Jean-Bernard Fourtillan, né le à Bordeaux, est un pharmacien français, expert en pharmacologie et ancien professeur des universités. Certaines de ses prises de position sont contestées par la communauté scientifique. Il est poursuivi par la justice pour des essais cliniques illégaux.
En 1978, il quitte l'hôpital et crée une entreprise prestataire de services en pharmacologie, le Centre d'études et de recherches en pharmacie clinique (Cephac)[1],[2] à Poitiers. Cette structure prend au fil des années différentes appellations[N 2] : Centre privé de recherche biomédicale Cerom, Cemaf, Parexel-Cemaf, Parexel Worldwide Bioanalytics.
Invention de la « valentonine »
En avril 1994, Jean-Bernard Fourtillan annonce avoir reçu la révélation divine[3] d'une hormone qu’il dénomme valentonine[2],[4], d'après le prénom de sa petite-fille[5], et qui, selon lui, intervient dans le système d'alternance veille-sommeil. Il prétend que la régulation circadienne de l'organisme entre les phases de veille et de sommeil est due à l'action de trois hormones sécrétées par la glande pinéale :
le 6-méthoxy-harmalan (6-MH, aussi dénommé 6-méthoxy-l-méthyl-3, ou encore 4-dihydro-[beta]-carboline), un produit de dégradation de la mélatonine, découvert vers 1960 par Gordon Farrell et William Isaac, de la clinique de Cleveland (Ohio), à partir de la glande pinéale de bœuf[6] ; cette molécule est considérée comme un antagoniste potentiel de la sérotonine par Philip A. Khairallah en 1961[7] ;
une supposée molécule active qu'il a dénommé valentonine.
L'existence de la valentonine et/ou de ses effets est très contestée : aucune étude ni aucun autre scientifique ne la confirme[8],[9],[10] et la communauté scientifique s'étonne que les recherches de Jean-Bernard Fourtillan (ou de son épouse) n'aient pas fait l'objet de publications, mais seulement de dépôt de brevets[5],[11].
Essais cliniques de la valentonine dans les troubles neurologiques
Ce n'est qu’en 2014 que Jean-Bernard Fourtillan décide de reprendre les recherches soutenues par son épouse Marianne[2].
À partir de 2015, Jean-Bernard Fourtillan se rapproche du chirurgien controversé Henri Joyeux, comme lui fervent catholique[2], qui milite contre l'utilisation des vaccins et tient de nombreuses positions polémiques éloignées de la rationalité scientifique[12],[13]. Ensemble, ils entreprennent de démontrer l'intérêt de la valentonine dans le traitement de la maladie d'Alzheimer, de la maladie de Parkinson et d'autres affections neurologiques. L'année suivante, le neurologue Philippe Damier, vice-président du comité scientifique de l'association France Parkinson considère leur argumentaire comme une « manipulation »[12],[14]. Ils créent le fonds de donation Josefa, d'après le nom d'une religieuse espagnole morte à Poitiers en 1923[2], présidé par Jean-Bernard Fourtillan, auquel ils déclarent céder la totalité des brevets déposés et les redevances de leur exploitation et qui collecte les versements effectués par les patients pour être inclus dans leur recherche médicale et scientifique[15],[16],[17].
À l'automne 2019, une enquête est ouverte par un juge d'instruction pour « tromperie » et « abus frauduleux de l’ignorance ou de la faiblesse d’une personne vulnérable »[24]. En , Jean-Bernard Fourtillan obtient à Bordeaux la condamnation pour diffamation d'un dirigeant de l'ANSM qui l'avait accusé de charlatanisme[3].
En , Jean-Bernard Fourtillan et le fonds Josefa demandent l'annulation de l'interdiction de l'essai par l'ANSM. Leur demande est rejetée par le tribunal administratif de Poitiers[25],[26]. La décision du tribunal administratif est annulée par la Cour administrative d'appel de Bordeaux le ; l’ANSM se pourvoit alors en cassation devant le Conseil d'État[27],[28]. Son pourvoi est rejeté. En main 2024, l'ANSM suspend la publicité et l'exploitation des patchs transdermiques de la Société d'exploitation de la valentonine, dirigée par Jean-Bernard Fourtillan. Ces patchs n'avaient fait l'objet d'aucune autorisation de mise sur le marché[29].
En , Jean-Bernard Fourtillan intervient dans le film conspirationnisteHold-up en déclarant que l'Institut Pasteur a « fabriqué » le virus SARS-CoV-2 en 2004 avant de le disséminer[37] afin de pouvoir commercialiser un vaccin plus dangereux que le virus[38]. L'Institut Pasteur annonce porter plainte pour diffamation[39]. En , Jean-Bernard Fourtillan déclare à son tour dans une vidéo qu'il a déposé plainte contre l'Institut Pasteur[40].
Publications
Étude chimique et pharmacodynamique de quelques dérivés organosiliciés hydrosolubles, thèse, Bordeaux, 1971.
La glande pinéale et le système Veille-Sommeil : Applications thérapeutiques. Éd. Fonds Sœur Josefa Menéndez[41].
↑La date à laquelle il quitte ses fonctions universitaires n'est pas déterminée avec certitude : les sources les plus anciennes (Ref 1) mentionnent 1978 ou 1981 ; son CV sur le site valentonine.fr mentionne septembre 2008.
↑Le Cephac continue son existence en parallèle : transféré à Saint-Benoît, il devient Aster-Cephac. À la suite de son rachat en 2006 par la multinationale suisse SGS, le site change de nom et devient SGS-Cephac. Le nom Cephac disparaît définitivement en 2018 au profit de l’appellation SGS France (Life Science Services).
Références
↑ a et bCoup de projecteur sur... le CEPHAC, centre d'études et de recherches en pharmacie clinique. Actualité Scientifique Technique & Économique (Poitiers) 1987, no 2, p.22 (ISSN1761-9971).
↑William M. McIsaac, « “Hormones” of the Pineal Gland », Cleveland Clinic Journal of Medicine, vol. 29, no 2, , p. 76–80 (ISSN0891-1150 et 1939-2869, lire en ligne, consulté le ).
↑William M. McIsaac, Philip A. Khairallah et Irvine H. Page, « 10-Methoxyharmalan, a Potent Serotonin Antagonist Which Affects Conditioned Behavior », Science, vol. 134, no 3480, , p. 674–675 (ISSN0036-8075 et 1095-9203, DOI10.1126/science.134.3480.674).