Vive l'Algérie française !« Vive l'Algérie française ! » est une phrase prononcée par le président du Conseil Charles de Gaulle, en visite officielle dans le département d'Oran, à la fin d'un discours à Mostaganem le . Celui-ci déclencha une grave crise politique à ce jour entre les Français d'Algérie et la France puisqu'il semblait démontrer le soutien du chef du gouvernement aux anti-indépendantistes français d'Algérie dont le slogan était justement « Algérie française ! » (voir l'ORAF), qui deviendra le nom d'un parti politique dans les départements d'Algérie, le Front de l'Algérie française (FAF)[1], et en métropole, le Front national pour l'Algérie française (FNAF)[2]. Incidemment, cet événement fut porteur d'une espérance. Une fois déçue, avec l'acheminement vers la Paix des braves (le ), puis le choix de l'autodétermination (le ), elle fut vécue comme un « malentendu » par les gaullistes, comme une « trahison » par des Français d'Algérie, compatriotes métropolitains et gaullistes déçus (comme Jacques Soustelle ou Georges Bidault), ou comme un « déshonneur » par des officiers de l'Armée française[3]. Les plus déterminés de ces derniers tentèrent d'assassiner de Gaulle pour ces motifs précis, comme l'atteste la déclaration du lieutenant-colonel Bastien-Thiry lors du procès suivant l'attentat du Petit-Clamart le [4]. ContexteCrise de mai 1958Comité de Salut PublicLe général de Gaulle clamait en 1958 : « Tous Français, de Dunkerque à Tamanrasset ! », slogan lancé à cette foule du 13 mai 1958 pour la remercier de lui avoir permis de revenir au pouvoir[5]. Premier voyage de de Gaulle en AlgérieLe , Charles de Gaulle est officiellement investi président du Conseil. Le , il effectue le premier d'une série de voyages officiels en Algérie. Discours à Alger « Je vous ai compris ! » (4 juin 1958)Le , le chef du gouvernement Charles de Gaulle, vêtu de son uniforme de général, se rend à Alger, où il délivre un discours au Forum, lieu du putsch du 13 mai 1958, commençant par la formule devenue célèbre : « Je vous ai compris. » Le discours comprend également un passage fort et qui a été largement diffusé par les populations voulant rester françaises : « À partir d'aujourd'hui, la France considère que, dans toute l'Algérie, il n'y a qu'une seule catégorie d'habitants : il n'y a que des Français à part entière. » Discours à Constantine et à Bône (5 juin 1958)Discours à Oran (6 juin 1958, matin)Extrait du discours :
DiscoursL'allocution de Mostaganem fait suite à celle d'Oran quelques heures auparavant, bien que semblable, mais le contenu s'en distingue par l'emploi unique et historique de la formule « Vive l'Algérie française ! »[6],[7]. Le discours a lieu dans l'après-midi et se déroule au balcon de l'hôtel de ville de Mostaganem, où de Gaulle s'adresse à la foule européenne et musulmane assemblée sur la place[8]. ControversesContradiction entre retranscription officielle et archives historiquesLa retranscription officielle du texte de l'allocution de Mostaganem par la Fondation Charles-de-Gaulle, organisation fondée en 1971 par des gaullistes quelques mois après la disparition de Charles de Gaulle, diffère des captations de l'époque (la scène est filmée[9] et un enregistrement audio est pressé sur disque vinyle[10]). Le passage controversé est précisément celui de la prononciation de « Vive l'Algérie française ! ». Sur son site officiel, la Fondation de Gaulle change l'emplacement de la formule et la justifie en proposant une « indication scénique » qui l'interprète et en change la portée :
Cette version gaulliste entre en contradiction avec la version historique dont témoignent les archives audiovisuelles[12],[13]:
En 1977, dans son ouvrage A Savage War of Peace (traduit en français en 1980 et réédité plusieurs fois depuis par Albin Michel[14]), Alistair Horne, historien britannique spécialiste de l'histoire de France, relève également que « la parole tant attendue » par la foule, « Vive l'Algérie française ! » précède « Vive la République ! » dans le crescendo des vivats du général[15]. Contradiction avec la politique algérienneLa parole tenue par de Gaulle lors de son premier voyage en Algérie, en particulier lors des allocutions d'Alger et de Mostaganem, qui donnèrent lieu à une « fraternisation » entre les communautés d'Algérie, est celle du serment de l'intégration. Intégration démographique, celle des musulmans (qui pour l'administration de l'époque sont des « citoyens français de statut coranique ») mais aussi territoriale, avec l'affirmation du rattachement indéfectible des départements d'Algérie créés en 1848 (voir Algérie française) à la République française. Ainsi à Mostaganem, le chef du gouvernement nouvellement investi proclame : « tous les Français d'Algérie sont les mêmes Français. Dix millions d'entre eux sont pareils, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs », « c'est grâce à cela que la France a renoncé à un système qui ne convenait ni à sa vocation, ni à son devoir, ni à sa grandeur », puisqu'« il n'y a plus ici, je le proclame en son nom et je vous en donne ma parole, que des Français à part entière, des compatriotes, des concitoyens, des frères qui marchent désormais dans la vie en se tenant par la main […] »[11]. Ce discours est relayé par des tracts de propagande largués au-dessus de l'Algérie et assenant un slogan qui a fait florès : « 55 millions de Français de Dunkerque à Tamanrasset »[16]. Pourtant, comme l'écrit quarante ans après l'indépendance de l'Algérie, Paul-Marie de La Gorce dans la revue Historia[17], la parole privée de Charles de Gaulle est contradictoire avec les allocutions, comme lorsqu'il confie à Alain Peyrefitte et Jean de Broglie (futur secrétaire d'État aux Affaires algériennes) :
De fait, avec son appel en 1961 au « Oui » lors du référendum sur l'autodétermination en Algérie dont il prend lui-même l'initiative, de Gaulle, est en réalité le promoteur de ce qu'il nommera dans ses allocutions télévisées, l'« Algérie algérienne ». ConséquencesAffaire du Petit-ClamartLors de son procès, l'accusé conspirateur Jean-Marie Bastien-Thiry fait référence à l'allocution de Mostaganem, entre autres ; il déclare à la cour militaire :
Notes et références
Voir aussiArticles connexes
Sources et bibliographie
Filmographie
Discographie
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