Grand Prix automobile du Portugal 1958Grand Prix du Portugal 1958
Le Grand Prix du Portugal 1958 (VII Grande Prémio de Portugal), disputé dans la ville de Porto sur le circuit de Boavista le , est la soixante-treizième épreuve du championnat du monde de Formule 1 courue depuis 1950 et la neuvième manche du championnat 1958. Contexte avant le Grand PrixLe championnat du mondeLa physionomie des Grands Prix a quelque peu changé en 1958, la Commission Sportive Internationale (C.S.I.) ayant banni l'utilisation du carburant libre au profit du carburant de type 'Avgas', employé en aviation, et réduit la longueur des épreuves à trois cents kilomètres au lieu de cinq cents. L'usage du nouveau carburant a entraîné une perte de puissance de l'ordre d'une vingtaine de chevaux[1] par rapport à la saison précédente, perte compensée par la réduction de poids des nouvelles monoplaces, dont la capacité des réservoirs a été considérablement réduite. Largement favori dans la course au titre mondial après la retraite sportive de Juan Manuel Fangio, Stirling Moss, malgré deux victoires en début de saison, a vu sa suprématie contestée par son compatriote Mike Hawthorn, qui le devance de six points au championnat. Pilote numéro un de la Scuderia Ferrari, Hawthorn était néanmoins sur le point de renoncer à la compétition, très affecté par les accidents mortels ayant tout récemment touché ses coéquipiers Luigi Musso, à Reims, et surtout son ami Peter Collins (pilote automobile) au Nürburgring. Seule la possibilité de conquérir le titre mondial en l'honneur de son 'ami Mate' l'a incité à terminer la saison[2]. Le circuitTracé dans les rues de Porto, le circuit de Boavista fut utilisé dès 1951 pour des courses de voitures de sport. C'est la première fois qu'il accueille une épreuve de vitesse. Long de 7,4 kilomètres, il se caractérise par ses nombreux virages serrés et son revêtement très inégal, alternant rues pavées et avenues comportant des rails de tramway, rendant les dépassements difficiles. Le record de la piste est détenu par Jean Behra, vainqueur du Grand Prix en 1955, qui avait alors réalisé un tour à 152,3 km/h de moyenne au volant de sa Maserati 300S[3]. Monoplaces en lice
Diminuée par la perte de Luigi Musso et de Peter Collins, la Scuderia Ferrari n'engage que deux voitures pour Mike Hawthorn et Wolfgang von Trips, qui disposent de leurs habituelles Dino 246 (650 kg, moteur V6 (2400 cm3, 290 chevaux à 8 500 tr/min[4]. La voiture d'Hawthorn bénéficie pour cette course de la nouvelle suspension arrière à ressorts hélicoïdaux[2]. Une troisième monoplace avait été initialement engagée pour l'Américain Phil Hill, spécialiste des courses d'endurance et notamment vainqueur des 24 Heures du Mans cette saison et tout récemment intégré à l'équipe F1, mais la Scuderia a préféré l'utiliser pour la préparation du prochain Grand Prix d'Italie[5].
Tony Vandervell a engagé son équipe complète pour cette course. Simple spectateur au Nürburgring, Stuart Lewis-Evans retrouve ses coéquipiers Stirling Moss et Tony Brooks au volant des très modernes Vanwall VW. Grâce à une aérodynamique très poussée, ces monoplaces se montrent presque aussi rapides en pointe que les Ferrari, malgré une puissance moindre, de l'ordre de 270 chevaux. Elles bénéficient en outre d'une excellente tenue de route et d'un très moderne système de freins à disques, un redoutable atout face aux tambours de leurs concurrentes qui perdent rapidement leur efficacité en course[6].
Ron Flockhart étant toujours convalescent après son accident du Grand Prix de Rouen[7], seules deux P25 ont été engagées pour Jean Behra et Harry Schell. Avec seulement 550 kg à vide, ces monoplaces de 250 chevaux[8] se montrent généralement performantes sur les circuits sinueux, mais leur fiabilité et leur constance en course reste encore à améliorer.
John Cooper a engagé deux T45 pour ses pilotes habituels Jack Brabham et Roy Salvadori. Les T45 sont les seules du plateau à adopter la solution du moteur central arrière. Malgré leur petit moteur de Coventry Climax FPF de 2200 cm3 développant 194 chevaux à 6250 tr/min[9], ces agiles monoplaces de moins de 500 kg sont capables de tenir tête aux F1 conventionnelles sur les tracés tortueux, comme l'ont prouvé les victoires de Stirling Moss en Argentine (sur un modèle T43 de l'année précédente) et de Maurice Trintignant à Monaco. Ce dernier épaule l'équipe officielle sur une T43 engagée par Rob Walker.
Colin Chapman a engagé deux Type 16 pour Graham Hill et Cliff Allison. Surnommées les 'mini-Vanwall' à cause de leur ligne très proche de celle des voitures de Tony Vandervell, ce sont les plus petites monoplaces du plateau. Elles ne pèsent que 450 kg à vide et disposent du même moteur Climax FPF que les Cooper, mais monté à l'avant[10].
Après son retrait officiel de la scène des Grands Prix, la marque reste présente à l'initiative de quelques écuries et pilotes privés, mais la célèbre 250F à moteur six cylindres en ligne de 270 chevaux est maintenant dépassée face à ses concurrentes adaptées à la nouvelle réglementation. Joakim Bonnier et Maria Teresa De Filippis pilotent leurs monoplaces personnelles, tandis que la Scuderia Centro Sud a engagé une voiture identique pour le pilote américain Troy Ruttman, qui n'a cependant pas confirmé sa venue. De son côté, Carroll Shelby dispose de la dernière évolution de la 250F, utilisée à Reims par Juan Manuel Fangio et rachetée par Temple Buell[11]. Coureurs inscrits
QualificationsLes essais qualificatifs sont organisés les vendredi et samedi après-midi précédant la course[8]. Lors de la première journée, sous un beau soleil, Jean Behra met à profit sa connaissance du circuit et se montre régulièrement le plus rapide, couvrant son meilleur tour à 170,7 km/h de moyenne. Parmi les pilotes découvrant la piste, bon nombre se font piéger par les nombreuses difficultés, dont Cliff Allison (Lotus) et Maria Teresa De Filippis (Maserati), qui endommagent sérieusement leurs monoplaces. Tous deux sont indemnes, mais leurs voitures ne pourront être réparées à temps pour la course. En fin de journée, Stirling Moss, qui a progressivement amélioré ses performances au volant de sa Vanwall, parvient à battre Behra de près de neuf dixièmes de secondes, à 171,8 km/h de moyenne, établissant le meilleur temps de cette première séance. Les conditions de pistes sont une nouvelle fois très favorables le samedi. Behra parvient à améliorer son temps de la veille, mais Moss se montre une nouvelle fois intraitable et s'adjuge la pole position à près de 173 km/h de moyenne. Sur sa Ferrari, Mike Hawthorn réalise également une excellente performance, échouant à seulement cinq centièmes secondes de son rival. Behra a amélioré son temps de la veille, mais a été relégué sur la seconde ligne par Stuart Lewis-Evans, troisième à quatre dixièmes de secondes de son coéquipier Stirling Moss. Grâce à la Scuderia Centro Sud dont les pilotes habituels sont absents, Allison et mademoiselle de Filippis ont pu chacun se qualifier au volant d'une Maserati 250F.
Grille de départ du Grand Prix
Déroulement de la courseLe dimanche de la course se déroule en bonne partie sous la pluie. Celle-ci a cessé peu avant le départ, prévu à seize heures, mais la piste reste glissante. Stirling Moss effectue un envol parfait et place sa Vanwall en tête dans le premier virage, devant la Ferrari de Mike Hawthorn et la BRM de Jean Behra. Moss repasse le premier devant les stands, talonné par Hawthorn. Wolfgang von Trips, très à l'aise sur la piste humide, a pris la troisième place, sa Ferrari devançant la BRM d'Harry Schell et la Vanwall de Stuart Lewis-Evans, alors que Behra, sixième juste devant la petite Cooper de Jack Brabham, a perdu un peu de terrain. Dans le virage à gauche rejoignant la grande avenue, Moss fait une embardée, ce dont profite Hawthorn pour le dépasser dans la ligne droite. Le pilote Ferrari va se maintenir au commandement jusqu'au début du huitième tour, mais des problèmes de freins le contraignent à laisser repasser son rival. Il parvient néanmoins à rester quelque temps dans son sillage, et à la fin du dixième tour les deux hommes sont toujours roues dans roues, avec un avantage de six secondes sur Behra, bien remonté, qui vient de dépasser Trips. A mesure que la piste sèche, Moss accentue son rythme, améliorant le record de la piste, et se détache rapidement d'Hawthorn, qui doit anticiper ses freinages, au rythme de deux à trois secondes par tour. A la mi-course, l'écart entre les deux hommes s'élève à cinquante-cinq secondes. Hawthorn conserve toutefois une nette avance sur Behra, lui-même loin devant Lewis-Evans qui compte déjà près d'un tour de retard sur la voiture de tête. Trips, auteur d'un excellent début de course, a perdu de nombreuses places, ayant dû s'arrêter au stand pour faire refixer son capot. La course commence à sombrer dans la monotonie, les positions semblant acquises. Toutefois, au trente-troisième tour, Moss rejoint son coéquipier Lewis-Evans ; ce dernier cède le passage à son chef de file et s'accroche à son sillage, ce qui lui permet de se réduire progressivement son retard sur Behra. Quelques instants plus tard, Hawthorn doit s'arrêter à son stand pour faire régler ses freins avant, devenus totalement inopérants. L'opération dure trente-cinq secondes, et lorsque la Ferrari repart, elle a chuté en troisième position, vingt secondes derrière Behra[11]. Très déterminé, Hawthorn va alors aligner une série de tours extrêmement rapides, battant à plusieurs reprises le record de la piste qu'il va porter à 175 km/h. Au bout de six tours, il a rejoint le pilote français et lui reprend bientôt la seconde place. Au stand Vanwall, on signale à Moss que son rival pour le titre mondial s'est octroyé le point du record du tour, mais celui-ci interprète mal le panneau et, pensant s'être montré le plus rapide de la journée, garde son rythme régulier[8]. On s'achemine vers une arrivée sans surprise mais à quelques tours de l'arrivée, le moteur de la BRM de Behra perd de sa puissance, à cause d'une bougie cassée. Il est bientôt rejoint par les deux Vanwall de Moss et Lewis-Evans, qui roulent toujours de concert, et se fait inexorablement dépasser par les deux voitures vertes, perdant ainsi sa troisième place. Dans les derniers kilomètres de la course, Moss rejoint Hawthorn, qui, de nouveau en difficulté avec ses freins, a nettement baissé l'allure, mais se refuse à prendre un tour à son adversaire malheureux[2]. Moss passe la ligne d'arrivée dans le sillage de la Ferrari, obtenant son troisième succès de la saison, préservant ses chances de décrocher le titre mondial. Alors qu'il accomplit son dernier tour et ne peut plus être inquiété pour la seconde place, Hawthorn effectue un tête-à-queue à quelques encablures de l'arrivée et cale son moteur. Les commissaires de piste s'apprêtent à pousser la Ferrari mais en sont empêchés par Moss, alors dans son tour d'honneur, qui sauve ainsi Hawthorn de la disqualification. Ce dernier parvient à redémarrer sa machine en profitant de la déclivité, roulant sur le trottoir avant de reprendre la piste dans la bonne direction et de franchir la ligne à temps pour être classé. Toutefois, ce n'est que grâce à l'intervention de Moss qu'il sauve sa deuxième place, les commissaires de course voulant tout d'abord le disqualifier pour avoir emprunté la piste à contre-sens. Moss arguera du fait qu'Hawthorn avait alors emprunté le trottoir et non la piste, manœuvre non dangereuse[14]. Après plusieurs heures de délibération, les officiels entérineront le classement, permettant à Hawthorn de conserver quatre points d'avance au classement du championnat. Classements intermédiairesClassements intermédiaires des monoplaces aux premier, deuxième, cinquième, dixième, quinzième, vingt-cinquième, trente-cinquième,quarantième et quarante-cinquième tours[15].
Classement de la course
Pole position et record du tour
Tours en tête
Classement général à l'issue de la course
À noter
Notes et références
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