Château de Crans (1764) non retenu Salle de la Comédie-Italienne (1772) collaboratif, non retenu Hôtel sur le boulevard pour Georges-Tobie de Thellusson (v. 1775) non retenu Maison de campagne au pays de Vaud (v. 1780-1790) Place Louis XVI de Brest (1785-1786) retenu, non réalisé Hôtel de la Caisse d'escompte (1789) retenu, non réalisé
Avant son départ pour Rome, il avait effectué un relevé partiel de Notre-Dame de Dijon qui servit à Soufflot lorsqu'il s'attacha à faire revivre le système structurel de l'architecture gothique. À son retour, il travailla avec son maître puis, en 1764, il entra dans l'atelier d'Ange-Jacques Gabriel à Versailles et mit à son service « un talent de dessinateur qui devait être légendaire »[4].
Il fit partie, aux côtés de Charles De Wailly et de François-Joseph Bélanger, de l'équipe qui travailla sur l'aménagement intérieur de l'Opéra royal du château de Versailles. Le programme tracé en 1769 était celui d'un espace polyvalent susceptible d'accueillir aussi bien des représentations lyriques que des concerts, des bals et des banquets. Le Premier machiniste du Roi, Blaise-Henri Arnoult, imagina un dispositif qui permettait de réunir de plain-pied la scène et la salle. Le menuisier Absyle construisit une maquette qui explicitait le mécanisme tandis que Jallier dessinait des coupes sur la scène, la salle et le foyer[5].
« À Versailles, Jallier mettait à profit la tranquillité du mois d'août, pendant que la Cour était à Compiègne, pour étudier ses projets personnels. Gabriel le recommandait à des seigneurs pour lesquels il composait des plans de jardins ou de kiosques, comme ceux qu'il oublia un jour dans un fiacre ; il passa un avis dans la presse, mais nous ignorons si le portefeuille fut rapporté à son domicile parisien. De son côté, Soufflot avait introduit Jallier dans le milieu des administrateurs et des grands actionnaires de Saint-Gobain, chez ses amis Geoffrin[6], La Ferté-Imbault[7], Tronchin[8]. Jallier fut l'architecte de la manufacture de 1769 à 1792. Nous lui connaissons dès lors une clientèle assez caractérisée de capitalistes helvétiques et d'industriels français de l'Est, le plus souvent protestants. »[4]
En France, il soumit divers projets pour des commandes publiques, par exemple pour la Comédie-Italienne (1772, en collaboration avec Bélanger). Lorsque Necker et Calonne développèrent la Caisse d'Escompte, installée dans des bureaux modestes de la rue Vivienne, les architectes rivalisèrent d'imagination pour lui construire un siège digne de son importance nouvelle et on dut organiser un concours public qui attira l'élite de la profession. Jallier obtint le premier prix en 1789 devant Denis Antoine et Alexandre-Théodore Brongniart, mais la Révolution française entraîna l'abandon du projet[10].
Architecte consultant du ministère de la Marine, il présenta en 1784 un projet d'aménagement de la ville de Brest qui devait lui permettre d'installer dignement la statue de Louis XVI que cette ville avait obtenu l'autorisation d'élever[11], sur une succession d'esplanades encadrées de bâtiments palatiaux dominant le port, « afin, qu'aucun bâtiment, petit ou grand, ne put entrer dans la rade, aucun mouvement se faire dans le port [...] sans que le roi les vît et y présidât en quelque sorte »[12].
Château et parc de Crans, sur le lac Léman, Suisse (1764, projet non retenu) : Pour le compte d'Antoine Saladin, Jallier travailla sous la supervision de son maître Soufflot. « Ils ménagèrent à l'arrivée un effet de surprise favorisé par la déclivité du terrain, mais donnèrent une large assise à la terrasse et orientèrent les grandes perspectives en direction du lac. Le mémoire de Jallier qui accompagne le projet dans les archives du château manifeste des préoccupations de confort, et des attentions pour les dames, qui n'étaient pas encore exigibles dans la bonne société genevoise. “Chaque maître ayant sa chaise dans son appartement, et y ayant des lieux à l'anglaise, les domestiques seuls auront la peine de les aller chercher dans la cour.” On jugea que les commodités perdaient de la place au détriment des pièces les plus nobles : à Crans, ce qui a été réalisé par les Suisses Bovet et Vaucher-Faton est digne, mais n'égale pas en distinction l'architecture de Jallier. »[16]
Château de Montvillers à Bazeilles, Ardennes (1770) : Construit pour Jean-Abraham Poupart de Neuflize, drapier à Sedan. Selon Michel Gallet, c'est « l'un des plus beaux châteaux de style Louis XVI. Sur les façades principales, l'ordre ionique embrasse deux niveaux, mais les hautes toitures sont traditionnelles, comme il convient sous le climat ardennais. Du côté du parc, la rotonde du grand salon se mire dans la pièce d'eau alimentée par la Givonne ; il faut reconnaître ici, fixé dans la pierre des Vosges, l'écho des somptueux dessins présentés au concours de 1758 : “un pavillon au bord d'une rivière”. La frise de l'entablement porte des emblèmes maçonniques, des sphinx, un niveau, une équerre, des compas. »[17]
Projet d'aménagement de la ville de Brest, Finistère (1784, projet non réalisé) : Le projet comprenait, au bas de la rue du Château, une place d'armes de forme ovale, plantée d'arbres. Allant de cette place jusqu'à l'extrémité du Parc-au-Duc, la rue Royale, une large rue permettait de se trouver sur la place Louis XVI aménagée face à la rade, dominée par la statue royale (une aquarelle et encre sur papier au musée des Beaux-Arts de Brest). Le projet faisait raser le château de Brest, vénérable témoin de quatorze siècles d’histoire. Selon l'architecte : « le public verrait avec quelque émotion un monument à Louis XVI rendant les privilèges à la Bretagne et la liberté des mers, élevé sur les débris d'un édifice consacré à ce César qui l’ôta aux Romains et mit aux fers le monde entier. » Le projet fut approuvé par le Conseil du roi à Versailles le [19], mais en , le comte d'Hector, commandant la Marine, le déclara inconciliable avec les travaux que la Marine envisageait sur le terrain du Parc-au-Duc, qui venait d’être concédé par le département de la Guerre. Le projet de Jallier de Savault a pu inspirer Jean-François Thomas de Thomon à Saint-Pétersbourg, sur un site comparable[20].
↑Archives départementales de la Nièvre, 4 E 62 art. 6 (Registres paroissiaux de Château-Chinon ville, 1739-1752), Acte de baptême de Jean-Claude Jallier, 28 mai 1739. [1]
↑Archives nationales, MC ET LXX 760 (Minutes de Me Auguste Herbelin, novembre 1806), "Procès verbal tendant à l’inventaire du Sr Jallier", 5 novembre - 23 décembre 1806.
↑Archives nationales, O1 1093, Ordres du Directeur général des Bâtiments du Roi (1758-1761), folio 397 et suiv.
↑ a et bMichel Gallet, Les architectes parisiens du XVIIIe siècle, p. 272
↑Conservées parmi les papiers de Pierre-Adrien Pâris à la bibliothèque municipale de Besançon, cotées carton R I no 37 et 38 [2] et [3]
; elles ont été publiées par Alain-Charles Gruber : « L'Opéra de Versailles est-il l'œuvre de Gabriel ? », Revue de l'art, 1971
↑Pierre François Geoffrin (1665-1749), mari de la célèbre Mme Geoffrin (1699-1777), fut l'un des plus gros actionnaires de la manufacture de Saint-Gobain dans les années 1720 à 1740. À sa mort, ses actions furent partagées entre sa femme et sa fille, marquise de La Ferté-Imbault.
↑projet signé de son nom et conservé parmi les dessins de l'architecte Érasme Ritter zu Grünstein (Michel Gallet, Les architectes parisiens du XVIIIe siècle, p. 273). non réalisé.
↑Le projet de Jallier est passé en vente publique à Paris le et à nouveau aux États-Unis en 1997 par les soins de Christie's : Projet de construction pour une Caisse d'Escompte, prise sur l'angle de la rue Sainte-Anne et d'une rue neuve. « Jallier l'avait exposé au Salon de 1791, avec un projet de monument à la gloire de l'aérostat. » (Michel Gallet, Les architectes parisiens du XVIIIe siècle, p. 274)
↑Le , les États de Bretagne ayant décidé d'élever une statue de Louis XVI, Brest posa sa candidature qui fut agréée par le Roi le .
↑Le projet définitif, exposé en 1789, est conservé au cabinet des dessins du musée du Louvre.
Waldemar Deonna, Les Arts à Genève des origines à la fin du XVIIIe siècle, Genève : musée d'art et d'histoire, 1942
René Faille, Cordouan, les Baleines, Chassiron : les trois plus anciens phares de France, La Rochelle : Quartier Latin, 1974 ; nlle. éd. : Chauray : Patrimoines et médias, 1993
Monique Fontannaz et Monique Borie, « Le Château de Crans, une œuvre genevoise », Genevana, 1989
G. Gayot, « La manufacture du Dijonval et la draperie sedanaise », Cahiers de l'Inventaire, 1984
J. Guillaume, « Le Phare de Cordouan, “merveille du monde” et monument monarchique », Revue de l'art, 1970
B. Lossky, « Le Projet d'une place Louis XVI à Brest par Jallier de Savault », Bulletin de la société d'histoire de l'art français, 1976, pp. 255-260
Claude Pris, La Manufacture royale des glaces de Saint-Gobain, une grande entreprise sous l'Ancien Régime, Lille : Service de reproduction des thèses de l'université, 1975
Paul Robiquet, Le Personnel municipal de Paris pendant la Révolution, Paris : D. Jouaust : C. Noblet : Maison Quantin, 1890
Werner Szambien, « Les architectes parisiens à l'époque révolutionnaire », Revue de l'art, vol. 83, 1989, pp. 36-50