La « Lituanie ethnographique » est un concept qui recoupe une partie importante des territoires ayant appartenu au Grand-Duché de Lituanie, considérant comme Lituaniens comme tous ceux qui y vivent, que ces personnes parlent lituanien ou non actuellement et qu'ils se considèrent lituaniens ou non. Ce concept s'oppose à la fois à celui de « Lituanie historique », soit les territoires du Grand-Duché, et de « Lituanie linguistique », qui est le territoire où la langue lituanienne était majoritairement parlée[1],[2].
Historique et description
Selon l'interprétation de l'historien polonais Piotr Lossowski, le concept de Lituanie ethnographique était en conflit avec le droit à l'autodétermination des peuples vivant sur ce vaste territoire, en particulier des Polonais et des Biélorusses, qui, selon les partisans de la Lituanie ethnographique, étaient des « Lituaniens slavisés » qui avaient donc vocation à être re-lituanisés. Le concept de Lituanie ethnographique sous-entend en creux qu’un individu ne peut pas choisir son appartenance ethnique ni sa nationalité, lesquels ne sont pas déterminées par la langue mais par l’ascendance[2].
« On ne peut pas la définir selon l'opinion de chacun. Appartenir ou non à une nationalité donnée n'est pas une chose que chacun peut décider pour lui-même, ce n'est pas une chose qui peut être résolue selon le libéralisme politique, même caché sous le manteau de slogans démocratiques. Elle est trop complexe, trop liée à l'histoire ancienne, trop liée à l'histoire d'une nation donnée, pour que la volonté ou la passivité d'un individu puisse la remettre en question. [...] La Lituanie ethnographique ne s'arrête pas là où les habitants ne parlent plus le lituanien, elle s'étend plus loin, dans les régions qui ne parlent pas — mais qui parlaient — le lituanien, car elle est composée d'une seule nation lituanienne, qu'elle parle le lituanien, qu'elle ait oublié la langue ou même qu'elle la méprise[2] ».
Selon les interprétations d'historiens polonais, les exigences de ce premier programme ne seraient que légèrement modifiées dans les décennies suivantes[2] (certains incluraient également une partie du gouvernorat de Minsk autour de Novogrodek et le territoire de la Petite Lituanie autour de Memel). En substance, les élites lituaniennes exigeaient la création d'un pays lituanien de 323 748 km², s'étendant entre la mer Baltique à l'ouest, la rivière Daugava au nord, le Boug et les marais de Polésie au sud[2]. Ce territoire était habité au début du XXe siècle par 5 850 000 personnes ; parmi elles, selon les statistiques officielles de l'Empire russe, les Lituaniens linguistiques représentaient 1 659 000, soit moins de 30 %[2] du nombre total de résidents. Parmi les régions mentionnées dans la déclaration de 1905, seules la province de Kovno et la partie nord de la province de Suwałki comptaient une nette majorité lituanienne[2].
Tomas Norus et Jonas Žilius, Lithuania's case for independence, Washington, D.C., B. F. Johnson Publishers, (lire en ligne)
Lectures complémentaires
Timothy Snyder, The Reconstruction of Nations: Poland, Ukraine, Lithuania, Belarus, 1569-1999, Yale University Press, 2003, (ISBN0-300-10586-X)
Egidijus Aleksandravičius, Political goals of Lithuanians, 1863-1918, Journal of Baltic Studies, Volume 23, Issue 3 Autumn 1992, pages 227 - 238
Egidijus Aleksandravičius, « Political Goals of Lithuanians, 1863-1918 », Journal of Baltic Studies, vol. 23, no 3, (ISSN0162-9778, lire en ligne)
Jakubowski J., STUDYA NAD STOSUNKAMI NARODOWOŚCIOWEMI NA LITWIE PRZED UNIĄ LUBELSKĄ, Warszawa, Prace t-wa naukowego warszawskiego, 1912, str. 1-10, [1]
Władysław Wielhorski, Litwa etnograficzna, Wilno, 1928