Cisco Herzhaft (né en juillet 1947) est un guitariste chanteur français folk et blues connu notamment pour sa technique dite du slide et pour son jeu de finger picking. Il est amateur de blues et de ragtime.
Biographie
Les origines
Né au Bouscat, banlieue immédiate de Bordeaux, Cisco Herzhaft est le quatrième enfant d'une famille d'immigrés d'Europe Centrale qui aura connu de nombreux déboires durant les deux guerres mondiales. Le petit Cisco Herzhaft, exhorté à « rester discret » toute son enfance, restera un « rambler, une valise à la main, toujours prêt à partir ».
Un amateur de blues
Cisco Herzhaft fut très tôt profondément inspiré par la culture nord américaine. Enfant, s’il s’intéressa au cinéma ainsi qu’à la littérature d’Outre-mer, sa véritable passion fut la musique et, plus précisément, le folk américain. Amateur éclairé, Cisco Herzhaft grandit aux côtés de son frère Gérard Herzhaft, historien et spécialiste de la musique blues reconnu dans le monde entier (auteur du " Que sais-je ? " sur le blues et de la « Grande Encyclopédie du Blues », référence aux États-Unis). Il écoute Cisco Houston (d’où son nom d’artiste), Woody Guthrie, Pete Seeger, dans un registre bluegrass les Stanley Brothers, Hank Williams, Doc Watson (dont les disques ont inspiré son style de guitare), et dans le registre blues Lightnin' Hopkins, John Lee Hooker, Big Bill Broonzy[1]… Aucun représentant de la folkmusic américaine n’échappa à l’étude systématique du jeune Cisco, ni à son engouement croissant pour cette culture si proche de ses « bleus à l’âme » et de ses envies d’errance. Le passage de l’écoute à la pratique, s’il fut naturel, se fit tardivement. Pris entre un noyau familial aussi insensible à l’appel de la musique américaine, et une France qui ne connait pas, ou si peu, la culture folk américaine, Cisco Herzhaft dut attendre les années 1960 et sa fraîche majorité pour quitter son foyer la guitare à la main.
Une prime jeunesse en musique
Sans avoir pris le temps de passer son baccalauréat, et après avoir été remercié par trois établissements scolaires, Cisco Herzhaft part sur les routes. Il parcourt la France en auto-stop, fait la manche, donne des concerts dans de petites salles, assure, à l’occasion, une animation dans un lycée. Arrivé par hasard à Saint-Brieuc, ville d’Armor en Bretagne, où Cisco obtiendra en parallèle un CAP d’électricien, il joue tous les soirs à bord d’un petit navire deux mâts, l'Etoile, mouillé dans le port du Légué. Sa cale cache un cabaret tenu par le chanteur breton, et porte-drapeau, Serge Kerguiduff. Cisco y interprète ses premières compositions d’inspiration folk, dont le Blues de l’auto-stoppeur repris plus tard sur l’album Two brothers and a pick. Il rencontre ainsi Alan Stivell et Glen Mor. Ce dernier, intéressé par son jeu guitaristique non-académique, une des caractéristiques du doigté de Cisco Herzhaft, lui proposera une tournée Fest-noz en tant que guitariste.
Au fil de ces années, Cisco Herzhaft apprend à suivre en picking toutes les couleurs musicales. Avec ses compositions, il passe régulièrement à l’ORTF, notamment à Radio Bordeaux (ses premières feuilles de paie), où il enregistre un morceau folk Étienne était mineur sur bandes magnétiques. En revenant sur Paris, il rencontre les Haricots Rouges, groupe français Jazz Nouvelle-Orléans, qui lui proposent d’assurer des parties guitare sur des morceaux jazz de l’album Sweet & Hot produit en 1968 (label Ducretet Thomson). Il y enregistre en guitariste solo blues picking, « à la manière de Lightin hopkins », un des premiers blues en français, Bettina.
Également présent à tous les American Folk Blues Festival de ces années 1960, Cisco Herzhaft rencontre les figures qui installeront durablement le Blues en France. C’est ainsi qu’il fait la connaissance de Jacques Périn, l’initiateur du célèbre magazine Soul Bag, en 1968, de Jacques Demetre (critique de Blues dès les années 1950 dans Jazz Hot et écrivain), ou encore de Kurt Mohr (journaliste spécialisé et écrivain). Au festival de Jazz d’Andernos, venu assurer un concert avec les Haricots Rouges, Cisco Herzhaft rencontre et joue avec John Lee Hooker[2]. Le jeune Cisco, sur un premier solo « plein de notes », ce que son jeu lui permettait, reçoit de John Lee Hooker, sur scène, une de ses premières « vraies » leçons de Blues : « Just play the blues… ». Ce sera dans le lecteur cassette de la voiture de John Lee Hooker que Cisco Herzhaft entend pour la première fois Albert King, futur grand bluesman de la scène internationale, que John Lee Hooker qualifie alors de « nouveau venu qui va faire parler de lui »...
Formation intellectuelle, une parenthèse de dix ans
Cisco Herzhaft, en 1970, passe un examen d’entrée à l’université. Lancé dans des études de psychologie, il décroche, en 1975, un DESS, puis un DEA en 1976. Il travaille ensuite comme psychologue à l’hôpital de jour de Ville-d’Avray, où il restera onze ans. À la même période, il se marie avec la chanteuse folk Marie Courcelle et a trois enfants, Lionel (1968), Chloé (C4h, 1975), qui enregistre le titre Paris Spleen sur un de ses albums[3], et Jérémie (1981).
Les années folk
Les années 1980 seront celles du folk français pour Cisco Herzhaft. Il fut le premier, et le seul à ce jour, à explorer et (ré)arranger à la manière folksong de la chanson traditionnelle et folklorique médiévale française.
En 1982, Il enregistre l’album folk français, Naguère la Brie (label Caiac). En collaboration avec Marie Courcelle au chant, Bernard Mercier aux percussions et violon, Cisco Herzhaft (à la guitare, au banjo et à l’harmonica) revisite un répertoire de vieilles chansons de la région de la Brie (Mai nouveau, La fille au roi Louis, Les trois roses…). À l’occasion de cet enregistrement, en vue de déclarer siens les arrangements et réussir l'examen d’arrangeur et compositeur que la SACEM exigeait alors, Cisco apprend le solfège et l’harmonie.
En 1983, rejoint par le contrebassiste (et sculpteur) Bernard Brimeur, Cisco Herzhaft enregistre l’opus Que faire si amour me laisse ?. Dans le même esprit que pour Naguère la Brie, il parcourt cette fois le folklore de toute l’Île-de-France. Sont ainsi enregistrées, pour la première fois, les chansons Pierre de Grenoble et Oh Gué vive la rose. Cisco Herzhaft joue également du flageolet irlandais.
Entre 1981 et 1985, les deux albums, dont le second est sponsorisé par le Crédit Agricole de la Brie, entraînent concerts, émissions de radio et de télévision ; Cisco Herzhaft et Marie Courcelle gagnent en notoriété. Singularisés, ils représentent bientôt, pour un public varié dépassant le cercle premier des amateurs de musique traditionnelle, un folklore français vivant, synthèse originale de la séculaire musique folklorique et d’une couleur originalement moderne[4].
En avril 1987, Cisco Herzhaft et Marie Courcelle, financés par le Club Richelieu dans un cadre de promotion de la Francophonie à l’étranger, partent établir des contacts au Canada. Introduits sur place auprès du producteur Yves Lagacé par le chansonnier québécois Michel Lafleur, et bénéficiant d’une naissante notoriété locale, ils assurent deux tournées canadiennes en 1987 et en 1988 ; ils représentent notamment la France, les deux étés, au Festival le Mondial des cultures de Drummondville.
L’année 1989 voit Cisco Herzhaft revenir à la composition ; il signe, à l’exception notable des deux reprises À la claire Fontaine et Le beau Robert, l’album folk, très personnel, Sur un côté de la rivière particulièrement adapté à la voix soprano de Marie Courcelle. On note la marquante présence du violoniste Bertrand Deraspe, du groupe folklorique traditionnel québécois Suroît.
Marie Courcelle consacre par la suite sa remarquable énergie scénique à un répertoire acadien, cadien et zydeco, et fonde son groupe Delta Connexion.
Cisco Herzhaft, à l’aube des années 1990, se voue à sa passion de jeunesse, le Blues.
Les années 1990, un retour aux sources
En 1991, Cisco Herzhaft, en duo avec Bernard Brimeur, enregistre un album Blues sans titre (!), auquel participe son frère Gérard. Cet enregistrement « pour le plaisir » amorce l'équipée des albums communs, les très familiaux Herzhaft Blues. C’est sur cet enregistrement que figure Fontainebleau Rag, un des nombreux rag composés par Cisco Herzhaft qui feront, pour une part essentielle, en plus de sa technique slide, sa réputation et son succès.
À la fin de l’année 1993, avec l’arrivée de David Herzhaft à l’harmonica, sort le premier « vrai » album de la série des Herzhaft Blues : Never been plugged. Cet album, s’il rapproche en studio les Herzhaft, est véritablement l’occasion pour Cisco de renouer définitivement avec la scène, en solo, dans un registre blues.
En 1995, Cisco Herzhaft assure une tournée estivale en Amérique du Nord. À partir de l’année suivante, Cisco Herzhaft, jamais plus à l’aise que sur la scène, assure un minimum d’une centaine de concerts par an, enchaîne les festivals, et retourne annuellement au Canada.
En 1996 sort le deuxième opus des Herzhaft Blues, Two Brothers and a pick, qui voit le batteur Patrick Cassotti rejoindre le projet.
En 2000 arrive le cd Herzhaft Special, qui clôt la série des Herzhaft Blues.
Cisco Herzhaft en solo
Cisco Herzhaft sort son premier album Blues solo en 2002, Ghost Cities[5], en majorité des chansons originales, dont le scénique, et très demandé, New Marseillaise Rag, le morceau slide A1 Motorway Blues et le titre folk Mon road movie.
L’album est suivi, en 2003, d’un CD de Bluegrass, BBC & Mister P, réunissant des morceaux traditionnels, Jesse James, John Henry, Old Joe Clark… Le banjoïste Bernard Smaguine figure sur cet album.
En 2007 sort le très personnel Cisco’s Cooking qui réunit l'ensemble des influences de Cisco Herzhaft. Cet album se fait remarquer à l'étranger et correspond aux premières tournées américaines, ainsi qu'aux chroniques d'albums dans les médias étrangers, des sites en ligne musicaux, comme MTV.com[6], à des médias spécialisés. Le titre Schnorer’s Blues perpétue la tradition des titres yiddish-Blues que Cisco Herzhaft a composé pour tous ses enregistrements (tels Old yiddish Blues sur Two brothers and a pick, ou Mazel tough sur Herzhaft Special).
En 2010, Cisco Herzhaft enregistre son troisième album solo, The Cisco's system, dont Cisco Herzhaft a enregistré seul à la guitare la moitié des titres, mettant en valeur le fingerstyle dont il est un des seuls interprètes en Europe. Il "joue à la fois les basses et la mélodie" à la main droite[7]. Aux tournées européennes (1re tournée en 2009, Allemagne, Belgique, Suisse, Luxembourg, Autriche, Pays-Bas, Espagne et Italie) s'ajoutent des destinations internationales comme le Maghreb (premiers concerts en 2009 et 2010[8]) ou l'Amérique du Sud (tournée en Argentine en 2013[9]). Dans la foulée, il est sélectionné pour représenter la France à l’International Blues Challenge de Memphis aux États-Unis, en 2012, dans la catégorie Solo/Duo[10].
À partir de 2014, Cisco Herzhaft est sollicité pour des collaborations notamment avec des artistes venus du Hip Hop. à la suite de la sortie de son album Good Hand (2014) et réalisé avec de nombreux invités, d'où son nom, tels l'harmoniciste canadien Guy Bélanger, Cisco part en tournée avec le rappeur français Rockin'Squat. Ce dernier intègre le morceau qu'ils ont enregistré ensemble, « Bentonia Mississippi », dans sa compilation « Rockin squat, Excuse My French Part 3 » sortie en 2015. Deux ans plus tard, le bluesman joue sur scène avec le beatboxeur Micflow[11], plusieurs fois champion de France de beatbox (en 2006, 2007 et 2008), puis champion du monde (en 2009) et vice-champion du monde par équipe (en 2015)[12]. Ils sont qualifiés de « duo d'eau et de feu »[13] à l'occasion de leur prestation au Festival Tanjazz en septembre 2018 dans la presse (Tanger, Maroc).
En 2019, Cisco Herzhaft sort un album[14] en hommage à son père horloger, Son of a watchmaker[15], dans lequel il se raconte[16]. La même année Cisco Herzhaft est intronisé au Blues Of Fame Français aux côtés de Paul Personne, Bill Deraime et Jean Jacques Milteau[17].
Cisco Herzhaft a été le parrain de plusieurs festivals de blues, dont les Nuits du Blues de Marnaz[18] ou le Abers Blues Festival en 2023[19].
↑(fr) [1] Articles de presse en ligne sur le site de Marie Courcelle.
↑(fr) Ghost Cities de Cisco Herzhaft, chronique de l'album Ghost Cities sur le site La Gazette de Greenwood, le 2 novembre 2003. Consulté le 10 janvier 2010.
↑(fr) Cisco's Cooking de Cisco Herzhaft, fiche de l'album Cisco'Cooking sur le site MTV.com, le 17 octobre 2007. Consulté le 29 août 2014.
↑(fr) Tournée de Cisco Herzhaft en Argentine en 2013, Programme officiel de la Tournée du Bluesmen français Cisco Herzhaft en Argentine, site de l'Ambassade de France en Argentine, le 17 janvier 2013. Consulté le 28 août 2014.
(fr) Cisco Herzhaft sur Weo TV. Cisco Herzhaft lors de l'émission Grand' Place sur Tv Weo, diffusée le 27 octobre 2010. Entretien et interpération de Mean Dirty Street. Consulté le 30 juillet 2011.