Responsabilité sociétaleLa responsabilité parfois dite « sociétale » (ou plus sobrement responsabilité sociale) est le concept qui désigne la responsabilité d'une entité (agent économique, groupe, collectivité, ou même une personne dans le peuple...) relativement aux conséquences économiques, sociales et environnementales de ses activités à l'égard de la société (souvent désignée, mais de façon généralement réductrice, par le terme de parties prenantes). C'est une notion notamment mise en avant par des organisations de consommateurs, des partisans du développement durable et de l'intégration de l'éthique (morale ?) dans l'économie, mais aussi traduite en dispositifs de management[1]. La force juridique de cette notion est encore en débat : d'un côté, elle est souvent revendiquée comme une initiative volontaire (qui ne devrait donc pas être saisie par le droit) ; de l'autre côté, la RSE est toujours définie par rapport à la réglementation existante (qu'il convient a minima de respecter avant de pouvoir se dire responsable) et, faute d'avancées suffisantes en matière d'intégration d'un développement durable dans les entreprises, les pratiques de RSE (reporting, devoir de vigilance…) ont dû être de plus en plus encadrées par la loi. ÉtymologieDans une communication du , l'Académie des Sciences morales et politique (Institut de France) s'est interrogée sur la légitimité formelle du néologisme sociétal, « qu’aucune règle grammaticale de dérivation ne justifie, ni en français ni en anglais »[2]. Chantal Delsol, vice-présidente de cette institution spécialiste de la terminologie des questions de société, souligne qu'aucun adjectif n'est formé en français par substitution de la syllabe -tal à la syllabe -té. Aucun autre adjectif n'est en effet construit sur ce modèle malencontreux : ni « santal » (santé) ni « beautal » (beauté) ni « chastetal » (chasteté) ni « puretal » (pureté) ni « qualital » (qualité) ni « méchancetal » (méchanceté) n'existent, et leur ridicule n'échappe pas aux francophones. Au-delà de cette dimension linguistique, l'adjectif « sociétal » n'est en général utilisé en France que pour se distinguer du champ du « dialogue social » (champ du droit du travail où interviennent le législateur ainsi que les « partenaires sociaux », à savoir les organisations représentatives des employeurs d'une part, et des salariés d'autre part). C'est le cas par exemple du nom de la Plateforme nationale d'actions globales pour la responsabilité sociétale d'entreprise. Hormis ce cas de figure, l'usage courant est de parler de « responsabilité sociale », incluant le champ du dialogue social et le champ du « sociétal » ). Éléments de définitionLa responsabilité sociétale des organisations (entreprises, collectivités territoriales, syndicats, associations) a fait l'objet d'une norme internationale, adoptée par le vote en 2010 de 86 pays, la norme ISO 26000. Elle résulte d'un projet initié par des organisations de consommateurs en 2001, « inquiets des conditions de travail des salariés face aux pratiques de certains grands groupes[3] ». Les groupes de travail ont été néanmoins caractérisés par une faible présence des pays en développement et par un déséquilibre de représentation en faveur des représentants des entreprises et en défaveur des représentants des ouvriers et employés[4]. La responsabilité sociétale repose principalement sur deux principes :
La norme ISO 26000[5], toujours en vigueur, la définit comme :
Pour une entreprise, on parle ainsi de responsabilité sociétale des entreprises, ou de responsabilité sociale des entreprises (RSE) ; en anglais : « corporate social responsibility » (CSR).
Plusieurs types de responsabilités socialesLa responsabilité sociétale peut cependant être comprise de différentes façons. Pour certains, c'est une approche éthique, et non morale[7], prise en compte dans les approches éthique et d'écologie politique, d'affichage environnemental. Elle peut faire partie des allégations environnementales citée par l'entreprise, dans son rapport sur le développement durable par exemple, mais il n'existe pas encore de référentiel consensuel permettant d'objectivement mesurer la responsabilité sociétale d'une organisation ou d'une entreprise. En management, la RSE est souvent présentée comme une démarche de processus permanent de progrès (de type amélioration continue), et non comme un état. Dans le cas des techniques de l'information et de la communication (TIC), Florence Rodhain et Bernard Fallery ont mis en évidence un ensemble de mauvaises hypothèses sur le rôle des TIC pour l'environnement, qui fait apparaître un jeu de « responsable mais pas coupable », avec trois types d'acteurs et de responsabilités[8] :
La catastrophe du Rana Plaza : Vers un tournant de la régulation ?Le , les ateliers textiles dans le bâtiment Rana Plaza (dans la ville de Dacca au Bangladesh) - qui travaillaient pour l'exportation - se sont effondrés faisant 1.129 victimes. L'ampleur de la catastrophe du Rana Plaza a fait évoluer la nature de la réglementation encadrant les relations entre une entreprise et ses filiales à l'étranger, ainsi que sa chaîne de sous-traitants [9]. À la suite de cette catastrophe, le CCFD, Amnesty International, le collectif « Éthique sur l'étiquette », et l'association Sherpa ont plaidé pour la création d'un principe de responsabilité juridique liant une entreprise et ses filiales à l'étranger, ainsi que sa chaîne de sous-traitants. L'instauration de ce lien juridique rendrait la société-mère responsable d'un accident du travail survenu dans une de ses filiales à l'étranger, voire chez un sous-traitant, s'il pouvait être démontré que la société-mère a manqué de vigilance. En effet, sauf exception, une société commerciale est, du point de vue de la loi, considérée comme une personne morale autonome, même si son capital social est contrôlé par une autre société (formant un groupe) et a fortiori entre donneur d'ordre et sous-traitant. La démarche de ces associations vise donc à ouvrir une voie de recours pour demande réparation en cas d'accident du travail –même dans les « lointains » pays émergents– à l'encontre d'une société-mère et/ou d'un donneur d'ordre dont le siège social se trouve en France. Cette démarche a débouché sur le vote de la Loi n° 2017-399 du 27 mars 2017 relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre[10] (loi dite « Devoir de vigilance »). Elle a été suivie au niveau européen de la Directive 2024/1760 sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité et modifiant la directive (UE) 2019/1937 et le règlement (UE) 2023/2859 (dite Directive CS3D « Devoir de vigilance ou, en anglais, « Due diligence »)[11], entrée en vigueur le 25 juillet 2024. Notes et références
AnnexesArticles connexesBibliographie
Liens externes
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