Adonis (en arabe : أدونيس), pseudonyme d'Ali Ahmed Saïd (علي أحمد سعيد), est un poète et critique littérairesyrien d'expressions arabe et française, né le . Son pseudonyme se réfère au dieu d'origine phénicienne, symbole du renouveau cyclique.
Il est considéré comme l'un des grands réformateurs de la langue arabe et de la poésie[2].
Biographie
Ali Ahmad Saïd naît à Qassabine près de Lattaquié au nord de la Syrie le , dans une famille alaouite. Il commence jeune à travailler dans les champs, mais son père l'incite aussi à apprendre la poésie. Il est scolarisé au lycée français de Tartous en 1942. En 1947, contre l'avis de ses parents, il se rend à la ville voisine où il trouve le président syrien Choukri al-Kouwatli. Saïd, alors âgé de 17 ans, veut se joindre à l'assemblée des poètes locaux pour honorer le président, mais on l'écarte. En insistant, il capte l'attention de ce dernier, qui demande à l'entendre. Le président décide alors de lui payer ses études[3]. Il obtient son baccalauréat à Lattaquié en 1949. C'est également à cette époque qu'il prend le pseudonyme d'Adonis lors de la publication de quelques poèmes. Il entre ensuite à l'université syrienne de Damas qu'il quitte en 1954 avec une licence de philosophie.
En 1955, il est emprisonné six mois pour appartenance au Parti nationaliste syrien, qui préconise une grande nation syrienne au Moyen-Orient. Après sa libération en 1956, il s'enfuit pour Beyrouth au Liban où il fonde avec le poète syro-libanais Youssouf al-Khal dans les années 1960, la revue Chi'r[4] (en arabe :شعر) ou Chiir, qui signifie «Poésie» : le manifeste d'une libération inconditionnelle de la tradition et d'un élan vers l'internationalisation de la poésie. Il obtient la nationalité libanaise en 1962. Adonis se consacre aussi plus principalement à ses activités littéraires qu'à ses activités politiques. En 1968, il fonde la revue Mawâkif[5] (en arabe : مواقف ), qui signifie «Positions» – aussitôt interdite dans le monde arabe – qui s'avère un espace de liberté en même temps qu'un laboratoire de rénovation «déstructurante» de la poésie. C'est là qu'il traduit en arabe Baudelaire, Henri Michaux, Saint-John Perse et en français Aboul Ala El-Maari. Adonis cherche le renouvellement de la poésie arabe contemporaine en s'appuyant sur son passé glorieux mais aussi en regardant la richesse de la poésie occidentale. À la suite de la guerre civile libanaise, il fuit le Liban en 1980 pour se réfugier à Paris à partir de 1985. Il est le représentant de la Ligue arabe à l'UNESCO.
Il est aujourd'hui considéré comme l'un des plus grands poètes arabes vivants, notamment à la suite de la disparition de Mahmoud Darwich[6]. Il est un autodidacte influent, voire iconoclaste, quant à la réévaluation critique de la tradition poétique arabe vis-à-vis des pressions intellectuelles, politiques et religieuses[7] du monde arabe actuel, l'exemple le plus frappant étant La Prière et l'Épée. Son œuvre[8] révèle plusieurs thèmes : injustice, dictature, guerre, misère... Il se saisit des évènements contemporains pour en faire des mythes, sans pourtant devenir un « poète engagé ». Le Temps des villes démontre une connaissance exacerbée des grandes métropoles du monde arabe moderne[9]. Il a pris position dans Al-Hayat contre le port du voile[10]. Il cède, en 2011, ses archives à l'IMEC[11].
Il se montre très critique envers l'islam dans son livre d'entretiens avec la psychanalyste Houria Abdelouahed Violence et islam. Adonis dénonce le caractère intrinsèque de la violence dans l’islam[12],[13],[14].
Avec Houria Abdelouahed, Prophétie et Pouvoir (Violence et Islam, tome 2), Seuil, 2019.
Avec Fanny Ardant, Le Louvre, espace de l'alphabet à venir, Seghers, 2024[17].
Bibliographie
Reuven Snir, “Poète des secrets et des racines’: L’Adonis hallajien,” in: Adonis: un poète dans le monde d’aujourd’hui 1950-2000 (Paris: Institut du monde arabe, 2000), pp. 171-172.
Reuven Snir, "A Study of Elegy for al-Ḥallāj by Adūnīs,” Journal of Arabic Literature 25.2 (1994), pp. 245-256.
Reuven Snir, “Adūnīs – The Acts of the Wind” [en hébreu], Helicon — Anthological Journal of Contemporary Poetry 30 (1999), pp. 50–55.