Pour tous réelsX et Y tels que,il existe des entiers x et y tels que
Shoup démontre cet énoncé dans le cas particulier où X et Y sont entiers[4], puis l'applique à X = Y = 1 + ⌊√m⌋, pour m non carré[5].
LeVeque préfère appliquer la variante suivante à X = √m[3] : pour tout réel X tel que , il existe des entiers x et y tels que [6]. Cette variante se déduit de l'énoncé ci-dessus, appliqué à un réel suffisamment proche de .
Remarque
En général, la solution (x, y) dont ce lemme garantit l'existence n'est pas unique et le rationnelx⁄y lui-même ne l'est pas : par exemple, si m = a2 + 1 et X = Y = a + 1 ≥ 2, on a deux solutions (x, y) = (1, a), (a, –1).
Sous d'autres hypothèses[7] — incompatibles cependant avec celles du lemme de Thue — l'éventuelle solution est unique.
Théorème de Brauer et Reynolds
Le lemme de Thue se généralise[8] en remplaçant les deux inconnues par s inconnues et la congruence linéaire par le système homogène de r congruences associé à une matrice à coefficients entiers à r lignes et s colonnes :
Si alors, pour tous réels positifs tels que
,
il existe des entiers tels que
[9].
Démonstrations
Preuve du théorème de Brauer et Reynolds. Notons le plus grand entier strictement inférieur à , c'est-à-dire que est la partie entière par excès de . On a doncLe nombre des s-uplets d'entiers tels que vérifie :Il est donc strictement supérieur au nombre des valeurs possibles des r-uplets images, dans , par . Par conséquent (d'après le principe des tiroirs), il existe deux s-uplets distincts ayant même image. Leur différence est la solution annoncée.
Preuve du lemme de Thue. Appliquons le théorème de Brauer et Reynolds au cas particulier , en notant l'inconnue et son majorant . Les hypothèses et (donc ) assurent l'existence d'un couple d'entiers tel que , et . Puisque de plus , on a donc n'est pas nul (sinon, le serait aussi, puisqu'il serait congru à mod ). Enfin, quitte à remplacer si nécessaire par son opposé, est positif.
Application aux sommes de deux carrés
Le lemme de Thue permet par exemple de démontrer la proposition suivante, utile dans le théorème des deux carrés[3] :
Si alors il existe des entiers premiers entre eux tels que et .
Démonstration
En appliquant le lemme de Thue à puis en choisissant ou (selon le signe de ), on obtient et .
On remarque alors que ou est strictement inférieur à , même si est un carré. En effet, si pour un entier (nécessairement impair), on montre facilement que .
On en déduit que (puisque et ).
Enfin, et sont premiers entre eux car si divise et alors donc .
Réciproquement, si avec et premiers entre eux (donc premiers avec m) alors –1 est le carré modulo m de l'entier défini modulo m par .
(no) A. Thue, « Et bevis for at lignigen A3 + B3 = С3 er remulig i hele fra nul forsk jellige tal A, B og С », Archiv. for Math. og Naturvid, vol. 34, no 15, 1917, selon (en) Alfred Brauer et R. L. Reynolds, « On a theorem of Aubry-Thue », Canad. J. Math., vol. 3, , p. 367-374 (DOI10.4153/CJM-1951-042-6) et (en) William J. LeVeque, Fundamentals of Number Theory, Dover, (1re éd. 1977) (lire en ligne), p. 180 ;
(no) A. Thue, « Et par antydninger til en taltheoretisk metode », Kra. Vidensk. Selsk. Forh., vol. 7, , p. 57-75, selon (en) Pete L. Clark, « Thue's Lemma and Binary Forms », .
↑Dans la version de LeVeque 2014, p. 180 de ce lemme, l'hypothèse pourtant indispensable est remplacée par , et l'hypothèse additionnelle de LeVeque ne suffit pas à garantir la condition supplémentaire qu'il énonce dans sa conclusion.