire dans les zones à risques, est alors toujours demandée même pour des visas de court séjour.
Au terme des démarches, la famille reçoit un visa long séjour pour venir en France. Arrivés en France, ces nouveaux arrivants devront à nouveau passer le contrôle médical de l'OFII et signer le Contrat d'accueil et d'intégration (CAI).
↑France Ministère de l'intérieur (1912-1981) Auteur du texte et Secrétariat d Etat à l intérieur Bureau d études juridiques et de documentation générale Auteur du texte, « Informations générales », sur Gallica, (consulté le ).
↑Haute-Garonne) Auteur du texte Société des études du Comminges (Saint-Gaudens et Société Julien Sacaze Auteur du texte, « Revue de Comminges », sur Gallica, (consulté le ).
↑France, Étrangers (Edition mise à jour au 1er novembre 1970), (lire en ligne).
↑ abcd et e« Une « nouvelle loi » sur l’immigration qui s’ajoutera à une longue série de 118 textes depuis 1945 », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )
↑Alexis Feertchak, « Burkini au Conseil d'Etat : «Le peuple est trahi par ceux qui rendent la justice en son nom» », Le Figaro, (lire en ligne, consulté le ).
↑Yves Nantillé, « Le septennat de Valéry Giscard d'Estaing », La Nouvelle Revue d'histoire, no 70, janvier-, p. 31-34.
↑« Idée reçue sur les migrants (6/6) : « Le regroupement familial est la porte d’entrée d’une immigration massive » », Le Monde, (lire en ligne, consulté le )