NUWARD (réacteur)

NUWARD SMR
Logo de Nuward
Présentation
Type
Génération
III+
Utilisation
Production d'électricité et/ou de chaleur
Statut
en projet
Concepteur
Site web
Caractéristiques
Caloporteur
Modérateur
Neutrons
thermiques
Puissance électrique
400 MWe

Le réacteur NUWARD, abréviation de « nuclear forward », est un petit réacteur nucléaire modulaire (dit PRM ou SMR en anglais pour « small modular reactor ») en cours de développement depuis 2019.

Il est co-développé par un consortium initialement composé d'EDF, de Framatome (et de leur EPCC commune Edvance), de TechnicAtome, de Naval Group et du CEA. En 2022, Tractebel s'associe à ce consortium.

Une première version du SMR Nuward consiste en un petit réacteur à eau pressurisée (REP) de 340 MWe (en deux unités conjointes de 170 MWe). L'approche est centrée sur un réacteur très compact et faisant appel à des concepts techniques innovants, comme une chaudière nucléaire intégrée.

À l'été 2024, le projet est restructuré et TechnicAtome quitte le consortium. Une nouvelle version du SMR Nuward est alors à l'étude depuis , consistant en un REP de 400 MWe (pouvant également fournir 100 MW de chaleur pour l'industrie ou le chauffage urbain). Cette version ne ferait appel qu'à des technologies connues et éprouvées.

Histoire du projet

Le projet est officiellement annoncé le à la conférence générale annuelle de l’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) à Vienne[1]. Ce petit réacteur vise à remplacer les centrales électriques brûlant des combustibles fossiles dans le cadre de la transition énergétique et de la réduction des émissions de CO2[2]. EDF présente le premier design du réacteur le [3],[4]. Des discussions ont également eu lieu avec Westinghouse Electric[5].

La société NUWARD, filiale à 100 % d'EDF, est créée le et dirigée par Renaud Crassous[6],[7]. En 2024, elle compte employer 150 salariés, dont 50 travaillent sur le projet à sa création[8].

En , Tractebel (bureau d'ingénierie du groupe Engie) annonce rejoindre le consortium afin notamment de participer aux travaux d'ingénierie de l'îlot conventionnel[9].

Financement et coût évoqué

Le projet Nuward est financé en grande partie sur fonds propres avant d'être également financièrement soutenu par l'État français à hauteur de 50 millions d'euros dans le cadre du plan de relance économique de 2020-2022[10]. Le plan France 2030 prévoit un financement de 500 millions d'euros[6]. Les coûts de développement évoqués en 2024 à l'horizon 2035-2040 avoisine le milliard d'euros[11].

Selon la Société française d'énergie nucléaire (SFEN), le coût de construction d'un SMR Nuward serait de l'ordre d'un milliard d'euros[12].

Première version ( - )

Caractéristiques techniques

Un SMR Nuward serait destiné à la production d'électricité et composé de deux réacteurs identiques de 170 MWe pour une puissance totale de 340 MWe. La technologie retenue est de la filière des réacteurs à eau pressurisée (REP), maitrisée par EDF car similaire à celle du parc de réacteur nucléaire français[13].

L'approche initiale d'EDF est centrée sur le développement d'un réacteur compact[13]. Ainsi le SMR Nuward serait dérivé du réacteur compact K15, développé par TechnicAtome et construit par Naval Group pour les sous-marins nucléaires français et le porte-avions Charles de Gaule[12]. La conception de sa « chaudière intégrée » est innovatrice : le cœur du réacteur inclut le pressuriseur et les générateurs de vapeur à plaque à l'intérieur même de la cuve du réacteur. Cette structure permet d'occuper proportionnellement beaucoup moins de place que dans un grand réacteur[13],[14].

Le réacteur prendrait place dans un cube d’eau de 25 mètres de côté et serait semi-enterré pour le protéger des agressions extérieures. La cuve ne ferait ainsi que 4 mètres de diamètre et 13,50 mètres de hauteur, à l’intérieur d’une enceinte métallique de 15 mètres de diamètre et 16 mètres de hauteur[15], elle-même logée dans une piscine[16].

L'aspect modulaire du Nuward doit permettre sa fabrication en série en usine, ainsi qu'un assemblage sur site plus aisé par l'assemblage de modules pré-fabriqués. Des innovations importantes sont apportées en matière de sûreté passive (ne nécessitant ni source électrique, ni intervention humaine) et de simplifications d'exploitation[17],[18],[19].

Il utiliserait le même combustible nucléaire à base d'uranium faiblement enrichi à 3-5 % que les réacteurs de grande puissance français. Ce combustible serait fourni par Orano et Framatome[20],[21].

Évaluation de sûreté

EDF et ses partenaires comptent soumettre en un premier dossier d'option de sûreté à l'Autorité de sûreté nucléaire et achever en 2026 la conception et les détails techniques de ce nouveau réacteur, en vue d'une entrée sur le marché vers 2035. La construction du premier réacteur est prévue pour démarrer en 2030[22],[23]. EDF annonce le que NUWARD fera l’objet d’une pré-évaluation conjointe, menée par l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) française avec la participation des autorités de sûreté nucléaire tchèque (SUJB) et finlandaise (STUK)[24],[25].

EDF dépose le le dossier d'option de sûreté (DOS) de NUWARD auprès de l'ASN[26]. Cela ouvre la phase dite de pre-licensing, préparant la demande d'autorisation de création (DAC) prévue pour 2025. D'ici là, l'objectif est d'élaborer le basic design pour un début de commercialisation en 2025[27].

Deuxième version (depuis )

Le , alors que le projet doit entrer en phase de basic design, EDF « décide de faire évoluer la conception de son SMR »[19]. EDF justifie ce choix par les retours des autorités de sûreté nucléaires impliquées dans le développement de Nuward (ASN, STUK, SUJB, etc.)[28],[17],[18].

D'une part, les exploitants sont demandeurs de projets peu risqués sur le plan technologique, c'est-à-dire ne faisant pas appel à des concepts innovants encore non maitrisés. Il leur est préféré des « briques technologiques » éprouvées, à choisir « sur étagères ». Ainsi le concept de générateurs de vapeur à plaque directement intégrés dans la cuve du réacteur pose problème, car il n'existe pas sur le marché et présente de nombreux défis de conception. D'autre part, le besoin est exprimé de pouvoir produire de l'électricité mais aussi de la chaleur[28]. À la suite de ce changement de concept, TechnicAtome quitte le développement de Nuward[29].

Le projet de SMR Nuward est relancé en après un changement de PDG (Renaud Crassous est remplacé par Julien Garrel)[30]. Le SMR Nuward vise une puissance électrique de 400 MW, avec une option de cogénération jusqu’à 100 M Wth adaptée aux besoins des industriels et des réseaux de chaleur urbain.

Le nouvel objectif est de finaliser le basic design du réacteur d’ici mi-2026 et proposer un produit commercialisable dans les années 2030[31].

Réacteurs Nuward en projet

France

L'objectif initial d'EDF est de commencer à construire un premier réacteur Nuward en France (sur un site non encore défini) à l'horizon 2030, pour une mise en service aux alentours de 2035[32].

La présidente de la région Pays de la Loire Christelle Morançais manifeste en son interêt pour l'implantation d'un exemplaire sur le site de la centrale à charbon de Cordemais, qui doit fermer à l'horizon 2027, de même que Claude Brender, maire de Fessenheim, qui abrite la centrale nucléaire du même nom, définitivement arrêtée en 2020[33].

Italie

En , EDF, Edison, Ansaldo Energia et Ansaldo Nucleare annoncent avoir signé une lettre d’intention en soutien au développement de nouveaux projets nucléaires en Italie[34].

Dans l'objectif de décarboner sa production d'électricité, la compagnie italienne d'électricité Edison annonce en envisager la construction de deux SMR Nuward en Italie d'ici à 2030/2040, si les conditions techniques et économiques sont réunies[35].

Royaume-Uni

Le Royaume-Uni projette à l'horizon 2050 l'installation de 24 GW de capacité nucléaire sur son territoire, au moyen de nouveaux réacteurs nucléaires de forte puissance (tels les deux EPR d'Hinkley Point C et les deux EPR de Sizewell C), ainsi qu'au moyen de petits réacteurs modulaires[36].

Un appel à projets est lancé par le gouvernement britannique début 2023, et en octobre six modèles de SMR sont sélectionnés : le Nuward, l'AP300 de Westinghouse, le BWRX-300 de GE-Hitashi, le VOYGR de NuScale, le SMR-300 d'Holtec, et le SMR de Rolls-Royce[37]. Les offres des différents constructeurs sont attendues pour juin puis , mais le EDF retire Nuward de l'appel d'offre. Ce retrait fait suite à une remise à plat du concept de base du réacteur survenue la semaine précédente, ne permettant plus selon EDF de tenir les délais imposés par l'appel d'offre britannique[19],[36].

PRM concurrents

Plusieurs autres PRM sont en cours de développement et apparaissent comme des concurrents proches du réacteur Nuward : technologies similaires (réacteur à eau pressurisée (REP) ou réacteur à eau bouillante (REB)), puissances similaire (300 à 400 MWe), stades de développement proches et horizon de construction aux alentours de 2030. On peut notamment citer[38],[39] :

  • le SMR de Rolls-Royce (REP de 470 MW) ;
  • l'AP300 de Westinghouse (REP de 300 MW) ;
  • le BWRX-300 de GE-Hitashi (REB de 300 MW) ;
  • le SMR-300 de Holtec International (REP de 300 MW) ;
  • les VOYGR-4 et VOYGR-6 de NuScale (groupement de quatre ou six REP de 77 MW chacun, soit un total de 308 MW ou 462 MW).

Notes et références

  1. « CEA, EDF, Naval Group et TechnicAtome présentent NUWARD : projet commun de « petit réacteur modulaire » (Small Modular Reactor - SMR) », sur EDF France, (consulté le ).
  2. « Nucléaire : comment EDF compte revenir dans le match des petits réacteurs », Les Échos, (consulté le ).
  3. « Nucléaire : la longue route des petits réacteurs », Les Échos, (consulté le ).
  4. « EDF crée Nuward, une filiale dédiée aux petits réacteurs nucléaires », sur Investir, (consulté le ).
  5. CEA, « CEA, EDF, Naval Group et TechnicAtome présentent Nuward : projet commun de “petit réacteur modulaire" », sur CEA/Espace Presse, (consulté le ).
  6. a et b « EDF crée une filiale dédiée au petit réacteur nucléaire modulaire Nuward et embarque de nouveaux partenaires », L'Usine nouvelle,‎ (lire en ligne).
  7. « Nucléaire : les petits réacteurs modulaires, proposeront "une alternative compétitive au charbon pour accélérer la décarbonation" (Renaud Crassous, EDF) », La Tribune, (consulté le ).
  8. « Nuward », sur societe.com.
  9. « Soutenir la conception de la première technologie de petits réacteurs modulaires dans l’UE », sur Tractebel, (consulté le ).
  10. « Pourquoi Nuward, le petit réacteur modulaire (SMR) à la française, reste très prometteur », La Tribune, (consulté le ).
  11. « Nucléaire : EDF revoit sa stratégie en matière de "petits réacteurs" », sur France Info, (consulté le ).
  12. a et b Michel Cabirol, « Pourquoi Nuward, le petit réacteur modulaire (SMR) à la française, reste très prometteur », La Tribune (consulté le ).
  13. a b et c « NUWARD, le futur SMR français », sur Société française d'énergie nucléaire (consulté le ).
  14. « Le petit réacteur atomique SMR fait rêver les nucléaristes », sur Reporterre, (consulté le ).
  15. Nasrine Winther, « Le projet Nuward SMR », L'Armement, no 130,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  16. « Réacteurs nucléaires, la course aux petits modèles », La Croix,‎ (ISSN 0242-6056, lire en ligne, consulté le ).
  17. a et b « Mini-réacteur nucléaire : EDF change ses plans pour son projet Nuward », Les Échos,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  18. a et b « Nucléaire : EDF met un coup d’arrêt à son projet phare Nuward », sur L'Informé, (consulté le ).
  19. a b et c « SMR : EDF se retire de la course aux « petits réacteurs » nucléaires au Royaume-Uni », sur Connaissances des énergies, (consulté le ).
  20. « Quel avenir pour les petits réacteurs nucléaires ? » [vidéo], PNC France, .
  21. Claudine, « Les petits réacteurs nucléaires modulaires », sur PNC France, (consulté le ).
  22. « Renaud Crassous (Nuward) : Nucléaire, les petits réacteurs ont le vent en poupe », BFM TV, .
  23. Sharon Wajsbrot, « Nucléaire : EDF passe un cap dans son projet de mini-réacteur « SMR » », Les Échos,‎ (lire en ligne).
  24. « EDF avance ses pions en Europe sur les« petit réacteur modulaire » (Small Modular Reactor - SMR) », L'Express, (consulté le ).
  25. « Le SMR français Nuward voit ses options de sûreté évaluées simultanément par trois Autorités européennes » Accès libre, sur Société française d'énergie nucléaire, .
  26. « Nuward remet son dossier d’options de sûreté à l’ASN », sur Sfen (consulté le ).
  27. « NUWARD annonce l’envoi à l’Autorité de sûreté nucléaire du Dossier d’Options de Sûreté de son SMR, marquant le début du processus de pre-licensing » [PDF], (consulté le ).
  28. a et b (en) « One moment, please... », sur www.sfen.org (consulté le ).
  29. Paul Messad, « TechnicAtome quitte le projet Nuward de petit réacteur nucléaire d’EDF » Accès libre, sur Euractiv, .
  30. « Retour de Nuward, découvrez la nouvelle stratégie du SMR français », sur Sfen, (consulté le ).
  31. Ludovic Dupin, « Retour de Nuward, découvrez la nouvelle stratégie du SMR français » Accès libre, sur Sfen, .
  32. « Mini-réacteurs nucléaires : EDF revoit sa stratégie pour le projet NUWARD » Accès libre, sur Techniques de l'ingénieur, .
  33. Gaïc Le Gros, « La présidente des Pays de la Loire veut une centrale SMR Nuward » Accès libre, sur Sfen, .
  34. « EDF, Edison, Ansaldo Energia et Ansaldo Nucleare annoncent avoir signé une Lettre d’Intention en soutien au développement de projets nouveau nucléaire - 06/03/2023 », sur EDF France, (consulté le ).
  35. (en) « Edison eyes SMR deployment in Italy », sur World Nuclear News (consulté le ).
  36. a et b (en) « EDF withdraws from UK's SMR selection competition », sur World Nuclear News (consulté le ).
  37. « SMR : EDF se retire de la course aux « petits réacteurs » nucléaires au Royaume-Uni », (consulté le ).
  38. (en) « UK SMR negotiations begin with GE Hitachi, Holtec, Rolls-Royce SMR and Westinghouse », sur World Nuclear News (consulté le ).
  39. « Small Nuclear Power Reactors », sur World Nuclear Association (consulté le ).

Voir aussi

Articles connexes

 

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