Marianne PajotMarianne Pajot
Marianne Pajot ou Marie-Anne Pajot, née vers 1641, morte au Château du Bois-Froust à Niort-la-Fontaine le [1], inhumée aux Bénédictines de Lassay[2], fille de l’apothicaire de Mademoiselle de Montpensier, était un personnage remarquable par sa beauté et son esprit. BiographieOrigineSon père était apothicaire et sa mère était femme de chambre, l'un et l'autre attachés à la maison de Mademoiselle de Montpensier[3]. Élevée au Château de Saint-Fargeau, son instruction et ses manières étaient bien au-dessus de ce qu'impliquait sa naissance. Mademoiselle de Montpensier l'aimait fort et l'attirait constamment dans sa chambre; mais de méchants rapports[3] détruisirent cette intimité. Marianne fut accusée d'écrire des lettres à Paris, où elle tournait en ridicule la princesse et ses dames d'honneur: Mademoiselle, la fit partir de sa maison et, congédiée, Marianne vint demeurer à Paris chez sa tante, femme de chambre au service de la duchesse d'Orléans[3]. C'est ainsi qu'elle passa, à l'âge de 20 ans du château de Saint-Fargeau au Palais du Luxembourg, où son esprit et sa beauté lui attirèrent promptement tous les hommages[3]. CourtisaneElle se fait alors courtiser par le duc Charles de Lorraine, veuf depuis peu, et âgé alors de plus de 60 ans. Sans paraître « éblouie » de la proposition de fiançaille, elle demanda du temps pour réfléchir, et dix-huit mois s'écoulèrent de la sorte[3]. Marianne était fiancée à Charles de Lorraine, duc de Lorraine, et avait été sur le point de l’épouser en 1662. Au moment de la signature, le roi envoya son ministre Le Tellier pour obtenir de Marianne Pajot qu’elle fît renoncer le duc à ses droits sur la Lorraine. Si elle ne consentait pas à agir dans ce sens, le roi la ferait enfermer dans un couvent. Marianne ne se prêta pas à cet arrangement et refusa tout net d’entrer dans les vues du roi. Elle rendit au duc sa parole et fut conduite à la Ville-l’Évêque, où elle demeura enfermée tout le temps du séjour du duc de Lorraine en France. Cette aventure aurait été connue de Marivaux et lui aurait servi de thème pour son roman la Vie de Marianne, mais cette hypothèse n’est plus guère retenue aujourd’hui[4],[5]. Dans son Recueil, Armand de Madaillan de Lesparre a consacré une partie de son récit de l'aventure de Marianne Pajot avec le duc de Lorraine[6]. Le récit
Quelques années après la paix des Pyrénées, le duc de Lorraine vint en France où il fit un traité avec le roi, par lequel il lui cédoit ses états à des conditions écrites en plusieurs endroits, trop longues pour être mises ici, et de plus, inutiles à ce que j'ai dessein de dire : Après avoir fait ce traité , il s'en repentit, et ne voulut plus qu'il eut d'exécution[7]. Pendant tout ce temps-là il voïoit au Luxembourg, chez Madame, qui étoit sa soeur, et chez Mademoiselle, une fille, que sa beauté, ses grâces et son esprit avoient mis dans le monde d'un air bien différent de celui qu'elle y devoit avoir par sa naissance; elle s'appeloit Marianne, et n'étoit que femme de chambre de Mademoiselle ; ses qualitez aimables et ses manières nobles qui avoient plû à tout le monde touchèrent le duc de Lorraine qui en devint passionnément amoureux ; il s'aperçut bien tôt que ce n'étoit pas une conquête aisée, et il l'estima assez pour la vouloir faire Duchesse de Lorraine, il lui dit donc qu'il vouloit l'épouser. On peut aisément imaginer l'effet que fit une telle proposition sur une jeune personne dont l'âme étoit noble et élevée ; elle regarda un honneur si surprenant avec modestie, mais elle n'en fut point éblouie au point de s'en croire indigne. M. de Lorraine parla à ses parens et la chose alla si loin qu'il y eut un contrat de mariage fait dans toutes les formes; que les bans furent publiés, et le jour pris pour faire le mariage[8]. Comme tout cela ne se fit pas avec un grand mystère, Madame soeur de M. de Lorraine, en étant avertie, fit tout ce qu'elle pût auprès de lui pour l'empêcher de faire un mariage si inégal; mais voïant que tout ce qu'elle pouvoit dire étoit inutile, elle eût recours au Roi et à la Reine-Mère, et les supplia d'empêcher ce mariage. D'un autre côté, M. Le Tellier , instruit de ce qui se passoit, et qui avoit fait avec M. de Lorraine le traité par lequel il donnoit ses Etats, vint trouver le Roi et lui dit qu'il se présentoit l'occasion du monde la plus favorable pour engager M. de Lorraine à finir une affaire aussi avantageuse à la France qu'étoit le traité en question, qu'il falloit aller trouver Mademoiselle Marianne, et lui dire que si elle voulait obliger M. de Lorraine à exécuter ce traité, que le Roi non seulement n'empècheroit point son mariage, mais qu'il la reconnoîtroit Duchesse de Lorraine ; et que si elle ne lui obéïssoit, il accorderoit à Madame la grâce qu'elle lui demandoit avec tant d'insistance, qui étoit de la faire mettre dans un couvent. La proposition aiant été agréée par le Roi, M. Le Tellier lui dit qu'il n'y avoit pas un moment à perdre parce que le mariage se devoit faire la nuit même ; qu'il eût donc la bonté de lui donner un officier et trente de ses gardes, et qu'il iroit sur le champ chercher Mademoiselle Marianne pour lui parler, ce qui fut exécuté. Il la trouva à table avec M. de Lorraine et sa famille qui étoit assemblée chez un de ses oncles, où se faisoit le festin de noces, en attendant minuit, pour s'aller marier. Je crois que la surprise fut grande de voir arriver M. Le Tellier, qui demanda à parler en particulier à la mariée. Il remplit son ordre en homme qui avoit fort envie de réussir. Il lui fit envisager tout ce qu'elle avoit à craindre et a espérer, et il lui dit enfin qu'il ne tenoit qu'a elle d'être reconnue le lendemain Duchesse de Lorraine par le Roi ; qu'elle n'avoit qu'à faire signer à M. de Lorraine un papier qu'il avoit apporté avec lui et qu'il lui montra et qu'elle seroit reçue au Louvre avec tous les honneurs dûs à un si grand rang; mais que si elle refusoit de faire ce que Sa Majesté souhaitoit, qu'il y avoit à la porte un de ses carrosses, trente gardes du corps et un enseigne qui avoit ordre de la mener au couvent de la Ville-l'Evèque, ce que Madame demandoit avec beaucoup d'empressement. L'alternative étoit grande, et il y avoit lieu d'être tentée. Marianne ne balança pas un moment et elle répondit à M. Le Tellier qu'elle aimoit beaucoup mieux demeurer Marianne que d'être Duchesse de Lorraine aux conditions qu'on lui proposait ; et que si elle avoit quelque pouvoir sur l'esprit de M. de Lorraine, qu'elle ne s'en serviroit jamais pour lui faire faire une chose si contraire à son honneur et à ses intérêts'; qu'elle se reprochait déja assez le mariage que l'amitié qu'il avoit pour elle lui faisoit faire. M. Le Tellier, touché d'un procédé si noble, lui dit qu'on lui donneroit, si elle vouloit, vingt-quatre heures pour y songer : elle lui répondit que son parti étoit pris, et qu'elle n'avoit que faire d'y penser d'avantage, et puis elle rentra dans la chambre où étoit la compagnie pour prendre congé de M. de Lorraine, qui aïant appris dequoy il étoit question, se mit dans des transports de colère effroïables; après l'avoir calmé autant qu'elle put, elle donna la main à M. Le Tellier, laissant la chambre toute remplie de pleurs, et monta dans le carrosse du Roi sans verser une larme. Quelques jours après elle renvoïa à M. de Lorraine par une de ses tantes, pour un million de pierreries qu'il lui avoit données, lui disant qu'il ne lui convenoit pas de les garder, n'aïant pas l'honneur d'être sa femme. Elle demeura à La Ville-l'Evêque, où il y avoit ordre de ne la point laisser voir à M. de Lorraine, tout le temps qu'il resta en France, ce qui fut quatre ou cinq mois, étant gardée par une compagnie aux gardes, dans la crainte qu'on avoit qu'il ne l'enlevât, aïant même fait quelques tentatives pour cela, et elle n'en sortit que lorsqu'il fut retourné en Lorraine, d'où il lui manda (sçachant qu'elle étoit en liberté) que si elle vouloit le venir trouver dans ses Etats avec sa mère, ou quelqu'une de ses tantes, qu'il acheveroit un mariage qu'il souhaitoit toujours passionément. La crainte qu'elle eût de lui, si elle étoit une fois en lieu où il fut le maître, fit qu'elle lui répondit qu'elle ne pouvoit point se résoudre à aller en Lorraine sans être auparavant sa femme. Il lui écrivit pendant un temps assez long, beaucoup d'autres lettres, par lesquelles il lui disoit qu'il viendrait l'épouser en France s'il n'avoit pas peur d'y être arrêté, étant brouillé avec le Roi ; mais effraïée par beaucoup d'exemples de légèreté qu'il avoit déja donnez en pareilles occasions, elle ne pût jamais se rassurer, et elle lui répondit toujours sur le même ton. J'ai écrit une action aussi belle et aussi singulière que celle-là pour mon fils et pour ses enfants, afin qu'ils en conservent la mémoire et qu'ils tâchent à imiter une mère si vertueuse ; j'ose même leur dire qu'une fille qui avoit tant de noblesse dans l'âme est peut-être préférable à une demoiselle dont les pères sont souvent parvenus, par des voies basses et honteuses, aux honneurs qui ont illustré leur maison. M. Le Tellier qui étoit demeuré fort des amis de Mademoiselle Marianne depuis leur conversation, l'a contée bien des fois en sa vie, et il parloit toujours d'elle avec admiration ; l'abesse de La Ville-l'Evêque et les religieuses ne lui donnoient pas moins de louanges. Bien des années après, s'étant trouvée en un commerce assez familier avec le Roi, il lui demanda un jour si elle lui avoit pardonné de l'avoir empêchée d'être duchesse de Lorraine ; elle lui répondit qu'aïant contribué depuis à lui faire épouser un homme de condition qu'elle aimoit, et dont elle croïait être aimée, qu'elle lui avoit pardonné aisément d'avoir rompu son mariage avec un souverain qui l'auroit rendue moins heureuse qu'elle n'étoit. Extrait des Recueil de différentes choses d'Armand de Madaillan de Lesparre.
Mme de MadaillanDevenu veuf à 23 ans, Armand de Madaillan de Lesparre en était fort épris et l’épousa malgré l’opposition de son père, Louis II de Madaillan-Lespare, marquis de Montataire. D’après la tradition, leur nuit de noces dura 72 heures… De ce mariage, elle eut un fils, Léon de Madaillan de Lesparre. Le marquis de Montataire pour prix de son consentement imposa un traité à son fils le par lequel il retirait à Armand la terre de Montataire et lui laissait l’hôtel particulier de Paris et le marquisat de Lassay, à la condition de prendre en charge une partie de ses dettes.
La finSes obsèques eurent lieu le en l'église de Niort-la-Fontaine, et furent célébrés par le curé de la paroisse, entouré d'un grand nombre de membres du clergé de la région. Son corps fut déposé dans le cloître du Couvent des Bénédictines de Lassay[9].
. Voir aussiNotes et références
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