Il a été récompensé par le prix de l'Association française des cinémas d'art et d'essai[1].
La particularité du film se situe dans la désynchronisation de ce que Duras appelle « le film des voix » et « le film des images ». En effet, les personnages ne parlent jamais en « son synchrone in » (leurs paroles ne sont accompagnées d'aucun mouvement des lèvres).
Synopsis
Dans l’Inde britannique des années 1930, à l'ambassade de France de Calcutta, des voix évoquent le souvenir d’une femme aujourd’hui disparue et inhumée au cimetière de la ville : Anne-Marie Stretter, autrefois épouse de l’ambassadeur… Un soir, lors d’une réception à l’ambassade et dans la torpeur estivale de la mousson, le vice-consul de France à Lahore avait crié son amour à Anne-Marie au beau milieu de la réception…
La première partie évoque la vie d'Anne-Marie Stretter aux Indes, la seconde met en scène la réception qui a lieu à l'ambassade de France à Calcutta, et la dernière se situe aux îles de l'embouchure du Gange.
Les prises de vue ont été effectuées durant 12 jours en 1974[3].
Bien que l'action se déroule à Calcutta, les extérieurs ont été tournés en France, à Boulogne-Billancourt, au château Rothschild[4]. Les intérieurs ont été tournés dans un autre lieu, le château étant trop délabré à l'époque.
L'acteur Michael Lonsdale raconte qu'il n'était pas prévu au départ que le film soit tourné en voix off :
« Le premier jour de tournage, c'était la scène de bal. Marguerite envoie la musique et nous demande de dire notre texte. L'ingénieur du son lui explique que ce n'est pas possible, que c'est l'un ou l'autre. Elle ne connaissait rien au mixage. Alors elle dit : "Très bien, on enregistre la musique et ils se taisent." C'est comme ça que le film est entièrement en voix off[6] ! »
« À vrai dire, je ne sais pas trop d’où il vient Carlos d’Alessio, on dit du pays argentin, mais lorsque j’ai entendu sa musique pour la première fois, j’ai vu qu’il venait du pays de partout, j’ai vu des frontières aplanies, des défenses disparues, la libre circulation des fleuves, de la musique, du désir, et j’ai vu que j’étais aussi bien de cette nation argentine que lui, Carlos d’Alessio, de ce Viêtnam, du Pacifique Sud, quelle joie, j’ai été heureuse, et je lui ai demandé de faire la musique pour un film de moi, il a dit oui, j’ai dit sans argent, et il a dit oui, et moi j’ai fait les images et les paroles en raison du blanc que je lui laissais pour sa musique à lui et je lui ai expliqué que ce film se passait dans un pays qui nous était inconnu, aussi bien à lui qu’à moi, les Indes coloniales, l’étendue crépusculaire, de lèpre et de faim des amants de Calcutta, et que nous devions les inventer tous les deux en entier. Nous l’avons fait. Et de cette façon, la chose s’est faite, nous avons fait complètement ensemble, lui et moi, ce film du titre India Song et le film a été terminé et il est sorti de nos mains, et il nous a quittés, et il est en train de parcourir le monde contenant à jamais dans son être les éclats douloureux arrachés de notre corps, et nous laissant toujours privés, et de même toujours privés de nous-mêmes ensemble la faisant, nous laissant là, à faire d’autres musiques, d’autres films, d’autres chansons, et à toujours nous aimer aussi fort, tellement, si vous saviez. »
C'est durant la projection d’India Song, en 1975, au cinéma Lux à Caen, que Marguerite fait la rencontre de Yann Andréa, écrivain qui fut son dernier compagnon et à qui elle dédia certaines de ses œuvres.[réf. nécessaire]
↑Marguerite Duras a ultérieurement écrit des paroles sur le thème principal, ce qui est devenu la chanson India Song interprétée par Jeanne Moreau et reprise ensuite par d'autres chanteurs (voir India Song dans le répertoire des œuvres de la Sacem).
Sémir Badir, « India Song ou le temps tragique », Cinémas : revue d'études cinématographiques/ Cinémas: Journal of Film Studies, vol. 5, nos 1-2, , p. 123-133 (lire en ligne)
Alissa Wenz, « L’année dernière à Calcutta », Critikat, (lire en ligne, consulté le )
Thierry Jutel, « Marguerite Duras et le cinéma de la modernité : tout [est] ce qu'il n'y a pas dans India Song », The French Review, vol. 66, no 4, , p. 638-647 (lire en ligne, consulté le )
L'année indiquée est celle de la cérémonie. De 1949 à 1956, l'Oscar est un prix d'honneur, sans propositions ou nominations de films. Les films sont ceux qui sont proposés à la nomination par la France ; tous ne figurent pas dans la liste finale des films nommés.