La villa Nobili, anciennement château de Cimiez, est une villa construite en 1894 au no 94 avenue George V, dans le quartier de Cimiez, à Nice[1].
Historique
La villa Nobili s'appelle avant 1920 « château de Cimiez ».
Le terrain sur lequel cette maison se situe est acquis vers 1715 par la famille Focardi della Roccasparviera (Foucard de la Roque) qui n’a pas cessé d’agrandir son domaine de Cimiez / Carabacel depuis le XVIIe siècle[2]. Ses biens passent par héritage aux comtes Alziari de Malausséna et Tonduti de l’Escarène. La propriété est vendue en 1862 à Joseph Pollonais. Son fils Désiré, maire de Villefranche-sur-Mer, vend le terrain en 1881 à la Société foncière lyonnaise qui le revend le au promoteur François Chabaud (1824-1906)[3].
Construction, François Chabaud
Le château de Cimiez est construit en 1894 par François Chabaud au boulevard Washington (actuelle avenue George V) ; il édifie aussi dans le même lot la villa Chabaud et la villa Les Hespérides[4].
Bâti sur un terrain de 4 642 m2, le château de Cimiez comporte à l'origine 82 fenêtres[5].
Le promoteur met la villa en location. C’est ainsi que, du au , elle est louée pour la suite de la reine Victoria qui séjourne alors au Grand hôtel de Cimiez.
Un prospectus de location décrit le château de Cimiez :
« 10 chambres de maîtres (6 au premier, 4 au second), 14 chambres de domestiques (8 au sous-sol,6 au deuxième), plus au sous-sol : grand calorifère, grande cuisine et office, salle à manger de domestiques, garde-manger, monte-plats, 2 caves, bûcher, WC ; au rez-de chaussée : 3 salons en enfilade (17,5 m de long, 106,75 m2 au total), salle à manger (35 m2), cabinet de travail, atrium, office, WC ; au premier : 5 cabinets de toilette, salle de bains, WC ; au second : WC de Maîtres et WC de domestiques.Prix de la location pour la saison : 28 000 F, plus 800 F pour l’usage des eaux et les soins particuliers du jardinier. »
Et il vante la belle situation de la propriété :
« Cette villa, placée au milieu de grands et beaux jardins de 4 à 5 000 mètres, occupe une situation exceptionnelle d'où l'on jouit d'une splendide vue sur la mer et les montagnes. Elle se trouve en fait à 10 minutes de la place Masséna, centre de Nice, au moyen du tramway électrique Nice-Cimiez. »[6]
Prince Mavrocordato
Après la mort de François Chabaud le à Nice[7], son fils Henri vend le château de Cimiez le au prince George Alexandre Mavrocordato [ou Maurocordato] (1865-1939), ambassadeur de Roumanie en Russie[8].
Le prince est le descendant d’une grande famille de Grecs phanariotes. Originaires de Chio les Mavrocordato[9] (en grec Μαυροκορδάτος) s'illustrent au service de l'Empire ottoman.
George Alexandre Mavrocordato est le fils d'Alexandru Mavrocordato, grand chambellan à la cour de Roumanie, et l'oncle de la princesse Marthe Bibesco, femme de lettres.
Le prince Mavrocordato se plaît beaucoup à Nice. Au début du XXe siècle il réside au 53 de la Promenade des Anglais. Ensuite il loue la villa Monticello, au bas de l'avenue George V, avant d'acheter le château de Cimiez.
Le prince Mavrocordato revend le château de Cimiez le au marquis Prospero De Nobili Di Vezzano, homme politique et entrepreneur italien, ministre du Trésor (1901-1903), chef de file d'un mouvement politique qui prendra son nom, le denobilisme.
Le nom de la propriété change avec son nouvel acquéreur : Le "château de Cimiez" devient la "villa de Nobili"[12].
Retiré de la vie politique italienne et vivant désormais en France, le marquis réside habituellement à la villa de Nobili jusqu'à la Seconde Guerre mondiale.
Sa deuxième femme, Dola Vertès, une Française d'origine hongroise, est la sœur du peintre Marcel Vertès (1895-1961). Dola Vertès étant juive, le marquis De Nobili doit fuir en Suisse en 1942.
La villa de Nobili est réquisitionnée de 1942 à 1947 (voir paragraphe suivant).
À la fin de la guerre, le marquis De Nobili rentre en France sur la Côte d'Azur mais ne peut s'installer à la villa de Nobili, toujours réquisitionnée.
A la fin de l'année 1942 la villa de Nobili est réquisitionnée par les autorités italiennes d'occupation et devient le siège pour Nice des services de l'OVRA, police politique de l'Italie fasciste, dirigée localement par les commissaires Barranco et Cerrato[16]. L'OVRA s'installe par la suite aussi dans la Villa Lynwood qui devient son principal centre de torture[17].
Le Nice passe sous occupation allemande. La propriété devient l'un des sièges niçois de la Gestapo[18].
A la fin de la réquisition de sa propriété Lila De Nobili reprend possession de la villa de Nobili, conformément aux dispositions testamentaires de son père.
Copropriété
En 1952, Lila De Nobili se sépare de la villa de Nobili qui devient une copropriété[20], connue désormais sous le nom simplifié de « villa Nobili ».
Le bâtiment est modifié sous la direction de l'architecte Jean Chiérico[21] de 1952 à 1955 : La véranda côté cour et la porte centrale côté jardin sont supprimées; les toits mansardés des ailes du deuxième étage sont remplacés par deux appartements s'élevant au niveau de la partie centrale.
Actuellement, outre les anciennes chambres des employés en sous-sol, la copropriété comporte trois appartements à chacun des trois niveaux.
Le parc entourant la villa est loti, permettant la construction tout autour de trois maisons. Le parc actuel occupe 1 305 m2, soit entre le tiers et le quart de la surface d'origine.
↑Michel Massimi, Cimiez : Promenade au fil du temps, PyréMonde/Princi Negue, 2008 (ISBN2846185689)
↑François Chabaud a divisé la propriété de la Société foncière lyonnaise en trois lots où il a construit en même temps trois villas : 1/ le château de Cimiez, 2/ à côté la villa Chabaud, aujourd'hui villa Aurore, 3/ à l'angle de l'avenue George V et du bd de Cimiez la villa les Hespérides, démolie et remplacée par un immeuble.
↑Michel Massimi, Cimiez : La banlieue champêtre de Nice, éditions Campanile, 2021 (ISBN9782369930648)
↑dans la "villa Chabaud" (située à côté du château de Cimiez), l'une des trois villas que François Chabaud avait fait construire en fin du XIXe siècle et qu'il occupait personnellement depuis.
↑Cimetière Orthodoxe de Caucade,
Русское Православное кладбище Кокад : МАВРОКОРДАТО ГЕОРГИЙ АЛЕКСАНДР / GEORGE ALEXANDRE MAUROCORDATO (03.05.1865 - 14.02.1939)
↑Le nom "villa de Nobili" est mentionné dans les courriers de la CRS en 1945 et dans le testament du marquis De Nobili
↑Cahier des charges de la Villa de Nobili du 23 décembre 1952; étude de Me Séassal, notaire.
↑Richard Peduzzi, Marc Bayard, Alvar Gonzalez-Palacios, Dino Trappetti, Caterina d'Amico de Carvalho, François Regnault : Damiani, de Nobili, Tosi, Scene e costumi, Accademia di Francia a Roma - Villa Medici, Skira, 2005, (ISBN8876243984).