Lucien Lacour

Lucien Lacour, né le dans le 5e arrondissement de Paris et mort en août 1944, est un menuisier et militant de l'Action française.

Biographie

Jeunesse

Né le 31 août 1885 à Paris au no 3 de la rue Linné, Edmond-Lucien Lacour est le fils d'Élise Jublin (1857-1930) et de Frédéric-Louis-Ernest Lacour (1856-1936), menuisier[2]. Ce dernier est le fils d’Auguste-François Lacour, qui a fondé l'entreprise familiale en 1871.

Lucien est tout d'abord élève de l'école Lavoisier puis suit des cours à l'école des arts décoratifs avant d'accomplir son service militaire comme engagé volontaire au sein du 1er bataillon de chasseurs à pied, en garnison à Troyes, sous les ordres du commandant Émile Driant, puis du commandant Lorillard[3],[4]. Contrairement à une anecdote rapportée par plusieurs journaux, il n'y a pas été sous-officier et n'a pas été « cassé » pour avoir refusé de marcher contre les opposants aux inventaires[5].

Engagement politique

Lucien travaille comme ouvrier-menuisier dans l'atelier familial, dirigé par son père et son frère aîné Maurice-Auguste (1884-1915), au no 3 de la rue Vésale[5]. Les trois hommes partagent un engagement politique à l'extrême droite. Membre entre 1903 et 1907 de la Ligue des patriotes[3], Lucien prend part aux campagnes électorales de Gabriel Syveton, Jules Auffray et Henry Chérot (d)[4]. Il rejette ensuite le républicanisme sous l'influence d'un nouveau journal, L'Action française, organe du mouvement royaliste, antisémite et antimaçonnique de l'Action française (AF). En 1908, qu'il rejoint ce mouvement, dans les rangs des camelots du roi[6].

Au cours de la seconde phase de l'affaire Thalamas, en février 1909, il accompagne Maurice Pujo lors d'une expédition punitive contre le professeur Amédée Thalamas, que les royalistes accusent de manquer de respect à Jeanne d'Arc[7]. La même année, il prononce plusieurs discours au nom des camelots du roi, dont il intègre le comité directeur, aux côtés de Maxime Real del Sarte (président), Marius Plateau (secrétaire général), Armand du Tertre (trésorier), Lucien Martin, Jean Dorange et Edmond de Rigaud[8]. Lors de la crue de la Seine de 1910, il participe à la construction de plusieurs maisons de fortune en faveur des sinistrés à Vigneux-sur-Seine[4].

Gifle à Aristide Briand

Le 20 novembre 1910, à l'occasion de l'inauguration de la statue de Jules Ferry au jardin des Tuileries, Lucien Lacour agresse à coups de poing le président du conseil Aristide Briand[3]. Il expliquera ainsi les motifs de son geste : « Briand représentait pour moi la loi de séparation, les inventaires, la loi de spoliation, ce qui froissait ma conscience de catholique ; c’était pour moi le défenseur d'Hervé, devenu le défenseur de la société capitaliste ; il représentait, aussi la république et Jules Ferry, qui a chassé Dieu de l’école et mis les protestants à la tête de l’instruction publique. Au nom des patriotes, au nom des catholiques, j'ai voulu marquer la face de Briand. Enfin, c'était, le moment de l’avènement de Lafferre [nommé ministre le 4 novembre], le délateur. C'est la goutte d’eau qui a fait déborder le vase »[9]. « Pourquoi ai-je agi ainsi ? Parce que notre doctrine, c'est la violence, mise au service de la raison »[10].

Lucien Lacour au banc des accusés le 28 mars 1911.

La Ligue d'Action française salue cet « acte lumineux et fort » tandis que le comité directeur des camelots du roi récompense Lacour du titre de vice-président[4]. Quant au prétendant royaliste Philippe d'Orléans (1869-1926), il semble désavouer à demi-mot l'agression par l'intermédiaire du comte Henri de Larègle, chef de son bureau politique[11].

Inculpé de violences envers un magistrat de l'ordre administratif, Lucien Lacour encourt de deux à cinq ans d'emprisonnement[5]. Le 6 décembre, il comparaît devant la 9e chambre correctionnelle, qui le condamne à trois ans de prison[12]. Incarcéré à la prison de la Santé puis à la maison centrale de Clairvaux, il est gracié le 16 janvier 1912 à la demande Briand qui vient d'être nommé ministre de la Justice[13].

Lucien Lacour fraternise avec le socialiste Gustave Hervé, leader de La Guerre Sociale et antimilitariste, en prison, en 1911.

Le 19 février 1914, Lucien Lacour épouse Marie-Antoinette-Cornélie Baetz (1896-1949), sœur du camelot du roi Gaston Baetz. Leurs témoins sont la marquise de Mac Mahon Marthe de Vogüé, Eugène Bignon, Charles Maurras et Maurice Pujo[14]. Peu de temps après, Il reprend la maison de menuiserie et parquets Bouquet, fondée en 1880 et installée au no 28 de la rue Dussoubs[15].

Première Guerre mondiale

Pendant la Première Guerre mondiale, il sert comme éclaireur-cycliste[16] puis comme caporal-mitrailleur au sein du 71e bataillon de chasseurs à pied avant d'être hospitalisé puis réformé en 1916, en raison d'une phlébite[17]. Son frère aîné Maurice est tué au front le 18 janvier 1915, le jour même où nait le fils de Lucien, également prénommé Maurice (1915-2010). Lucien reprend par la suite la direction de l'entreprise familiale de la rue Vésale, à laquelle il associe Charles Saint-Léger en 1931[18]. En 1936, Saint-Léger revend ses parts au beau-frère de Lacour, Gaston Baetz[19].

L'entre-deux-guerres

Lors des élections législatives de 1919[20], puis de celles de 1924[21], Lacour figure sur la liste conduite par Léon Daudet dans la 3e circonscription de la Seine.

Après l'assassinat de Marius Plateau, le 22 janvier 1923, Lacour le remplace pendant quelque temps en tant que secrétaire général de la Fédération nationale des Camelots du roi et de la Ligue d'Action française[22]. En juin 1924, il est nommé vice-président d'honneur de cette dernière[23].

Après la dissolution des organisations d'Action française, en 1936, Lacour se fait plus discret puis poursuit son militantisme royaliste au sein de la Propagande monarchiste, l'organisation du comte de Paris Henri d'Orléans (1908-1999)[24]. Il quitte l'Action française vers 1937-1938 au profit du Courrier royal[25], il est dès lors considéré comme un « transfuge » par une partie des anciens ligueurs et Camelots du Roi[26].

Il meurt peu de temps avant le 11 août 1944, date à laquelle Charles Maurras lui rend hommage dans les colonnes de L'Action française[27].

Discographie

Lucien Lacour a enregistré un disque 78 tours chez Hébertot[28] avec les textes suivants :

  • La leçon du 6 février
  • Comment et pourquoi j’ai giflé Briand le 20 novembre 1910

Notes et références

  1. « https://www.siv.archives-nationales.culture.gouv.fr/siv/UD/FRAN_IR_059528/fichier_l_1141 »
  2. « Acte de naissance no 2096 (vue 26/31) de Edmond Lucien Lacour du registre des naissances de l'année 1885 du 5e arrondissement de Paris »
  3. a b et c Excelsior, 21 novembre 1910, p. 1-2 et 6.
  4. a b c et d L'Action française, 21 novembre 1910, p. 1-2.
  5. a b et c Le Journal, 21 novembre 1910, p. 1 et 4.
  6. L'Action française, 9 août 1909, p. 1-2.
  7. L'Action française, 24 février 1909, p. 1-2.
  8. L'Action française, 8 octobre 1909, p. 2.
  9. Le Droit, 29 mars 1911, p. 3.
  10. La Presse, 29 mars 1911, p. 1.
  11. L'Univers, 23 novembre 1910, p. 4.
  12. Le Journal, 7 décembre 1910, p. 1-2.
  13. Ecelsior, 17 janvier 1912, p. 6.
  14. Archives de Paris, état civil du 5e arrondissement, registre des mariages de 1914, acte no 179 (vues 28 et 29 sur 31).
  15. L'Action française, 12 et 19 juillet 1914.
  16. L'Action française, 2 février 1915, p. 1.
  17. L'Action française, 24 septembre 1916, p. 1.
  18. Archives commerciales de la France, 12 août 1931, p. 3962.
  19. Archives commerciales de la France, 6 mai 1936, p. 2021.
  20. L'Action française, 3 novembre 1919, p. 1.
  21. Le Matin, 19 avril 1924, p. 2.
  22. L'Action française, 11 février 1923, p. 3.
  23. L'Action française, 26 juin 1924, p. 3.
  24. Le Petit Courrier, 12 décembre 1938, p. 1.
  25. Eugen Joseph Weber (trad. Michel Chrestien), L'Action française, Stock (Montrouge, Impr. moderne), (lire en ligne), p. 501
  26. L'Étudiant français, 25 avril 1938, p. 4.
  27. L'Action française, 11 août 1944, p. 2.
  28. Hébertot, DX 3009

Bibliographie

  • Agnès Callu et Patricia Gillet, « Les hommes de terrain : Lucien Lacour, Marius Plateau et Maxime Réal Del Sarte », dans Lettres à Charles Maurras : Amitiés politiques, lettres autographes, 1898-1952, Villeneuve d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, (lire en ligne), p. 177-206