Loi portant réforme de la protection juridique des majeursDroit des personnes en France
En France, la loi no 2007-308 du portant réforme de la protection juridique des majeurs[1], entrée en vigueur le , rénove les dispositifs issus de deux lois antérieures :
Cette réforme était nécessaire, notamment en raison de l'explosion du nombre de mesures de protection liées au vieillissement de la population[2] : « En effet, la loi de 1968, conçue pour quelques milliers de personnes, ne répondait plus aux besoins actuels des majeurs protégés, estimés à 700 000 [...] »[3]. Les grandes orientations de la loiUne plus grande prise en compte de la personne protégéeLa loi consacre la protection de la personne elle-même et non plus seulement celle de son patrimoine. Les droits et la volonté de la personne à protéger sont davantage pris en compte, comme on peut le voir dans l'article 415 du Code civil français :
— Article 415 du Code civil[4] Par ailleurs, il y a un changement de vocabulaire. On ne parle plus dans le texte de « personnes incapables », mais de « majeur ou personne protégé(e) » ou de « personne sous tutelle ou sous curatelle »[5]. Le recentrement des mesures de protection sur les personnes souffrant d'une altération de leurs facultésLa loi recentre les mesures de protection sur les personnes souffrant d'une altération de leurs facultés, comme on peut le voir dans l'article 425 du Code civil :
— Article 425 du Code civil[6] Ainsi, les termes de prodigalité, d'oisiveté et d'intempérance disparaissent de la loi[2] et ne sont plus des causes justifiant une mesure de protection. De plus la réforme réaffirme les principes fondamentaux de la protection juridique des majeurs qui sont la nécessité, la subsidiarité et la proportionnalité[7]. La notion de nécessité implique qu'une mesure de protection n'est mise en place qu'en cas de la reconnaissance de l'altération des facultés de la personne par un médecin choisi sur une liste établie par le Procureur de la République[8]. La notion de subsidiarité implique qu'une mesure moins contraignante n'a pas pu suffire à protéger la personne. Enfin, la notion de proportionnalité implique une individualisation des mesures, avec des droits plus ou moins restreints selon les capacités de la personne. Ces deux principes sont intégrés dans l'article 428 du Code civil :
— Article 428 du Code civil[9] La limitation des mesures, avec un réexamen obligatoire et systématique permet d’ajuster les mesures selon l’évolution des personnes. Ainsi, la prise en charge des majeurs protégés est personnalisée. Les nouvelles mesures introduites par la loiSuppression de la Tutelle aux Prestations Sociales Adulte et mise en place de nouvelles mesures d'accompagnement social et juridiqueLa loi trace une ligne de partage entre les mesures de protection juridique et les systèmes d'aide et d'action sociale[3]. Concrètement, cela s'est traduit par une nette séparation entre les mesures d'accompagnement que sont la Mesure d'Accompagnement Social Personnalisé (MASP) et la Mesure d'Accompagnement Judiciaire (MAJ) qui remplacent les anciennes Tutelles aux Prestations Sociales adultes (TPSA)[10], et les mesures de protection juridique. Ainsi, les mesures dépendent des difficultés et des besoins des majeurs protégés :
L'instauration du mandat de protection futureLa loi a créé un dispositif complètement nouveau : le mandat de protection future. Il s'agit de la possibilité offerte pour toute personne qui n'est pas protégée de désigner une ou plusieurs personnes pour la représenter le jour où elle sera incapable d'exprimer sa volonté[13]. Les mesures régies par la loiLes mesures de protection juridiqueLa sauvegarde de justiceLa sauvegarde de justice est un régime minimal de protection qui s'adresse à deux types de publics :
La sauvegarde de justice ne peut dépasser un an, elle est renouvelable une fois par le juge des tutelles[15]. La durée totale ne peut donc excéder deux ans. La curatelleLa curatelle est un régime de protection destiné à des personnes qui ne sont pas hors d'état d'agir elles-mêmes mais qui ont besoin d'être assistées et contrôlées de façon continue dans les actes de la vie civile[16]. La curatelle est donc un régime d'assistance[17]. Le juge fixe la durée, qui ne peut excéder cinq ans[18]. Cependant, il peut décider de la renouveler pour une durée plus longue si l'altération des facultés du majeur protégé apparaît irrémédiable[19]. La tutelleLa tutelle est le régime de protection le plus lourd pour les personnes qui souffrent d'une altération des capacités mentales et/ou corporelles qui les empêche d'agir par elles-mêmes et qui les oblige à être représentées en permanence pour les actes de la vie civile[16]. Il s'agit d'un régime d'incapacité d'exercice[20]. Le juge fixe la durée, qui ne peut excéder cinq ans[18]. Cependant, il peut décider de la renouveler pour une durée plus longue si l'altération des facultés du majeur protégé apparaît irrémédiable[19]. Les mesures d'accompagnement social et judiciaireLa Mesure d'Accompagnement Social et Personnalisé (MASP)La MASP est une mesure administrative, gérée par les conseils généraux, qui s'adresse à un public bien défini. Il s'agit de bénéficiaires de prestations sociales ayant des difficultés de gestion de ces prestations qui menacent leur santé ou leur sécurité[11]. Le but de cette mesure est de permettre au majeur concerné de gérer à nouveau ses prestations sociales de manière autonome[21]. La mesure prend la forme d'un contrat entre la personne et le conseil général et repose sur des engagements réciproques[11]. Le majeur bénéficie d'une aide à la gestion de ses prestations sociales et de l'ensemble de son budget, ainsi que d'un accompagnement social individualisé. Il existe deux possibilités de mise en œuvre de la mesure :
Dans les deux cas, la durée de la mesure peut être fixée de six mois à deux ans. Elle est renouvelable après évaluation. La durée totale ne peut excéder quatre ans[21]. En cas de non-respect du contrat, le Conseil général peut saisir le juge d'instance pour mettre en place une mesure plus contraignante :
— Article L. 271-1 du Code de l'action sociale et des familles[22] Les prestations concernées par la MASP sont les suivantes[23] :
La Mesure d'Accompagnement Judiciaire (MAJ)La MAJ, comme son nom l'indique, est une mesure judiciaire. Elle est ordonnée par le juge des tutelles, saisi par le Procureur de la République à la suite d'un rapport du Président du Conseil général[24]. En effet, cette mesure, respectant le principe de subsidiarité, ne peut être prononcée qu'après l'échec de la mesure administrative MASP, c'est-à-dire si celle-ci n'a pas pu rétablir l'autonomie de l'individu dans la gestion de ses ressources et si la santé et la sécurité de la personne sont de ce fait menacées[25]. À la différence de celle-ci, la MAJ est une mesure contraignante qui s'impose au majeur. Un mandataire judiciaire à la protection des majeurs perçoit les prestations sociales sur un compte ouvert au nom de la personne[26]. Il doit les gérer dans l'intérêt de la personne, en tenant compte de son avis et de sa situation familiale, tout en exerçant sur elle une action éducative en vue de rétablir son autonomie dans la gestion de ses ressources[26]. Rappelons toutefois que la MAJ n'entraîne aucune incapacité : la personne concernée peut procéder à tous les actes de la vie civile[27]. Le juge fixe la durée de la mesure qui ne peut excéder deux ans. Elle peut être renouvelée pour deux ans par décision spécialement motivée du juge, à la demande de la personne protégée, du mandataire judiciaire à la protection des majeurs ou du procureur de la République. La durée totale ne peut excéder quatre ans[28]. Les personnes pour lesquelles la mesure n'a pas permis un retour à l'autonomie peuvent être réorientées vers une MASP[11]. S'il est fait le constat d'une altération des facultés de la personne, le mandataire judiciaire peut l'accompagner dans une démarche de placement sous mesure de protection. Références
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