Affaire Flactif

Affaire Flactif
Titre Affaire Flactif
Fait reproché Homicide
Chefs d'accusation Quintuple assassinat
Pays Drapeau de la France France
Ville Le Grand-Bornand
Nature de l'arme Arme à feu, arme contondante
Date
Nombre de victimes 5
Jugement
Statut Affaire jugée en 1re instance
Tribunal Cour d'assises de Haute-Savoie
Date du jugement

L'affaire Flactif[1] ou tuerie du Grand-Bornand[2] est une affaire criminelle française qui a défrayé la chronique en 2003, à la suite de la disparition[1] d'un promoteur immobilier nommé Xavier Flactif, 41 ans, de sa femme Graziella Ortolano, 36 ans, et de leurs trois enfants Grégory, 7 ans, Lætitia, 9 ans et Sarah, 10 ans, au Grand-Bornand en Haute-Savoie.

David Hotyat, locataire d'un chalet appartenant aux Flactif, est arrêté quelques mois plus tard. Il avoue le meurtre de la famille et avoir brûlé leurs corps en forêt. Il est condamné en 2006 à la prison à perpétuité. Sa compagne Alexandra Lefevre et un couple d'amis, Stéphane et Isabelle Haremza, sont condamnés pour complicité, respectivement à 10 ans, 15 ans et 7 ans d'emprisonnement.

Faits et enquête

L'affaire débute à la suite de la disparition inexpliquée de la famille Flactif, l'alerte ayant été donnée par le fils de Graziella Ortolano et beau-fils de Xavier Flactif, Mario Leblanc, venu les rejoindre en vacances et qu'un taxi du Grand-Bornand, parti le [3],[4] venu le chercher à l'aéroport de Lyon-Saint-Exupéry avait amené devant une maison fermée. Les gendarmes pensent d'abord à un accident de la route, mais les recherches ne donnent rien. Après une première perquisition le dans leur luxueux chalet (45° 58′ 08″ N, 6° 26′ 49″ E) au Chinaillon[4], le procureur d'Annecy, Denis Robert-Charrerau, ordonne une seconde perquisition au cours de laquelle les gendarmes constatent la disparition de deux ordinateurs portables pourtant présents lors de la première[5]. Le , le procureur ouvre une information judiciaire pour « enlèvements et séquestrations »[6].

L'enquête se base d'abord sur une éventuelle fuite vers l'étranger, peut-être liée aux affaires du père. En effet, le promoteur avait d'importants soucis professionnels (chantiers en retard, dettes, impayés, etc.), et s'était déjà retrouvé par le passé sous la surveillance de la brigade financière à la suite d'une affaire d’escroquerie. D'ailleurs, les sociétés civiles dont il dispose au Grand-Bornand sont toutes au nom de sa compagne, Graziella Ortolano. De plus, le véhicule familial est retrouvé dans le parking de l'aéroport international de Genève.

Dans un premier temps, au vu de ces éléments et de la personnalité rusée de Flactif, les enquêteurs trouvent cette thèse de la fuite plausible, mais n'écartent pas la piste criminelle. Le , le procureur annonce que des traces de sang, soigneusement lavées mais visibles au révélateur Bluestar, ont été retrouvées par la police scientifique dans le chalet. Ces traces contiennent les ADN des cinq membres de la famille Flactif. Une douille de petit calibre (6,35 mm) et des éclats de dent de lait sont également retrouvés dans l'habitation. Des « petites taches suspectes » sont décelées par les techniciens à l'arrière de la 4 x 4 Toyota de Xavier Flactif retrouvée le sur un parking de l'aéroport de Genève. Le véhicule a été lessivé et le tapis de sol du coffre a été découpé au cutter[6]. Le spécialiste en morphoanalyse des traces de sang précise l'emplacement des victimes qui indique qu'elles ont été tuées au couteau[7].

Des gendarmes-spéléologues fouillent alors des cavités environnantes à la recherche des corps, et des prélèvements ADN sont effectués sur une centaine de résidents de la région. En vain[8].

Alors que le mystère reste entier, des échantillons d'ADN sont identifiés le  : il s'agit de celui d'un mécanicien de 31 ans, David Hotyat, locataire d'un chalet appartenant aux Flactif. Sa compagne Alexandra Lefevre est une ancienne employée de ménage des victimes. Ils avaient emménagé en Haute-Savoie en 2001 et étaient voisins des Flactif mais la gendarmerie, avant de les interroger, décide de pratiquer une série d'écoutes téléphoniques pour avoir plus d'éléments et découvrir d'éventuels complices. Celles-ci montrent qu'un couple d'amis, Stéphane Haremza et son épouse Isabelle, également originaires du Nord, semblent être impliqués. Les 16 et , la gendarmerie interpelle David Hotyat, sa compagne et le couple d'amis[6].

Avant son interpellation, le couple Hotyat avait été interrogé par la presse au début de l'enquête, notamment dans l'émission Sept à huit sur TF1. Le mécanicien et surtout sa compagne avaient égrené les griefs accumulés contre leur propriétaire, lui reprochant son côté « fort en gueule », parlant de location au noir, de travaux inachevés, critiquant le mode de vie des Flactif et véhiculant des rumeurs sur les prétendus comportements crapuleux de ces derniers[2],[9]. Cette attitude volontairement accusatrice et teintée de haine à l'égard des victimes amène les enquêteurs à s'intéresser de plus près au couple Hotyat qu'ils placent sur écoute téléphonique, mesure qui laisse apparaître que David Hotyat se refuse dans un premier temps à se soumettre aux tests ADN, renforçant les soupçons des gendarmes[10].

Arrestations et incarcérations

Dès les premières heures de sa garde à vue, David Hotyat, confondu par son ADN retrouvé sur les lieux du crime, avoue le quintuple assassinat et conduit les enquêteurs dans les bois de Thônes, à quelques kilomètres du Grand-Bornand, où il a incendié les corps. Il dit avoir agi seul, sur un coup de sang, mais les Haremza déclarent qu'il a l'idée de tuer la famille après avoir regardé en un reportage de Sept à Huit sur l'affaire Stranieri[11]. Néanmoins, sa conjointe est considérée comme le cerveau du crime, et, elle ainsi que le couple Haremza l'ont aidé pour la préparation des meurtres et la dissimulation des preuves. Divers objets appartenant aux Flactif (DVD, matériel informatique, caméscope numérique, téléphones portables) sont retrouvés à leur domicile. D'après la reconstitution et les éléments du dossier, l'assassin s'est rendu dans l'après-midi du chez son propriétaire pour avoir une explication avec lui, mais celle-ci aurait mal tourné. David Hotyat déclare avoir voulu lui tirer dans la tête sans penser que l'arme fonctionnerait, mais le coup est parti. Pour ne pas laisser de témoins, il aurait éliminé les enfants et leur mère avec des objets contondants et le pistolet. Puis, les corps ont été transportés en forêt, où ils ont été brûlés. Le mobile est surtout basé sur la jalousie et la cupidité suscitées par la réussite et le train de vie du promoteur immobilier, alimentées de plus par d'autres différends, notamment d'ordre financier et immobilier. Ces sentiments auraient conduit les coupables vers une obsession vengeresse[réf. souhaitée].

Le , le mécanicien du Nord se rétracte, et défend une version des faits peu vraisemblable : il prétend alors que lorsqu'il s'est rendu chez les Flactif le jour fatidique, deux mystérieuses personnes avaient déjà tué la famille et l'auraient obligé à les aider à se débarrasser des corps[1]. Mais il est confondu, notamment par les témoignages de ses complices qui permettent de retenir la préméditation[1].

David Hotyat est entendu à trois reprises par une psychologue qui décèle chez lui des « traits narcissiques, phobiques et opératoires avec une tendance à fuir les émotions dans l'action, avec un idéal de maîtrise » (…). Les capacités de clivage et d'évitement de David Hotyat ne peuvent que le faire considérer comme dangereux », note le rapport d'expertise[12] ».

Procès et condamnations

À l'issue du procès qui s’est tenu du au devant la cour d'assises de Haute-Savoie, à Sevrier[10], David Hotyat est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une mesure de sûreté de vingt-deux ans. Ses complices récoltent respectivement des peines de quinze ans de réclusion pour Stéphane Haremza, dix pour Alexandra Lefevre, et sept pour Isabelle Haremza[2],[10], tandis que Mickael Hotyat, le frère de David Hotyat, est aussi condamné à 1 an avec sursis sans inscription faite sur son casier judiciaire, pour avoir fait disparaître une des armes du crime[1],[10]. Seul David Hotyat fait appel de la décision de justice, mais il se désiste finalement dès le premier jour de son nouveau procès, le , acceptant la peine prononcée à son encontre en première instance[1],[2].

Les Hotyat et les Haremza ont aussi été jugés et condamnés pour deux affaires dissociées du procès criminel : avoir mis le feu, un an avant le drame, à un chalet en construction appartenant aux Flactif, et pour une série de vols et de cambriolages commis au Grand-Bornand et dans les alentours. En effet, David Hotyat, poussé par le désir d'une vie toujours plus confortable et semblable à celle de ses victimes, avait sombré dans la délinquance à son arrivée en Haute-Savoie[12].

David Hotyat

David Hotyat naît le à Arras[13], d'un père ouvrier et d'une mère postière, et passe sa jeunesse à Biache-Saint-Vaast, dans le Pas-de-Calais. Très distant avec sa mère, il s'attache à son père et commence à pratiquer les passions de celui-ci : l'athlétisme (détenant le record cadets du 3 000 mètres du club d'athlétisme de Biache-Saint-Vaast[14]), la pêche, et la nature. L'école ne l'intéressant pas, il effectue son service militaire en ex-Yougoslavie, en tant que casque bleu[15]. En 1999, avec sa nouvelle compagne Alexandra Lefèvre, ils quittent le Nord-Pas-de-Calais, région dont ils sont originaires. Ils s'installent dans l'Ain, puis au Grand-Bornand à la fin de l'année 2001. C'est alors qu'il fait la rencontre de Xavier Flactif, un promoteur immobilier, qui lui louera successivement plusieurs chalets dans la station.

Filmographie

Notes et références

  1. a b c d e et f « Affaire Flactif : David Hotyat renonce à son appel », L'Express, (consulté le ).
  2. a b c et d « David Hotyat », Faites entrer l'accusé (consulté le ).
  3. Gilles Carle, « Présenter un pardon, à quoi ça sert ? », sur leparisien.fr, .
  4. a et b Stéphane Bouchet, « Affaire Flactif : envie et jalousie moteurs de la sauvagerie », sur ledauphine.com, .
  5. Kelly 2006, p. 27-31.
  6. a b et c « Chronologie de l'affaire Flactif », sur lejdd.fr, .
  7. Kelly 2006, p. 39.
  8. Michel Pascal, 40 ans d'affaires criminelles, Michel Pascal, , p. 174.
  9. « L'affaire Flactif » sur le site Affaires criminelles.
  10. a b c et d « L'affaire Flactif 5 ans après » sur le site Scène de crimes, le 11 avril 2008.
  11. Kelly 2006, p. 57.
  12. a et b Pascal 2009, p. 177.
  13. « Les différents visages de David Hotyat » (consulté le )
  14. « Records Cadets Biache Saint Vaast Athlétisme » (consulté le )
  15. « Les différents visages de David Hotyat »
  16. « Un film sur l'affaire Flactif en tournage dans le Briançonnais », Alpes du Sud, (consulté le ).
  17. « «Possessions» : l'affaire Flactif au bout de l'horreur », Le Parisien,‎ (lire en ligne).

Annexes

Bibliographie

  • Christine Kelly, L'Affaire flactif: Enquête sur la tuerie du Grand-Bornand, Calmann-Lévy, .
  • Nathalie Truche, L'Étrange Affaire Flactif, Association Alpes Infos, 2006.
  • Samira Sedira, Des gens comme eux, Editions du Rouerge, 2020 (roman s'inspirant librement de ce fait divers)

Documentaires télévisés

Article connexe