L'ambre bleu a une couleur rare pour l'ambre, qui va parfois jusqu'au vert, ce qui est rarissime, et en raison de sa rareté, il est encore peu connu. Sa couleur est due sans doute à la présence de substances aromatiques. Sur une surface blanche et à la lumière artificielle, l'ambre bleu est jaune transparent, légèrement bleuâtre, mais sur une surface opaque ou noire et à la lumière du soleil, il prend une teinte bleu profond ainsi que sa fluorescence[pas clair] aux ultraviolets : « Du fait de ces moléculespolynucléaires (molécules aromatiques de type pétrole = pérylène) cette résine apparaît bleue à la réfraction de la lumière ou flurorescence. Certains ambres sont bleus quelle que soit l'orientation de la pièce d'ambre par rapport à la source lumineuse ; d'autres varient beaucoup. Il existe plusieurs qualités de bleu. »[2].
Formation
Cet effet n'est possible que dans certains spécimens de l'ambre dominicain, dans certains ambres mexicains du Chiapas, et certains ambres de l'Indonésie. Toute autre ambre (comme l'ambre de la Baltique) ne présente pas ce phénomène, car sa résine d'origine ne provient pas de l'arbre Hymenaea protera. Il existe plusieurs théories sur sa formation et pour expliquer la présence de cette couleur bleue et d'une importante fluorescence à l'exposition aux ultraviolets. Certains scientifiques pensent qu'une exposition prolongée de la résine encore fraîche à des températures élevées dues à des éruptions volcaniques ou encore la proximité d'intenses feux de forêt auraient engendré ce phénomène coloré »[3]. Il doit le plus probablement son existence à des éléments tels que l'anthracène à la suite de « combustion incomplète » lors de feux de forêt parmi les espèces éteintes de cette espèce d'arbre entre 25 et 40 millions d'années[4],[5]
Récemment, l'absorption optique, la fluorescence et les mesures de fluorescence des ambres dominicains ont été étudiés. Ces études montrent que la variété « bleue » révèle une émission intense de la fluorescence dans la région de longueur d'onde visible, entre 430 et 530 nm, avec des caractéristiques spectrales qui sont typiques des hydrocarbures aromatiques. Au contraire, la variété « rouge » dominicaine et les variétés d'ambre « jaune » ont une émission beaucoup plus faible et sans relief, quoique avec encore une certaine fluorescence.
Le processus de l'« ambre bleu » est étonnamment similaire à celui du phosphore. Vittorio Bellani et Enrico Giulotto[6] de l'Université de Pavie en Italie ont étudié plusieurs spécimens d'ambre bleu : l'absorption optique, la spectroscopie de la fluorescence, les mesures de fluorescence. L'analyse spectrale en résultant a révélé que les spectres des hydrocarbures sont très semblables à ceux de la forme de solutions diluées de l'anthracène, le pérylène, le tétracène et suggèrent que l'hydrocarbure fluorescent responsable de la couleur bleue est probablement le pérylène.
Histoire
Découverte par Christophe Colomb
Christophe Colomb décrivit lors de son expédition, cet ambre gris bleu et presque noir : une note de Colomb en témoigne, écrite de sa main, en espagnol mêlé de corse, en marge de son exemplaire de Pline[7], et il en fit alors extraire des morceaux.
« De l'ambre il est certain qu'on en trouve dans l'Inde sous terre. J'en ai fait extraire dans plusieurs montagnes de l'île de Feyti, ou d'Ophir ou de Cypango, à laquelle j'ai donné le nom d'Hispaniola, et j'en ai trouvé un morceau grand comme la tête, mais non tout clair, sauf celui gris-clair et un autre noir, avec assez de veines. »[8]
Le père Jean-Baptiste Le Pers, missionnaire à Saint-Domingue, rapporte que Colomb avait trouvé trois mines, une d'or, l'autre d'« azur » (azul) et la troisième d'« ambre » ( ámbar), près de Cibao, à dix-huit lieues d'Isabelle, en 1494. Il aurait construit là une forteresse, le « Fort Saint-Thomas »[9]. Il aurait trouvé à côté du « Fort de la Conception », encore de l'ambre[10].
Commerce
Les habitants d'Hispaniola en firent rapidement le commerce, on ne l’appelait pas encore « ambre bleu » : « Les principales marchandises dont cette Nation y faste négoce sont les cuirs, les suifs, le gingembre, le cacao, la cire, le miel, « quelque ambre gris », le bois de brésil et le Gaïac qui y croissent et celui de Campêche qui y est apporté de dehors, enfin des citrons, des oranges, et plusieurs autres fruits ou qu'on vend frais ou dont on fait d'excellentes confitures sèches et liquides »[11].
De nos jours, le prix varie suivant les nuances : parfois dix fois plus élevé pour le bleu. Les propriétaires qui ont découvert des gisements d'ambre dans leurs champs et cultures ont fait fortune. L'ambre est récolté par des « ambreros »[3].
On trouve de l'ambre au Chiapas, et des spécimens d'ambre couleur bleu-vert[21].
Datation
La datation de l'ambre bleu est controversée, on s'accorde généralement pour 20 et 30 millions d'années, c'est-à-dire de l'Oligocène au Miocène, mais la fourchette de datation oscille entre 10 et 100 millions d'années[22].
Sculpture sur ambre, réalisées par des artisans locaux[23]
Dans les œuvres de fiction
Gilbert Vieillerobe, La route de l'ambre bleu : roman, Paris, L'Harmattan, , 170 p. (ISBN978-2-296-07000-4, lire en ligne), p. 174 (œuvre de fiction se déroulant entièrement dans la Baltique où nul ne trouva jamais d'ambre bleu)
Notes et références
↑« Retinite is a general name applied to various resins, particularly those from beds of brown coal, which are near amber in appearance, but contain little or no succinic acid. It may conveniently serve as a generic name, since no two independent occurrences prove to be alike, and the indefinite multiplication of names, no one of them properly specific, is not to be desired. Encyclopædia Britannica (11th ed.). Cambridge University Press, 1911 » Distinction entre rétinite et succinite controversée
↑ Les hydrocarbures aromatiques polycycliques, produits par un processus de polymérisation thermique initié par irradiation, se détendent à leur état fondamental, absorbent les photons ultraviolets de haute énergie et les ré-émettent de manière inférieure à l'énergie des photons visibles, en fonction de la courbe d'absorbance du fluorophore. « the polycyclic aromatic hydrocarbons, produced through a thermal polymerization process initiated via irradiation, relax to their ground state and absorb high-energy ultraviolet photons and re-emit them as lower-energy visible photons, according to the absorbance curve of the particular fluorophore ».
↑« Del ambra es cierto nascere in India soto tierra Heyo ne ho fato cavare in molti monti in la isola de Feyti bel de Ofir bel de Cipango a la quale habio posto nome Spagnola y ne trovato pieça grande come el capo ma no tota chiara salvo de chiaro y parda y Otra negra y vene assay. » in: - « Hispaniola, perle des Antilles. » Revue trimestrielle des amis de la République dominicaine 1re année, no 1, 1938. Année 1, Numéro 2. On trouvera ici l'autographe de Colomb Christophe Colomb: Calvais, Corse, Génois, de René Massoni, pages 76-77
↑Histoire de l'Isle espagnole ou de S. Domingue, écrite particulièrement sur des mémoires manuscrits du P. Jean-Baptiste Le Pers, jésuite, missionnaire à Saint-Domingue a T.1, page 161-162. (Découverte de Cibao)
↑« Non loin du fort de la Conception, et dans les mêmes montagnes, les Espagnols trouvèrent une grande quantité d'ambre. Dans quelques cavernes était distillée une couleur glauque fort recherchée par les peintres. »
↑Dictionnaire Universel du Commerce, Savary, 1748.
↑Détermination de George Poinar, Jr. du Department of Entomology, Oregon State University, Corvallis, site de l' « Amber Institute ». Auteurs de livres sur l'ambre dominicain comme : The Amber Forest, Princeton University Press
(en) Edward Everett Hale (1891), The Life of Christopher Columbus from His Own Letters and Journals and Other Documents of His Time, Massachusetts Historical Society. Chicago: G. I, . Howe & Co.
9a Conference Geologica del Caribe, Santo Domingo, Republica Dominicana, 1980.
(en) Baroni Urbani, C. & Saunders, J.B. (1980): The fauna of the Dominican Republic amber: the present status of knowledge. – Memorias, 9a geologica del Caribe, 1: 213-223; Santo Domingo. (1983).
(de) Martínez, R. & Schlee, D. (1984): Die Dominikanischen Bernsteinminen der Nordkordillera, speziell auch aus der Sicht der Werkstaetten. – Stuttgarter Beitr. Naturk., C, 18: 79-84; Stuttgart.