Isabel Godin des OdonaisIsabel Godin des Odonais
Isabel Godin des Odonais, parfois dénommée Doña Isabel dans la littérature moderne, née en 1728 à Riobamba, vice-royauté du Pérou, aujourd'hui en Équateur, et morte le à Saint-Amand-Montrond, (France), est une femme du XVIIIe siècle qui est séparée de son époux en Amérique du Sud en raison des politiques coloniales de l'époque, et ne le rejoint que plus de vingt ans après[1]. Son long voyage du Pérou occidental à l'embouchure de l'Amazone n'a pas son égal dans l'histoire de l'Amérique du Sud. Son histoire, tenant à la fois du mythe et de la réalité, a été souvent reprise, et a notamment répandu des idées fausses sur les dangers de la forêt tropicale humide. En 1749, son mari, Jean Godin des Odonais, quitte leur domicile de Riobamba, sur le territoire sud-américain de l'Empire espagnol, pour un voyage en Guyane française. En raison de sa nationalité française, les autorités espagnoles et portugaises lui interdisent de rentrer chez lui. Isabel Godin des Odonais devient célèbre, car elle fut l'unique survivante d'une expédition de quarante-deux personnes qui parcourut près de 4 830 km dans le bassin amazonien pour rejoindre son époux. Ce dernier et elle se retrouvent finalement en 1770 puis partent en France ensemble. BiographieNaissance et jeunesseIsabel Godin des Odonais, née Gramesón[2], était la fille de Don Pedro Gramesón y Bruno, administrateur à Riobamba, ville coloniale de la Vice-Royauté du Pérou[3]. Elle reçut une bonne éducation ; elle parlait couramment l'espagnol, le français et le quechua et connaissait le quipu, méthode de comptabilité inca fondée sur l'usage de cordelettes nouées. Rencontre et mariageJean Godin des Odonais était un cartographe français qui participa à la première expédition géodésique de l'Histoire à destination de l'équateur. L'équipe scientifique travailla dans la région de Quito de 1735 à 1744, période pendant laquelle Jean et Isabel se rencontrèrent. Ils se marièrent le alors qu'Isabel n'était âgée que de quatorze ans. Séparation![]() Dans un premier temps, Jean décida de s'établir à Riobamba avec sa femme, mais en 1743, il se proposa pour accompagner La Condamine dans sa nouvelle expédition. Il retarda son départ pour être avec Isabel pendant sa grossesse. Mais quand il apprit la mort de son père en , il décida de retourner en France avec sa famille. Il fit le projet de voyager seul jusqu'à Cayenne, en Guyane française, en passant par l'Amazone pour voir si sa famille pouvait faire le voyage sans danger et pour prendre les dispositions nécessaires auprès des autorités françaises. À son arrivée à Cayenne, Godin se rendit compte que les autorités coloniales portugaises et espagnoles ne le laisseraient pas lui, un simple français sans importance, retraverser leurs territoires. Ne voulant pas rentrer en France sans sa famille, il fut contraint de rester en Guyane et envoya sans cesse des plaidoyers en Europe pour obtenir l'autorisation de rentrer à Riobamba. Finalement, La Condamine écrivit pour Godin au roi Joseph Ier du Portugal, qui voulait se rapprocher de la France en raison de changements politiques. En 1765, le roi ordonna à une galiote de trente rameurs de ramener Godin à sa femme. Cependant, comme il avait écrit des lettres incendiaires à l'encontre des Portugais, Godin trouva suspecte l'offre de remontée de l'Amazone et quitta le navire au premier port qu'il toucha. Le capitaine de la galiote continua à remonter le fleuve sans lui pour aller chercher la femme du Français suivant l'ordre du roi. Pendant la plus grande partie de leurs vingt ans de séparation, Isabel ne reçut pas de nouvelles de son mari et dut affronter la mort de ses enfants emportés par la petite vérole. Elle déménagea dans la localité plus petite de Guzman. Quand des rumeurs lui parvinrent qu'un navire l'attendait pour lui faire descendre l'Amazone, elle envoya son domestique Joachim et une poignée d'Amérindiens pour en savoir plus. L'expédition revint deux ans après avoir trouvé le bateau qui attendait, quatre ans après son départ initial. Le père d'Isabel, Don Pedro, partit prendre des arrangements avec le capitaine du navire et y attendre sa fille. Le périple d'Isabel![]() Le , un groupe de quarante-deux personnes partit vers le navire : Isabel transportée dans une chaise à porteurs par des indiens[4], son grand fils Joachim, ses deux frères Antoine et Eugenio Gramesón, son neveu de dix ans Joaquin, trois domestiques (Rosa, Elvia, et Héloïse), trente et un Amérindiens et trois Français. Les conditions du trajet à travers la cordillère des Andes et le bassin amazonien étaient ardues en temps normal, et les ravages d'une récente épidémie de petite vérole autour de la mission de Canelos (aujourd'hui dans la province de Pastaza) les dégradèrent en privant l'expédition d'une aide précieuse neuf jours après son départ[5]. Le groupe y trouva deux survivants amérindiens qui acceptèrent de réparer un canot d'environ 12 m avec lequel il continua à descendre l'Amazone. La navigation sur le fleuve s'avéra difficile, car le canot n'était pas manœuvrable. Les Amérindiens de Canelos désertèrent, et un autre membre de l'expédition se noya en tentant de repêcher le chapeau de l'un des Français. Le canot alourdi par le ravitaillement, le groupe installa un campement et envoya Joachim et un Français en éclaireurs dans le canot pour qu'ils reviennent avec plus de moyens de transport. Dans l'attente de leur retour, les autres commencèrent à souffrir de l'infection de piqures d'insectes, ce qui tua Joaquin, puis Rosa et Elvia, les Français restants et les frères d'Isabel. Héloïse s'éloigna en pleine nuit, on ne la revit plus. Ses compagnons morts, Isabel se retrouva seule à errer dans la jungle[6]. Quand il revint au campement, Joachim ne trouva que les cadavres des voyageurs décédés. Ne pouvant identifier le corps d'Isabel, il avisa Don Pedro de sa mort, nouvelle qui parvint par la suite à Jean Godin. Isabel erra seule et affamée durant neuf jours. À demi folle, elle rencontra quatre Amérindiens qui lui proposèrent de l'aider à atteindre Cayenne. Grâce à eux, elle put atteindre le navire, qui attendait toujours. L'histoire de son périple incroyable se répandit rapidement, et Isabel reçut un accueil de plus en plus chaleureux à mesure qu'elle descendait le fleuve[7]. Les retrouvaillesLe , Isabel et Jean se retrouvèrent dans la ville d'Oiapoque située sur la rive brésilienne du fleuve éponyme, qui marque la frontière entre la France et le Brésil, après dix-neuf années de séparation. Ils restèrent à Cayenne quelques années. Le , Isabel, son mari et son père décidèrent de quitter la Guyane et de rejoindre la France[7]. Don Pedro, ayant été très perturbé par les événements qui les avaient amenés en France, mourut le . Jean Godin décéda dans leur demeure de la rue Hôtel-Dieu à Saint-Amand-Montrond (département du Cher) le [8]. Isabel y mourut le de la même année[9]. PostéritéProductions artistiques
Associations et mémoireBasée à Saint-Amand-Montrond, l'association Saint-Amand-Montrond-Riobamba[13] se propose d'entretenir et d'étayer l'histoire et la mémoire d'Isabel et de son mari. La bibliothèque de la ville se nomme par ailleurs Isabel-Godin en son honneur[14]. Figure féministeDu fait de son histoire, Isabel Godin est devenue une icône du féminisme[15],[16]. Notes et références
Bibliographie
Voir aussiArticles connexesLiens externes
Bases de données et dictionnaires
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