Nombre de Carmichael![]() En théorie des nombres, un nombre de Carmichael (portant le nom du mathématicien américain Robert Daniel Carmichael), ou nombre absolument pseudo-premier, ou encore nombre pseudo-premier absolu[1], est un nombre composé qui vérifie la propriété suivante, satisfaite par tous les nombres premiers d'après le petit théorème de Fermat :
C'est donc un nombre pseudo-premier de Fermat en toute base première avec lui (on peut d'ailleurs se restreindre aux entiers de 2 à dans cette définition). D'après le lemme de Gauss, cette propriété équivaut à que pour tout entier premier avec , soit un diviseur de . Mais l'étude des nombres de Carmichael permet de montrer que ce sont aussi les nombres composés vérifiant : ce qui correspond, pour les nombres premiers , à un autre énoncé du petit théorème de Fermat. Le plus petit nombre de Carmichael est 561, et en 1994, Alford, Granville et Pomerance démontrent qu'il existe une infinité de nombres de Carmichael[2]; voir la suite A002997 de l'OEIS. ContexteLe petit théorème de Fermat énonce que les nombres premiers ont la propriété que pour tout entier , est un diviseur de . Sa réciproque est fausse et les nombres de Carmichael sont les nombres positifs qui satisfont cette propriété sans être premiers : ce sont des menteurs de Fermat. Pour de tels nombres, dits pseudo-premiers, le test de primalité de Fermat échoue toujours à montrer qu'ils sont composés[3], quel que soit le choix du témoin , ce qui ne peut pas arriver pour d'autres tests de primalité comme le test de primalité de Solovay-Strassen ou le test de primalité de Miller-Rabin. Cependant, plus les nombres deviennent grands, plus les nombres de Carmichael deviennent rares, ce qui fait que le test de primalité de Fermat reste probabilistiquement relativement pertinent. Par exemple, le 646e nombre de Carmichael vaut 993 905 641 et il existe 105 212 nombres de Carmichael entre 1 et 1015. AppellationL'appellation "nombre absolument pseudo-premier" (ou "nombre pseudo-premier absolu") devrait être précisée par : "pour le test de Fermat", car il existe d'autres nombres absolument pseudo-premiers, par exemple les nombres absolument pseudo-premiers d'Euler. CaractérisationUne caractérisation des nombres de Carmichael est donnée par le théorème de Korselt : Théorème — Un entier positif composé est un nombre de Carmichael si et seulement si aucun carré de nombre premier ne divise (on dit que est sans facteur carré) et pour chaque diviseur premier de , le nombre divise . De plus, un tel divise tous les (même pour non premier avec ). Il découle de ce théorème que tous les nombres de Carmichael sont des produits d'au moins trois nombres premiers différents. Korselt mentionne cette caractérisation (sans l'accompagner d'exemples) dans une courte réponse à une question de Gaston Tarry[4], à propos, dirions nous aujourd'hui, de l'existence de nombres pseudo-premiers en base 2, caractérisation passée semble-t-il alors inaperçue[5]. En 1910, Robert Daniel Carmichael énonce indépendamment[5] et démontre un critère voisin, dont la formulation utilise sa fonction indicatrice, et donne 4 de ces nombres dont 561 et 1105, les deux plus petits d'entre eux[6], résultats qu'il reprend et développe dans un article paru en 1912[7]. C'est à la suite de ces articles que ces nombres sont appelés nombres de Carmichael[5]. On vérifie facilement que 561 = 3 × 11 × 17 est un nombre de Carmichael à l'aide du théorème de Korselt : la décomposition en facteurs premiers ne comporte pas de facteur multiple et 3 – 1 = 2, 11 – 1 = 10 et 17 – 1 = 16 sont tous trois des diviseurs de 560. Les sept premiers[8] nombres de Carmichael sont :
J. Chernick démontre un théorème en 1939[9] qui peut être utilisé pour construire un sous-ensemble de nombres de Carmichael. Le nombre est un nombre de Carmichael si ses trois facteurs sont tous premiers. On ne sait pas si cette formule, ou d'autres similaires, engendre une infinité de nombres de Carmichael lorsque décrit l'ensemble des entiers. Tout nombre de Chernick est aussi un nombre de Zeisel avec et . Nombre de nombres de CarmichaelEn 1956, Paul Erdős démontre[10] l'existence d'une constante telle que le nombre de nombres de Carmichael inférieurs ou égaux à est majoré par . Le tableau suivant donne les valeurs minimales approximatives de cette constante, pour :
Dans le même article, Erdős donne des arguments heuristiques en faveur de l'hypothèse selon laquelle pour tout pour assez grand, hypothèse qui a pour conséquence l'existence d'une infinité de nombres de Carmichael conjecturée par celui-ci. La conjecture de Carmichael est démontrée en 1994 par William Alford (en), Andrew Granville et Carl Pomerance[2], qui démontrent même plus précisément que pour assez grand[11]. En 2013, Thomas Wright démontre qu'il existe une infinité de nombres de Carmichael dans toute suite arithmétique où [12]. PropriétésTout nombre de Carmichael est impair. En effet, pour tout entier composé pair , n'est pas divisible par . Les nombres de Carmichael ont au moins trois facteurs premiers. Les premiers nombres de Carmichael avec respectivement au moins k = 3, 4, 5,... facteurs premiers sont (suite A006931 de l'OEIS) :
Les premiers nombres de Carmichael avec quatre facteurs premiers sont (suite A074379 de l'OEIS) :
Une coïncidence amusante est la suivante : le troisième nombre de Carmichael et premier nombre de Chernick , 1729, est le nombre de Hardy-Ramanujan, c'est-à-dire le plus petit entier positif qui peut être écrit de deux façons différentes comme la somme de deux cubes (1729 = 7 × 13 × 19 = 103 + 93 = 123 + 13). Dans la même veine, le deuxième nombre de Carmichael, 1105, peut être écrit comme somme de deux carrés de plus de façons que n'importe quel entier qui lui est inférieur. Le nombre 101 101 est le plus petit nombre de Carmichael palindrome. L'astéroïde numéroté 101 101 a été baptisé du nom de Carmichael[13]. Démonstration du théorème de Korselt
Cela achève la démonstration du théorème de Korselt. Conséquences du théorème de Korselt : Si est un facteur premier d'un nombre de Carmichael alors, modulo , on a n/p = (n/p)1 ≡ (n/p)p = n ≡ 1. Autrement dit, si est un facteur premier d'un nombre de Carmichael, alors le produit des autres facteurs premiers est congru à 1 modulo . Un nombre de Carmichael ne peut être le produit de deux nombres premiers et , car alors chacun des deux nombres et diviserait l'autre et ils seraient égaux. Tout nombre de Carmichael est donc le produit d'au moins trois nombres premiers (impairs) distincts. Nombres de Carmichael d'ordre supérieurLes nombres de Carmichael peuvent être généralisés en utilisant les concepts de l'algèbre générale. La définition ci-dessus énonce qu'un entier composé est un nombre de Carmichael précisément lorsque la fonction puissance -ième de l'anneau commutatif des entiers modulo dans lui-même est la fonction identité. L'identité est le seul -endomorphisme d'algèbre sur donc nous pouvons retrouver la même définition en demandant que soit un endomorphisme d'algèbre de . Comme ci-dessus, satisfait à cette propriété quand est premier. La fonction puissance -ième peut se définir sur n'importe quelle -algèbre A. Un théorème énonce que est premier si et seulement si toutes les fonctions sont des endomorphismes d'algèbres. Entre ces deux conditions se trouve la définition des nombres de Carmichael d'ordre pour un entier positif comme étant les nombres composés tel que est un endomorphisme de chaque -algèbre pouvant être générée comme -module par éléments. Les nombres de Carmichael d'ordre 1 sont alors les nombres de Carmichael ordinaires. PropriétésLe critère de Korselt peut être généralisé aux nombres de Carmichael d'ordre supérieur[14]. Un argument heuristique[14] semble suggérer qu'il existe une infinité de nombres de Carmichael d'ordre , quel que soit . Néanmoins, on ne connaît aucun nombre de Carmichael d'ordre 3 ou plus. Notes et références(en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Carmichael number » (voir la liste des auteurs).
Bibliographie(en) Paulo Ribenboim, The New Book of Prime Number Records, Springer, , 541 p. (ISBN 0-387-94457-5), chap. IX Voir aussiArticle connexeLiens externes
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