Certaines définitions du terme rupicole [étymologie : rupes : rocher ; colere : habiter ; ne pas confondre avec ripicole] sont plus précises que celle donnée en introduction comme celle de B. Fischesser & M.F. Dupuis-Tate[4] : « une association végétale se développant à la faveur de fissures dans une paroi rocheuse ». On doit cependant noter que de nombreux auteurs semblent répugner à utiliser ce terme préférant comme le botaniste allemand Werner Rauh désigner « des plantes pionnières établies sur la roche nue » ("pioneer plants settling on the naked stone"[5]). Le terme rupicole désignant autre chose que Rupicola rupicola, un oiseau de l'Amérique du Sud[6], est apparu, selon toute vraisemblance au XIXe siècle : on trouve sa définition dans un dictionnaire de 1834[7]. Le mot était alors en concurrence avec divers synonymes : rupellaire, rupincole, rupestral[8], rupestre et saxicole. Seuls les deux derniers termes se sont maintenus, saxicole désignant tout organisme se développant sur la roche, alors que rupicole distingue subtilement tout être vivant inféodé aux parois rocheuses (ou biotope assimilé : vieux murs en matériaux naturels...)[9]. En français rupestre tend plutôt à se limiter aux arts. Plus rarement est employé l'adjectif chasmophile qui fait référence aux fissures d'une roche[10]. De même « épilitique » est d'usage peu développé. En anglais, on utilise le terme rupicolous. En italien[3], on fait également usage du mot rupicole. On note enfin que dans les noms scientifiques, le terme rupicola apparaît parfois au niveau du genre ou de l'espèce (tableau).
Du stade pionnier au « climax » : les successions écologiques
Les êtres vivants (et les communautés que ces derniers forment) sont qualifiés de pionniers quand ils s'implantent sur la roche nue, considérée comme un habitat extrême pour la vie du fait de la sécheresse édaphique et de l'absence de sol meuble. Aux bactéries, aux cyanobactéries, aux algues et aux lichens du stade pionnier s'ajoutent à l'issue d'une période plus ou moins longue des mousses, des xérophytes, notamment des succulentes[5]. Si les conditions climatiques le permettent, des lianes à étayage actif s'établissent[11]. Cependant au fil des décennies, la roche peut s'altérer d'autant plus vite que les plantes fournissent de la matière organique et de l'acide humique [12],[13]. Des communautés biologiques de plus en plus denses et hautes peuvent alors se succéder[14]. Dans les régions chaudes et humides ou tempérées océaniques, on peut même aboutir à un climax forestier [15]. Cependant on observe l'extrême fragilité de bien des milieux rupicoles : leur destruction a souvent lieu bien avant que le climax soit atteint : les falaises s'éboulent, les coulées de lave sont recouvertes par les scories ou de nouvelles coulées, etc.
Une adaptation aux roches et aux sols en dérivant
Des plantes, des animaux et des communautés d'êtres vivants s'adaptent aux différents types de rochers sur lesquelles elles et ils s'établissent. Les conditions de vie y sont difficiles et au stade pionnier n'apparaissent que des bactéries, des cyanobactéries, des micro-algues et des lichens. Il est utile de signaler que la plupart des auteurs a coutume de mettre dans une rubrique à part les communautés psammophiles ou arénicoles, ainsi que toutes celles qui se développent sur des roches meubles, également appelées sols minéraux bruts.
Voici une rapide nomenclature de quelques substrats rocheux sur lesquels la végétation se développe plus ou moins difficilement :
sur les grès : colonisation des reliefs ruiniformes gréseux de l'Isalo à Madagascar[5], des quartzites du Minas Gerais[14] ou des tepuys du Venezuela par exemple ;
sur les roches cristallines acides[13] : vieux cuirassements (bowal) et inselbergs ;
sur les substrats rocheux littoraux où sel et inondation jouent un rôle majeur : falaises et platiers rocheux submersibles ; exemple des mangroves sur substrat rocheux du Gabon[17],[18], des mangroves sur platier corallien des Fidji (photo) ou des « forêts littorales à faciès rupicole sur coraux et basaltes soulevés » de Nouvelle-Calédonie (photo) et de Wallis[19] ;
sur supports artificialisés comme les bâtiments, les monuments, les axes de circulation, les carrières[1] ou sur les vieux murs[4] (photo).
Les variantes climatiques
Aux variables édaphiques s'ajoutent des variables climatiques zonales :
hautes montagnes tempérées : éboulis, parois rocheuses ; les conditions sont proches de celles des déserts froids : exemple des groupements rupicoles de l'étage alpin [21] ;
D'une manière générale les conditions climatiques chaudes et humides ou tempérées océaniques sont plus favorables que des conditions arides chaudes ou arides froides. Le nombre d'espèces et de familles adaptées y sera donc plus important.
Enjeux et gestion
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Voir aussi
Bibliographie
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Gruber, M., 1976. Les groupements végétaux rupicoles calcicoles des Pyrénées ariégeoises et catalanes, Bulletin de la Société Botanique de France, 123:1-2, 61-77,DOI: 10.1080/00378941.1976.10835666
Joly, F., 1997. Glossaire de géomorphologie. Base de données sémiologiques pour la cartographie. Colin, Coll. U, 325 p.
Klein, J.-C., 2001. « Chapitre X : La végétation rupicole (Asplenietea Rupestris (H. Meier) Br-Bl. 1934) » In : La végétation altidudinale de l’Alborz central. Paris, Bibliothèque iranienne, 40 : pp.105-112.
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Rougerie, G., 1988. Géographie de la biosphère. Paris, A. Colin, U, 288 p.
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