Stéphane TarnierStéphane Tarnier
Étienne (dit Stéphane) Tarnier, né le à Aiserey et mort le à Paris, est un médecin et obstétricien français. Chef de file de l'école française d'obstétrique de la fin du XIXe siècle, il est considéré comme un pionnier de l'hygiène des accouchées et des nouveau-nés. Il est surtout connu pour la mise au point de la première couveuse, et pour avoir inventé le forceps qui porte son nom. BiographieOrigine et formationIl est le fils d'Étienne Tarnier (1796-1866), officier de santé qui exerce à Arc-sur-Tille près de Dijon. Sa mère est Jeanne Tarnier, née Jouy (1807-1888)[1]. Il obtient son baccalauréat en lettres en 1846 et en sciences physiques en 1847. Il s'inscrit à l'école secondaire de médecine de Dijon (intégrée dans l'Université de Bourgogne au XXe siècle)[2],[3]. En 1848, il continue ses études de médecine à Paris. Il est reçu externe en 1850, et second au concours de l'internat de 1853, devant Léon Le Fort[4]. Il obtient son doctorat en 1857[3]. CarrièreEn 1860, il est agrégé de chirurgie dans le domaine des accouchements. Il donne des cours d'accouchements, remplaçant occasionnel de titulaires de chaires. Il est chargé du cours d'accouchement des élèves sages-femmes de 1864 à 1868. En 1867, il devient chirurgien en chef de la Maternité[3]. Pendant la guerre de 1870, il est chargé d'ambulances militaires durant le siège de Paris[3]. En 1884, il est nommé professeur d'accouchement, des maladies des femmes en couches et des enfants nouveau-nés, à la Faculté de médecine de Paris en 1884, en remplacement de Charles Pajot (1816-1896)[3]. En 1889, il est titulaire de la première chaire de clinique d'accouchement, jusqu'à sa mort en 1897, où il est remplacé par Pierre Budin (1846-1907)[3]. Il a été inhumé au cimetière de Dijon. Stéphane Tarnier est resté célibataire, et surnommé pour cela « Stéphane-le-mal-armé ». Certains de ses élèves furent pour lui des amis intimes, dont Pierre Budin et Adolphe Pinard (1844-1934)[5]. TravauxSes travaux concernent principalement l'hygiène des accouchées, l'hygiène des nouveau-nés, et les opérations obstétricales[3]. Fièvre puerpéraleLa fièvre puerpérale exerce ses ravages au cours du XIXe siècle. Dans les années 1860, il meurt une accouchée sur 12 dans les hôpitaux de Paris, contre une sur 178 en ville[6]. Dans sa thèse de 1857 Recherches sur l'état puerpéral et sur les maladies des femmes en couches et dans un livre en 1858 La fièvre puerpérale observée à l'hospice de la Maternité, Tarnier envisage la fièvre puerpérale comme une maladie contagieuse réalisant un empoisonnement du sang, dont la transmission se fait par voie aérienne, c'est-à-dire par les poumons[6]. Cette thèse est fausse par rapport à celle d'Ignace Philippe Semmelweis (1818-1865), dont il n'est pas certain que Tarnier en avait connaissance à l'époque[7]. Semmelweis établit en effet que la contagion s'établit par contact direct, par les mains souillées, en proposant des premières mesures d'asepsie (lavage des mains)[6]. Comme cela arrive parfois en médecine, partir d'une idée fausse peut aboutir à de bons résultats[6]. Pour lutter contre la transmission aérienne, Tarnier propose de séparer les accouchées infectées des accouchées saines, en les plaçant dans des pavillons isolés avec personnel séparé dédié[6]. Cette mesure ne fut appliquée qu'à partir de 1870, mais elle a permis d'abaisser la mortalité hospitalière des accouchées de 9 à 2 %, sans emploi d'asepsie[7]. Après les découvertes de Louis Pasteur (1822-1895) et les pratiques d'asepsie par Joseph Lister (1827-1912), il recommande à ses élèves – dont Paul Bar (1853-1945) et Jacques Amédée Doléris (1852-1938) – de les mettre en application[5]. La bactériologie médicale fait alors partie de l'enseignement de la chaire d'obstétrique, sous l'égide de Tarnier, un laboratoire est créé dans son service, Doléris en étant le premier préparateur (technicien de laboratoire) de 1881 à 1883[8]. En 1880, son élève Doléris publie sa thèse sur l'emploi de compresses imbibées de solution phéniquée sur les parties génitales externes des accouchées, ce qui entraine une nouvelle chute de la mortalité de 2 à 0,3 %. Tarnier utilise par la suite des injections vaginales et des instillations intra-utérines de dérivés mercuriels (sublimé, biodure de mercure...)[7]. En 1890, il fait la synthèse de ses travaux dans un ouvrage imposant L'Antiseptie en Obstétrique[6]. Des critiques se font alors de plus en plus nombreuses et virulentes, car ces instillations sont dangereuses. Tarnier finit par y renoncer en écrivant : « Le sublimé est le plus puissant des antiseptiques ; malheureusement, il est toxique et son maniement doit être très surveillé. Je ne m'en sers plus jamais pour les injections intra-utérines, par crainte d'une intoxication mortelle »[6]. ForcepsLe nom de Tarnier est resté attaché au forceps de son invention, toujours utilisé au début du XXIe siècle dans les pays francophones[9]. En 1877, il améliore le forceps de Levret (1703-1780). Il démontre que ce forceps classique, loin d'être parfait, ne permettait pas de bien tirer dans l'axe du bassin maternel[7]. En collaboration avec un ferronnier et un colonel d'artillerie[10], il ajoute au forceps classique un « tracteur » ou système de traction en 3 parties : une tige horizontale articulée avec une tige verticale intermédiaire, elle-même articulée avec le centre d’un palonnier sur lequel s’effectue la traction des deux mains. Toutes ces pièces articulées mobiles laissent le jeu des branches courbes du forceps, indépendant de la traction[9]. Il est alors possible d'effectuer des tractions dans l'axe du bassin, avec économie de forces, tout en respectant la liberté d'orientation de la tête fœtale[7]. Il invente aussi d'autres instruments obstétricaux, comme le basiotribe destiné à l'embryotomie sur enfant mort in utero. Il s'agit d'un instrument combinant le céphalotribe (pince broyeuse de la tête fœtale) avec un perforateur[7],[10], présenté en 1883 à l'Académie de médecine[3]. CouveuseVers 1862, il invente un dilatateur intra-utérin (ballonet gonflable) pour pratiquer l'accouchement prématuré[3], afin de faire naitre l'enfant avant qu'il ne grandisse trop pour un accouchement naturel, alors impossible ou trop dangereux en cas de dystocie osseuse[10]. Pour les bébés prématurés, il a aussi imaginé la couveuse ou incubateur. Il aurait eu l'idée en regardant des couveuses pour oiseaux exotiques du jardin d'acclimatation de Paris en 1870. Cette idée est appliquée à partir de 1880 à la clinique qui portera son nom[3]. L'incubateur de Tarnier est une caisse en bois munie de réservoirs d'eau chauffée par une lampe à alcool, où l'enfant est maintenu dans une atmosphère de température à peu près constante de 37° C[11]. Il veille aussi à la nutrition des nouveau-nés : en 1879 il utilise le lait de chèvre et le lait d'ânesse, avant de s'en tenir au lait de vache[12]. Ses travaux seront repris et corrigés par son élève Pierre Budin, pionnier de la médecine périnatale moderne. AutresPour les femmes enceintes en situation de pré-éclampsie, il préconise un traitement préventif de l'éclampsie par un régime lacté exclusif (ce qui n'a pas été confirmé par la suite)[7]. Le , Wilhelm Röntgen (1843-1925) découvre les rayons X. Cette découverte fait aussitôt l'objet d'un engouement grand public (attractions dans les cafés en vogue, grands magasins, fêtes foraines...) au même titre que le cinématographe. En 1896, Tarnier est le premier à organiser dans son service une conférence sur les rayons X, ce qui lui vaut des reproches du doyen de la Faculté de médecine pour avoir autorisé la présentation d'une « mystification »[13]. ÉponymieLa plupart des termes (instruments, manœuvres...) n'ont d'intérêt qu'historique[14],[15] :
Publications principales
Honneurs et distinctions
HommagesLa rue principale d'Arc-sur-Tille où se trouve son ancienne résidence (La Clochette) porte son nom. Au sud d’Arc-sur-Tille une fontaine porte également son nom. À Paris, un monument lui a été élevé à l'angle de l'avenue de l'Observatoire et de la rue d'Assas, contre le bâtiment de l'ancienne clinique Tarnier, regroupant aujourd'hui les services de psychiatrie et de l'hôpital Cochin ainsi que l'Unité de Recherche Clinique Paris Centre. Notes et références
Article connexeLiens externes
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