L’île d'Orléans est une île du fleuve Saint-Laurent située à environ 5 km en aval du centre-ville de la ville de Québec[1]. L'île a été l'un des premiers endroits à être colonisé en Nouvelle-France, et un grand pourcentage des Québécois, Métis, Franco-Canadiens et Franco-Américains peuvent retracer leur ascendance aux premiers habitants de l'île. Elle a été décrite comme le « microcosme du Québec traditionnel et le lieu de naissance des francophones en Amérique du Nord[2] » et compte environ 7 000 habitants, répartis sur 6 villages. L'Île d'Orléans est jumelée avec l'Île de Ré en France.
L'île est accessible depuis le continent via le pont de l'Île-d'Orléans depuis Beauport. La route 368 est la seule route provinciale de l'île qui traverse le pont et fait le tour du périmètre de l'île. Au village de Sainte-Pétronille vers l'extrémité ouest de l'île, un belvédère surplombe la plus impressionnante des chutes Montmorency, ainsi qu'un panorama du fleuve Saint-Laurent et de la ville de Québec.
Toponymie
L'île d'Orléans porta plusieurs noms au cours de son histoire. Avant la colonisation française, l'île est fréquentée, voire habitée, par des autochtones. Les Algonquins l’appellent l'île « Minigo »[3],[4],qui signifie « enchantée »[5].
En 1535 lors du second voyage de Jacques Cartier, celui-ci donne à l'île le nom « d'isle de Bacchus » en raison des nombreuses vignes sauvages qui y poussent naturellement[4]. Toutefois, étant soucieux « d'immortaliser le nom et la mémoire des rois et princes de France », Cartier changera le nom quelques mois plus tard pour « Isle d'Orléans » en l'honneur d'Henri II, duc d'Orléans[3].
Cette appellation restera inchangée jusqu'à l'arrivée des Hurons. Ceux-ci, attaqués dans leur territoire par les Iroquois, viennent se réfugier dans la région de Québec sous la protection des Français. Une partie des réfugiés s'établit en 1651 à la pointe sud-ouest de l'île et y construit un fort à proximité du lieu connu aujourd'hui sous le nom de l'Anse du Fort[6]. Les Hurons surnomment l'endroit « île Sainte-Marie », en hommage à la patronne de leur mission en Huronie dans la Baie Géorgienne. Cependant, au mois de mai 1656, les Iroquois les surprennent dans leur refuge et les déciment presque tous. Le nom « d'île Sainte-Marie » disparaît donc avec le massacre des Hurons[6].
Le , l'île, qui est devenue la propriété de François Berthelot, est érigée en comté par le roi Louis XIV, qui décrète que l'île d'Orléans serait dorénavant appelée « Isle et Comté de Saint-Laurent »[7]. Ce changement de nom devient officiel et le demeure jusqu'en 1770. Néanmoins, pour les habitants de l'île et de la région, le nom du territoire est toujours « Orléans », comme le mentionne Sieur Gilbert Boucaut de Godefus dans ses écrits : « L'isle et comté de Saint-Laurent, qui était appelée l'isle d'Orléans et qui l'est encore par la plus grande partie des habitants de cette isle et du voisinage...»[8].
En 1792, lors de la première réunion de la Chambre d'Assemblée du Bas-Canada, l'île est officiellement nommée « Comté de l'île d'Orléans » et son nom reste inchangé depuis[8].
Géographie
L'île d'Orléans est située entre le Plateau Laurentien ou Bouclier canadien au nord et les Appalaches au sud. Son point nord-est marque la frontière entre le fleuve Saint-Laurent et son estuaire (le plus grand du monde), où l'eau douce commence à se mélanger à l'eau salée[2].
Longue de 34 km et large de 8 km en son milieu, cette île comporte 75 km de circonférence, avec une surface totale de 190 km2. Il a un relief vallonné avec de petites vallées et des crêtes progressives qui atteignent une hauteur maximale d'environ 150 m à Sainte-Pétronille et à Saint-Laurent au Sud[9].
L'été, avec la venue des vacanciers ainsi que des travailleurs saisonniers, la population double. L'île reste toutefois un lieu fortement agricole avec de nombreuses cultures (pommes de terre, fraises, pommes, légumes, vignes, petits fruits, produits de l'érable[10]) et une partie forestière au milieu.
C'est Jacques Cartier qui, en 1535, à la vue de cette île verdoyante, la surnomme « île de Bacchus », en raison des vignes sauvages qui y poussent. Mais bien avant l'arrivée des Européens, les Amérindiens désignaient l'île par le mot algonquin « Ouindigo » qui signifie « coin ensorcelé ». Au fil des ans, l'île cumula une série de noms différents. Son nom définitif, soit île d'Orléans, on le doit (encore) à Jacques Cartier qui, le , la rebaptisa ainsi en l'honneur du duc d'Orléans, fils du roi de France, François Ier.
Au début de la colonisation, les colons appelés à peupler l'île sont pour la plupart originaires de la Normandie et du Poitou.
L'île d'Orléans est l'un des plus anciens lieux de peuplement de la Nouvelle-France. La seigneurie de l'Île-d'Orléans fut concédée à Jacques Castillon par la compagnie de la Nouvelle-France en 1636 et Sainte-Famille fut fondée en 1661 sous l'administration du gouvernement de Québec[16],[17]. On trouve d'ailleurs sur l'île de nombreuses fermes ainsi qu'une importante concentration de maisons de pierres datant du régime français. Plus de 600 bâtiments sont reconnus par le gouvernement du Québec, comme ayant une grande valeur patrimoniale, dont la plus ancienne église rurale de la Nouvelle-France (Saint-Pierre).
Le recensement de 1685 dénombra 1 205 insulaires et 917 têtes de bétail.
En 1759, l'île, après avoir été complètement évacuée de ses habitants avant l'arrivée de la flotte de la Royal Navy, sera occupée par les Anglais, mais il ne persiste aujourd'hui que peu de traces de leur passage. L'île est quand même ravagée par les troupes britanniques. Lors de la mise à sac de l'île par les troupes de James Wolfe, à l'été 1759, seulement quelques habitations sont épargnées, parmi lesquelles le manoir Mauvide-Genest et la maison Drouin. L'église de Saint-Pierre-de-l'Île-d'Orléans et le presbytère ont servi d'hôpital militaire et de quartier général à l'armée britannique de James Wolfe.
Carte du gouvernement de Québec levée en l'année 1709 par Gédéon de Catalogne - détail.
Manoir Mauvide-Genest de 1734 à Saint-Jean-de-l'Île-d'Orléans.
Maison Drouin à Sainte-Famille-de-l'Île-d'Orléans érigée entre 1729 et 1735.
Porte de la seigneurie Saint-Jean-de-l'Île-d'Orléans, érigé vers 1734.
Façade d'une vieille maison sur l'ile, novembre 2022.
Église de Sainte-Famille de l'Île-d'Orléans, construit de 1743 à 1747.
Économie
L'économie de l'île d'Orléans est principalement basée sur l'agriculture (pommes de terre, fraises, pommes, bleuets, framboises, légumes, vignes, petits fruits, produits de l'érable…), une viticulture notable — quelques petits domaines produisent des vins locaux blancs et rouges, la production de cidre et l'élevage. On y produit un fromage, le paillasson de l'Isle d'Orléans.
Le tourisme est une activité importante de l'île, notamment en raison de plusieurs producteurs de l'île qui offrent des produits locaux, ainsi que pour faire de l'autocueillette dans les fermes fruitières et maraîchères, surtout durant la période de récolte[18]. Sur l'île existent aussi quelques attraits touristiques intéressants :
Saint-Jean-de-l'Île-d'Orléans : le café "La Boulange", l'église catholique, la promenade sur la grève du Saint-Laurent et le Manoir Mauvide-Genest (Lieu historique national du Canada)
Aussi il y a depuis des années un fort mouvement des habitants de la ville de Québec, qui possèdent des résidences secondaires sur le pourtour de l'île d'Orléans.
L'intérieur de l'église de la Sainte-Famille-de-l'île-d'Orléans.
Maison typique à Saint-Jean-de-l'Île-d'Orléans.
La Seigneurie à Saint-Jean-de-l'Île-d'Orléans avec le pont vers le bâtiment principal.
Infrastructures
Projet de pont reliant l'île d'Orléans au continent.
Un projet d'une nouvelle infrastructure reliant l'île d'Orléans au continent (municipalité de Québec) a été proposé récemment. Les intervenants qui sont en faveur du nouveau projet en ont discuté devant le BAPE (Bureau d'audience publique sur l'environnement). Malheureusement, cette nouvelle construction amène son lot d'inquiétudes. En effet, le chantier se trouve dans une zone qui abrite le bar rayé, une espèce de poisson en voie de disparition. Cela dit, avant que le projet de construction du pont prenne son élan officiel, il devra être approuvé par Pêche et Océans Canada, défendeurs de l'environnement écologique dans le milieu marin. La deuxième contrainte est que le chantier se trouve sur des terres fédérales, de fait plusieurs considérations doivent être réglées avant qu'il soit lancé[19].
Filmographie
L'île d'Orléans, reliquaire d'histoire, film muet réalisé par Albert Tessier, 1939, 12 min 35 s
↑ a et bPierre-Georges Roy, Noms géographiques de la Province de Québec, Québec, Département des Terres et Forêts, , 344 p. (lire en ligne), p. 200-201
↑ a et bAndré Thevet, Le grand Insulaire et pilotage d'André THEVET, Angoumoisin, cosmographe du Roy, dans lequel sont contenus plusieurs plants d'isles habitées et deshabitées et description d'icelles., , 466 p. (lire en ligne), p. 200
↑Joseph-Camille Pouliot, La grande aventure de Jacques Cartier: Épave bi-centenaire découverte au Cap des Rosiers en 1908, Québec, Documentation québécoise, , 328 p. (lire en ligne), p. 68
↑ a et bJean Poirier, Toponymie de l'île d'Orléans, Québec, Fondation Minigo, , 137 p., p. 14
↑Gérard Godbout, Aperçu général sur l'île d'Orléans, p. 14
↑ a et bGérard Godbout, Aperçu général sur l'île d'Orléans, p. 2
↑« Île d'Orléans », Commission de toponymie du Québec (consulté le )
↑Frédéric Poisson, Connaissance de la flore vasculaire et cartographie écologique de l'île d'Orléans, Québec, Bibliothèque nationale du Canada, , 158 p.
↑ ab et c« Faune vertébrée du Québec », sur Ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs du Québec, (consulté le )
Linda Arsenault et Sonia Landry (dir.), Les producteurs toqués de l'île d'Orléans. Farmers in Chef Hats, Éditions L. A. Communication, Québec, 2007 (ISBN9782980972102)
Louis-Édouard Bois, L'île d'Orléans: notes sur son étendue, ses premiers établissements, sa population, les mœurs de ses habitants, ses productions, A. Coté & Cie., 1895, 148 p.
Hélène Bourque, Donald Dion et Brigitte Ostiguy, L’île d’Orléans, un enchantement, Éditions du Chien Rouge, Québec, 1999, 48 p. (ISBN9782922627008)
André Gaulin, et Norbert Latulippe, L’île d’Orléans, microcosme du Québec, Association québécoise des professeurs de français, Québec, 1984, 137 p.
Collectif, « Dossier île d’Orléans : Le goût de l’île », Continuité, n° 73, été 1997, p. 17-51.
Martin Fournier, Jean Mauvide : de chirurgien à seigneur de l’île d’Orléans au XVIIIe siècle, Éditions du Septentrion, Québec, 2004, 187 p. (ISBN9782894483800)
David Karel, « Le chantre de l’île d’Orléans » dans Horatio Walker, Musée du Québec/Fides, Québec/Montréal, 1986, p. 5-117.
Félix Leclerc, Le Fou de l’île, Bibliothèque québécoise, Québec, 1988 (1re éd. Denoël, 1958), 182 p. (ISBN2894060149)
Jean Poirier, La Toponymie historique et actuelle de l'Île d'Orléans, Fondation Minigo, 1985, 137 p. (d'après une thèse de 1961)