Giorgio BassaniGiorgio Bassani
Giorgio Bassani (au centre) entouré de Luigi Silori, Walter Mauro, Roberto Bettega et Giuseppe Brunamontini
Œuvres principales Giorgio Bassani est un romancier, poète et essayiste italien né le à Bologne, et mort le à Rome. Il est notamment connu pour son roman Le Jardin des Finzi-Contini, adapté au cinéma par Vittorio De Sica. BiographieEnfance et jeunesseGiorgio Bassani naît à Bologne mais c'est à Ferrare, où il passe son enfance et sa jeunesse, qu'est liée son existence. Membre de la grande bourgeoisie juive de la ville, il y habite, avec ses parents, ses grands-parents paternels, son frère Paolo (né en 1920) et sa sœur Jenny (née en 1924), une grande maison au 11 de la via Cisterna del Follo[1]. Angelo Enrico Bassani, son père, est médecin. Sa mère, Dora Minerbi, a fait des études de chant, mais les interrompt quand elle se marie à vingt ans, en 1915. Davide Bassani, le grand-père paternel, est un riche marchand de tissus ayant pignon sur rue dans le ghetto de Ferrare. L'autre est médecin-chef de l'hôpital Sant'Anna[2]. Le petit Giorgio est d'abord scolarisé à la campagne, puis à Ferrare. Il fréquente ensuite le lycée Ludovico Ariosto, étudie le piano, qu'il délaisse vers l'âge de 17 ans pour la littérature et le tennis, qu'il pratique au très huppé Tennis Club Marfisa d’Este, en compagnie notamment de Michelangelo Antonioni[1],[3]. En 1934, il rompt avec la tradition médicale de sa famille (père, grand-père maternel, oncle maternel) en s'inscrivant à la faculté de lettres de Bologne. Il y fréquente le milieu littéraire, y suit les cours de l'historien de l'art Robero Longhi, et y fait la connaissance de Leo Longanesi (qui y a fondé la revue L’Italiano) et du peintre Giorgio Morandi[1],[2].
En mai 1935, il publie son premier récit (III Classe) dans le Corriere Padano, inspiré par ses allers-retours quotidiens en train entre Ferrare et Bologne. Il poursuit cette collaboration en y publiant articles, poésies, traduction et contes jusqu'en novembre 1937[1]. En 1939, il sort diplômé de la faculté des lettres de Bologne. Les lois raciales votées en 1938 l'empêchent désormais d'accéder à la bibliothèque municipale et il doit se contenter d'enseigner à l'école confessionnelle hébraïque de via Vignatagliata, dans le ghetto de Ferrare[1]. Débuts littéraires et militantsEn 1940, il publie son premier livre, Una città di pianura, (un recueil de cinq nouvelles) sous le pseudonyme de Giacomo Marchi (du nom d'une de ses grand-mères, Emma Marchi, catholique)[1]. Entre 1937 et 1943, il s'engage dans la résistance clandestine antifasciste, d'abord à Ferrare, puis à Bologne, où il rejoint le Partito d'azione, aux côtés, entre autres, d'Ugo La Malfa, de Giorgio Morandi et de Carlo Ludovico Ragghianti.
Ce dernier est un militant du mouvement antifasciste Giustizia e Liberta, fondé à Paris en 1929 par des exilés comme Carlo Rosselli, Emilio Lussu et Ernesto Rossi. Sous son impulsion, Bassani organise un groupe de lycéens rayonnant sur la région de Ferrare et prenant leurs ordres auprès de l'institutrice socialiste Alda Costa, de l'avocat Ugo Teglio, du juge Pasquale Colagrande, de l'ex-député socialiste Mario Cavallari. Voyageant dans toute l'Italie, Bassani assure la liaison avec des hommes politiques et des enseignants antifascistes (Ugo La Malfa, Ferruccio Parri, Aldo Capitini, Guido De Ruggiero, Delio Cantimori etc.)[5]. Arrêté par l'OVRA de Bologne comme antifasciste, il est incarcéré en mai 1943 à la prison de Ferrare. Après la chute de Mussolini, le 25 juillet, il est libéré et épouse, le 4 août, Valeria Sinigallia († 1er décembre 2013), issue elle aussi d'une grande famille juive de Ferrare, qui l'a rejoint dans la clandestinité[6],[7]. Le couple quitte Ferrare pour Florence, puis Rome (où Bassani vit sous la fausse identité de Bruno Ruffo[5]), qui devient, à partir de décembre 1943, leur ville d'adoption[1]. Giorgio Bassani publiera leur correspondance de prison sous le titre (Da una prigione), en ouverture du recueil d'essais Di là dal cuore (Milan, 1984)[1]. À l'été 1944, les Bassani doivent se réfugier à Naples, où ils retrouvent Leo Longanesi et Mario Soldati, avec lequel Giorgio Bassani se lie d'amitié[1]. En 1945, année de la naissance de sa fille Paola[2], il publie une traduction de la Vie privée de Frédéric II, de Voltaire et du Facteur sonne toujours deux fois de James M. Cain, ainsi que Storie dei poveri amanti e altri versi. En 1947, il publie un recueil de poèmes Te lucis ante. 1946-1947 (qui sera remanié et republié en 1951 sous le titre Un’altra libertà, et de nouveau en 1963 sous le titre L’alba ai vetri. Poesie 1942-50). Chaque édition est l'occasion d'un réagencement ou d'une réécriture, phases qui deviendront la marque de fabrique de Bassani[1]. De retour à Rome, il tente sa chance au cinéma comme scénariste, mais également comme acteur[1]. Son fils Enrico naît en 1949[2]. Les années 1950Il adhère à cette époque au Parti socialiste italien (il sera élu conseiller municipal apparenté PSI en 1962 et restera proche de ce parti jusqu'en 1966, date à laquelle il adhère au Parti républicain). C'est aussi à partir de cette époque, dans les années 1950 et 1960, que sa production littéraire, plus importante, paraît à un rythme soutenu[1]. En 1953, il publie La passeggiata prima di cena qui regroupe trois textes parus dans la revue Botteghe oscure. En avril 1954, Gli ultimi anni di Clelia Trotti paraît dans la revue Paragone. Avec la nouvelle Una notte del ’43, parue en 1955 dans Botteghe oscure, ces récits forment les Cinque storie ferraresi, réunies en 1956 par Einaudi et qui reçoivent le Prix Strega. Tous ces textes subiront de nouvelles réécritures avant d'être à nouveau publiées sous le titre Romanzo di Ferrara. Giorgio Bassani y recompose à la fois le paysage de la ville de province où il a grandi, les personnages qui la peuplent, la montée du fascisme et le destin de la communauté juive de Ferrare[1]. En 1958, il publie, d'abord en revue (Paragone-Letteratura), puis chez Einaudi, le roman Gli occhiali d’oro, écrit pour la première fois à la première personne, qu'il fait ajouter en 1960 aux Cinque storie ferraresi, qui deviennent Le storie ferraresi[1]. Les années 1960 et la reconnaissance littéraireEn 1962, sur des ébauches remontant aux années 1940, Giorgio Bassani fait publier chez Einaudi Il giardino dei Finzi-Contini, , qui remporte le prix Viareggio. En 1964, Einaudi publie Dietro la porta, bref roman – toujours situé à Ferrare entre 1929 et 1930[1]. En 1966 Einaudi publie Le parole preparate, un recueil d'articles parus dans divers journaux et périodiques, qui sera refondu en 1984 chez Mondadori sous le titre Di là dal cuore[1]. En 1968, Bassani publie L’airone, qui remporte le prix Campiello[1]. En 1972 il fait paraître chez Mondadori L’odore del fieno, un recueil de textes déjà publiés en revues ou en volumes, qui clôture le cycle de Ferrare. Revu et corrigé, le texte s'insère dans le recueil Dentro le mura (1973), et finalement dans le Romanzo di Ferrara (1974), dont l'édition définitive, en 1980, rassemble Dentro le mura, Gli occhiali d’oro, Il giardino dei Finzi-Contini, Dietro la porta, L’airone et L’odore del fieno[1]. Il est membre fondateur (1951) et président (1965-1980) de l'association Italia Nostra, qui défend le patrimoine artistique et naturel italien[8],[2]. De 1948 à 1959, il est rédacteur en chef de la revue littéraire semestrielle trilingue (italien, français et anglais) Botteghe Oscure, fondée par la princesse Marguerite Caetani. Il y fait découvrir aux lecteurs italiens Dylan Thomas, René Char, Henri Michaux, Roger Caillois, Maurice Blanchot, Georges Bataille, Antonin Artaud, W. H. Auden, Truman Capote, Robert Graves. Et parmi les auteurs italiens : Mario Soldati, Carlo Cassola, Italo Calvino, Attilio Bertolucci, Giorgio Caproni, Pier Paolo Pasolini[2]. En 1956, il devient consultant, puis directeur éditorial des éditions Feltrinelli, où il fait notamment publier Le docteur Jivago de Boris Pasternak (1957), Le Guépard de Giuseppe Tomasi di Lampedusa[3] (1958), ainsi que de nombreux auteurs étrangers comme Jorge Luis Borges, Edward Morgan Forster, Ford Madox Ford ou Karen Blixen[1]. Il quitte la maison d'édition en 1963, à la suite d'un e dégradation de ses rapports avec Giangiacomo Feltrinelli, débouchant sur un procès qu'il gagne. Cette rupture est suivie d'une violente campagne de dénigrement menée par les écrivains du Gruppo ‘63, qui le dénoncent publiquement comme un écrivain de romans de gare et le symbole d'un passé à oublier[9],[2]. De 1964 à 1966, il est vice-président de la RAI, où il développe la programmation culturelle[2]. Jusqu'en 1967, Giorgio Bassani est professeur d'histoire du théâtre à l'Académie nationale d'art dramatique, journaliste, où il propose un cours pour les jeunes acteurs et un autre pour les metteurs en scène. Il a ainsi pour élèves Carmelo Bene, Giancarlo Giannini, Ugo Pagliai, Gabriele Lavia, Paola Gassman et Giuliana Lojodice[2]. Thèmes littéraireFerrareDans la première phase de sa production littéraire, la majuscule « F. » anonymise la Città di pianura dont parle Bassani. Ce n'est qu'après de longues années que l'auteur fait de son œuvre le Roman de Ferrare. La ville de son enfance et de son adolescence y occupe une place absolument centrale et constitue un personnage en soi.
JudéitéL’œuvre de Giorgio Bassani est « ancrée dans la Ferrare du fascisme et de la déportation[11] ». Le fascisme ferrarais, particulièrement violent, s'est imposé en quelques années, par la terreur et au mépris de la loi, à la tête des institutions locales et provinciales. Mais à l'égard des Juifs, le fascisme ferrarais est particulièrement ambigu : de 1926 à 1938, la ville est dirigée par Renzo Ravenna, un podestat à la fois Juif et fasciste. Pendant cette période, la bourgeoisie juive de Ferrare — dont la famille Bassani — est partie prenante des organisations fascistes locales. Il faudra les lois raciales avec leur cortège de vexations, les rafles et les premières déportations, pour que la communauté juive de Ferrare prenne conscience de la trahison dont elle a été victime. En 1943, 183 Juifs de Ferrare sont déportés. Une partie de la famille Bassani périt à Buchenwald (ses parents et sa sœur échappent aux rafles et s’enfuient à Florence, cachés dans une armoire dissimulée dans un camion)[11]. Ambiguïté, crédulité, naïveté, lâcheté : l'œuvre de Bassani parcourt sans cesse, chez son père, chez les Finzi-Contini, chez lui-même, le spectre des compromissions pour reconstituer ce passé trouble, inquiétant et inexorable.
La mémoire des lieux et des personnesGrand lecteur de Proust, Giorgio Bassani brasse constamment, comme lui; les thèmes du souvenir, du temps, de l’histoire, de l'art, de l’homosexualité et de la faillite de l’amour. Mais alors que le souvenir se rappelle au narrateur proustien au hasard d'une sensation, celui de Bassani en exploite méthodiquement les moindres bribes pour le ramener à la vie dans « une illusion d'éternité »[13]. « Le passé n’est pas mort, [...] il ne meurt jamais. Il s’éloigne, certes : à chaque instant. Récupérer le passé est donc possible. Il faut néanmoins, si l’on veut vraiment le récupérer, parcourir une sorte de couloir à chaque instant plus long. Là-bas, au fond du lointain et ensoleillé point de convergence des noires parois de ce couloir, il y a la vie, aussi vivante et palpitante que jadis, quand elle s’est manifestée pour la première fois. »[14] Le Roman de Ferrare épuise cette veine en l'appliquant aux personnages aussi bien qu'aux lieux. Ferrare, unique décor de son œuvre, est ainsi ramenée à la vie sous toutes ses perspectives, ainsi que tous les protagonistes qui ont animé ses rues, ses cafés et ses salons, se croisant d'un récit à l'autre, tantôt personnage principal, tantôt comparse, tantôt apparition fugitive. Vie privéeL'auteur qui, à partir des années 1960, voyage beaucoup en Europe et aux États-Unis, enseigne à l'étranger et reçoit de nombreux prix littéraires, se retire fréquemment dans une maison qu'il a acheté, en 1967, à Maratea, souvent en compagnie d'Anne Marie Stelhein, une américaine installée à Paris. À la fin de l'année 1977, il fait la connaissance de Portia Prebys, une universitaire américaine avec laquelle il emménage, en 1991, sur le Lungotevere a Ripa. S'ensuit une longue procédure judiciaire en abus de faiblesse engagée par sa femme et ses deux enfants pour soustraire l'auteur à l'influence de sa nouvelle compagne, qui partagera sa vie jusqu'à la mort de l'écrivain[1]’[15],[2]. Giorgio Bassani meurt le 13 avril 2000, à l'âge de 84 ans, des complications d'une maladie dégénérative qui l'accompagne depuis les années 1990, à l'hôpital San Camillo de Rome. Il est inhumé, selon sa volonté, dans le cimetière juif de la via delle Vigne, à Ferrare[1]‘[16]. En 2002, sa fille Paola et son fils Enrico créent la Fondation Giorgio Bassani. Le 4 mars 2016, pour le centenaire de sa naissance, ils inaugurent à Casa Minerbi, dans le centre médiéval de Ferrare, un Centre d'études dédié à leur père, qui recueille documents et objets légués à la commune de Ferrare par Portia Prebys, sa dernière compagne[1]. ŒuvreCycle Le Roman de Ferrare
Autres romans et nouvelles
Poésie
Autres publications
FilmographieComme scénariste
Comme acteur
Bassani double Orson Welles dans La ricotta (Le Fromage blanc), de Pier Paolo Pasolini (1963). AdaptationsAu cinéma
À la télévision
Notes et références
Liens externes
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