Le Livre vermeil de Montserrat (en catalan : Llibre Vermell de Montserrat) est un recueil de textes religieux, parmi lesquels figurent plusieurs hymnes de la fin du Moyen Âge. Le manuscrit a été réalisé au XIVe siècle à l'abbaye de Montserrat, en Catalogne, où il se trouve toujours aujourd'hui.
Manuscrit
Le manuscrit a été écrit vers 1399 et contenait environ 350 pages (172 doubles pages format in-folio), dont seulement 137 nous sont parvenues, notamment en raison de l'incendie qui ravagea le monastère en 1811, pendant la guerre d'indépendance espagnole. Le titre fait allusion à la couverture de velours rouge qui contenait le recueil à la fin du XIXe siècle. Toutes les œuvres sont anonymes.
Le monastère abrite le sanctuaire de la Vierge de Montserrat, qui était un lieu de pèlerinage très fréquenté au moment de l'écriture, de la réalisation du manuscrit.
Contenu musical
Le réalisateur anonyme de cette compilation en définit clairement l'objectif :
« Quia interdum peregrini quando vigilant in ecclesia Beate Marie de Monte Serrato volunt cantare et trepidiare, et etiam in platea de die, et ibi non debeant nisi honestas ac devotas cantilenas cantare, idcirco superius et inferius alique sunt scripte. Et de hoc uti debent honeste et parce, ne perturbent perseverantes in orationibus et devotis contemplationibus. »
« Lorsqu'ils veillent la nuit dans l'église de Notre-Dame de Montserrat, les pèlerins souhaitent parfois chanter et danser, et aussi le jour sur le parvis. Or en ce lieu ne doivent se chanter que des chansons chastes et pieuses. C'est pour ces raisons que nous en avons transcrites ci-dessus et en dessous. Elles doivent donc être utilisés avec modestie, en prenant garde de ne pas perturber ceux qui sont plongés dans la prière ou dans la dévotion contemplative. »
Ces cantiques étaient donc écrits pour des pèlerins afin qu'ils puissent utiliser un registre « chaste et pieux » (littéralement : honnête et dévot, ou encore : digne d'estime et dévoué à l'égard de Dieu).
Ils sont rédigés en catalan, en occitan ou en latin. Bien que le recueil ait été réalisé à la fin du XIVe siècle les styles musicaux utilisés semblent plus anciens. Par exemple, le motetImperayritz de la ciutat joyosa contient deux textes différents qui pouvaient être chantés en même temps, un style qui était considéré comme démodé au moment de la constitution du manuscrit.
Ces cantiques possèdent de nombreuses caractéristiques de la musique traditionnelle ou des hymnes. Certains sont des monodies et d'autres sont construits en deux ou quatre parties polyphoniques non imitatives. Certaines monodies peuvent être chantées en canon. La simplicité relative de ces cantiques, couplées avec de fortes mélodies, ont contribué à assurer le succès postérieur de l'ouvrage. Ils figurent parmi les pièces de musique ancienne les plus souvent enregistrées de nos jours.
Œuvres rescapées
Les dix œuvres musicales contenues dans ce manuscrit sont les suivantes :
O virgo splendens (« O Vierge resplendissante »)
Stella splendens (« Étoile brillante »)
Laudemus Virginem (« Louons la Vierge »)
Mariam, matrem virginem, attolite (« Célébrez Marie la vierge mère »)
Imperayritz de la ciutat joyosa / Verges ses par misericordiosa (« Impératrice de la cité joyeuse / Vierge à la miséricorde sans égale »)
Ad mortem festinamus (« Nous nous hâtons vers la mort »)
O virgo splendens
Paroles :
« Antiphona dulcis armonia dulcissime virginis Marie de Monteserrato.
Caça de duobus vel tribus:
O Virgo splendens hic in monte celso Miraculis serrato
fulgentibus ubique quem fideles conscendunt universi.
Eya pietatis occulo placato
cerne ligatos fune peccatorum ne infernorum
ictibus graventur sed cum beatis tua prece vocentur. »
« Antienne pleine aux douces harmonies à la douce Vierge Marie de Montserrat. Canon à deux ou trois voix :
Oh vierge resplendissante, ici sur cette fière montagne
Dont les prodiges éclatants se propagent en tout lieu
Et que les fidèles gravissent tous ensemble.
Va ! Pose ton regard bienveillant de piété
Sur ceux entravés par leur péchés
Afin qu'ils ne tombent pas dans les affres de l'enfer
Mais qu'ils soient appelés auprès des saints grâce à ta prière. »
Stella splendens
Les paroles :
« Sequitur alia cantilena ad trepudium rotundum :
Stella splendens in monte ut solis radium
Miraculis serrato exaudi populum.
Concurrunt universi gaudentes populi
divites et egeni grandes et parvuli
ipsum ingrediuntur ut cernunt oculi
et inde revertuntur gracijis repleti.
Principes et magnates extirpe regia
saeculi potestates obtenta venia
peccaminum proclamant tundentes pectora
poplite flexo clamant hic : Ave Maria.
Prelati et barones comites incliti
religiosi omnes atque presbyteri
milites mercatores cives marinari
burgenses piscatores praemiantur ibi.
Rustici aratores nec non notarii
advocati scultores cuncti ligni fabri
sartores et sutores nec non lanifici
artifices et omnes gratulantur ibi.
Reginae comitissae illustres dominae
potentes et ancillae juvenes parvulae
virgines et antiquae pariter viduae
conscendunt et hunc montem et religiosae.
Coetus hic aggregantur hic ut exhibeant
vota regratiantur ut ipsa et reddant
aulam istam ditantes hoc cuncti videant
jocalibus ornantes soluti redeant.
Cuncti ergo precantes sexus utriusque
mentes nostras mundantes oremus devote
virginem gloriosam matrem clementiae
in coelis gratiosam sentiamus vere. »
« Suit une autre chanson à danser en rond :
Étoile resplendissante sur la montagne, telle un rayon du soleil
Sertie de miracles, Exauce les prières de ton peuple.
Tous les peuples accourent ensemble, Remplis de joie;
Riches et pauvres, Grands et humbles,
Gravissent la montagne, Pour voir de leurs yeux
Et en redescendent, Remplis par la grâce.
Les princes et les Grands, Ceux de souche royale,
Les puissances du siècle, Une fois obtenu
Le pardon de leurs péchés, le proclament en se frappant la poitrine,
C'est ici qu'à genoux, Ils clament « Ave Maria ».
Les prélats et les barons, Les comtes illustres,
Tous les religieux et tous les prêtres,
Soldats, marchands, Citadins, marins,
Bourgeois, Pêcheurs, Tous ici rendent grâce.
Les paysans, les laboureurs, Mais aussi les notaires,
Avocats, sculpteurs, Tous les charpentiers,
Cantonniers et couturiers, Mais aussi les fileurs,
Tous les artisans, Rendent grâce ici.
Reines, comtesses, Illustres dames,
Puissantes et servantes, Jeunes et humbles,
Vierges et vieilles, Et puis les veuves,
Et les religieuses escaladèrent Aussi cette montagne.
Ces foules s'assemblèrent, Ici pour présenter leurs requêtes,
Dire leurs remerciements, Et pour rendre grâce.
Elles enrichirent ce lieu. Comme tous, en voyant ce spectacle,
Elles apportèrent leur joie, Et purent repartir délivrées.
Tous alors, des deux sexes, purifions
Notre âme par la prière, prions avec dévotion
La Vierge pleine de gloire, la mère de clémence.
Puissions nous la voir dans les Cieux, vraiment, elle qui est pleine de Grâce. »
Laudemus Virginem
Ce chant est un canon à deux ou trois voix.
« Laudemus Virginem Mater est et ejus filius Ihesus est
Plangamus scelera acriter sperantes in Ihesum jugiter. »
Louons la Vierge qui est mère et son fils qui est Jésus.
Confessons sans faillir nos péchés
sans cesser d’espérer en Jésus.
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Ad mortem festinamus
Cuncti simus concanentes
Cette pièce est un virelai dont voici les paroles :
« Refrain: Cuncti simus concanentes: Ave Maria. (bis)
Virgo sola existente en affuit angelus.
Gabriel est appellatus atque missus celitus.
Clara facieque dixit ; Ave Maria. (bis)
Clara facieque dixit ; audite carissimi. (bis)
En concipies Maria ; Ave Maria. (bis)
En concipies Maria ; audite carissimi. (bis)
Pariesque filium ; Ave Maria. (bis)
Vocabis eum Ihesum ; Ave Maria. (bis) »
Cette pièce est intéressante par la variété des interprétations actuelles. Voici quelques exemples dont certains sortent du cadre de la musique ancienne :
style "musique sacrée" par la chorale Allegro de Barcelone Cuncti simus concanentes ;
style "arabo-andalou" par l'ensemble Sarband(en) ;