Sous l'Ancien Régime, le prévôt des marchands de Paris, assisté de quatre échevins, s'occupait de l'approvisionnement de la ville, des travaux publics, de l'assiette des impôts et avait la juridiction sur le commerce fluvial. Il était élu tous les deux ans et son rôle était l'équivalent de celui de maire de Paris dans l'ancien régime.
La prévôté des marchands de Paris a été instituée sous Philippe Auguste, mais le premier prévôt dont le nom nous soit connu est Evrard (ou Evrouin) de Valenciennes, mentionné sous Saint Louis, dans un texte d'[1]. Le poste a été supprimé après la prévôté d'Étienne Marcel et la révolte des Maillotins, en 1383. Rétabli en 1412, il n'a plus joué de rôle politique jusqu'à sa disparition en 1789.
Histoire
Naissance de la prévôté des marchands
Au Moyen Âge, les marchands formaient une association, la hanse parisienne des marchands de l'eau, et s'étaient donné un règlement dont ils débattaient dans le parloir des marchands et qu'ils chargèrent un prévôt de faire appliquer. La puissante corporation, détentrice depuis 1170 du monopole de l'approvisionnement par voie fluviale, constitua progressivement la municipalité de Paris, sans avoir été investie de la charge par le roi de France.
La corporation des nautes — « les marchands de l’eau » — avait obtenu une juridiction installée en 1250 près du Grand Châtelet au lieu-dit « la vallée de la misère » sur le quai de la Mégisserie dans une maison à l'enseigne du bénitier puis transférée au début du XIIIe siècle au « parloir aux bourgeois », à l'emplacement de l'actuel no 20 de la rue Soufflot[2]. Les bourgeois obtinrent un prévôt des marchands dont les compétences étaient limitées au domaine commercial, par opposition à celles du prévôt de Paris, qui était un officier royal, dont la juridiction s'étendait sur Paris et sa « vicomté » (sa banlieue)[1].
Le roi Saint Louis décida de réformer la municipalité parisienne : les jurés des marchands de l'eau devinrent des échevins et leur chef prit le titre de prévôt des marchands de Paris. Ainsi, en 1263, la hanse parisienne élut une première municipalité composée d'un prévôt des marchands, Évrard de Valenciennes, assisté de quatre échevins.
La compétence du prévôt des marchands était théoriquement limitée aux affaires de la marchandise, mais la charge acquit progressivement un rôle politique en raison de ses forts liens avec la bourgeoisie parisienne dont il défendit les privilèges auprès de la royauté.
L'élection du prévôt des marchands et des échevins avait lieu le de chaque année[3], le prévôt étant élu pour deux années non renouvelables, et les échevins renouvelés par moitié chaque année (le troisième échevin devenant le premier, et le quatrième devenant second).
Apogée de la prévôté de Paris
La prévôté d'Étienne Marcel (1354-1358), qui installa le siège de la municipalité dans la maison des Piliers sur la place de Grève (à l'emplacement de l'Hôtel de Ville actuel), marqua l'apogée du rôle politique du prévôt. Après son échec, les pouvoirs de la prévôté furent diminués, puis, en 1383 après la révolte des Maillotins, celle-ci fut supprimée et unie à la prévôté de Paris sous Audouin Chauveron ; les juridictions des métiers étaient alors dissoutes.
Fin de la prévôté de Paris
Rétablie en 1412, la prévôté restera dès lors subordonnée au roi. Les prévôts seront de plus recrutés parmi les officiers royaux, chez des gens de justice ou de finance. Le 18 août 1450, une assemblée décida "qu'on n'élirait point d'autre sujet que des gens natifs de la Ville de Paris"[4]
De 1533 à 1551 est édifiée la partie nord de l'Hôtel de Ville ; la construction, interrompue par les guerres de religion, est reprise sous Henri IV (1605) et achevée en 1628. Elle correspond à la partie centrale de l'édifice actuel (mais celui-ci a été entièrement reconstruit après les incendies de la Commune en mai 1871).
Par un édit de janvier 1577, Henri III accorda la noblesse aux Prévôts des marchands, Échevins et Procureurs du roi de la ville de Paris, avec la qualité de chevalier donnée aux Prévôts. Ces privilèges furent confirmés par Louis XIV en 1659 et novembre 1706[5].
En 1588 (le 12 mai), le prévôt Nicolas-Hector de Péreuse fut arrêté avec les échevins par la section dite des Seize, et ils furent remplacés de force par d'autres. "L'ancienne forme fut rétablie le 18 octobre 1590" [6] , mais l'élection de 1592 fut retardée jusqu'au 9 novembre, à cause que "le Duc de Mayene y vouloit être présent". Après le siège de la ville par Henri IV, qui y entra solennellement le 22 mars 1594, Jean Luillier fut remplacé (avec les échevins) par Martin Langlois dès le 28 mars[7].
L'élection a lieu le lendemain de l'Assomption, le . Le prévôt des marchands et les échevins ont demandé aux seize quarteniers de convoquer les dizainiers et cinquanteniers de leur quartier, ainsi que six notables du quartier. Chaque assemblée de quartier désigne, chacune, quatre représentants en son sein. Le prévôt, les échevins, et les quarteniers suivent alors une messe solennelle du Saint-Esprit puis s'assemblent dans la grande salle de l'hôtel de ville. De chacun des seize groupes (un par quartier) sont tirés au sort, dans un chapeau, deux personnes parmi les quatre représentants. Ces trente-deux notables, ajoutés au prévôt, aux quatre échevins, aux vingt-quatre conseillers et aux seize quarteniers, composent une assemblée de soixante-dix-sept votants. C'est ce corps électoral qui choisit, à bulletin secret, dans l'après-midi, le prévôt des marchands et les échevins.
Une fois élu, le prévôt des marchands demande audience au roi, se rend au Louvre en carrosse avec les échevins, vêtus de robes de cérémonie. Il est donné lecture au roi du procès-verbal de l'élection puis le prévôt nouvellement élu prête serment « entre les mains de Sa Majesté »[8].
↑Louis Batiffol, La Vie de Paris sous Louis XIII, Éditions Calmann-Lévy, 1932, pp. 90-91.
↑Alfred Fierro, « Les représentants de ma municipalité » in: Histoire et mémoire du nom des rues de Paris, Parigramme, 1999, pp. 33-34 (ISBN2-84096-116-4).
↑Alfred Fierro, op. cit.. Est mentionné p. 191 au sein de la section « La « viviruification » : personnages honorés de leur vivant », pp. 190 et suivantes : « Bignon (prévôt des marchands, 1769 ».
Félix Lazare et Louis Lazare, Dictionnaire historique des rues et monuments de Paris [en] 1855 : avec les plans des 48 quartiers, Maisonneuve & Larose, , 796 p. (ISBN978-2-86877-184-1 et 2-86877-184-X).