C'est le , que Léonard Lipp et son épouse Pétronille ouvrent leur brasserie boulevard Saint-Germain. Alsacien d'origine, né à Goldbach le 5 novembre 1846 dans le département du Haut-Rhin, Léonard Lipp a fui sa terre natale, devenue allemande, et se consacre à la préparation de cervelasrémoulade en entrée et de choucroute en plat de résistance, le tout accompagné de bière. Sa convivialité et des prix modestes lui font connaître un franc succès. L'établissement porte alors le nom de Brasserie des Bords du Rhin[1]. La germanophobie lors de la Première Guerre mondiale l'oblige à prendre comme nouveau nom la Brasserie des Bords pendant quelques années[2].
En 1905, Jules Cazé en devient propriétaire. Il la revend ensuite à M. Hébrard[1],[2].
En , le bougnat Marcelin Cazes (et non Marcellin) reprend l'établissement, qui était déjà fréquenté par quelques poètes comme Verlaine ou Apollinaire. Il le fait décorer avec des céramiques murales de Léon Fargue - le père de Léon-Paul Fargue[1] -, les plafonds peints de Charley Garry, les banquettes en moleskine marron. C'est en 1935 que Marcelin créera le prix Cazes, qui était originellement attribué chaque année à un auteur n'ayant jamais eu d'autre distinction littéraire, ce qui n'est plus le cas aujourd'hui. En 1955, Marcelin passe le flambeau à son fils Roger Cazes. Entre la fin des années 1950 et le début de la décennie suivante, Gaby Aghion organise pour la marque Chloé les défilés de prêt-à-porter dans cette brasserie[3].
C'est devant cette brasserie, le , que Mehdi Ben Barka, opposant politique au roi du Maroc, Hassan II, a été enlevé par les services secrets marocains avec de probables collaborations locales. L'« affaire Ben Barka » deviendra un scandale politique qui altérera profondément les relations entre la France et le Maroc.
Les décors sont d'origine et les menus du jour n'ont pas été changés depuis les années 1930[5].
Prix Cazes
Le prix Cazes est un prix littéraire créé dans le but de récompenser les auteurs de moins de 40 ans n'ayant jamais été primés, afin de leur servir de « rampe de lancement ». Depuis sa création, ce principe a cependant été abandonné. Il est doté d'un chèque de 4 000 euros et de vingt repas gratuits à la brasserie[7].
Une scène du film Tanguy (2001) y est tournée[10],[5].
Littérature
L'écrivain Pierre Bourgeade a écrit plusieurs nouvelles ayant pour cadre la célèbre brasserie : « La Perleuse » (dans Cybersex et autres nouvelles, Éditions Blanche, 1997 (ISBN978-2911621093)) ; « Histoire de Chimène » (dans Senso, mars-, no 13) ; « Chimène chez Lipp » (extrait d'Éloge des fétichistes, Tristram, 2009, 193 p. (ISBN978-2907681766)).
Bibliographie
Marcelin Cazes, 50 ans de Lipp, 1966, éditions de La Jeune Parque, 196 pages ;
↑Denis Bruna (dir.), Chloé Demey (dir.), Astrid Castres, Pierre-Jean Desemerie, Sophie Lemahieu, Anne-Cécile Moheng et Bastien Salva, Histoire des modes et du vêtement : du Moyen Âge au XXIe siècle, Éditions Textuel, , 503 p. (ISBN978-2845976993), « Le défilé, de la présentation intimiste à la surmédiatisation », p. 435
↑Charles Jaigu, « Quand les politiques cuisinent la gastronomie française », Le Figaro, supplément « Le Figaro et vous », 29-30 janvier 2022, p. 28-29 (lire en ligne).
↑ abc et dBertrand de Saint-Vincent, « Claude Guittard, l'œil de Paris », Le Figaro, 12-13 décembre 2020, p. 39 (lire en ligne).