Né dans une famille francophone en Sarre peu après qu'elle est devenue prussienne en 1815 à la suite de la bataille de Waterloo et du traité de Paris, Gouvy est prussien de naissance alors que deux de ses frères aînés (nés à Goffontaine, antérieurement encore en France) sont français. Il est scolarisé au collège de Sarreguemines, puis au lycée de Metz[2].
Il étudie le droit puis la musique à Paris. Le Conservatoire de Paris lui demeurant fermé en raison de sa nationalité prussienne, il suit des cours privés avec Antoine Elwart et Pierre-Joseph Zimmerman[3]. Il se perfectionne également au contact des musiciens de Francfort, Leipzig et Berlin, où il rencontre entre autres Franz Liszt. Il séjourne ensuite à Rome où il fréquente un cercle de musiciens parmi lesquels Karl Anton Eckert(en)[4], Eduard Franck et Niels Gade. Il n'accède à la citoyenneté française par naturalisation qu'à 32 ans.
Antoine Elwart (1808-1877)
Karl Pierre-Joseph Zimmerman (1785-1853)
Karl Anton Eckert (1820-1879)
Niels Gade (1817-1890)
Gouvy vit et compose longtemps à Hombourg-Haut en Moselle, chez son frère maître des forges. Il est un homme de double culture, française et allemande, d'où il tire son inspiration et sa particularité. Bien qu'il y soit connu et reconnu de son vivant, il tombe au XXe siècle dans l'oubli[5].
Hector Berlioz écrit dans le Journal des Débats du : « Qu'un musicien de l'importance de M. Gouvy soit encore si peu connu à Paris, et que tant de moucherons importunent le public de leur obstiné bourdonnement, c'est de quoi confondre et indigner les esprits naïfs qui croient encore à la raison et à la justice de nos mœurs musicales[6]. »
Mais Berlioz n'y change rien et Gouvy reste largement ignoré jusqu'à la fin du XXe siècle. C'est toute l'action entreprise dans sa région, la Lorraine, et la redécouverte de son Requiem, avec son vigoureux Dies iræ, qui le fait sortir à nouveau de l'ombre en 1994[7].
L'œuvre de Gouvy demeure largement méconnue bien qu'elle comporte plus de 300 compositions, dont 90 opus publiés de son vivant. Il a notamment écrit 25 compositions pour grand orchestre[9] dont neuf symphonies, des ouvertures et des variations. La musique de chambre occupe également une place importante dans sa production musicale[10] avec notamment quatre sonates en duo, cinq trios avec piano, onze quatuors, sept quintettes, un énorme répertoire pour piano – à deux et quatre mains et pour deux pianos – , plusieurs partitions pour ensembles à vent, ainsi que de très nombreuses mélodies et des Lieder. On connaît aussi cinq grandes cantates dramatiques – Aslega, Œdipe à Colone, Iphigénie en Tauride, Électre et Polyxène –, deux opéras – Le Cid et Mateo Falcone – ainsi que des grandes œuvres religieuses, dont un Requiem, un Stabat Mater, une Messe brève et la cantate Golgotha.
Symphonie no 5 en si majeur, op. 30 (1857, première version ; deuxième version en 1868) ; création de la première version à Leipzig par l'Orchestre du Gewandhaus en 1865[15], de la deuxième version à Cologne en 1868[15]
Trois élégies pour deux soprani et piano, op. 46 (1866)
Trois duos pour deux soprani et piano, op. 74 (1883)
Trois mélodies dominicales
Voix et orchestre
Dernier Hymne d'Ossian, pour baryton-basse et orchestre, op. 15 (1850)
La Religieuse, poème de Millevoye, pour contralto et orchestre (1875)
À Capella
Douze choeurs pour quatre voix d'hommes à capella, op. 23 (1860)
Sérénade à quatre voix d'hommes (1847)
Chœurs pour voix d'hommes (1849)
8 Vierstimmige Lieder für Männerchor
Douze choeurs à quatre voix, op. 32 (1866)
Trois cantiques pour chœur à cappella (1874)
Musique religieuse
La gloire du Seigneur, psaume pour orchestre et chœur (1874)
Requiem, pour quatre voix, chœur et orchestre, op. 70 (1874)
Stabat mater, pour trois voix, chœur et orchestre, op. 65 (1875)
Le Calvaire, cantate pour voix, chœur et orchestre (1877)
Messe brève, pour quatre voix, chœur et orchestre, op. 72 (1883)
Œuvres profanes
Ode au printemps (Frühlings Erwachen), cantate pour soprano, chœur d'hommes et orchestre, op. 73 (1878)
Asléga, drame lyrique pour trois voix, chœur et orchestre (1877)
Oedipus à Colonne, pour quatre voix, chœur et orchestre, op. 75 (1880)
Iphigénie en Tauride, pour quatre voix, chœur et orchestre, op. 76 (1883)
Egille, pour ténor, baryton, choeurs d'hommes et orchestre, op. 86 (1886)
Electre, pour quatre voix, chœur et orchestre, op. 85 (1888)
Polyxéne, pour trois voix, chœur et orchestre, op. 88 (1894)
Opéras
Le Cid, d'après la pièce de Corneille (1862), écrit à la demande de l'Opéra de Dresde mais non représenté en raison de la mort du ténor, tenant titre du rôle (1865). L'œuvre est représentée pour la première fois à Sarrebruck le 5 juin 2011.
↑Cieslik, Astrid, Die Klaviermusik des Lothrinischen Komponist Théodore Gouvy (1819-1898), Thèse de doctorat, Sarrebruck, Université de la Sarre, 2013.
Quintette, op. 24 et 5e quatuor à cordes, op. 68 par le quatuor Denis Clavier.
Quatuors à cordes n°5 et n°6 par le Quatuor Élysée.
Intégrale de l'œuvre symphonique (coffret CPO Disques) par la Deutsche Radio Philharmonie Saarbrucken Kaiserslautern sous la direction de Jacques Mercier, qui comprend : Symphonies no 1, op. 9 et no 2, op. 12 (enregistrement - CPO 777 379-2) / Symphonies no 3, op. 20 et no 5, op. 30 (enregistrement - CPO 777 381-2) / Symphonie no 4 op. 25, Symphonie brève op. 58, Fantaisie symphonique (enregistrement (CPO 777 382-2) / Symphonie no 6, op. 87, Sinfonietta, op. 80 (enregistrement - CPO 777 380-2).
Une sélection de mélodies: Songs to texts by Pierre de Ronsard and other Renaissance Poets, par MeeAe Nam (soprano), John Elwes (tenor), Joel Schoenhals (piano). Toccata Classics, London 2014.
De nombreux enregistrements sont également disponibles par les plateformes de musique en streaming.
Bibliographie
Mario d'Angelo, Martin Kaltenecker, Marc Rigaudière (dir.), Théodore Gouvy, recherches récentes (Actes du deuxième colloque international de Paris 2019). Paris : Éditions Le Manuscrit, 2022. Textes en français et en allemand, 384 p. (ISBN978-2-304-05350-0)
Joël-Marie Fauquet (direction) (préf. Joël-Marie Fauquet), Dictionnaire de la musique en France au XIXe siècle, Paris, Fayard, , 1 405 (ISBN2-213-59316-7), p. 526
Herbert Schneider et René Auclair (éd.) Théodore Gouvy 1819–1898. Bericht über den Internationalen Kongress / Actes du Colloque international Saarbrücken / Hombourg-Haut'. Hildesheim: Georg Olms Verlag, 2008, (ISBN978-3-487-13541-0).
Wolfgang Birtel, "Zu Persönlichkeit und Werk des „saarländischen“ Komponisten Theodor Gouvy (1819-1898)", in Mitteilungen der Arbeitsgemeinschaft für mittelrheinische Musikgeschichte, 38 (1979), p. 463-472.
Dratwicki, Alexandre (éd.). "Théodore Gouvy: cantates, œuvres symphoniques et musique de chambre", livre-disque, Ediciones singulares/Palazetto Bru-Zane (Centre de musique romantique française), 2013.
Otto Klauwell, Theodor Gouvy. Sein Leben und seine Werke, Berlin, Harmonie, 1902.