Poètes anglais de la Première Guerre mondialeLes poètes anglais de la Grande Guerre occupent une place tout à fait éminente dans l'histoire de la poésie britannique, tant par le sujet qu'ils évoquent, que par la qualité de leurs écrits. Parmi les grands noms qui s'y rattachent se trouvent Rupert Brooke, Wilfred Owen, Siegfried Sassoon, John McCrae, David Jones ou Robert Graves. À la différence des poésies écrites jusque-là sur la guerre, souvent empreintes de lyrisme, comme Salisbury Plain, de Wordsworth ou La Charge de la brigade légère (The Charge of the Light Brigade), de Tennyson[N 1],[1] ces poèmes anglais de la Première Guerre mondiale sont l'œuvre de patriotes combattant au front, souvent avec un courage remarquable, mais dont le patriotisme ne masque ni la folie du conflit auquel ils participent, ni leur amertume face à l'immense gâchis qui en résulte. Caractères spécifiques de la poésie de la Première Guerre mondialeLa « poésie de guerre » (War poetry) est considérée en Grande-Bretagne comme un genre poétique bien distinct, regroupant un nombre limité de poètes, dont les trois plus marquants sont Rupert Brooke, Wilfred Owen et Siegfried Sassoon. De façon générale, l'expression « poésie de guerre » s'applique uniquement aux poèmes de la Première Guerre mondiale[2]. La guerre dans la poésie, avant la « poésie de guerre »La référence à la guerre dans un poème n'est pas chose nouvelle. Sans remonter à l'Iliade — qui présente cependant certains caractères d'une poésie de guerre — on trouve dans la littérature, et dans la littérature anglaise en particulier, de nombreux poèmes inspirés par la guerre, tels que les poèmes de Salisbury Plain, de Wordsworth ou La Charge de la brigade légère (The Charge of the Light Brigade), de Tennyson, inspirée par la guerre de Crimée[2]. Cependant, les poètes de la Première Guerre mondiale ne sont pas les chantres de celle-ci, car ils en sont d'abord aussi les acteurs : ils participent aux combats, parfois de façon héroïque, et beaucoup n'en reviendront d'ailleurs pas. Aussi leurs poèmes ne sont-ils pas des hymnes glorifiant la guerre et la patrie, de façon détachée et lointaine : patriotes, mais impliqués, courageux, mais exposés aux horreurs de ces combats longs et acharnés, ils en donnent une vision réaliste, dure, parfois grinçante et amère, qui constitue un des apports originaux de cette poésie. Ainsi par exemple Siegfried Sassoon, engagé volontaire et farouchement opposé à la guerre, pacifiste condamnant l'horreur des tranchées qui mène des raids de nuit d'une folle bravoure dans les tranchées allemandes, héros décoré de la Military Cross connu pour ses écrits condamnant la guerre sans appel, illustre-t-il bien la complexité des aspects de la poésie de la Première Guerre mondiale. Thèmes principaux
Les premiers recueils de poèmes de guerre, en particulier la célèbre anthologie, The Muse in Arms (La Muse en armes), publiée en 1917 par E. B. Osborn, traitaient de la guerre sur un mode patriotique, voire chauvin, à peine teinté parfois de tristesse devant les morts, et les sacrifices individuels, car la tristesse elle-même n'empêchait pas de reconnaître la « nécessité » de toutes ces souffrances[2]. À telle enseigne que l'anthologie The Muse in Arms ne comportait aucun poème de Wilfred Owen, et deux seulement de Siegfried Sassoon[2].
Les poèmes publiés pendant la guerre elle-même ne laissent souvent que peu de trace dans la littérature anglaise, car trop patriotiques, et déconnectés de la réalité de la guerre, comme le sont ceux de Jessie Pope, à laquelle s'adresse le Dulce Et Decorum Est de Wilfred Owen. Si ce n'est qu'après la fin de la guerre que la poésie de poètes tels que Owen et Sassoon fut reconnue du grand public, c'est en revanche au cours de la tourmente qu'ils écrivirent beaucoup de leurs œuvres les plus connues.
StyleNo truth unfitting : influence de Sassoon sur le style et le regard des poètes de guerre. Liens et influences réciproques entre les différents War poetsOwen, Graves, Sassoon... Avec des poètes d'autres nationalités. Principaux poètes anglais de la Première Guerre mondiale
Beaucoup ont été engagés volontaires, ce qui va mal avec l'idée qu'on se fait d'un « doux poète ». On retrouve sans doute ce trait chez les poètes allemands. Caractère patriotique, voir nationaliste de leur vie et de leurs écrits. Evolution commune du patriotisme au réalisme le plus cru. Rupert BrookeRupert Chawner Brooke ( - ) est un poète anglais connu tant pour ses poèmes idéalistes, les War Sonnets écrits pendant la Première Guerre mondiale (notamment The Soldier), que pour les poèmes qu'il a écrits en temps de paix, particulièrement The Old Vicarage, Grantchester[3] et The Great Lover[4]. Il est également connu alors pour sa beauté juvénile, ce qui amène W. B. Yeats à le décrire comme « le plus beau jeune homme d'Angleterre » (the handsomest young man in England). Il aide à fonder le club de théâtre Marlowe Society, se fait des amis parmi un groupe d'écrivains, le Bloomsbury Group, et appartient à un autre groupe nommé les Georgian Poets. Il est également le membre le plus important des Dymock Poets. Il meurt le sur l'île de Lemnos dans la mer Égée, alors qu'il part pour la bataille des Dardanelles. Il est enterré sur l'île de Skyros, en Grèce. Wilfred Owen
Wilfred Owen MC ( – ) est un poète anglais, très connu en Angleterre et parfois considéré comme le plus grand poète de la Première Guerre mondiale. Ses poèmes, souvent réalistes et décrivant la brutalité et l'horreur de la guerre de tranchées et des attaques au gaz, tranchent fortement avec l'opinion publique sur la guerre à l'époque et avec les vers patriotiques d'hommes tels que Rupert Brooke. Parmi ses poèmes les plus connus on peut citer Dulce Et Decorum Est, Anthem for Doomed Youth, Futility et Strange Meeting. Il fut tué avec tous ses compagnons d'arme le , une semaine avant l'Armistice, en essayant de reprendre des positions sur le canal Sambre-Oise. La poésie d'Owen fut fortement influencée par son ami Siegfried Sassoon.
Siegfried Sassoon
Siegfried Loraine Sassoon ( – ) est un poète et écrivain anglais qui influença des auteurs tels que Wilfred Owen ou Robert Graves. D'abord connu pour ses écrits pacifistes au cours de la Première Guerre mondiale, il acquit plus tard la célébrité avec ses mémoires et ses œuvres de fiction. Bien que patriote et engagé volontaire juste avant l'entrée de la Grande-Bretagne dans le conflit, Sassoon était violemment opposé à la guerre. Bien que pacifiste et opposé à la tuerie et aux horreurs de la guerre des tranchées, qu'il vécut en première ligne, il était d'une bravoure folle, par exemple lors des raids de nuit qu'il effectuait, ce qui lui valut le surnom de Mad Jack (« Jack le Fou »). On dit de lui qu'en une certaine occasion, il s'empara à lui tout seul d'une tranchée ennemie. Il fut d'ailleurs décoré de la Military Cross. Il fut considéré comme un héros par les poètes qui le suivirent, du fait de sa condamnation sans ambiguïté de la guerre.
John McCrae
John McCrae est un médecin biologiste canadien qui s'est enrôlé volontairement d'abord pour la seconde guerre des Boers en Afrique du Sud puis dans le Corps expéditionnaire canadien pendant la Grande Guerre. Il a été promu au grade de Lieutenant-Colonel du Corps médical canadien. C'est lui qui aurait écrit en , à Boezinge, un poème en pleine bataille des Flandres. Il décède à l'Hôpital militaire britannique de Wimereux à la fin de . Son poème In Flanders Fields (Au champ d'honneur) évoque avec une grande simplicité les champs de bataille des Flandres. Il est devenu pour les Britanniques le symbole de toute une génération fauchée dans la fleur de l'âge, à l'instar des romans de Roland Dorgelès ou de Maurice Genevoix pour les Français.
Robert Graves
Robert Graves (Wimbledon, Londres, – Deia (île de Majorque, Espagne), ), fils de l'écrivain irlandais Alfred Perceval Graves et d'Amalia von Ranke, est un poète et romancier britannique. Il quitta ses études pour s'engager en 1914 et devint Capitaine dans un régiment des Royal Welsh Fusiliers. Il est surtout connu pour sa biographie historique Moi, Claude. Il a aussi publié en 1929 ses souvenirs, essentiellement de la Première Guerre mondiale, dans Good-Bye to All That. Ce titre désabusé est justifié à la fin de l'avant-dernier chapitre dans lequel il évoque très brièvement son divorce d'avec sa femme Nancy : We parted on May 6th, 1929. She, of course, insisted on keeping the children. So, I went abroad, resolved never to make England my home again; which explains the Goodbye to All That of this title. David Jones
David Jones, Companion of Honour ( – ) était à la fois un artiste et l'un des poètes les plus importants de la première génération des poètes modernistes britanniques. Son œuvre est marqué par son double héritage, gallois d'une part, et catholique de l'autre. T. S. Eliot considerait que Jones était un écrivain de la plus grande importance, et son œuvre The Anathemata était considérée par W. H. Auden le long poème le plus important jamais écrit en anglais au XXe siècle.
Autres poètes de langue anglaise de la Première Guerre mondialeContexte des poèmes de guerrePourquoi ces poèmes ?
Vie quotidienneConditions d'écritureAccueil et réactions du public
Au cours de la Première Guerre mondiale, la poésie de guerre eut une audience certaine, et l'anthologie The Muse in Arms, publiée en 1917, connut un grand succès. Cependant, l'heure était à l'élan patriotique, et à la conviction que, si douloureux que soient la guerre et le sort de ses victimes, ces sacrifices étaient nécessaires, et que cette nécessité primait sur toute autre considération. Ce n'est donc qu'après la guerre, vers les années 1920, que toute une série d'ouvrages, en Grande-Bretagne (Undertones of War, d'Edmund Blunden, ou Goodbye to All That, de Robert Graves), en France (Le Feu, d'henri Barbusse), et en Allemagne, avec le célèbre livre d'Erich Maria Remarque de 1929, Im Westen nichts neues (À l'ouest, rien de nouveau), firent connaître la réalité de l'horreur de la vie au front. Et c'est alors seulement que l'appréciation de la poésie de guerre commença à prendre toute son ampleur. Un nouveau regain d'intérêt eut lieu également beaucoup plus tard, dans les années 1960. Vie après la guerre
Poètes de la Première Guerre mondiale d'autres nationsAllemagne
August Stramm est un dramaturge et poète allemand, né à Munster le et mort dans les marécages de Rokitno (Russie) le . Jugé comme l'un des précurseurs du théâtre expressionniste allemand, Stramm reste très peu connu et monté actuellement en France. FranceEn France, la Grande Guerre ne donne pas lieu à la même création poétique et les poètes évoquant la guerre sont peu nombreux. Théodore Botrel, l'auteur de La Paimpolaise, est l'auteur de textes et de chansons patriotiques, dont Ma P'tite Mimi. De son côté, Guillaume Apollinaire écrit son recueil de poèmes Calligrammes, sous-titré poèmes de la paix et de la guerre 1913-1916. Italie
Giuseppe Ungaretti est un poète italien, né le à Alexandrie (Égypte), mort le à Milan. Au début de la Première Guerre mondiale, il s'engagea comme volontaire pour partager le destin de ses contemporains. Il combattit au Carso (province de Trieste), puis en Champagne [5]. En 1916 il publia en italien (grâce à l'un de ses officiers) le recueil de poésie Il porto sepolto où se reflètent son expérience de la guerre, qui lui avait fait côtoyer la couche la plus pauvre de l'humanité, celle de la douleur quotidienne. Comme pour tant d'autres appelés, malgré l'horreur absolue de la guerre, Ungaretti ou Rèbora firent aussi l'expérience de l'appartenance à une nation et à une langue, peu sensibles jusqu'alors. PostéritéDans la littératureDans la culture populaire
AnnexesNotes
Références
Bibliographie
Articles connexes
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