Jules Auguste Muraire naît le à Toulon[1],[2] à qui il voue une véritable passion[3]. Peu porté sur les études, il se bagarre au lycée, ce qui lui vaut d'être exclu, et ses parents doivent l'inscrire dans une institution pour enfants difficiles[4]. Il découvre très jeune le monde du spectacle et est attiré par le métier de comédien. Mais son père, qui veut le voir reprendre son atelier de tapisserie, s'y oppose et le fait embaucher comme marmiton à l'hôtel du Louvre. La mort brutale de ce père, alors qu'il n'a que 15 ans, le ramène à sa vocation d'artiste[5].
Il débute alors sous le nom de Rallum, le , à 16 ans et demi, dans les cafés-concerts et les guinguettes à matelots de sa région natale, la Provence, mais sans succès, car il chante mal[6]. Engagé par une modeste troupe locale, les Lauri-Laur, il fait même une courte tournée en Afrique du Nord[7]. Puis il fait des petits boulots : croupier au casino d'Aix-les-Bains et commerçant. Alors artiste lyrique, il demeure 209 boulevard de La Madeleine (à présent boulevard de la Libération) à Marseille, il est exempté du service militaire pour obésité[8].
En 1908, il entre au théâtre de l'Alhambra à Marseille comme souffleur, puis enchaîne au théâtre de l'Alcazar de Marseille et au « Palais de cristal ». Ayant adopté le pseudonyme de Raimut (verlan approximatif de son nom Muraire), il se fait finalement appeler Raimu[9] et devient une vedette régionale dans un répertoire de comique troupier popularisé par Polin, dans lequel se sont essayés aussi Jean Gabin et Fernandel.
En , il demeure au no 15 rue de La Tour d'Auvergne à Paris, et demeure en au no 46 rue de la République à Marseille[8]. Reconnu apte au service de l'armée le , il est mobilisé à Orange au sein du 15e ETEM (escadron du train des équipages militaires)[8] et part au front en . Lors d'un de ses premiers contacts, il est enseveli sous une sape[b]. Il en réchappe, mais perd du poids, tombe malade et est réformé en [10].
L'arrivée en 1929, en Europe, du cinéma parlant fait connaître Raimu par son jeu, sa personnalité et sa voix méridionale tonitruante si caractéristique.
Le , il se marie dans la salle de mariages de la mairie du 8e arrondissement de Paris, avec Ester Honorine Métayer[c], actrice de cinéma et mère de leur fille de 10 ans, Paulette (1925-1992)[13].
Le , Raimu roule en voiture sur la nationale 6 — qui, à l’époque, est, entre Paris et Lyon, la route vers la côte méditerranéenne — dans le but de se rendre à Monte-Carlo ; il est accompagné du dramaturge et réalisateur Yves Mirande. Aux environs de Tournus, il est victime d’un accident qui lui occasionne de multiples fractures. Il est rapatrié en ambulance à Paris, où il est opéré à la clinique Lyautey. Il n'en sort que le dimanche , au bout de cinquante-quatre jours. Quatre mois plus tard, il est admis à l'hôpital américain de Paris — situé à Neuilly-sur-Seine en proche banlieue — pour une nouvelle opération chirurgicale, en apparence bénigne, dans le but de soigner les complications d’une fracture au tibia provoquée par l’accident. Il meurt au bloc opératoire le [1] d'une crise cardiaque — probablement une syncope blanche due à une allergie à un produit anesthésiant[15].
«
À midi et demi, on vint m'appeler à table. Je pensai qu'il n'était pas encore réveillé, mais que la serviable infirmière allait me donner de ses nouvelles. C'était une voix inconnue, une voix de femme.
— Le cas de M. Raimu était beaucoup plus grave qu'on ne vous l'a dit. L'opération a duré deux heures, il ne s'est pas réveillé.
— Vous voulez dire pas encore ?
Il y eut un silence tragique. Puis la voix murmura :
Il avait prévu de quitter la Comédie-Française mais ne s'était pas résolu à envoyer sa lettre de démission, « écrite en avril 1946, alors qu'il était cloué sur son lit à la clinique Lyautey »[17].
Des funérailles grandioses, auxquelles ont assisté des milliers de personnes, sont organisées en l'église Saint-Philippe-du-Roule, puis il est inhumé au cimetière de Toulon, ville où il est né[d]. Le poète Maurice Rostand lui rend hommage en composant ces vers :
« Quand s'éteint cette voix
Fameuse et familière
Pagnol pleure ici-bas
Là-haut pleure Molière. »
Marcel Pagnol prononce son éloge funèbre : « On ne peut faire un discours sur la tombe d'un père, d'un frère ou d'un fils, et tu étais les trois à la fois »[19].
Orson Welles estima qu'il était « le plus grand acteur au monde »[12]. Pagnol raconta avoir vu arriver Orson Welles dans son bureau, lui demandant : « Je veux voir monsieur Raimu. » Marcel Pagnol lui répondit que Raimu venait de mourir deux mois auparavant et vit alors Orson Welles fondre en larmes : « C'était le meilleur de nous tous !, dit-il[12]. »
Sa petite-fille, Isabelle Nohain-Raimu (fille de Paulette Raimu et d'un des fils de Jean Nohain) a d'abord fondé le musée-espace Raimu à Cogolin (à 10 km de Saint-Tropez), puis, lorsque celui-ci a fermé, le musée Raimu à Marignane, 27 cours Mirabeau, en 2014, œuvre de l'architecte Nicolas Masson et du muséographe Jean-Louis Mylonas[21].
Maison de Raimu à Bandol
En 1933, Raimu achète à Bandol (Var) une villa qu'il rebaptise Ker-Mocotte en l'honneur de celle qui deviendra son épouse, Esther[1].
De nos jours, la villa, sise 103 rue Raimu, après avoir été un hôtel-restaurant, est une propriété privée et conserve le nom de Ker-Mocotte.
Prix Raimu
En hommage à son grand-père, Isabelle Nohain-Raimu a créé, en 2006, les prix Raimu de la comédie récompensant des personnalités du théâtre et du cinéma pour des pièces ou des films comiques sortis dans l'année[22][source insuffisante]. Il y eut trois cérémonies en 2006, 2007 et 2008. Le trophée Raimu est une œuvre de Cyril de La Patellière dont l'original est au musée Raimu de Marignane.
↑La scène de la « partie de cartes » au Bar de la marine, sur le Vieux-Port de Marseille, fait partie du patrimoine du cinéma français et de la culture marseillaise. César, interprété par Raimu, y prononce la réplique célèbre, alors qu'il triche à la manille : « Tu me fends le cœur ! »
↑Il ramène du champ de bataille un morceau du bois de l'étai qui soutenait la tranchée et auquel il doit la vie et le gardera sur lui toute sa vie comme un talisman, sauf — ironie du sort — le jour de sa mort[11].