Banat historique
Le Banat[N 1] (prononciation en français : [ba.na] ; roumain : Banat ; serbe : Банат ou Banat ; allemand : Banat ; hongrois : Bánát ou Bánság ; slovaque : Banát) est une région historique de l’Europe du Sud-Est dont la capitale historique est Timișoara, située dans le județ de Timiș de Roumanie. Elle est partagée aujourd'hui entre trois pays :
La région couvre la partie sud-est du bassin du moyen Danube et la partie sud de la plaine de la Tisza limitée par le Danube au sud, la Tisza à l’ouest, le Mureș au nord, et les Carpates méridionales à l’est. De façon générale, un « banat » est une marche-frontière de l’ancien royaume de Hongrie, gouvernée par un « ban ». Il y eut ainsi sur les flancs méridional et oriental de ce dernier, en territoire slave du Sud, de nombreux autres banats actuellement croates (notamment en Slavonie), bosniens, serbes ou roumains (Olténie, ancien « banat de Severin »). AntiquitéAvant que l’Empire romain sous Trajan n’annexe la région du Banat en 106 de notre ère, le pays était habité par les Daces (Thraces septentrionaux). Sous la pression des Goths, l’empereur Aurélien (270-275) signa un traité de foederati et retira l’administration et les forces romaines au sud du Danube (Dacie aurélienne), abandonnant le pays aux Gépides, aux Hérules, aux Huns, aux Lombards et aux Avars, que rejoignent les Slaves au VIe siècle. Moyen Âge
Bien qu’elle soit imprécise sur les lieux et les personnages, la chronique historique hongroise Gesta Hungarorum évoque ces divers événements en mettant en scène un duc appelé Glad, souverain du territoire du Banat, qui venait de Vidin et était un vassal du tsar de Bulgarie. Son descendant Ahtum ou Ajtony est le dernier souverain qui s’opposa au royaume de Hongrie. L’archéologie et l’épigraphie confirment ce tableau général (à défaut des existences individuelles de Glad et d’Ahtum) à travers le site de Morisena (aujourd’hui Cenad), capitale du territoire et siège d’une abbaye bénédictine. Les bans de Severin (1233-1524)Le titre de ban de Severin s’est transmis longtemps après la division du banat de Severin en banat de Temesvar et banat de Craiova (Olténie, valaque) en 1330, et après la division du premier en comitats au début du XVe siècle, mais il est devenu honorifique.
Période ottomaneLe Banat est graduellement conquis par les Ottomans et en 1552 devient un eyalet (province) nommé Eyâlet-i Temeșvar. Au XVIe siècle le Banat, jusque-là principalement peuplé de Valaques (Roumains), accueille environ 55 000 Slaves (Serbes) réfugiés du despotat de Serbie déjà occupé par les Ottomans. En 1594, ces populations chrétiennes lancent une grande révolte contre la domination turque. Elle est écrasée et de nombreux habitants s'enfuient vers la Transylvanie et la Valachie. Période habsbourgeoiseAu XVIIIe siècle, le prince Eugène de Savoie-Carignan conquiert la région en 1716. Au traité de Passarowitz en 1718, le Banat est reconnu possession des Habsbourg d'Autriche sous le nom de Banat de Temeschburgou (Temesvár). Mise en valeurLes Habsbourg trouvent les zones basses du Banat peu habitées, en friche ou redevenues des zones humides naturelles. Le comte Claude Florimond de Mercy, Feld-maréchal du Saint-Empire (1666-1734), nommé gouverneur du Banat en 1720, prend des mesures importantes pour valoriser la région. Les marais à côté du Danube et de la Timiș sont drainés, des routes et des canaux construits à grand-peine, des artisans et des fermiers pour la plupart Lorrains, Alsaciens, Badois, Souabes et Hongrois sont attirés par la distribution de terres, l'agriculture et le commerce sont encouragés. Alors que les Roumains et les Serbes sont orthodoxes, la majorité des nouvelles populations est catholique. La province (kreis) du Banat est dissoute en 1778 et trois des quatre comitats hongrois rétablis, sauf dans la partie sud du Banat (Krajina du Banat ou Valko/Vâlcu) qui fait dès lors partie de la frontière militaire (les confins militaires) jusqu'à la dissolution de celle-ci en 1871. L'impératrice Marie-Thérèse d'Autriche s'intéressa beaucoup au Banat : elle fit coloniser la région par de nouveaux paysans catholiques allemands, fit fonder plusieurs villages, encouragea l'exploitation des richesses minérales, et d'une manière générale développa les mesures introduites par le comte de Mercy. Les Allemands arrivaient de Souabe, d'Alsace, de Lorraine allemande et du Luxembourg (dont des francophones parfois dénommés « Français du Banat »[N 2]), de Bavière, d'Autriche, voire d'Italie du nord et même d'Espagne. Beaucoup de colonies de l'est du Banat étaient occupées principalement par des Allemands, appelés les Souabes du Danube (Donauschwaben) avec la seconde vague du Drang nach Osten. Les villages francophones de Charleville, Seultour, Saint-Hubert[1] (aujourd’hui Banatsko Veliko Selo) se trouvent de nos jours du côté serbe de la frontière. PopulationAu terme de soixante années de contrôle Habsbourg sur la région, la population du Banat était composée, selon les données du recensement fait par les Habsbourg en 1774, de :
Seconde période hongroiseEn 1779, le Banat fut réuni à la Hongrie habsbourgeoise, et en 1784 l'empereur Joseph II d'Autriche le divise en deux Bezirke, l'un au nord centré sur Temesvár, l'autre au sud centré sur Pancsova[2]. Durant la révolution de 1848/1849, des combats eurent lieu dans le Banat entre les troupes révolutionnaires hongroises et les régiments de garde-frontières serbes, restés fidèles aux Habsbourg. Ces derniers furent vainqueurs. Après l'échec de la révolution de 1848, le Banat occidental devint une partie de la Voïvodine, formant avec les régions de Syrmie et de Bačka un Kronland de l'empire d'Autriche, appelé voïvodat de Serbie et du Banat de Tamiš (en allemand : Woiwodschaft Serbien und Temescher Banat). En 1860, cette province fut dissoute et réincorporée à la Hongrie habsbourgeoise, à l'exception de la frontière militaire du Banat, qui suivit en 1871. Les quatre comitats de Torontál, Temes/Timiš/Timiș, Krassó/Karaš/Caraș et Szörény/Severin furent alors recréés mais en 1881, Krassó et Szörény furent unis en Krassó-Szörény. Après 1918L'effondrement de l'Autriche-Hongrie fin 1918 crée les conditions du partage du banat roumain, but de guerre serbe et roumain, promis par les Alliés, à la fois aux Serbes (ouest) et aux Roumains (est). Le Banat en 1918Fin octobre 1918, le Banat vit une triple proclamation à Temesvár/Timișoara[3] :
Partage du BanatAprès une évaluation sur place faite par les délégations alliées et américaine, la Serbie et la Roumanie convinrent de se partager le pays sur des critères démographiques, à raison deux tiers pour la Roumanie avec Timișoara, et d'un tiers pour la Serbie. C'est la commission « Lord » où des géographes comme Robert Seton-Watson (en) ou Emmanuel de Martonne et l'historien Ernest Denis jouèrent un rôle important, qui traça la frontière entre la Roumanie et la Serbie[5] : la partie nord-est du Banat fut attribuée à la Roumanie (le Krassó-Szörény/Caraș-Severin en totalité, 2/3 du Temes/Timiș, et une petite partie du Torontál), tandis que la partie sud-ouest (le Torontál et 1/3 du Temes/Timiș) fut attribuée au royaume des Serbes, Croates et Slovènes nouvellement créé (qui deviendra la Yougoslavie). Une petite zone, ayant une population mixte (hongroise, serbe et roumaine) près de la ville de Szeged fut laissée à la Hongrie nouvellement indépendante. Le traité de Trianon de 1920 confirme ce partage de 1918, toujours en vigueur. Le Banat durant la Seconde Guerre mondialePendant la Seconde Guerre mondiale, le Banat, bien que revendiqué par la Hongrie de Miklós Horthy, resta partagé selon le découpage de 1918, mais la partie serbe fut occupée par la Wehrmacht et administrée par les minorités allemandes locales. À la fin de la guerre, celles-ci furent expulsées vers l'Allemagne en raison de ce rôle. Période moderneActuellement, le territoire du Banat est partagé entre:
SymbolesLe symbole héraldique traditionnel du Banat est un lion debout sur le pont d’Apollodore de Damas. Il est aujourd’hui inclus dans les armes de la Roumanie et de la Voïvodine. VillesLes grandes villes du Banat sont :
Notes et référencesNotes
Références
Voir aussiBibliographie
Articles connexesLiens externes
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